Par Claude Pennetier
Né le 15 novembre 1905 à Blois (Loir-et-Cher), mort le 26 avril 1983 à Bobigny (Seine-Saint-Denis) ; ouvrier puis employé de mairie à Bagnolet (Seine) ; militant syndicaliste CGT ; militant communiste ; élève de l’ELI à Moscou ; volontaire en Espagne républicaine.
Lucien Bécret était d’une famille de souche paysanne. Son père, charpentier en bois, était venu travailler dans une usine de cuirs emboutis à Bagnolet (Seine). Sa mère, fille de ferme, d’une famille de sept enfants, était malade alités depuis 1928. Un frère fut tué au début de la Première Guerre mondiale. Sur l’acte de naissance, le métier des parents est « journalier » et « journalière ».
Élève à l’école primaire de Bagnolet, il obtint en juin 1917 son certificat d’études. En juillet 1918, il fut apprenti dans une usine de chaussures et y apprit le métier de cordonnier qu’il exerça jusqu’à son service militaire. Incorporé en novembre 1925 dans un régiment de travailleurs malgaches à Reims, il y resta quatre mois avant de passer sept mois au Maroc où il ne « monta pas en colonne » car il travailla comme cordonnier. En octobre 1926, à sa libération, il travailla dans une usine de cuirs emboutis de Bagnolet, d’où il fut renvoyé le 13 juillet 1929 pour avoir tenté de créer une section syndicale. D’août 1929 à mars 1930, il travailla dans une usine de carrosserie de Levallois. De mars 1930 au 6 août 1931, il fut emprisonné, et ensuite employé communal à Bagnolet.
Militant depuis 1928 de la Libre pensée révolutionnaire (Travailleurs sans Dieu), il y fit la connaissance du docteur Galpérine qui le parraina lors de son adhésion au Parti communiste en août 1929. En tant que gérant de l’Humanité, il fut condamné par la 13e Chambre correctionnelle de Paris, et en appel, pour provocation de militaires à la désobéissance dans une page du quotidien communiste du 29 janvier 1930. À la prison de la Santé où il passa quinze mois avant d’être envoyé trois mois à la centrale de Clairvaux, il s’éduqua politiquement sous la direction des co-détenus Henri Varagnat*, Nguyen Van Tao* et Gustave Galopin* qui avaient organisé une école du Parti. Il connut alors René Arrachart*, Gaston Monmousseau*, Henri Gourdeaux*, Alfred Costes*, Gabriel Péri* et André Marty qui étaient inculpés dans le « complot » de 1929. Bécret était responsable du contrôle des journaux de cellules.
Militant du Parti communiste (cellule des Communaux) depuis août 1929, il passa par l’École léniniste internationale à Moscou de décembre 1932 et ce jusqu’en avril 1934 .Mais ceci ne plait pas à Eugen Fried * qui dans une note du 2 juin 1933 le présentait comme « un élément en qui on ne peut pas avoir confiance ». De ce fait une note du 26 mars 1934 de l’OMS (département des liaisons internationales) de l’IC (internationale communiste) demande d’organiser son retour.
Il fut secrétaire du rayon de Bagnolet-Pantin de 1930 à 1937 et aurait participé au congrès de Villeurbanne (Rhône) du Parti communiste (22-25 janvier 1936). Il était début 1938 membre du comité régional de l’Est parisien.
Muni d’une expérience de caporal dans les tirailleurs sénégalais, Lucien Bécret se porta volontaire en Espagne républicaine le 3 avril 1938 via Massanet. Incorporé à la 14e BI où il assurera la fonction de secrétaire d’organisation du comité de la 3e Cie du 2e Bataillon.De mai à septembre 1938 il prend part aux combats de l’Ebre Campredo,Corbera côte 356, Durant son engagement il adhéra au SRI ainsi qu’aux Amis de l’Union Soviétique. Combattant du bataillon « Vaillant-Couturier » de la 14e Brigade internationale la Marseillaise, il fut rapatrié, avec le gros du contingent français, le 12 novembre 1938.
Une note du comité central du PCE datée du 22 octobre 1938 signée Bigouret qualifie Lucien Bécret de « très bon cadre » « a eu un moment de faiblesse,s’est bien racheté au dernier front,très courageux » « très travailleur, très bon activiste dans sa compagnie » « responsable du parti dans sa compagnie à fait un bon travail politique et d’organisation »
Note provenant de la Brigade non datée et non signée le qualifiant ainsi : « bonne éducation politique , un peu sectaire et porté à acepter tout les réclamations des camarades au lieu de leur donner des explications. A eu une faiblesse en descendant du front le 25 septembre mais fait depuis un très bon travail politique. Très courageux au front.
Lucien Bécret manifesta son désaccord au Pacte germano-soviétique de manière ostensible et en faisant connaître sa prise de distance au parti.
Prisonnier en Allemagne pendant la guerre, selon le témoignage de Paul Colombe, mais non confirmé par d’autres sources, il se serait évadé et se serait retrouvé en Yougoslavie, au côté de la résistance. Il ne fut pas réintégré au PCF à la Libération. Il aurait cependant versé l’équivalent de sa cotisation pendant trente ans avant d’être discrètement repris, donc quelques années avant sa mort.
Lucien Bécret avait cependant la confiance du maire, Paul Coudert, puisqu’il devint chef de bureau et responsable du garage municipal et qu’il fut président d’une association d’anciens combattants (l’ARAC ?). Il était par ailleurs membre de l’AVER.
La rumeur locale disait qu’il avait fait allégeance à Pétain pour expliquer sa mise à l’écart. Mais, d’après Marcel Picard, cela n’était pas crédible car, prisonnier en Allemagne, il n’était pas soumis aux mêmes pressions que les internés en France.
Lucien Bécret habitait toujours Bagnolet en 1978 et avait conservé une bonne image dans la ville : « honnête, sympathique, franc... » (Marcel Picard)
Il s’était marié le 2 juillet 1949 à Bagnolet avec Eugénie Gaudet.
Par Claude Pennetier
SOURCES : Arch. RGASPI, Moscou, 495 270 4925, autobiographies de novembre et décembre 1932 ; note d’Eugène Fried du 2 juin 1933 ; documents sur séjour à Moscou (décembre 1932-mars 1934) ; 545/6. ; RGASPI F. 545. Op.6 D.36. D.1044.D.1073) 4. — Arch. AVER — La Voix de l’Est. — Renseignements recueillis auprès de Jacqueline Chonavel, ancienne maire de Bagnolet, et fournis par Marcel Picard. — Notes de Démétrio Gonzale.