DRUARD Léon [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis]

Par Michel Cordillot

Mineur français originaire d’Avion (Pas-de-Calais) ; membre de la Fédération syndicale du Pas-de-Calais (tendance baslycot), et du POF ; parti aux États-Unis vers 1895 ; socialiste, puis anarcho-syndicaliste ; publiquement accusé en 1908 d’être membre de la Fédération civique.

Mineur à Avion, Léon Druard adhéra la Fédération syndicale du Pas-de-Calais et au POF de Jules Guesde, dans les rangs duquel il côtoya Charles Robasse (voir ce nom). Parti aux États-Unis à la suite d’une grève perdue, il était en 1896 installé à California (Pennsylvanie). Il adressa en effet en février de cette même année à L’Ami des ouvriers une lettre dans laquelle il se prononçait en faveur de Basly et Lamendin, ce qui lui valut une rebuffade de la part de Louis Goaziou. Peu après, ce dernier le mit au défi de venir lui donner la contradiction à l’occasion de la réunion publique qu’il s’apprêtait à tenir à California. Léon Druard ne se déroba pas à l’invitation quelque peu ironique qui lui avait été faite et, si l’on en croit le compte-rendu rédigé par Louis Goaziou lui-même, il n’aurait opposé qu’une résistance de principe aux arguments des anarchistes. Il participa en tout cas de bonne grâce à l’animation de la réunion en entonnant des chants socialistes.

Léon Druard fut en septembre 1901 l’un des premiers abonnés de L’Union des travailleurs. Lecteur dévoué, il collecta en 1903 5,75 dollars pour financer l’agrandissement du format du journal et plaça plusieurs abonnements dans son entourage au cours des mois suivants. Toujours prêt à mettre la main à la poche pour financer par exemple la propagande en direction des Franco-canadiens de Nouvelle Angleterre, il participa en tant que chanteur amateur à l’animation du bal-concert de L’Indépendance de Charleroi en mai 1903.

Vers le milieu de l’année 1903, Léon Druard partit travailler à Gorham (Colorado) et, de ce fait, il ne put voir Charles Robasse lors de son passage à California. Il écrivit à la rédaction de L’Union des travailleurs pour dire son regret de n’avoir pas pu revoir celui aux côtés de qui il avait milité à Avion.

Début 1904, Léon Druard résidait à Weir City (Kansas). Attaqué par le Réveil du Nord, qui l’accusait d’avoir attiré aux États-Unis par des promesses mensongères des candidats au départ, il fut vigoureusement défendu par une lettre cosignée par Frank Cuvelier, Stanislas Hut, Napoléon et Louis Bourlard, et Frank Gasperi (voir ces noms). Installé à Roseland (Kansas) en août, il fut aussitôt officiellement nommé agent-abonneur de L’Union des travailleurs dans cette localité. En novembre 1904, il fut l’un des co-signataires d’une lettre qui accusait un lecteur du journal se prétendant socialiste d’avoir en réalité œuvré pour assurer la victoire des Républicains à Roseland, par 132 voix contre 102 aux socialistes.

En février 1905, Léon Druard fit publiquement savoir qu’il était opposé au ministérialisme millerandien. Installé à Scammon Mineral (Kansas), il écrivit à ses anciens camarades du Pas-de-Calais pour leur annoncer que le 1er Mai avait été fêté par les mineurs de cette ville à l’occasion d’une journée chômée, marquée par des discours révolutionnaires et des chants de lutte, dans une salle décorée de portraits de Guesde et de Debs.

En février 1906, Léon Druard versa son écot à la collecte organisée pour soutenir les révolutionnaires russes. En mai, il s’abonna à L’Action syndicale de Lens, puis envoya 100 francs pour les victimes de la catastrophe de Courrières et les mineurs grévistes. À partir de ce moment, il commença à évoluer vers l’anarcho-syndicalisme. Le 10 mai 1906, il était d’ailleurs au nombre des lecteurs auxquels Broutchoux, emprisonné à Béthune le 20 mars, envoyait son salut fraternel par l’intermédiaire de L’Union des travailleurs.

Léon Druard participa à la réunion syndicaliste-révolutionnaire qui se tint le 1er Mai 1907 chez Stanislas Hut à Pittsburgh (Kansas). À plusieurs occasions, il fit parvenir à L’Action syndicale des sommes d’argent destinées à aider les camarades français. Il versa notamment 3 francs 75 au profit de l’imprimerie communiste du Pas-de-Calais (dans la même liste, on note une contribution de 1 franc 25 versée par Georgette Druart, 10 ans, sans doute sa fille).

Dans une tribune libre publiée par L’Union des travailleurs en mars 1908, Léon Druard se posa en défenseur de l’action directe, insultant Goaziou et son journal auquel il se félicitait de n’être plus abonné. Dans une réponse au vitriol, Goaziou commença par lui rappeller que douze années auparavant, lors d’une certaine réunion à California les rôles avaient été inverses, et il révéla pour finir que nonobstant ses postures ultra-révolutionnaires, Druard était en fait membre de la Fédération civique. Pressé de questions par plusieurs lecteurs, Goaziou répéta et précisa quelques semaines plus tard ses accusations contre Druart et ne fut jamais démenti.

Léon Druard annonça son retour définitif en France par une lettre parue dans L’Action syndicale et datée d’Hénin-Liétard, le 13 septembre 1908, transmettant par la même occasion ses salutations fraternelles aux camarades des États-Unis.

Léon Druard était toutefois de nouveau aux États-Unis quelques mois plus tard. Installé à Carona (Kansas), il vint porter la contradiction à Louis Goaziou lors de la conférence que ce dernier donna dans cette ville le dimanche 7 mars 1909 devant un auditoire de 500 personnes (qui furent traitées de « fumistes », et de « vendus » par Druard quand elles prirent le parti de Goaziou).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article159792, notice DRUARD Léon [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis] par Michel Cordillot, version mise en ligne le 10 juin 2014, dernière modification le 10 juin 2014.

Par Michel Cordillot

SOURCES : L’Ami des ouvriers, 29 février, 30 mars, 15 avril 1896. — L’Union des travailleurs, 19 septembre 1901, 26 mars, 7 mai, 10 septembre 1903, 21 avril, 4 août, 4 septembre, 24 novembre 1904, 16 février, 25 mai 1905, 1er février, 10 mai 1906, 12 mars, 28 mai 1908, 18 mars 1909 entre autres. — L’Action syndicale, 18 juin 1905, 27-31 mai, 24 juin-1er juillet 1906, 24 mars, 2 juin, 4 août, 5 décembre 1907, 26 janvier, 13 septembre 1908.

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