BÉE (BEE aux États-Unis) Émile [Emélie, Alexis, dit Émile] [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis]

Par Michel Cordillot, Robert P. Sutton, Daniel Cahen

Tailleur ; né le 19 décembre 1828 à Sonchamp (Yvelines), mort à San Francisco (Californie), le 17 avril 1914 ; marié ; membre des sociétés secrètes, puis communiste icarien ; exilé en Californie après le 2 décembre 1851 ; de retour en France en 1862, prit part à la guerre franco-prussienne et à la Commune ; reparti à San Francisco, membre de l’AIT, puis du SLP ; co-fondateur de la communauté d’Icaria Speranza.

Né dans une famille de tisserands établie à Sonchamp (Yvelines), Émile Bée reprit la profession de son père Toussaint Boniface (1781-1841) en devenant tailleur d’habits. Installé à Paris à l’âge de 16 ans pour y exercer sa profession de tailleur, il adhéra à la société secrète dite « des Saisons » organisée par Blanqui et Barbès. Après l’échec de l’insurrection du 12 mai 1839, il abandonna toute activité clandestine et s’abonna au Populaire. Converti au cabétisme, il souscrivit au fonds de soutien à Icarie et demanda à faire partie de la première Avant-garde. Mais il n’avait ni l’argent de l’apport ni le trousseau exigé, et sa candidature fut en conséquence écartée.

Après juin 1848, Émile Bée reprit du service dans les sociétés secrètes républicaines et conspira contre le prince-président. Au lendemain du deux décembre, il fut arrêté et banni de France. Il s’embarqua pour l’Amérique, mena durant plusieurs années une vie d’aventure, et fut même chercheur d’or en Californie. Il acquit la nationalité américaine en 1854, et fut alors enregistré sur les listes électorales sous le nom d’Émile Bee.

En 1862 il revint en France et rencontra peu après Caroline Joséphine Rosalie Davergne, née le 23 mai 1834 à Feuquière-en-Vimeu, petit village de la Somme, dont le père était tisserand. Il l’épousa à Paris, dans le 8e arrondissement, le 25 novembre 1865, et ils eurent deux enfants nés en 1867 et 1868 dans le 8e arrondissement à Paris, Florence Emélie et Louise Adrienne, qui décéda prématurément en 1869 à Raincheval, dans la Somme. Un troisième enfant, Louis Adrian, naquit à San Francisco en 1873.

On sait qu’Émile Bée participa en 1870 à la défense de Paris assiégé par les Prussiens, puis combattit dans les rangs de la Commune.

De nouveau expulsé (sans doute la nationalité américaine le protégea-t-elle d’un sort moins enviable), Émile Bée repartit pour les États-Unis. Après un rapide passage dans la colonie d’Icarie en Iowa, il gagna la Californie et s’installa à San Francisco. En 1873, on retrouve son nom sur la liste des membres et des sympathisants de la section française n°19 de l’AIT ayant versé leur écot à la souscription ouverte au profit des veuves et des orphelins des combattants de la Commune. Il assista également en mars 1874 à la cérémonie de commémoration du 18 mars organisée par les Internationaux de San Francisco et versa à cette occasion son obole à la collecte organisée pour venir en aide Jules Leroux, suite à l’incendie qui avait détruit tous les biens de ce dernier. Quelques années plus tard, Émile Bée figurait parmi les dirigeants de la section locale du Socialist Labor Party.

En 1881, renouant avec ses premiers idéaux, Émile Bée s’abonna au journal de Jules Leroux. La même année, il fit la connaissance d’Armand et Théodore Dehay, et il poussa les Jeunes Icariens à quitter l’Iowa pour se réinstaller en Californie. Lorsque la décision fut arrêtée, il les aida à trouver un site adapté à Cloverdale qui fut baptisé Icaria Speranza.

Émile Bée et son épouse Caroline figurèrent parmi les signataires de la charte de la colonie, mais ils n’y exercèrent aucune responsabilité. On notera donc que contrairement à ce qui a parfois été avancé, les Bée n’étaient pas en parenté avec les trois autres familles constituant la communauté en 1883 (les trois autres chefs de famille Armand Dehay, Étienne Pépin et Émile Zurchère étaient beaux-frères, puisque chacun d’eux avait épousé une des filles de Jules Leroux.

Après la dissolution de la communauté en 1886, Émile Bée s’établit en 1898 à Geyserville, en 1900 à Cloverdale et en 1903 à Santa Rosa, des villes toutes situées dans le comté californien de Sonoma. C’est à San Francisco qu’il mourut finalement le 17 avril 1914.

Son épouse Caroline décéda le 20 août 1914 à Santa Rosa et fut enterrée à ses côtés trois jours plus tard à Cloverdale au cimetière du Mont des Oliviers.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article159375, notice BÉE (BEE aux États-Unis) Émile [Emélie, Alexis, dit Émile] [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis] par Michel Cordillot, Robert P. Sutton, Daniel Cahen, version mise en ligne le 3 juin 2014, dernière modification le 9 décembre 2019.

Par Michel Cordillot, Robert P. Sutton, Daniel Cahen

SOURCE : Le Socialiste, 9 mars 1873. — L’Étoile du Kansas, 1er mai 1874. — La Jeune Icarie, 26 juin, 15 août 1879, 31 décembre 1880. — Jules Prudhommeaux, Icarie et son fondateur Étienne Cabet, Paris, Cornély & cie, 1907. — Robert V. Hine, California’s Utopian Colonies, 1850-1950, San Marino, Huntington Library, 1953. — Maurice Dommanget, Auguste Blanqui. Des origines à la révolution de 1848. Premiers combats et premières prisons, Paris-La Haye, Mouton, 1969. — Robert P. Sutton, Les Icariens : The Utopian Dream in Europe and America, Urbana, University of Illinois Press, 1994. — Dale Larsen (ed.), À History and Census of the Icarian Communities : Soldiers of Humanity, The National Icarian Heritage Society, sl, 1998, p. 278. — CDRom Maitron. – Note de Daniel Cahen.

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