BARANOWSKI Riva

Par Daniel Grason, Gérard Larue

Née le 28 août 1907 à Bolgrad en Bessarabie (Roumanie, Union soviétique, Ukraine), morte le 17 juin 1991 à Colombes (Hauts-de-Seine) ; ingénieur chimiste ; communiste ; militante du groupe de langue roumain de la Main-d’œuvre immigrée (M.O.I) ; résistante FTP-MOI ; déportée à Ravensbrück (Allemagne).

Fille d’Ira, médecin et de Ciarna, née Canda, Riva Baranowski arriva en France le 22 octobre 1929 pour poursuivre des études de chimie. Comme sa sœur Fanny, elle était mélomane. Elle possédait une équivalence du baccalauréat et un certificat des Arts et Métiers, militait au groupe de langue roumain de la M.O.I.
Depuis le 1er décembre 1941, elle travaillait comme chimiste dans une entreprise de Courbevoie, demeurait 5 rue Guynemer prolongée à Vincennes (Seine, Val-de-Marne). Elle entra dans les FTP-MOI en juin 1942, fut chargée d’accueillir des responsables des FTP- MOI dans son logement pour des réunions de travail.
Le 7 décembre 1942 une réunion de la direction des FTP-MOI était prévue avec Boris Holban dit Roger, Karel Stefka dit Carol et Joaquim Olaso dit Emmanuel. Riva Baranowski devait accrocher un torchon à sa fenêtre pour signifier aux visiteurs que la voie était libre. Quand Boris Holban arriva le 6 vers 20 heures en bas de la demeure, pas de torchon… Il croisa Luiba Bacicurinski, sœur d’un des médecins des FTP, elle lui lança : « Fous le camp d’ici, il y a la police ». La veille, le 5 les policiers de la BS2 avaient arrêtés Olaso, terriblement torturé, il livra l’adresse.
Le 5 décembre les policiers de la BS2 perquisitionnaient le domicile de Riva Baranowski, ils saisissaient une cinquantaine de pièces dont des tracts édités par l’organisation communiste, huit certificats ou diplômes au nom du docteur Aron Bacicurinschi, des lettres manuscrites, deux feuilles avec des noms, quatre photographies dont celle d’Edmond Hirsch, un manuel du Gradé d’Infanterie de 1942, un cours de topographie générale, des feuilles de cours sur l’attaque d’infanterie avec appui de tanks, une lettre indiquant les hôtels réquisitionnés par les autorités allemandes, une lettre sur la situation des FTP, des comptes rendus sur l’activité des FTP etc.
Interrogée par les Brigades spéciales elle déclara avec aplomb : « J’ignorais complètement la présence des documents à mon domicile ». Les policiers lui présentèrent les photographies de Matuch (Karel Stefka) et Olaso, elle affirma ne pas les connaître. « Je n’ai jamais appartenu à un parti politique quelconque ». Elle expliqua que les papiers déposés à son insu devaient appartenir à son ami Marcel Kiarta né en Hongrie. Elle expliqua qu’elle l’avait vu lire les manuels d’infanterie et qu’il était venu avec des amis sans lui présenter, qu’ils conversèrent hors de sa présence. D’autres papiers concernaient son itinéraire professionnel notamment à Blois (Loir-et-Cher).
Riva Baranowski fut livrée aux Autorités allemandes, elle a été incarcérée à la prison de Fresnes.
Le 26 janvier 1943 Riva Baranowski était dans un wagon de cinquante-huit détenues qui partit de la gare de l’Est à destination de Sarrebruck, le 30 les prisonnières étaient envoyées au camp de Ravensbrück (Allemagne). Elle fut transférée à Mauthausen (Autriche), matricule 21650 elle fut libérée avec quarante-neuf autres détenues le 22 avril 1945 par la Croix-Rouge internationale.
Le 24 septembre 1945 elle témoigna devant la commission d’épuration de la police. Elle déclara : « J’ai été arrêtée la 7 décembre 1942 à mon domicile en raison de mon activité au sein de la Résistance par les inspecteurs B… et C… que je reconnais formellement sur les photographies qui me sont présentées. »
« J’ai été conduite dans les locaux des Brigades spéciales des Renseignements généraux où j’ai été détenue pendant une huitaine de jours. J’ai été remise aux Autorités allemandes qui m’ont incarcérée à la prison de Fresnes. »
« Le 26 juillet 1943, j’ai été déportée au camp de Ravensbrück d’où j’ai été libérée le 22 avril 1945 par la Croix-Rouge internationale. »
« Pendant mon séjour aux Brigades spéciales, j’ai été frappée à coups de nerf de bœuf par les inspecteurs Barrachin, Bouton, D…, et Le M... Je me suis évanouie et j’ai été transportée dans la salle où j’étais détenue où interdiction a été faite aux gardiens de la paix de me donner à boire. J’ai entendu l’un des inspecteurs dire aux agents de me laisser crever comme cela. »
« Le 26 juillet 1943, j’ai été déportée au camp de Ravensbrück d’où j’ai été libérée le 22 avril 1945 par la Croix Rouge internationale. »
Elle porta plainte contre les inspecteurs qui l’arrêtèrent, et notamment contre ceux qui la frappèrent et ceux qui se rendirent coupables de vol de linge et de ravitaillement à son domicile.
Jugé, Gaston Barrachin avait dans l’exercice de ses fonctions été un « violent » écrivit Jean-Marc Berlière « Ses interrogatoires se terminent parfois tragiquement. Le groupe qu’il dirigeait fut l’un des plus actifs. Pourchassant inlassablement les « communo-terroristes », les interrogeant avec violence, il a commis de gros dégâts. Jugé en octobre 1945, Barrachin est condamné à mort et fusillé [au fort de Chatillon], non sans avoir tenté, aidé de sa fille, de se battre jusqu’au bout sur le terrain politique. »
Madame Gisèle Provost à très bien connue Riva Baranowski, elle se souvient : « Elle parlait couramment le russe, le yiddish et l’allemand ce qui facilitera son action militante. Elle devait entre autres dissimuler des armes dans des caches. »
« Elle a été renversée par une voiture et a eu une brève amnésie du présent mais un violent retour du passé, de sa période Ravensbrück qu’elle a dû revivre, une grande souffrance dont a témoigné son entourage. »
« J’ai dû être la dernière à voir Riva, très amaigrie, la veille de sa mort. Je l’ai reconnue à ses yeux. »
« Fanny sa sœur et Riva étaient très mélomanes, elles lisaient beaucoup. »
« Riva était affable, coquette (toujours quelques broderies ukrainiennes), souriante. C’était une belle personne. »

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article160864, notice BARANOWSKI Riva par Daniel Grason, Gérard Larue, version mise en ligne le 22 juin 2020, dernière modification le 22 novembre 2022.

Par Daniel Grason, Gérard Larue

SOURCES : Arch. PPo. BS2 carton 20, PCF carton 14 rapports hebdomadaires sur l’activité communiste. 77 W 5351-292132. – Bureau Résistance GR 16 P 30984. – Jean-Marc Berlière avec Laurent Chabrun, Les policiers français sous l’occupation, Éd. Perrin 2001. – Boris Holban, Testament. Après 45 ans de silence, le chef militaire des FTP-MOI de Paris parle…, Calmann-Lévy, 1989. – Gaston Laroche (Boris Matline), On les nommait des étrangers. Les immigrés dans la Résistance, ÉFR, 1965. – Livre-Mémorial, FMD, Ed. Tirésias, 2004. – État civil site Match ID. – Nos remerciements à madame Gisèle Provost pour les informations qu’elle nous a communiquées le 9 octobre 2020 sur la vie de Riva Baranowski après la guerre.

Photographie : collection particulière

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