BASSÈDE Louis [BASSÈDE Albert, Robert, Louis]

Par André Balent

Né le 15 octobre 1914 à Elne (Pyrénées-Orientales), mort le 27 septembre 1981 à Montesquieu-des-Albères (Pyrénées-Orientales) ; instituteur puis professeur d’enseignement général de collège, principal de collège ; militant syndicaliste (SNI) ; résistant ; militant catalaniste, co-fondateur du mouvement « Nostra Terra » : archéologue, historien, toponymiste.

Louis Bassède naquit et vécut à Elne, grosse bourgade de la zone de maraîchage et d’arboriculture fruitière du Sud de la plaine roussillonnaise. Il était fils unique. Son père, prénommé également Louis (1882-1959) employé de la Compagnie du Midi, en poste en gare d’Elne, était originaire de Glorianes (Pyrénées-Orientales), petit village du Conflent, aux flancs du Canigou. Sa mère, Marie Py était issue des Garrotxes, région de montagne du Haut Conflent. Elle fut successivement couturière puis épicière. Son père était un militant radical, opposé au Front populaire, qui fut à plusieurs reprises conseiller municipal d’Elne. Louis Bassède fut baptisé et il reçut, dans son enfance une éducation religieuse car sa mère était demeurée catholique. Il rompit avec la religion dès l’adolescence pour adopter un athéisme proche de la libre pensée et du rationalisme. Ses obsèques furent civiles. Après une scolarité primaire à Elne, il fréquenta l’EPS de Prades (Pyrénées-Orientales), puis l’École normale d’instituteurs de Perpignan, établissements où il fut le condisciple d’Alain Taurinya avec lequel il garda toujours des relations d’amitié.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, il étudia le latin par correspondance et entreprit à partir de 1943 des études de Lettres à la faculté de Montpellier où exerçait son ami du mouvement « Nostra Terra », Henri Guiter. Il obtint, après la Libération (1946), une licence de Lettres modernes. Dès avant 1939, il entreprit des recherches en histoire, en linguistique et en toponymie. Avec son ami Roger Grau, d’Elne, il s’intéressa aussi à l’archéologie, car leur ville natale (Illiberis, dans l’Antiquité), ancien siège épiscopal du Roussillon, est un site archéologique ibère et romain d’une richesse exceptionnelle. Tous deux fondèrent en 1942 la Société des amis d’Illiberis, pour étudier le passé de la cité, entreprendre des fouilles archéologiques et créer un musée. Après 1945, Louis Bassède fut, à titre gracieux, l’archiviste municipal de sa ville natale.

En 1936, il fut un des fondateurs du premier mouvement politique catalaniste du Roussillon, « Nostra Terra ». Il en fut, jusqu’à sa dissolution par le préfet, en 1939, un des animateurs. Il collabora à la revue mensuelle du mouvement, Nostra Terra qui compta jusqu’à trois mille abonnés. Le mouvement « Nostra Terra » qui ne définit jamais une ligne politique bien précise comptait dans ses rangs des gens dont les options politiques recouvraient un vaste éventail, allant de l’extrême gauche à la droite catholique.

« Nostra Terra » développa pendant la guerre civile espagnole des actions de solidarité avec la Généralité de Catalogne, puis à partir de janvier-février 1939, avec les réfugiés internés dans les camps de concentration du département (Argelès-sur-Mer, Saint-Cyprien...)

Après avoir effectué le service militaire à Marseille en 1936, il fut nommé instituteur dans le petit village montagnard de Réal, en Capcir. En 1938, il épousa Yvonne Deloupy, une collègue, et tous deux furent nommés à Sournia. Ils y demeureront pendant toute la durée de la Seconde Guerre mondiale. Toutefois, il fut mobilisé le 27 août 1939 et démobilisé le 26 juillet 1940, avec le grade de caporal-chef (pacifiste de conviction, il avait refusé de devenir officier, fonctions auxquelles ses diplômes lui donnaient droit.). Afin de préserver la jeunesse du village de l’influence idéologique de Vichy, ils créèrent une Association sportive et artistique sournianaise. En 1945, il fut nommé à Argelès-sur-Mer (Pyrénées-Orientales), d’abord à l’école primaire et ensuite au collège d’enseignement général où il assura un service de Lettres et d’Histoire et Géographie. Ensuite, en 1953, il fut professeur au cours complémentaire de sa ville natale, le futur collège « Paul Langevin ». En 1955-1956, il fit un stage à Beaumont-sur-Oise afin de préparer un diplôme pour l’enseignement des « enfants inadaptés ». À la rentrée de 1956, il fut nommé à Perpignan au collège de « La Garrigole », puis quelques années plus tard, dans la même ville au collège du « Champ de Mars », l’actuel collège « Albert Camus ». En 1965, il fut nommé principal du collège « Paul Langevin » d’Elne, fonctions qu’il assura jusqu’à sa retraite en 1970.

Si avant la 1939, il fut plutôt proche du pacifisme tel que le professaient la majorité des collègues de sa génération, souvent adhérents de la SFIO ou, pour les plus militants, du pivertisme, l’expérience de la guerre l’amena, également comme la majorité d’entre eux, à se rapprocher du PCF. auquel, pour sa part, il n’adhéra point à la Libération, à la différence de Lucette Justafré avec qui il avait noué de profonds liens d’amitié.

Très réticent à l’égard de Vichy, son engagement fut d’abord prudent et limité. En 1943, Il adhéra aux MUR (« Libération » ou « Combat » ?). Son engagement dans la Résistance ne fut réellement effectif qu’au printemps de 1944. Laude, son collègue du village voisin de Rabouillet, le mit en contact avec le grand maquis que l’AS implanta principalement dans les forêts de cette commune. Il intégra le CLL clandestin de Sournia, accueillit les réfractaires du STO qu’il acheminait vers le maquis de Rabouillet. Recherché par la Milice, il put à temps quitter sa résidence à Sournia et participer ultérieurement à sa Libération par le maquis de Rabouillet (14 août) qui fut, avec Rabouillet, une des deux des premières communes libérées du département (effective pour la quasi-totalité des communes les 19 et 20 août). Le 15 août, le CLL prit en main l’administration du village. Du 15 au 22 août, le CLL organisa le ravitaillement de l’important maquis AS commandé par Roger Gaigné. Dans un témoignage autographe rédigé le 23 février 1945 (et certifié conforme par le président du CLL), Bassède expliqua que, dans cette période, il participa "à plusieurs expéditions armées contre des groupes de soldats allemands signalés dans la région". Il intégra ensuite le conseil municipal provisoire de Sournia. Il adhéra aussi au Front national dont il fut le délégué cantonal.

Il fut un actif militant syndicaliste, d’abord dans les rangs du Syndicat unique de l’Enseignement (FEN), de 1944 à 1948 puis de la section départementale du SNI dirigé par la tendance cégétiste (plus tard « Unité et Action ») et dont le secrétaire départemental fut longtemps (jusqu’en 1965) son amie Lucette Justafré. Il fut souvent membre du Conseil syndical de la section départementale du SNI. Il fut élu du SNI. à la CAPD des instituteurs des Pyrénées-Orientales (scrutin des 21 et 29 avril 1952) et réélu à cette même instance le 5 novembre 1954, le 4 mars 1958, le 14 mars 1961 et le 6 avril 1965. Il fut délégué des Pyrénées-Orientales à plusieurs congrès nationaux du SNI, en particulier celui de Paris (du 10 au 14 juillet 1967 à la salle de la Mutualité).

S’il demeura en dehors de toute activité au sein d’un parti, il fit profiter de ses connaissances et de son expertise acquise en qualité d’archéologue la municipalité d’Union de la Gauche d’Elne, élue en 1965 (Narcisse Planas, PCF, maire) où son ami d’enfance Roger Grau (alors au PSU) était l’adjoint chargé du patrimoine historique et de la culture.

Archéologue, il assura pendant plusieurs années avec Roger Grau, les fouilles des importants gisements ibéro-romans d’Elne et de Villeneuve-de-la-Raho (Pyrénées-Orientales). Il publia les comptes rendus de ces fouilles dans plusieurs revues scientifiques. En 1964, la section des Pyrénées-Orientales du SNI publia son livre, La Toponymie des Pyrénées-Orientales. L. Bassède termina sa carrière professionnelle en qualité de directeur du collège d’Elne. Il mourut le 29 décembre 1981 alors qu’il venait de terminer la rédaction d’un traité de 800 pages de toponymie catalane.

Ce monumental ouvrage fut publié après sa mort à Prades en 1990 (Terra Nostra éd., 796 p.) sous le titre de Toponymie historique de Catalunya Nord. À l’occasion son patronyme, « Bassède », fut orthographié à la catalane : « Basseda ».

Lorsqu’il mourut, il était en train de téléphoner à ami Alain Taurinya.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article15848, notice BASSÈDE Louis [BASSÈDE Albert, Robert, Louis] par André Balent, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 13 septembre 2021.

Par André Balent

SOURCES : Interview de Ferdinand Baylard, instituteur, militant du PSOP puis du PCF. — Conversations avec M. Roger Grau, d’Elne, un des amis de Louis Bassède. — L’Indépendant (Perpignan), 1er janvier 1982 (nécrologie). — Divers auteurs, « Lluís Bassede  », n° spécial (87-88) de la revue en langue catalane de Perpignan, Sant Joan i Barres, estiu-tardor, 1982. — Arch. Privées A. Balent, notes manuscrites rédigées (juillet 1984) à l’intention d’A. Balent par Michel Ribera, instituteur retraité, militant de la FEN et du SNI. — Arch. privées Pierre Grau, Rapport autographe de Louis Bassède sur ses activités résistantes, certifié conforme, Sournia, 23 février 1945. — Conversation téléphonique (16 septembre 2016) avec Georges Taurinya, fils d’Alain Taurinya.

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