BEAUCHAMP Georges [né ROSENFELD Georges]

Par Gilles Morin

Né le 14 avril 1917 à Paris (XXe arr.), mort le 9 mai 2004 à Paris (XIVe arr.) ; représentant de commerce, conseiller social à l’ONU, cadre de l’édition, employé de l’Office général d’éditions et de publicité ; militant socialiste, de la SFIO, de l’UDSR puis du Parti socialiste.

Georges Beauchamp, militant socialiste parisien d’origine juive, a accompagné la carrière politique de François Mitterrand, de l’UDSR au Parti socialiste, il fut durant plus de trente années avec Georges Dayan un de ses plus proches collaborateurs.
Fils de Maurice Beauchamp et de Marie Graciet, Georges Beauchamp aurait adhéré, à l’âge de quinze ans aux Étudiants socialistes en 1932, à la 11e section du lycée Voltaire, puis à la 19e section des JS en 1935. En 1936-1937, il était, selon son témoignage, secrétaire adjoint du secrétaire à la propagande des Jeunesses de la Seine et se situait alors à la gauche du parti, soutenant la tendance pivertiste. Selon le témoignage qu’il fit à Thierry Pfister, il fit la connaissance de François Mitterrand* alors qu’ils étaient tous deux étudiants en droit. Ils « appartenaient l’un et l’autre à la petite minorité des étudiants qui défendaient le professeur Jèze dont les cours étaient systématiquement perturbés parce qu’il avait osé prendre positon en faveur de l’Éthiopie envahie par l’Italie. Pour Mitterrand, il s’agissait là d’un engagement à caractère exceptionnel et qui tendait surtout à préserver la liberté d’expression. Pour Georges Beauchamp, c’était déjà un combat militant, puisqu’il était le responsable du groupe des étudiants socialistes SFIO ». À la lumière des nouvelles connaissances sur François Mitterrand, ce témoignage est naturellement sujet à caution. D’après un témoignage plus tardif, cité par Lacouture, il ne l’aurait rencontré qu’en 1943, par l’intermédiaire de son ami de lycée, Robert Antelme*.
Sous l’Occupation, Georges Beauchamp qui avait obtenu sa licence en Droit appartint au réseau Patrick O’Leary de 1940 à 1942. Il retrouva Mitterrand en 1943 dans la Résistance au sein du Mouvement national des prisonniers de guerre et déportés (MNPGD). Beauchamp, lié à Edgar Morin*, à Robert Antelme et Marguerite Duras*, sans avoir jamais été prisonnier fut pour le mouvement l’un des responsables de la lutte contre le STO dans la région parisienne. Il devait être désigné secrétaire du comité de coordination du MNPGD en 1945 et succéda à Mitterrand à la direction du journal L’homme libre (qui deviendra par la suite Libres), journal liquidé en octobre 1946. Il obtint pour son action la Médaille de la Résistance.
À la Libération, Georges Beauchamp regagna pourtant les rangs de la SFIO qu’il n’avait pas fréquentés durant la guerre, « accaparé par son activité de résistant ». Il se réinscrivit à la 19e section de la SFIO en mars 1945. En liaison avec le secrétariat général du parti, il créa à la Libération, la Fédération nationale des déportés du travail qu’il présida - elle regroupa un temps environ 300 000 adhérents - ainsi que la Confédération internationale des déportés du travail. Il dirigea le journal Soir-Express à cette date.
Georges Beauchamp aurait glissé à Paul Ramadier*, président du conseil qui en janvier 1947 cherchait un représentant de l’UDSR pour son gouvernement, le nom de Mitterrand. Ce dernier, nommé secrétaire d’État aux Anciens combattants et victimes de guerre l’appela à son cabinet. Toujours membre de la SFIO, après la chute du gouvernement Ramadier, il sollicita du parti et de son groupe parlementaire son élection à l’Assemblée de l’Union Française (lettre du 13 octobre 1947 à Guy Mollet, Archives OURS).
Georges Beauchamp fut conseiller à l’ONU le 15 novembre 1947. Puis, il alterna des missions en qualité d’expert gouvernemental (notamment en 1948 auprès du gouvernement hongrois) et la participation à des cabinets ministériels aux côtés de Mitterrand. Il devait, en tant que chef ou chef adjoint, appartenir à tous les cabinets ministériels de celui-ci sous la IVe République, hormis les gouvernements Pierre Mendès France et Mollet. Il fut en effet, en accord avec François Mitterrand, chef de cabinet de Roger Duveau secrétaire d’État UDSR à la France d’outre-mer et sous-secrétaire d’État à la Marine marchande dans le cabinet Mendès France le 22 juin 1954 et dans le cabinet Guy Mollet en février 1956, comme conseiller technique.
Vers 1950, Georges Beauchamp rejoignit l’UDSR au moment où Mitterrand en prenait le contrôle contre Pleven. Au congrès de 1951, il représentait la fédération des Landes, puis il entra à la commission exécutive l’année suivante et, trois ans plus tard, était désigné secrétaire général adjoint (Joseph Perrin* étant secrétaire). Selon Éric Duhamel, « son influence s’est accrue avec la maladie de Joseph Perrin dans les dernières années de la Quatrième République, il est alors un homme clef de l’entourage du président ». Permanent durant trois années, il s’occupait plus particulièrement des fédérations d’outre-mer et des relations avec l’Union Française dans un parti dont plus de la moitié des parlementaires était élue outre Méditerranée. « Présent tous les après-midi au siège national, continue Duhamel, il assure avec Joseph Perrin l’administration de l’UDSR sous la direction de François Mitterrand qui en assure la direction politique ». Il mit au service du président de l’UDSR le réseau des prisonniers de guerre, alors que René Pleven, son prédécesseur, s’appuyait sur les anciens de la Jeune République et les anciens résistants. Il représenta le Parti dans plusieurs consultations électorales : il fut candidat aux cantonales de Saint-Martin-de-Seignaux en 1951 et aux élections législatives de 1956 (dans la 6e circonscription de la Seine) où il se trouva affronter Charles Hernu*. Il n’obtint que 6 541 suffrages sur 447 865 inscrits et 371 902 exprimés.
Georges Beauchamp, comme François Mitterrand, refusa le retour au pouvoir du général de Gaulle en juin 1958. Mais dix députés UDSR sur 14 se rallient à l’ancien chef de la France Libre. Durant l’été, il fut désigné par le président de l’UDSR pour créer des fédérations de l’Union des Forces démocratiques (UFD) qui regroupait les forces démocratiques opposées à la Ve République « afin, écrivait-il, d’occuper la place et éventuellement de revendiquer la paternité d’une liste UFD aux élections de novembre ». En novembre suivant, il fut lui-même candidat UFD aux élections législatives dans la 38e circonscription de la Seine (Clichy, Levallois-Perret). Il obtint 3 185 suffrages sur 78 294 inscrits. L’UDSR s’effondra, se mit en sommeil selon Éric Duhamel, et Georges Beauchamp permanent du Parti depuis trois ans se reconvertit dans la publicité, l’organisation n’ayant plus les moyens de l’employer. De Paris, il dirigea néanmoins Le Courrier de la Nièvre pour son patron politique. Il participa au cheminement de la « petite gauche » : membre de l’Union des forces démocratiques, il aida François Mitterrand qui s’est vu interdire l’entrée au PSA puis au PSU, à lancer en février 1960 la Ligue pour le combat républicain au sein de laquelle se retrouvaient nombre d’anciens de l’UDSR. Formellement, vice-président de l’UDSR depuis 1959, et président de sa fédération de la Seine en 1964-1965, on le retrouvait naturellement dans les multiples structures (pour paraître plus nombreux selon Roland Dumas) où s’organisaient les amis de François Mitterrand : le rassemblement démocratique, dont il a déposé les statuts dès février 1958, le Club des Jacobins, dont il était membre du comité exécutif national en 1964 (il était toujours dans sa direction en 1970) et surtout la Convention des institutions républicaines, dont il était membre de la commission permanente dès 1963. Délégué général du mouvement, il en fut secrétaire général adjoint en 1966 et était membre du présidium en 1968, lorsqu’il se présenta une dernière fois aux élections législatives.
Georges Beauchamp participa également aux colloques socialistes organisés par Georges Brutelle en 1964. « En tant que publicitaire et ami de François Mitterrand, il est l’homme de base » et l’un des principaux membres de l’état-major politique de campagne du « candidat unique de la gauche » en 1965 et du candidat de « l’union de la gauche » en 1974, où il fut plus particulièrement chargé de la propagande filmée.
Membre du comité exécutif de la FGDS, au nom de la CIR à sa fondation en décembre 1965, il participa à la commission d’arbitrage de la fédération en 1968. Il suivit son patron politique au Parti socialiste, où il fut membre de la commission des conflits. Nommé au Conseil économique et social en 1981, il en fut vice-président.
Divorcé de Louise Lenieffe, il s’était remarié le 11 décembre 1950 à Lucette Lebas.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article16014, notice BEAUCHAMP Georges [né ROSENFELD Georges] par Gilles Morin, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 3 août 2019.

Par Gilles Morin

SOURCES : Arch. Nat., F/1a/3253, F/1cII/213 et 292. — Arch. PPo 66 336, BA2/1965. — Arch. OURS, dossier Hauts-de-Seine. — Tribune du Peuple, 8 novembre 1958. — Annuaires des cabinets ministériels, ministère Guy Mollet, 31 janvier 1956, Office français d’éditions documentaires, juillet 1956. — Éric Duhamel, L’UDSR, 1945-1965, thèse d’histoire, Université de Paris IV, 1993. — Thierry Pfister, Les socialistes, Albin Michel, 1977. — Pierre Péan, Une jeunesse française, François Mitterrand, 1934-1947, Paris, Fayard, 1994. — Jean Lacouture, Mitterrand, une histoire de Français, Paris, Seuil, 1998, tome I. — Recherches socialistes, n° 27, juin 2004.

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