PUCCINI Louis

Par Jacques Girault

Né le 17 novembre 1919 à Vecchiano (Italie, province de Pise), mort le 23 novembre 2000 à La Seyne (Var) ; ouvrier et comptable ; secrétaire de la fédération communiste du Var (1964-1971), conseiller municipal de La Seyne (Var).

Marié à une infirmière formée par les soeurs catholiques, son père, socialiste italien, blessé de guerre à Caporetto, adjoint au maire de sa commune Filetolle, vint à plusieurs reprises clandestinement à La Seyne, pour occuper divers emplois (chantiers de démolition, création avec deux autres Italiens d’une coopérative de terrassement, ouvrier agricole jardinier). Installé en 1923 avec sa famille, dans le quartier du Pin de Grune, près des Mouissèques, parlant Italien avec son épouse catholique, mais tenant à ce que ses deux enfants apprennent le Français, il avait placé dans sa maison le portrait de Matteoti à côté de celui de la Madone. Trésorier de la section socialiste italienne organisée au sein d’une coopérative "Fratellanza operaia", interné en 1940, il mourut accidentellement deux ans plus tard.

Louis Puccini fréquenta l’école François Durand (maternelle et primaire) et obtint le certificat d’études primaires en 1930. Il entra à l’école primaire supérieure Martini jusqu’en troisième et échoua au brevet élémentaire. Il suivit les cours de catéchisme mais, dépourvu de certificat de baptême, ne put faire la communion. Il entra comme employé dans la société des autobus Étoile en 1935. Syndiqué en 1936, sympathisant des Jeunesses communistes, il voulut s’engager dans les Brigades internationales mais se heurta au refus de son père. Licencié après la grève du 30 novembre 1938, il connut une longue période de chômage puis devint facteur auxiliaire à la poste en remplacement des mobilisés.

À la déclaration de guerre, il contracta un engagement qui lui permit d’acquérir la nationalité française, le 25 octobre 1939. Sa feuille de route ne lui parvint que le 10 juin 1940 ; il ne répondit pas à la convocation. Il exerça alors différents métiers (manœuvre-maçon, gratteur de rouille, manoeuvre métallurgiste, peintre de carénage, peintre sous-marin, aide-ajusteur dans l’entreprise Terrin de Marseille). Travaillant depuis quelques mois aux chantiers maritimes du Midi, il entra aux Forges et chantiers de la Méditerranée en mars 1942 comme apprenti soudeur à l’arc puis devint grutier. En contact avec des ouvriers communistes clandestins, il participa en octobre 1942 à un rassemblement d’une quarantaine d’ouvriers qui voulaient ainsi manifester leur opposition au départ de travailleurs français vers l’Allemagne.

Sur le conseil de Blanchenoix, qui avait été exclu du parti pour menées trotskistes, il adhéra au Parti communiste en février 1943. À partir de l’été 1943, ces militants se donnèrent comme but de pénétrer dans l’organisation syndicale officielle, de la noyauter pour en prendre la direction. Une telle tactique réussit en octobre 1943 et Puccini devint un des trois responsables du syndicat. À partir d’un arrêt de travail d’une demi-heure pour réclamer une meilleure nourriture, le 10 novembre 1943, des actions syndicales s’accélérèrent contre les directions française et allemande des chantiers : organisation de grèves (11 novembre 1943, 21 mars, 11-17 juillet 1944), de manifestations consécutives aux bombardements (1er, 14 mai 1944). Puccini participa à la fin du mois de janvier à la reconstitution à Marseille de l’intersyndicale clandestine des métaux. La même année, toujours membre du secrétariat du syndicat, épisodiquement secrétaire de la cellule communiste, membre du trio de direction de la section communiste de La Seyne, membre du comité local de Libération, il devint le gestionnaire de la cantine de son entreprise, poste essentiel en cette période de pénurie.

Affecté dans les chasseurs alpins à Digne (Basses-Alpes) de mai à décembre 1945, Louis Puccini participa à la surveillance des prisonniers allemands. Il se maria en décembre 1945 à La Seyne avec une ouvrière calqueuse aux Forges et chantiers de la Méditerranée, qui fut membre du Parti communiste français pendant quelques années.

Louis Puccini ne réintégra pas les chantiers et travailla comme comptable dans la société des Grands Travaux de Marseille, chargée du creusement de l’émissaire. Secrétaire du syndicat, il fut limogé à la fin de 1947 après les grèves. Il resta par la suite au chômage, travaillant épisodiquement (entreprise de bâtiment, vendanges), s’occupant des chômeurs. Il entra comme comptable à la société des câbles sous-marins où il resta jusqu’à son renvoi à la fin de 1951.

Louis Puccini était devenu secrétaire non-permanent de l’Union locale CGT depuis la fin de 1946 et siégeait au bureau de l’Union départementale CGT. Le secrétariat du Parti communiste ratifia sa candidature, présentée par la Fédération communiste du Var, pour une école centrale d’un mois, le 24 janvier 1950.

Sans travail, Louis Puccini devint alors permanent. Lors des premières arrestations des responsables syndicalistes au moment de ce qui allait devenir « le complot » (mai-juillet 1952), il devint un des secrétaires de l’Union départementale CGT. Il ne répondit pas à la convocation du juge d’instruction Roth. La fédération communiste proposa la candidature de Puccini, alors membre du comité fédéral, pour une école centrale de quatre mois. Le secrétariat du parti la refusa dans un premier temps, le 11 février 1954, puis la ratifia le 27 novembre 1954. Deux ans plus tard, le secrétariat du 19 avril 1956 lui proposa de devenir correspondant de l’Humanité en Italie car il fallait des journalistes connaissant bien la langue italienne. Il effectua un stage de trois semaines dans le journal puis renonça au bout de quelques semaines à ces fonctions qui ne correspondaient pas à ses intérêts.

Puccini reprit ses activités militantes dans le Var, partageant son temps entre l’UD CGT dont il resta secrétaire jusqu’en 1964 et la Fédération communiste dont il devint rapidement membre du bureau fédéral. Régulièrement reconduit dans ces responsabilités, membre du bureau de la section communiste de La Seyne, il connaissait bien les rapports tumultueux entre le parti et le maire communiste Toussaint Merle ; il fut un des éléments-clefs de la tentative du parti pour contrôler le maire. Après de longues discussions au sein de la direction de la fédération communiste, Puccini, mis en demeure d’abandonner le secrétariat de l’UD, devint secrétaire de la section communiste de La Seyne en août 1964 tout en étant embauché comme ouvrier dans une entreprise travaillant pour la mairie. Élu conseiller municipal sur la liste d’ « Union républicaine de défense des intérêts communaux de réalisations sociales pour l’élimination du pouvoir personnel, pour la démocratie », qui réunissait, le 14 mars 1965, 9387 voix sur 17 161 suffrages exprimés, il n’accomplit qu’un mandat. Il eut dans cette période de nombreuses rencontres avec Juliette Dubois, la dirigeante communiste qui suivait les questions municipales, et avec Jean Capievic qui suivait la fédération varoise. Il participa aux rencontres entre le maire et la direction fédérale. Mais il eut aussi à aider les communistes des Forges et chantiers de la Méditerranée où une section communiste fut créée en 1965. Globalement, son action fut appréciée par la direction du Parti. Se posait depuis novembre 1964 la question du remplacement du premier secrétaire fédéral François Golési. Il fallait procéder à une réorganisation de la direction fédérale. Puccini devint secrétaire fédéral adjoint après la conférence fédérale des 19-20 juin 1965. Sept mois plus tard, il devenait le responsable de la propagande.

Pour permettre la future désignation de Maurice Paul comme successeur de Toussaint Merle comme candidat au conseil général, premier pas vers la municipalité, une permutation de responsabilités se produisit. Paul devint secrétaire de la section communiste et fut déchargé de ses responsabilités au sein du secrétariat fédéral. Puccini fut désigné comme premier secrétaire fédéral lors de la réunion du comité fédéral du 25 mars 1966. Il eut notamment à organiser la solidarité avec les Vietnamiens et une grande manifestation à La Seyne, qui lui valut un puissant mouvement de protestations des anciens d’Indochine et un désaveu de Raymond Guyot qui suivait la fédération. Après avoir dirigé l’action des communistes varois au printemps 1968, il approuva l’intervention soviétique en Tchécoslovaquie, comme une bonne partie des responsables communistes varois, qui finirent par accepter la « réprobation » décidée par la direction du Parti. Il encouragea la collecte de souvenirs sur les premières années du Parti communiste dans le Var, publiés en 1970 à l’occasion du cinquantième anniversaire de la naissance du parti. Il écrivit la préface de cette plaquette. Il participa à une délégation d’études du PCF en Yougoslovaquie, conduite par Raymond Guyot, en juin-juillet 1970.

En octobre 1970, le Parti, après des informations transmises par Raymond Guyot qui suivait toujours la fédération varoise, lui reprocha ses méthodes de direction jugées trop personnelles. Il demanda à la fin de l’année à quitter le secrétariat fédéral. Dans un rapport, le 11 décembre 1970, Guyot notait qu’il prétextait « une lassitude, un manque de confiance en lui, un trop grand nombre de questions difficiles qu’il a eu à résoudre et qui laissent des traces dans ses rapports avec un certain nombre de camarades ». Aussi concluait-il, « en vérité, je crois qu’il est dépassé et qu’il en prend conscience. Nous ne devons pas nous opposer à son désir ». Pendant quelques mois, en fait, la fédération communiste fut dirigée par Guyot, notamment lors de la préparation des élections municipales. Après s’être éloigné quelques semaines en juillet 1971, isolé dans un appartement du quartier du Mourillon propriété de l’institutrice communiste d’Hyères Jeanne Détruit, Louis Puccini fut remplacé lors de la conférence fédérale, alors qu’il avait refusé lors d’une rencontre avec Guyot de présenter un rapport à tonalité autocritique.

Puccini fut embauché par la Mutuelle des travailleurs varois peu après. Il y travailla jusqu’en 1981 et prit part aux débats internes à la Mutualité varoise qui ne s’achevèrent qu’avec la rupture en 1985.

Habitant toujours La Seyne, Louis Puccini appartenait à une cellule de quartier tout en adhérant à l’Amicale des Vétérans du PCF. Il présida pendant cinq ans, jusqu’en 1993, l’amicale de la Confédération nationale des locataires du groupe HLM Prairial. Il écrivit une brochure de 39 pages, La Seyne et la Résistance. Les Forges et chantiers de la Méditerranée 1942-1944, période et faits vécus par un militant (CGT clandestine). Il participa à une conférence organisée par la section de La Seyne de l’Association nationale des anciens combattants de la Résistance, le 27 mai 1998, publiée sous le titre 1938-1944. Une étape de la longue lutte des salariés des Forges et chantiers de la Méditerranée. Dans les années 1990, il contestait ouvertement les orientations générales du PCF et décida de renvoyer sa carte au début de l’année 2000.

 

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article161721, notice PUCCINI Louis par Jacques Girault, version mise en ligne le 26 juillet 2014, dernière modification le 2 février 2018.

Par Jacques Girault

SOURCES : Arch. Nat., AN F 7 15371. — Arch. com. La Seyne. — Arch. Parti communiste français. - Presse locale. - Témoignage de l’intéressé. — Sources orales. — MARRAS (Fred), 1939-1945 Dans la tourmente de la ville, Brive, Éditions du Ver luisant, 2001, 334 p. — Note de Marc Giovaninetti (fonds Guyot 283 J 32 aux Arch.Dép.Seine-Saint-Denis).

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