FOURNIER Henri [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis]

Par Michel Cordillot

Né à Paris vers 1861, mort de la tuberculose à Danbury (Connecticut) le 17 janvier 1909 ; marié et père de famille ; ouvrier fondeur, puis teinturier ; témoin de la Commune de Paris ; membre des groupes de choc blanquistes ; séjourna aux États-Unis de 1885 à 1888, puis émigra définitivement à la fin des années 1890 ; membre du PSA, collaborateur régulier de L’Union des travailleurs.

Henri Fournier naquit à Paris vers 1861. Dix ans plus tard, ses parents tenaient un café-restaurant situé au coin du boulevard du Montparnasse et de l’avenue de l’Observatoire juste à la pointe du jardin du Luxembourg. Durant la Commune de Paris, son père, qui était parti en voyage d’affaires en province, se trouva dans l’incapacité de regagner la capitale. Henri Fournier, qui avait lu Les Misérables et était fasciné par le personnage de Gavroche, assista avec passion à la construction des barricades le 18 mars. Au cours des semaines suivantes, il ne perdit rien des événements, traînant dans Paris et assistant aux débats qui se tenaient au bal Bullier tout proche. Lors de la Semaine sanglante, il fut témoin des combats de rue et vit ses premiers morts. Sa mère ayant été avertie que le Luxembourg était miné et que les Versaillais ne feraient pas de quartier, la famille partit se réfugier chez un parent résidant dans l’Ile de la Cité. Pour Henri Fournier ce fut un « baptême révolutionnaire » qui le convertit à jamais à la cause de la Révolution sociale.

Au début des années 1880, alors qu’il était étudiant, Henri Fournier rejoignit à Paris les groupes blanquistes. Il assista aux obsèques du « Vieux » le 8 janvier 1881 et prit également part à de nombreuses bagarres avec les groupes socialistes rivaux. En 1884, il était le délégué à Clichy de la Ligue pour l’abolition de l’armée permanente et pour son remplacement par une Garde nationale sédentaire, une organisation fondée par les membres du Comité révolutionnaire central. Il se lia alors avec Emmanuel Chauvière. Toutefois il fut rapidement forcé de constater que les actions violentes et les grèves dures étaient rarement couronnées de succès.

En 1885 Henri Fournier partit aux États-Unis. Il y resta trois ans avant de rentrer à Paris en 1888. Il fut alors embauché dans une fonderie de Vaugirard, où il travaillait quatre jours par semaine à la production et deux jours comme représentant. En 1889, il fit la connaissance de Jules-Louis Breton. Il s’inscrivit alors au comité socialiste et participa activement à plusieurs échauffourées avec les groupes de choc boulangistes. Puis il décida de retourner aux États-Unis, sans doute vers la fin des années 1890. Il se fit fondeur de fer avant de trouver un emploi comme ouvrier teinturier dans le magasin de sa tante Azélie Foubert, la veuve d’Auguste Foubert.

Ayant adhéré à la section locale du Parti socialiste américain de Danbury (Connecticut), Henri Fournier s’abonna à l’Union des travailleurs peu après son lancement et envoya en juillet 1901 à cette feuille ses premières contributions, dans lesquelles il polémiquait avec les théories naturiennes développées par Henri Zisly. Dans un éditorial publié le 31 juillet, il prit la défense de la Commune de Paris en faisant la critique d’un feuilleton publié par le Courrier des États-Unis. Ce même numéro contenait un supplément intitulé Cris d’en bas, fait de textes signés Henri Fournier. L’hebdomadaire socialiste francophone annonçait que ce genre de supplément serait servi une fois par mois, mais il n’y en eut en fait qu’un. Henri Fournier n’en continua pas moins de collaborer activement à L’Union des travailleurs au fil des mois et de placer autour de lui de nombreux abonnements (dont une douzaine d’abonnements d’essai en 1904).

En juin 1905, ouvrant la polémique au sujet des propos antipatriotiques de Gustave Hervé, Henri Fournier réagit violemment en déclarant : « Nous ne détestons pas nos patries ; nous détestons ceux qui exploitent l’idée de patrie à leur profit. » En 1906, il se prononça contre l’attribution du droit de vote aux femmes, au prétexte que cela ferait le jeu de la réaction.

Lorsque Louis Goaziou fit la connaissance d’Henri Fournier à Danbury en avril 1908, ce dernier vivait avec sa femme et leurs trois enfants, sa belle-mère et sa petite fille orpheline. Son fils aîné, âgé de vingt-cinq ans, était chapelier. Socialiste, il avait épousé la fille d’un militant convaincu. Henri Fournier était un artiste peintre amateur dont les dessins recevaient tous les ans un premier prix au concours de Danbury. Il était en mauvaise santé et toussait déjà de manière persistante.

A l’automne, et bien que de plus en plus malade, Henri Fournier assista à un meeting très réussi de Debs à Danbury. Quelques jours durant, il retrouva l’enthousiasme de ses vingt ans et s’en trouva tout revigoré. Sa dernière lettre à la rédaction de L’Union des travailleurs fut pour annoncer les bons résultats électoraux obtenus par le PSA à Danbury lors des présidentielles : 117 voix (contre 37 l’année précédente).

Henri Fournier décéda à Danbury le dimanche 17 janvier 1909, des suites d’une tuberculose contractée en soignant son gendre.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article159632, notice FOURNIER Henri [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis] par Michel Cordillot, version mise en ligne le 8 juin 2014, dernière modification le 8 juin 2014.

Par Michel Cordillot

SOURCE : L’Union des travailleurs, 4 juillet, 18 juillet 1901, 10 novembre 1904, 16 février, 27 avril, 4 mai, 11 mai, 22 juin 1905, 26 avril, 5 juillet 1906, 17 octobre 1907, 23 avril, 21 mai, 15 octobre, 12 novembre, 17 décembre 1908, 21 janvier 1909 entre autres.

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