LEIDER Arnold [Pseudonyme : Jean]

Par Daniel Grason

Né le 9 octobre 1908 à Zloczow (Pologne, Union soviétique, Ukraine), mort en 1993 en Pologne ; technicien radio ; communiste ; militant de la Main-d’œuvre immigrée (M.O.I.) ; résistant déporté.

Arnold Leider épousa Geneviève Daude, institutrice, tous deux étaient membres du parti communiste. Juif polonais, Arnold Leider, milita au sein de la sous-section juive du parti communiste, pendant la guerre, il devint responsable de la Main-d’œuvre immigrée pour la province, demeurait 16 rue Brissard à Clamart, puis au 11 rue du Moulin-de-Cage à Gennevilliers (Seine, Hauts-de-Seine).
Révoquée de l’enseignement pendant la guerre, Geneviève Leider devint employée dans un laboratoire. Elle fut arrêtée le 21 février 1941 en même temps que dix-neuf militants pour la plupart de Gennevilliers. Tous comparaissaient le 21 octobre 1941 devant la Section spéciale la cour d’Appel de Paris, Geneviève Leider fut condamnée à six ans de travaux forcés, emprisonnée, déportée à Ravensbrück le 13 mai 1944, elle revint.
Joseph Dawidowicz commissaire politique des FTP-MOI de la région parisienne, responsable aux effectifs, coordonnait le travail politique, disposait de liaison avec la direction de la M.O.I. et avec celle des FTP, il en était également le trésorier, un poste clef. Il fut identifié lors d’une filature le 18 octobre 1943, arrêté le 26 par des inspecteurs de la BS2, les policiers saisissaient notamment des listes d’effectifs, des comptes rendus d’activité de la M.O.I., un état numérique dactylographié des divers détachements, deux comptes rendus d’activité du 1er au 20 août 1943 etc.
La direction des Renseignements généraux avait décidée avant son interpellation d’une opération d’ensemble contre les militants de la M.O.I et des FTP-MOI le 17 octobre 1943. L’interpellation de Dawidowicz ne fut donc pas l’élément à l’origine d’un vaste coup de filet contre les résistants de la M.O.I.
Les policiers arrêtèrent le 17 octobre soixante-sept militants dont Arnold Leider et Guta Rosenstein appelée parfois Sténia Bonder, ils furent interpellés par quatre inspecteurs de la BS2 au 9 avenue Charles V à Nogent-sur-Marne (Seine, Val-de-Marne). Il présenta une carte d’identité au nom de Roger Colombier, elle ne fit pas illusion.
Pendant une quinzaine de jours il fut interrogé dans les locaux des Brigades spéciales salle 36, battu à coups de nerf de bœuf à plusieurs reprises, puis livré aux Allemands qui l’incarcérèrent à la prison de Fresnes. Le 12 mai 1944, un convoi de deux mille soixante-treize hommes quittait Compiègne (Oise) à destination de Buchenwald (Allemagne), le plus important de tous les transports. Huit déportés s’évadèrent à Commercy (Meuse), dont deux furent tués par un SS, quatorze moururent lors du trajet, où le 14 mai à l’arrivée.
Arnold Leider fit partie du Comité militaire clandestin de Buchenwald. Le 11 avril 1945 dans l’après-midi, l’armée américaine conduite par le général Patton libérait Buchenwald. Un Comité militaire clandestin international l’accueillit. Le Comité des intérêts français était composé de : Frédéric-Henri Manhès, Albert Forcinal, Marcel Paul, Robert Darsonville et Jean Lloubes représentaient les français au sein de ce comité précisa Olivier Lalieu dans son ouvrage La zone grise ? La résistance française à Buchenwald. Arnold Leider matricule 43349, était parmi les mille cent trente-neuf survivants du convoi (55%).
Dans 1945 La découverte, Annette Wieviorka soulignait : « c’est avec l’arrivée du résistant communiste Marcel Paul, en mai 1944, qui devient l’interlocuteur des dirigeants allemands, que le parti communiste français s’organise véritablement à Buchenwald et qu’il rassemble d’autres courants de la Résistance dans le Comité des intérêts français. Désormais, le Comité est à présent dans l’organisation de résistance du camp et peut protéger certains détenus. »
Arnold Leider témoigna le 14 mai 1945 devant la commission d’épuration de la police, il reconnut sur photographies les trois inspecteurs qui l’arrêtèrent : « J’ai été détenu pendant une quinzaine de jours à la salle 36. […] Pendant mon séjour aux Brigades spéciales j’ai subi plusieurs interrogatoires notamment par [l’inspecteur principal Gaston] Barrachin qui m’a menacé d’employer tous les moyens pour me faire parler, en effet, il m’a remis entre les mains de Bo… et de Ch… qui m’ont frappé brutalement à coups de poings, de pieds et de coups de nerfs de bœufs sur toutes les parties du corps et notamment sur la tête.
« Mon dernier interrogatoire a été mené par le secrétaire Jo…, celui-ci s’est montré d’une grande brutalité à mon égard. Il m’a frappé à coups de poings et à coups de pieds, je ressens toujours les douleurs dans les côtes des coups qu’il m’a portés. Comme je ne voulais rien dire, il a fait appel à deux inspecteurs qui m’ont maintenu couché sur une chaise et Jo… m’a frappé à coups de nerfs de bœuf sur tout le corps comme un véritable sauvage, pendant une quinzaine de jours j’étais méconnaissable. Tous ces sévices exercés en présence de la dactylo qui encourageait les sévices.
« Une perquisition a été effectuée à mon domicile, qui a été mis au pillage en ma présence, il m’a été dérobé un poste de TSF, une serviette en cuir, une mallette en fibre qui a été emplie de linge, de chaussures et d’autres objets, un sac de camping et peut-être d’autres articles dont je ne me souviens plus ».
« Je porte plainte contre les inspecteurs qui ont procédé à mon arrestation et notamment contre ceux qui m’ont frappé et contre ceux qui se sont rendus coupables de vol à mon préjudice ».
« Il m’a été également pris une somme de vingt-mille francs dont j’étais porteur au moment de mon arrestation ».
L’inspecteur principal adjoint Gaston Barrachin était jugé en octobre 1945, condamné à mort, il fut exécuté.
Arnold Leider a été homologué Déporté, interné, résistant et F.F.I. Il fut expulsé de France en 1949 pour son activité communiste, sa femme Geneviève le rejoignit en 1951. Il y mourut en 1993, elle revint en France.
Le couple eut un fils, Yannick né en 1946, il étudia en Pologne, il deviendra directeur artistique dans une usine polonaise qui fabriquait entre autre des pots en grès pour la décoration florale. Il s’occupera pendant des années d’enfants abandonnés, victimes de la guerre. Il revint en France en 2003 près de sa mère Geneviève malade. Artiste peintre, il expose régulièrement ses œuvres.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article162391, notice LEIDER Arnold [Pseudonyme : Jean] par Daniel Grason, version mise en ligne le 6 février 2020, dernière modification le 24 octobre 2020.

Par Daniel Grason

SOURCES : Arch. PPo. PCF carton 15 rapports hebdomadaires des Renseignements généraux sur l’activité communiste, 77W 791, 77W 3114, BA 2057, KB 15, KB 119. – Bureau Résistance GR 16 P 358137. – Livre-Mémorial, FMD, Éd. Tirésias, 2004. – Annette Wieviorka, 1945 La découverte, Éd. du Seuil, 2015. – Olivier Lalieu, La zone grise ? La résistance française à Buchenwald, préface de Jorge Semprun, Éd. Tallandier, 2005. – Pierre Durand, Les Français à Buchenwald et à Dora, Éd. Sociales, 1977. – Jean-Marc Berlière avec Laurent Chabrun, Les policiers français sous l’Occupation, Éd. Perrin, 2001. – Le Pays, Chauffailles en Saône-et-Loire « Yannick Leider et son long parcours », article du 23 juillet 2015.

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