DELPORTE Valentin [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis]

Par Michel Cordillot

Ouvrier verrier ; militant syndicaliste et socialiste ; propagateur de la médecine Raspail ; membre de la Fédération socialiste française après la Première Guerre mondiale ; une des grandes figures du socialisme franco-américain.

Ouvrier verrier et militant socialiste arrivé aux États-Unis en 1888, Valentin Delporte était vraisemblablement originaire du nord de la France. Il habitait en 1903 1729 South 8e rue à Saint Louis (Missouri).

Valentin Delporte fit la connaissance de Louis Goaziou à l’occasion du congrès du PSA qui se tint à Saint Louis en juillet 1903, et il fut l’un des membres fondateurs de la section socialiste de cette ville. À la même époque, il faisait savoir aux lecteurs de l’Union des travailleurs par le biais d’une publicité payante qu’il se tenait à leur disposition pour leur fournir par correspondance les ouvrages de médecine de F.-V. Raspail.

Ayant trouvé du travail à l’automne à Spring City (Pennsylvanie), Valentin Delporte organisa en novembre 1903 parmi les ouvriers verriers de cette localité une tombola au bénéfice de la propagande socialiste, qui rapporta au total la somme de 6 dollars. Quelques mois plus tard, il prit une action de la coopérative de publication de L’Union des travailleurs. Lecteur dévoué et généreux de ce journal il décida de mettre à profit la morte-saison de 1904 pour aller faire une tournée de propagande à Saint-Louis et placer des abonnements. À son retour à Spring City en octobre, il plaça encore 20 abonnements d’essai. Désireux de pouvoir voter socialiste aux élections, il s’enquit également des conditions dans lesquelles il pourrait acquérir la nationalité américaine.

Une jambe cassée lors d’une chute sur le verglas début 1905 ne ralentit guère ses activités militantes. Nommé agent abonneur officiel à Spring City, Valentin Delporte prit l’habitude de faire chaque année ou presque une tournée au cours de laquelle il prospectait pour L’Union des travailleurs tout en faisant des démonstrations des produits Raspail. En 1906, il fit ainsi une tournée de prospection à Point Marion, West Brownsville, California et dans un grand nombre de petites localités minières de Pennsylvanie. Il récolta avec l’aide des militants locaux plusieurs dizaines d’abonnements et de réabonnements et collecta des dizaines de dollars pour la souscription permanente.

En 1907, Valentin Delporte fit la saison à Point Marion (Pennsylvanie). Une situation difficile et une baisse des salaires de 12,5 % furent à l’origine d’une grève des verriers dans laquelle il s’impliqua activement. Il en rendit compte dans les colonnes de L’Union des travailleurs dont il était devenu de fait un collaborateur régulier.

De retour à Spring City, Valentin Delporte continua son travail de propagande et de diffusion. Il était également membre du Choral club et il fit savoir aux lecteurs de L’Union des travailleurs que ce dernier organiserait une « ducasse » les 14-18 juillet 1910.

En 1911, Valentin Delporte fut l’un des membres fondateurs du club socialiste de Spring City qui compta rapidement une cinquantaine d’adhérents. De sensibilité syndicaliste-révolutionnaire, il participa à la collecte organisée pour soutenir les travailleurs de Lawrence (Massachussetts), en lutte à l’appel des IWW pour « du pain et des roses » en 1912, et il prit une part très active dans la lutte pour hâter la libération des deux dirigeants des IWW, Joe Ettor et Arturo Giovannitti.

En 1913 Valentin Delporte partit s’installer à Fairmont (Virginie occidentale). Il habitait 302 9th street, et s’était fait marchand d’huîtres tout en continuant de vendre des livres de médecine Raspail. Toujours à la recherche d’idées nouvelles pour venir en aide à L’Union des travailleurs, il organisa à son profit une vente de moules fraîches qui rapporta plus de 20 dollars. Membre de la section socialiste locale, il promit d’essayer de convaincre l’ensemble des adhérents de voter leur rattachement à la Fédération socialiste de langue française alors en voie de formation. En juillet, il rendit visite à la rédaction de l’hebdomadaire socialiste de Charleroi et c’est tout naturellement qu’il se porta volontaire en août pour verser mensuellement 10¢ afin de permettre la constitution d’un fonds de réserve financier et pour faire la tournée des militants de Fairmont chaque mois afin de recueillir leur précieuse obole. Après une nouvelle tournée de propagande, il fut cité l’honneur par L’Union des travailleurs en tant que propagandiste (il figurait par ailleurs sur la liste des actionnaires de la coopérative de publication rendue publique fin 1913). Durant l’hiver, il plaça encore une dizaine d’abonnements, notamment à Butler où il fut bien accueilli et aidé par les militants locaux.

Au printemps 1914, désireux de retourner en France et en Belgique, où habitait sa sœur, Valentin Delporte annonça qu’il était prêt à céder son commerce Raspail. Un arrangement fut sans doute rapidement trouvé car il se mit en route à la mi-mars, profita du voyage pour collecter quelques abonnements, et embarqua à New York vers le 15 avril. Une semaine plus tard il se trouvait à Bruay-en-Artois, d’où il envoya un amical salut à la rédaction, puis il partit pour Bruxelles. Il se trouvait apparemment dans la région de Valenciennes lorsque éclata la Première Guerre mondiale. Fait prisonnier par les Allemands, il parvint à s’évader au bout de quelques mois et à gagner Bruxelles où il se plaça sous la protection du consul des États-Unis. De retour à New York aux alentours du 10 mai 1915, il décida de s’installer dans cette ville et trouva à se loger 42 ouest 18e rue. Immédiatement réabonné à L’Union des travailleurs, il recommença à placer des abonnements autour de lui et figura sur la liste des abonnés jusqu’à la cessation de publication en septembre 1916. Entre temps, il avait également repris le commerce des produits Raspail.

En 1922, Valentin Delporte était retourné s’installer à Jeannette (Pennsylvanie). Resté l’un des militants les plus actifs de la Fédération socialiste française après la Première Guerre mondiale, il prit en charge dans cette ville l’organisation de la collecte de soutien aux Russes et recueillit 14,25 dollars. Lui-même versa la somme de 2 dollars. À cette date, il était également toujours dépositaire des livres Raspail.

Il suffit de feuilleter la collection de l’Union des travailleurs pour vérifier qu’il ne se passa guère de quinzaine sans que le nom de Valentin Delporte soit apparu dans ses colonnes à un titre ou à un autre. Il fut sans conteste l’un des militants les plus actifs et les plus dévoués du mouvement socialiste franco-américain durant les années 1903-1922.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article159779, notice DELPORTE Valentin [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis] par Michel Cordillot, version mise en ligne le 10 juin 2014, dernière modification le 10 juin 2014.

Par Michel Cordillot

SOURCES : L’Union des travailleurs, 30 juillet, 6 août, 19 novembre 1903, 7 janvier 31 mars, 23 juin, 4 septembre, 15 septembre, 6 octobre, 20 octobre 1904, 28 septembre, 5 octobre 1905, 15 mars, 19 juillet, 26 juillet, 2 août, 9 août, 30 août 1906, 17 octobre, 21 novembre 1907, 19 mai 1910, 7 décembre 1911, 29 février, 8 août, 26 septembre 1912, 27 mars, 3 avril, 14 août, 13 novembre, 11 décembre 1913, 8 janvier, 22 janvier, 12 mars, 19 mars, 30 avril, 28 mai 1914, 15 avril, 27 avril 1915, 31 août 1916 entre autres. — Germinal, mai 1922.

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