CHRISTENERT Constant (dit parfois CONSTANT) [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis]

Par Michel Cordillot

Né en Suisse vers 1836, mort à New York (USA) autour du 10 février 1876 ; restaurateur ; une des principales figures new-yorkaises de l’Union républicaine de langue française et de l’AIT.

Vers la fin des années 1860, Constant Christenert tenait à New York le Café-restaurant international (billard, pension française, restaurant, vins et liqueurs) situé 68 Grand street. En février 1869, il participa au banquet fraternel des républicains de langue française de New York et Newark organisé pour commémorer la proclamation de la Deuxième République, et il y prononça un discours. Ce fut à cette occasion que Debuchy proposa de créer partout aux États-Unis des sections républicaines semblables à celle qui venait de se créer à Saint-Louis.

Membre-fondateur de l’Union républicaine de langue française (URLF) à New York, Constant Christenert fut élu président de la section n° 1 dans cette même ville, et à ce titre il fut désigné dès le 8 août 1869 pour faire partie de la commission chargée de préparer la publication d’un journal. À compter de la fondation du Bulletin, il en fut un collaborateur assidu. En janvier 1870, il fut l’un des organisateurs du banquet commémorant l’anniversaire du 24 février (des cartes d’admission étaient en vente à son domicile) et en fut l’un des principaux orateurs. Lors du déclenchement de la guerre franco-prussienne, il signa la déclaration de soutien aux Internationaux parisiens qui avaient manifesté contre la guerre et fut membre du comité organisateur de la deuxième tombola patriotique organisée sous les auspices du Comité républicain de défense nationale créé en septembre 1870 sous l’égide de l’URLF. Le tirage eut lieu en octobre à l’Union Assembly Rooms de New York en présence d’une assistance évaluée à 3 000 personnes, presque toutes francophones.

Avec le Comité de défense nationale, il travailla à organiser le départ de volontaires vers la France envahie. Par ailleurs, toujours à l’automne 1870, il s’efforça avec la section du Grütli Verein de rallier tous les républicains suisses à l’URLF. Une assemblée générale se tint au Teutonia Hall en mars 1871 en présence du consul de Suisse. Les autres membres du comité étaient Buxdorf, Schmidt, Hauser, Golay, Frey, Molo et Cuza.

Choisi pour présider la structure centrale de coordination des sections new-yorkaises de l’URLF, il signa l’adresse de remerciement à Garibaldi (mars 1871) pour l’aide qu’il avait apportée à la jeune République française. Début avril, alors que le débat s’amplifiait au sein de l’URLF, il fut l’un des signataires d’un communiqué prenant clairement fait et cause pour la Commune dans les termes suivants : « Le gouvernement de l’Assemblée de Versailles a voulu décapiter Paris et lui ravir ses droits de parler, d’écrier, de se réunir, et surtout d’être armé. Paris s’est soulevé. Il a bien fait ! Et nous, membres de l’Union républicaine de langue française de New York, déclarons à l’unanimité être avec Paris contre ses oppresseurs.

Constant Christenert, président.

D. Debuchy, Drury, Claude Pelletier, délégués. »

Peu après, il s’éleva avec force contre les thèses ultra-chauvines développées par Charles Villa (voir ce nom) dans les colonnes du Bulletin. En septembre 1871, il figurait encore au nombre des organisateurs chargés par l’URLF de préparer le banquet de commémoration du 22 septembre et d’y faire un discours. Contrairement à ce qui a parfois été écrit, Christenert ne quitta pas New York durant le printemps 1871, et il ne prit donc aucune part direct à la Commune.

Dès la fondation de l’AIT aux États-Unis, Constant Christenert adhéra à la section 2, puis à la section 22 lorsque celle-ci s’organisa. C’est à son domicile que se tenaient les réunions de cette dernière. Proche des milieux autonomistes, membre de la commission de contrôle du Socialiste, il fut l’un des signataires de l’appel à la manifestation de solidarité avec les communards vaincus à l’occasion de l’exécution de Ferré, Bourgeois et Rossel. Convoquée initialement le 10 décembre 1871, cette manifestation se déroula finalement le 17. Co-organisateur de la souscription au profit des veuves et des orphelins des combattants de la Commune, il contribua généreusement à son succès (10 dollars), mais il démissionna de ses responsabilités pour protester contre le choix de Gustave May comme trésorier national alors que des accusations de prévarication avaient été formulées à l’encontre de ce dernier. Il fut aussitôt réélu par les militants new-yorkais et continua de collecter des fonds. En juin et novembre 1873, deux jurys d’honneur furent constitués par l’URLF et par la Société des réfugiés de la Commune pour trancher sur la validité des accusations proférées en retour par les frères May contre Christenert ; par deux fois les frères May furent désavoués (ils furent finalement expulsés de la Société des réfugiés en 1877).

En 1873, Constant Christenert participa à l’organisation du banquet de commémoration de l’anniversaire du 18 mars, se chargeant de la vente des billets dans son établissement ; apparemment toujours membre de l’URLF, il joua de même un rôle de premier plan dans l’organisation de la célébration des anniversaires du 24 février et du 22 septembre en 1874.

S’étant rapproché de la mouvance blanquiste, Constant Christenert prit activement part au mouvement des chômeurs de l’hiver 1873-74, et au lendemain de l’échauffourée de Tompkins square (13 janvier 1874), on le vit se rendre au poste de police pour demander la libération de plusieurs militants arrêtés à cette occasion.

Décédé autour du 10 février 1876, Christenert fut inhumé le 13. Dans sa nécrologie le Bulletin écrivait : « Il est mort après une longue maladie, après des souffrances physiques qui ont duré des années, auxquelles il faut ajouter les souffrances morales de la défaite de la Commune dont il était l’un des plus fervents apôtres. »

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article159746, notice CHRISTENERT Constant (dit parfois CONSTANT) [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis] par Michel Cordillot, version mise en ligne le 10 juin 2014, dernière modification le 11 mars 2019.

Par Michel Cordillot

SOURCES : Arch. PPo., BA/435. — Le Messager franco-américain, 4 mars 1869, 13 avril 1871. — Bulletin de l’Union Républicaine et Le Socialiste, passim. — Charles Clerc, Les Républicains de langue française aux Etats-Unis, 1848-1871, Thèse, Univ. Paris XIII, 2001, p. 332, 353-354, 358 et suiv., 380. — Notes d’Hubert Perrier.

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