BAGINSKI Berek

Par Daniel Grason

Né le 30 octobre ou le 31 décembre 1902 à Radzilow région de Poldachie (Pologne) ; déporté le 31 juillet 1943 à Auschwitz (Pologne), rentré de déportation ; ébéniste ; communiste, militant de la Main-d’œuvre immigrée immigrée (M.O.I.).

Berek Baginski.
Berek Baginski.

Fils de Chaïm et de Chaja, née Tentkowski, Berek Bagisnki vint travailler en France. Il séjourna à Metz en Meurthe-et-Moselle du 4 février 1926 au 29 novembre 1928. Il demanda d’accéder à la naturalisation Française, le Préfet donna un avis favorable. Il travailla successivement à Jezainville, Mont-Saint-Martin puis Longwy. Une enquête préfectorale de février 1932 concluait : « il n’a fait l’objet d’aucune remarque particulière tant du point conduite moralité et fréquentations qu’au point de vue national. » Mais une autre note de mai 1932 le signalait « comme s’occupant de propagande extrémiste. » Sa demande de naturalisation a été ajournée.
Berek Baginski quitta la Meurthe-et-Moselle avec Esther Binder, sa compagne qui exerçait la profession de couturière. Le couple demeura dans le XXe arrondissement au 20, rue de la Mare, 37 rue des Couronnes, puis 44 rue de Pixéricourt. Ouvrier ébéniste il travaillait à la maison Katz 20 rue Montcalm à Paris (XVIIIe arr.) puis chez Stark. La Préfecture de police de Paris l’appréciait ainsi : « Il semble avoir perdu tout esprit de retour en Pologne et sollicite la naturalisation parce qu’il a l’intention de se fixer définitivement dans notre pays et pour bénéficier des avantages accordés aux citoyens français. »
« Il parle assez bien notre langue et son assimilation à nos mœurs et coutumes est bonne. Sans infirmité apparente et paraissant jouir d’une bonne santé, il pourra peut-être le cas échéant rendre des services à notre pays. »
« Baginski est connu aux archives centrales pour avoir été signalé en octobre 1930 par le Préfet de la Moselle, comme propagandiste communiste. Une enquête effectuée en juillet dernier, il ressort que cet étranger ne s’est pas fait remarquer à Paris, soit dans des réunions, soit s’occupant de politique avancée. […] Il lit le journal juif La journée parisienne et achète de temps en temps le journal l’Excelsior. »
En 1929, le couple demeura dans le XXe arrondissement 20, rue de la Mare, 37 rue des Couronnes, puis 44 rue de Pixéricourt. Il épousa Esther Binder le 6 août 1929 à Paris en mairie du XXe arrondissement. Le couple eut une fille Louise, puis un garçon né le 3 janvier 1931 à Paris (IVe arr.), prénommé Gaston, il mourut le 7 mai 1931 à Paris (XXe arr.).
La famille vivait 94 rue de l’Ourcq à Paris (XIXe arr.). Il travaillait comme ébéniste à Bagnolet, se syndiqua à la CGT en 1936. Il fréquentait la bibliothèque de la « Ligue de la culture juive » , versait aux collectes organisée par le Secours rouge international (SRI), lisait La Vie Ouvrière.
Il s’engagea comme volontaire étranger pour la durée de la guerre, il a été mobilisé le 25 décembre 1939 en qualité d’ouvrier à l’arsenal de Roanne (Loire), il fut libéré après l’exode. Après la promulgation du statut des juifs du 3 octobre 1940 et du 2 juin 1941, Berek Baginski estima plus prudent de se munir de faux-papiers au nom de Jean Bardini. La famille quitta Paris pour le 253 rue de Rosny à Montreuil-sous-Bois (Seine, Seine-Saint-Denis), le logement étant trop petit pour y entreposer tous leurs meubles, Berek loua une chambre 70 rue Curial (XIXe arr.).
Lors de la filature d’Abram Besserman dit Alfred des inspecteurs de la BS2 repérèrent Berek Baginski. Le 8 juillet 1943 vers 17 heures, trois inspecteurs l’interpellaient sur son lieu de travail 53 rue de Paris à Bagnolet (Seine, Seine-Saint-Denis). La perquisition des différents lieux où il habita avec sa femme et sa fille fut très maigre, aucun tract. Seule charge, les fausses cartes d’identité et les cartes d’alimentation au nom de Baginski qui ne portaient pas la mention « Juif ».
Quant à sa relation avec Abram Besserman, Berek Baginski expliqua qu’il le rencontra lors de vacances en 1935 à Roissy-en-Brie et qu’ils jouèrent à la belote ensemble. Ils se rencontrèrent en 1939 au bureau des engagements de volontaires étrangers et enfin récemment « incidemment » à Montreuil-sous-Bois où Besserman lui demanda s’il connaissait quelqu’un pour un déménagement. Baginski demanda ce service à l’un de ses camarades employé dans une maison qui disposait d’un cheval et d’une charrette.
Détenu au dépôt, son interrogatoire eut lieu dans les locaux des Brigades spéciales à la préfecture de police. Berek Bagisnki nia tout engagement politique. Les policiers sortirent une fiche d’octobre 1930 où il était signalé comme « propagandiste communiste », il répondit « Je m’inscris en faux contre les renseignements trouvés à mon dossier ». Il reconnut son engagement en 1936, mais affirma « Comme tous les ouvriers, et pour n’être pas montré du doigt après 1936, je versais aux collectes faites par le SRI [Secours Rouge International] ». Les policiers saisirent les quatre mille cinq cents francs d’économies du ménage. Tous les militants juifs arrêtés dans cette opération furent frappés, certains torturés.
Interné au camp de Drancy sous le matricule 3228, Berek Baginski était le 31 juillet 1943 dans le convoi n° 58 à destination du camp d’extermination d’Auschwitz (Pologne). Il prit part à organiser la Résistance ainsi qu’Esther, l’Armée Soviérique libéra Auschwitz le 27 janvier 1945, du transport n° 58 d’un millier d’hommes et de femmes, vingt-huit survécurent dont Berek et Esther Baginski, Genendel Goldsztajn, Hadassa Lerner, Rose Besserman, Rywka Grynberg, ainsi que Maurice Honel, ex-député communiste de Clichy-Levallois (Seine, Hauts-de-Seine).
La commission d’épuration de la police d’un des inspecteurs de la BS2 qui arrêta Berek Baginski siégea le 22 décembre 1944, le camp d’extermination d’Auschwitz n’avait pas été libéré. Il en a été de même quand une commission rogatoire auditionna les victimes ou/et leurs familles le 19 mars 1945. Le greffier nota : « Ces deux personnes, connues de leur concierge, sous le nom de Bardini, ne sont plus reparues à leur domicile depuis leur arrestation et leur trace n’a pût être retrouvée dans les différents services de la Préfecture de police (Prisons et Fusillés). Il s’agit deux Israélites ».
Il déposa le 1er octobre 1945 : « J’ai été arrêté le 8 juillet 1943, sur mon lieu de travail pour activité patriotique par plusieurs inspecteurs parmi lesquels je reconnais formellement G… et R… […] J’ai été conduit dans les locaux des Brigades spéciales des Renseignements généraux où j’ai été détenu pendant dix jours. […] Pendant mon séjour aux Brigades spéciales, j’ai été frappé à coups de nerf de bœuf sur tout le corps par B…, C… et R… C… m’a porté un coup de poing au visage qui m’a cassé une dent. ».
La perquisition à l’atelier et au domicile de Berek Baginski a été négative. Les inspecteurs dérobèrent un costume, un pardessus en velours, un bracelet montre, un stylo et un porte-mine de marque Waterman, du linge de corps, quarante paquets de gauloises et du ravitaillement. Il porta plainte contre les inspecteurs qui l’arrêtèrent et contre ceux qui le frappèrent et qui se rendirent coupables de vol.
Berek Baginski a été homologué Déporté interné résistant.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article160544, notice BAGINSKI Berek par Daniel Grason, version mise en ligne le 25 septembre 2017, dernière modification le 14 janvier 2020.

Par Daniel Grason

Berek Baginski.
Berek Baginski.

SOURCES : Arch. PPo. BA 2298, GB 130, Ia 11, KB 90, 77 W 3112. – Bureau Résistance GR 16 P 27202. – David Diamant, Par-delà les barbelés, 1986. – Site internet CDJC.

PHOTOGRAPHIE : Arch. PPo. GB 171, cliché du 9 juillet 1943.

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