PIOBETTA Jean, Benoît

Par Jacques Girault

Né le 29 octobre 1885 à Carticasi (Corse), mort le 22 septembre 1969 à La Roche-sur-Yon (Vendée) ; censeur des études, inspecteur général de l’enseignement primaire ; militant pédagogique ; militant socialiste.

Portrait par Jean Soubirou

Second des trois fils de Marc-Antoine Piobbeta (orthographe figurant sur le registre d’état civil), maître-maçon, et d’Angèle Exiga, Jean Piobetta (orthographe usuelle), étudia au collège de Corte (Corse) et réussit au baccalauréat en 1907. Il obtint une licence ès lettres à la faculté des lettres de Lille (Nord) en 1910 et un diplôme d’études supérieures en philosophie en 1911. Son mémoire analysant la pensée du cartésien, Louis de la Forge, reçut le prix du Conseil général du Nord.

Pendant ces études, Jean Piobetta fut maître d’internat au lycée de Bastia (Corse) en 1907, puis répétiteur aux collèges de Sedan (Ardennes) en 1908, puis de Dunkerque (Nord) en 1909. Licencié, il fut délégué professeur chargé de la surveillance générale au collège d’Arras (Pas-de-Calais) en 1910.

Sursitaire de 1906 à 1909, le conseil de révision le réforma le 15 octobre 1910 pour « endocardite », après un mois de service militaire au 2e Régiment d’artillerie de montagne. Il fut ensuite nommé professeur, successivement aux lycées de La Roche-sur-Yon en 1911, de Niort (Deux-Sèvres) en 1912, puis professeur de grammaire au collège de Saintes (Charente-Inférieure/Maritime) en 1913, puis à nouveau au lycée de La Roche-sur-Yon en 1914. Il y avait épousé, le 25 juillet 1912, Louise Etienne, avec laquelle il eut deux enfants, dont Stéphane, futur normalien de la rue d’Ulm, professeur agrégé de philosophie, mort au combat en mai 1944 et une fille, née en 1917, Lucette, devenue épouse Favreau-Blanchet, qui fit partie des FFI.

Mobilisé en août 1914 au 93e Régiment d’infanterie à La Roche-sur-Yon, il combattit sur le front en 1915. Sous-lieutenant au 65e Régiment d’infanterie, il fut grièvement blessé par balle à la tête, le 25 octobre 1915, lors des combats de Mesnil-lès-Hurlus (Marne). Trépané, après sa convalescence, il fut détaché en août 1916 au contrôle postal militaire à Bordeaux (Gironde), puis mis à disposition du ministère de l’Instruction publique le 15 juillet 1917, pour reprendre son poste de professeur au lycée de La Roche-sur-Yon. Cité à trois reprises pour sa bravoure au combat, il obtint la médaille militaire et la légion d’Honneur en 1931.

Son dossier médical montrant une impossibilité d’enseigner joua un grand rôle pour lui faciliter une nomination comme censeur au lycée de Rochefort (Charente Inférieure/Maritime) en octobre 1918. Muté comme censeur au lycée Clemenceau à Nantes (Loire-Inférieure/Atlantique) en 1920, il donnait des cours d’économie politique et de législation ouvrière et sociale à l’Institut polytechnique de Nantes. Il obtint un poste de censeur au lycée Henri IV à Paris en 1926.

Jean Piobetta présidait l’Association des censeurs en 1925, rédigea des textes officiels et des commentaires sur la fonction parus en 1932. Membre du bureau de l’Association des Anciens combattants de l’Université, il s’engagea en faveur de la démocratisation de l’enseignement secondaire. Membre du comité directeur des « Compagnons de l’université nouvelle » à partir de juillet 1919, il lutta pour « l’École unique » et une réforme générale de l’Université. Homme de gauche, il participa à de nombreuses initiatives en liaison avec les partis politiques de gauche et les associations syndicales et pédagogiques.

En 1934, il fut mis à la disposition du recteur de Paris pour diriger le service central des examens du baccalauréat de l’enseignement secondaire de l’Université de Paris. Il devint inspecteur d’Académie à Paris, après avoir soutenu une thèse de doctorat d’État en avril 1937 sur « Le baccalauréat de l’enseignement secondaire », qui reste une référence sur l’histoire de cette institution. Sa thèse complémentaire était consacrée à « Pierre Chanet, une psychologie de l’instinct et des fonctions de l’esprit au temps de Descartes ».

Il habitait Nanterre (Seine/Hauts-de-Seine), dans un pavillon à charpente en ciment, innovation architecturale, dont il était propriétaire, connu sous le nom de « Maison Piobetta ».

Politiquement, Jean Piobetta était aussi actif. En Vendée, où il conservait des attaches familiales, il fonda l’Association régionale des mutilés et blessés de guerre. C’est à ce titre qu’aux élections législatives du 16 novembre 1919, il figura sur la liste d’Union républicaine groupe Gauche radicale, conduite par Raoul Pacaud, président du Conseil général, député qui, avec Gabriel Guist’hau, intervinrent à diverses occasions lors de ses demandes de mutation. Par la suite, il adhéra au Parti socialiste SFIO.

Resté en fonction pendant la guerre, auteur en 1940 de Vues sur l’éducation française paru chez Fernand Nathan, Piobetta publia en 1943 une étude sur la réglementation des Examens et concours dans la collection « Nouvelle encyclopédie pédagogique » aux Presses universitaires de France. Sans doute proche de la Résistance universitaire, il proposa, en tant que directeur de l’Office du baccalauréat, en 1944 un ouvrage Éducation nationale et instruction publique (Éditions JB Baillère, 207 p.) utilisé pour la mise en place de la réorganisation universitaire. Il analysait notamment les grands principes qu’il fallait respecter pour une réforme d’ensemble du système éducatif (fin de l’autorité préfectorale sur les enseignants, un enseignement pour le peuple, réforme des enseignements techniques et modernes, enseignement de la culture, respect de la laïcité…). Il fut nommé inspecteur général de l’Instruction publique en 1944, relevant de la direction du premier degré. Mais, si son projet de réforme constitua un document de travail de la commission Langevin-Wallon, il n’y siégea pas. Ses propositions au sujet de la formation des maîtres se limitant au recrutement dans des écoles normales à 15 ans, furent rejetées à l’unanimité.

Yvon Delbos, ministre de l’Éducation nationale de 1948 à 1950, le chargea alors de préparer en 1949 un texte sur la réforme de l’enseignement réduisant notamment le cycle d’orientation du second degré à deux ans, alors que le projet précédent préparé sous le ministère Edouard Depreux l’étendait à quatre. A plusieurs reprises, Gustave Monod, en avril et en juillet 1949, s’opposa aux propositions de Piobetta qui remettaient en cause les conclusions de la commission Langevin-Wallon.

Dans les années 1950, Jean Piobetta assistait de façon assidue aux réunions du jeudi de la commission d’études du groupe socialiste à l’Assemblée nationale pour les questions de l’Éducation nationale.
Il participa activement à la seconde commission Faral sur le baccalauréat en 1951-1952, à laquelle le ministre André Marie, demanda d’élargir ses attributions et d’étudier l’ensemble des problèmes relatifs à une réforme générale. Le rapport final de cette commission fut présenté le 20 janvier 1953 au Conseil supérieur de l’Éducation nationale qui le renvoya, pour avis, aux cinq Conseils d’enseignement, qui le refusèrent.
Nommé inspecteur général des services d’enseignement de la Seine en 1953 et chargé de missions dans les écoles normales d’instituteurs, il prit sa retraite en 1957.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article158482, notice PIOBETTA Jean, Benoît par Jacques Girault, version mise en ligne le 28 avril 2014, dernière modification le 1er juillet 2022.

Par Jacques Girault

Portrait par Jean Soubirou

ŒUVRE : Le fichier de la BNF comprend 18 références d’ouvrages ou d’ouvrages préfacés dont un Que sais-je ? sur Les institutions universitaires en France en 1961.

SOURCES : Arch. Nat., F17/17503, 17776, 26920, 27599 (dossier Edmond Lablénie). — Arch. Dép. Corse du Sud (état civil, registre matricule). — JO Lois et décrets (31 janvier 1916, 14 janvier 1931). — Etya Sorel, Une ambition pour l’école. Le plan Langevin-Wallon, Editions sociales, 1997. — Notes d’Alain Dalançon et Antoine Prost.

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