BERCHER Louis, Gabriel. Pseudonyme : PERA J.

Par Colette Chambelland

Né le 17 août 1899 à Constantine (Algérie) ; médecin ; militant communiste de tendance syndicaliste révolutionnaire de La Révolution prolétarienne.

Clichés fournis par Henri Bercher

Louis Bercher devança l’appel pendant la Première Guerre mondiale : incorporé en avril 1918, il fut grièvement blessé en septembre 1918. Il fit des études de médecine et passa son doctorat à la faculté d’Alger. Il adhéra (vraisemblablement en 1921) au Parti communiste et fréquenta les milieux de la gauche d’Afrique du Nord en particulier Robert Louzon. Par lui, au cours d’un voyage à Paris, il fit la connaissance du groupe de La Vie Ouvrière. Il assista, en 1922, au congrès de Paris du Parti communiste.
En 1924, Louis Bercher suivit la même évolution que ce groupe et, après l’exclusion de Pierre Monatte, Alfred Rosmer et Victor Delagarde, il quitta le PC. Tout naturellement, il devint collaborateur de La Révolution prolétarienne. Ayant fait, dans l’été 1924, un voyage dans les Balkans, il envoya à la revue ses impressions qui parurent dans les n° 2 et 3 sous le titre « Coup d’œil sur les Balkans ». Il signa son article J. Péra, du nom d’un faubourg de Constantinople, pseudonyme qui lui resta. Il devint un collaborateur régulier et fréquenta les réunions dans la mesure de ses séjours à Paris.
Louis Bercher ne s’installa jamais médecin de ville ; il luttait contre une certaine médecine officielle, pratiquait l’homéopathie (il publia un ouvrage de vulgarisation homéopathique en 1937), fit des remplacements dans les dispensaires de la banlieue parisienne, notamment à Corbeil (Seine-et-Oise) dont la municipalité communiste lui confia un temps la direction de son dispensaire, pendant la maladie de son titulaire, le docteur Raphaël Zakine*. et fut embauché comme médecin par les Messageries maritimes. Il voyagea ainsi dans l’océan Indien et l’océan Pacifique. C’est ainsi que, médecin à bord du bateau L’Explorateur Grandidier reliant Madagascar à la France, il semble qu’il ait servi d’intermédiaire avec les militants communistes de l’île. On le vit plusieurs fois dans le port de Tamatave dans les années trente en compagnie de communistes malgaches connus tel Rajaona Johnson. Il pratiquait un type de médecine qui lui convenait et cela satisfaisait son goût des voyages et de l’observation des réalités du monde colonisé.
J. Péra publia de nombreux articles dans La Révolution prolétarienne à partir de 1928-1930 : « Quelques aperçus de la lutte de classes dans l’océan Indien », « La traite des jaunes », « Les siècles obscurs du Maghreb », « Lettre des Indes sur la révolution nationale en marche » et, surtout, en 1930, un « Panorama malgache, et Viet-Nam 1930 » (un récit des événements de Yen-Bay). Ce furent des articles marquants qui s’intégraient dans les campagnes anti-colonialistes de la revue qu’animèrent Daniel Guérin* et Marcel Martinet (qui publie « Un fleuve de sang en Indochine »). Ce furent aussi des articles qui lui valurent le licenciement des Messageries maritimes. Il navigua ensuite sur les bateaux de la Compagnie transatlantique. Sa collaboration régulière à La Révolution prolétarienne continua jusqu’à la guerre et il critiqua violemment le Front populaire pour n’avoir pas accordé de droits syndicaux aux travailleurs indigènes et avoir continué les politiques habituelles de répression.
Péra publiait aussi des articles économiques et historiques (en 1935, « La mort de Rome et les origines de la Féodalité ») d’un marxisme orthodoxe, que l’on retrouve dans le Précis de géographie économique d’Horrabin, qu’il traduisit et fit publier par la RP. Il écrivit aussi quelques articles dans le Cri du peuple et dans La Critique sociale où il se lia d’amitié avec Simone Weil qui correspondait avec lui et avec Boris Souvarine. Le compte rendu qu’il fit du Staline indiquait que, pour lui, le régime stalinien était le continuateur du premier régime bolchevik.
Habitant le Maroc avec sa famille et, après la Seconde Guerre mondiale, devenu fonctionnaire du Protectorat par concours, Louis Bercher maintint ses contacts avec La Révolution prolétarienne, souscrivit à la reparution en 1947, publia dans le n° 2 « De Madagascar à l’Union française » et en février 1948, « Le Manifeste a cent ans ». Sa collaboration fut régulière et particulièrement abondante après son retour en France au moment de l’indépendance marocaine et son installation comme médecin scolaire à Limoges puis à Montargis. Il continua à suivre les problèmes de l’Afrique du Nord mais ses préoccupations l’orientèrent de plus en plus vers un réexamen des doctrines des socialistes du XIXe siècle et une critique des idées marxistes. Ses discussions avec Robert Louzon furent souvent aussi vives que ses discussions avec Roger Hagnauer sur l’école.
Jusqu’à la veille de sa mort Louis Bercher dicta des notes et rédigea même la notice qu’il souhaitait voir imprimée dans La RP et qui le fut sous le titre qu’il avait choisi : « Il vient de nous quitter le Péra. C’était un copain », en juillet-août 1973.
J. Péra s’était marié le 21 décembre 1939 à Paris (VIIe arr.) avec Marie, Jeanne, Valentine Adam de Villiers, qui était institutrice.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article16304, notice BERCHER Louis, Gabriel. Pseudonyme : PERA J. par Colette Chambelland, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 10 octobre 2022.

Par Colette Chambelland

Clichés fournis par Henri Bercher

SOURCES : Arch. Nat. F7/13107. — Archives d’Aix (SOM) 6 (2) et 62. — ANOM, fiche matricule bureau d’Alger, classe 1919, n° 1452. — Journaux cités. — La Révolution prolétarienne, juillet-août 1973 [notes autobiographiques et articles de R. Hagnauer]. — Simone Pétrement, La Vie de Simone Weil, Fayard, 1978. — Lettre de Pierre Broué, 1981. — État civil.

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