DHAOUADI Mustapha

Par Robert Kosmann

Né le 19 avril 1946 à Tunis (Tunisie) ; ouvrier spécialisé, documentaliste traducteur, puis comptable chez Renault à Billancourt ; militant du Comité de lutte Renault puis délégué CFDT.

Le père de Mustapha Dhaouadi était commerçant et fut un combattant de l’indépendance en Tunisie. Sa mère s’occupait de ses six enfants à la maison. Mustapha Dhaouadi effectua des études secondaires au lycée français de Carthage (Tunisie) et atteignit le niveau du baccalauréat qu’il obtint ensuite par correspondance. Il exerça des métiers saisonniers pendant ses vacances, comme employé aux écritures. Curieux de connaître la France et sans perspective au pays, il arriva le 5 janvier 1966 à Limoges (Haute-Vienne) et occupa divers emplois précaires (peintre, livreur…) pendant deux ans.

Il rejoignit Paris en avril 1968 et travailla durant un mois dans une entreprise de bâtiment. Il fut marqué par le mouvement des étudiants de mai 68 puisqu’il habitait une petite chambre, avec des étudiants tunisiens, rue Monge (Ve arr.). L’un d’eux travaillait déjà chez Renault et lui conseilla l’embauche.

Mustapha Dhaouadi fut engagé le 29 octobre 1968, au Bas-Meudon sur la chaine de retouche peinture/ponçage comme ouvrier spécialisé sur la 4L puis sur la R6 avec un salaire modeste mais qui représentait quatre fois celui qu’il aurait touché en Tunisie. Il travailla ensuite à la retouche et participa à l’organisation des grèves contre les cadences, sans toutefois se mettre en avant comme leader. En 1972, il fut muté au bureau central à la commande des pièces chez les fournisseurs, dans l’île Seguin. Parfaitement bilingue, il fut intégré en 1981 à la documentation générale, comme traducteur. En 1987, il prépara un DUT de documentation en formation continue. Le service documentation/traduction étant supprimé en 1986, et externalisé ultérieurement, il effectua plusieurs stages internes de comptabilité et devint comptable à la direction financière, jusqu’à sa retraite en 2008.

En 1969, Mustapha Dhaouadi adhéra pendant quelques mois à la CGT mais refusa la carte du PCF qui lui était proposée en même temps. Il fréquenta alors les militants maoïstes de la Gauche prolétarienne et participa au « Comité de lutte Renault » qui réunissait les intellectuels « établis » et les immigrés de cette tendance. Il participa à des actions contre les « chefs haïs » à travers les « GOAF » (Groupes d’ouvriers anti-flics), groupes initiés et contrôlés par la Gauche Prolétarienne. Ces actions consistaient parfois à couvrir ces agents de maîtrise avec des seaux de peinture, mais Mustapha Dhaouadi ne souhaitait pas être en première ligne dans ces actions. Jusqu’à la dissolution de l’organisation maoïste en 1973, il fréquenta les librairies marxistes-léninistes parisiennes (Norman Béthune) et distribua les tracts du Comité de lutte Renault. En retrait des actions dures de l’organisation, il était pourtant fier de côtoyer des intellectuels prestigieux comme Marin Karmitz, Jean-Paul Sartre* ou Simone de Beauvoir. En 1972 il fut très ému par l’assassinat de Pierre Overney*, dont il était proche, et fit partie du cortège des ouvriers Renault présents à son enterrement.

À la fin de l’année 1973, Mustapha Dhaouadi rencontra Paul Palacio* et Daniel Labbé, tous deux militants de la CFDT, qui le firent adhérer au syndicat dont il devint un des militants en vue jusqu’en 2008. Il fut délégué CHSCT, délégué du personnel, du comité d’entreprise et du comité central d’entreprise. Il participa au congrès de recentrage de la CFDT à Brest, en 1979, et soutint le courant de rénovation. En 1995, en désaccord avec Daniel Labbé qu’il jugeait trop proche de la direction, il soutint le courant CFDT de la Basse-Normandie qui quitta ensuite la CFDT pour créer le nouveau syndicat SUD Basse-Normandie, mais Mustapha Dhaoudi ne les suivit pas dans cette rupture. À la fermeture de l’usine de Billancourt, en 1992, Mustapha Dhaouadi, adopta avec la CFDT une position « réaliste » qui considérait « que la survie de l’entreprise primait avant tout » et acceptait la fermeture comme inévitable. Il fit alors partie de l’équipe de l’association « Starter », initiée par Daniel Labbé et fondée en 1986, qui aida et proposa des reclassements aux ouvriers qui étaient sur les listes de licenciés de la direction Renault.

Sur le plan familial, Mustapha Dhaouadi épousa en 1989 une compatriote tunisienne avec qui il eut une fille et deux fils. Il acquit la nationalité française en 1992.

Mustapha Dhaouadi mit à profit sa formation de comptable pour devenir trésorier du comité d’entreprise Renault (1992-2002). Il était encore trésorier de l’association « Starter » en 2012. Il fut aussi pendant un an trésorier de l’Association des travailleurs Renault de l’Île Seguin (ATRIS). Il fut également adhérent au MRAP (Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article158662, notice DHAOUADI Mustapha par Robert Kosmann, version mise en ligne le 6 mai 2014, dernière modification le 6 mai 2014.

Par Robert Kosmann

SOURCES : Archives PPo. — Archives interfédérales et confédérales de la CFDT. — Gilbert Hatry (dir.), Notices biographiques Renault, Paris, Éditions JCM, 1990. — Entretien avec Mustapha Dhaouadi, juin 2012.

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