FAVRE Louis, Adrien

Par Jean-Pierre Besse, Michel Germain

Né le 3 novembre 1910 à Bellevaux (Haute-Savoie), exécuté sommairement le 16 juillet 1944 à Vieugy, auj. Annecy (Haute-Savoie) ; prêtre ; résistant, membre du réseau Gilbert, aide et sauvetage, Juste parmi les Nations.

Louis Favre naquit le 2 novembre 1910 à Bellevaux (Haute-Savoie), où habitaient ses parents Joseph Marie Favre son père, cultivateur, et Marie Julie Voisin, sa mère. A sept ans, il perdit son père, qui donna sa vie pour la France sur un champ de bataille de l’Alsace en 1917. Le jeune Louis fut envoyé comme élève au Juvénat de Ville-la-Grand (Haute-Savoie).
Entré dans les Ordres en 1936, devenu missionnaire de Saint-François-de-Sales, il était professeur dans l’école qui l’avait vu faire ses études. Toutes les personnes qui l’ont connu insistent sur sa sensibilité d’homme et d’artiste. Il avait un goût certain pour la poésie, le dessin et surtout la musique.
Il entra dans la Résistance. Le Juvénat de Ville-la-Grand est situé le long de la frontière suisse, ce qui facilitait les passages clandestins. Il est bien difficile de dire combien de personnes sont passées par les combles et les jardins de l’école. Certains avancent le chiffre de 2000. De 1941 jusqu’à son arrestation, de nombreux Hollandais, des prisonniers de guerre évadés, des Juifs, des Alsaciens réfugiés, des résistants qui passaient dans les deux sens franchirent cette frontière clandestinement grâce à lui et à des complicités dans l’école. Le futur général de Bénouville par exemple franchit plus de soixante fois cette frontière interdite.
Le 5 février 1944, les Allemands cernèrent l’école et les douaniers allemands d’Annemasse arrêtèrent le révérend père Favre. Il fut interné au Pax n°486 et mis dans la cellule n°2. Le lendemain, réclamé par la Gestapo d’Annecy, il fut transféré à Annecy sous l’escorte du II/39è Polizei et incarcéré à l’école Saint-François, dans le même cachot (N°5) qu’Albert Curioz*. Le révérend père Favre réussit à garder le contact avec l’extérieur. Il envoya le 24 mars le premier billet « Je vous écris du cachot n°5. Ce n’est pas une recommandation. C’est une cave où l’on a construit deux rangées de cellules. » On apprit grâce à lui que les gardiens étaient roumains, alsaciens, autrichiens ou allemands, tous enrôlés dans l’armée allemande. Mais surtout, il renseigna sur l’état de santé du lieutenant Pierre Bastian*, pris après les combats de Glières et qui sera exécuté par l’ennemi plus tard. Il écrit même le 25 mai : « le lieutenant Bastian a été emmené vendredi pour être fusillé ».
Il fut interrogé, torturé comme la plupart des détenus de Saint-François, les tortures physiques et morales étant constantes. Mais il se tut.
Sorti de sa cellule, il fut exécuté le 16 juillet 1944 à Vieugy (Seynod), après plus de cinq mois de détention. Il avait 34 ans. (Mémorial de l’oppression 3808 W 1539). Il fut inhumé sous le numéro 14.
Inhumé à la Libération à Ville-la-Grand, il fut déclaré « Mort pour la France » le 25 octobre 1945. Médaillé de la Résistance (décret du 26 mars 1945), il fut homologué, à titre posthume, sous-lieutenant, chargé de mission 3e classe. L’État d’Israël le fit Juste parmi les Nations le 30 avril 1987.
On peut lire une petite plaquette réalisée par les élèves du Juvénat en 1994, ainsi que celle réalisée pour le 60e anniversaire sur les fusillés de Vieugy, disponible en mairie de Seynod. Son nom est gravé sur les monuments aux morts de Ville-la-Grand et de Bellevaux. D’autre part, si un monument rappelle son souvenir dans le cimetière d’Annemasse, un monolithe de granit a été érigé en 1948 à l’emplacement où furent fusillés 40 patriotes à Vieugy (Seynod) et un panneau explicatif a été dressé en 2004.

Vieugy, ex-commune de Seynod, auj. Annecy (Haute-Savoie), 15 juin-10 août 1944

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article158973, notice FAVRE Louis, Adrien par Jean-Pierre Besse, Michel Germain , version mise en ligne le 2 juin 2014, dernière modification le 27 novembre 2022.

Par Jean-Pierre Besse, Michel Germain

Graffitis retrouvé sur les parois en bois de la cellule de la prison Saint-François où étaient internés le R.P. Favre et Émile Millet avant leur exécution.

SOURCES : BAVCC, Caen, dossier 21P 182810 et Vincennes GR 16 P 218930. — La Résistance en Haute-Savoie, CD-ROM AERI, 2008. — Michel Germain, Haute-Savoie Rebelle et martyre, Mémorial de la Seconde guerre mondiale en Haute-Savoie, La Fontaine de Siloé, 2009. — Hommage aux 450 fusillés ou massacrés de la Résistance en Haute-Savoie, CRD74, éditions de l’ANACR, 2018.— État civil. — Israël Gutman (sous la direction), Dictionnaire des Justes de France, Yad Vashem, Jérusalem, Fayard, Paris, 2003.

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