BERNARD Hélène, Camille, Adrienne

Par Robert Mencherini

Née le 8 septembre 1914 à Lyon (VIIe arr.) (Rhône), morte le 25 août 2008 à Marseille (VIe arr.) (Bouches-du-Rhône) ; institutrice dans le Rhône puis dans les Bouches-du-Rhône ; militante syndicaliste (FEN, tendance École Émancipée) et mutualiste.

Hélène Bernard, fille de l’institutrice Marie Carrère et de François Bernard, en compagnie de ses deux frères aînés, Daniel et René, vécut ses premières années à Tarare (Rhône) où sa mère enseignait dans une école primaire de filles. L’engagement politique et syndical de ses parents, de son père professeur à l’école primaire supérieure et dirigeant national du courant syndical se réclamant de L’École émancipée, modelait la vie de la maisonnée, sans que, pour autant, les enfants ne fussent traînés dans les réunions, assemblées ou congrès. Le militantisme des Bernard leur valut surtout d’être maintenus dix-sept ans à Tarare, loin de leurs familles et de leurs camarades du syndicat du Rhône. Ils furent par la suite nommés à Lyon, l’un à l’école primaire supérieure des Minimes, sur la colline de Fourvières, l’autre, institutrice (ce qui donnait droit à logement de fonction) dans une école de filles de la ville, dans le groupe scolaire de la place de Perrin, entre la Saône et la colline de Croix-Rousse. À la mort de Marie, le 27 janvier 1931, ils durent quitter le logement de fonction.

Hélène Bernard fut reçue la même année à l’École normale de Lyon (Croix Rousse). En 1934, elle prépara le concours de quatrième année sciences d’école normale. Reçue, elle passa cette année à l’École normale de Clermont-Ferrand où elle tenta l’admission à l’École normale supérieure de Fontenay-aux-Roses en vue d’enseigner les mathématiques dans une EPS. Recalée au concours, elle revint tout de même avec son certificat d’aptitude pédagogique. L’année suivante, elle commença à exercer en tant qu’institutrice à Quincieux (Rhône).

En 1935, François Bernard prit sa retraite et s’installa, quelques mois après, à Cassis (Bouches-du-Rhône), dans ce Midi où il avait toujours désiré habiter. Hélène Bernard obtint sa nomination pour le département. À la rentrée 1936, elle enseigna d’abord à l’école primaire de Saint-Chamas, petite ville qui fut, cette année-là, endeuillée par l’explosion de la poudrerie, puis, à partir de janvier 1937, à Cassis.

Hélène Bernard fut alors en contact avec les militants École émancipée et mutualistes des Bouches-du-Rhône : Pascal Lena, Suzanne Durand et Auguste Durand, Victor Gourdon, gérant de la coopérative de l’enseignement, rue Pavillon. Elle participa aux activités de la Mutuelle générale de l’enseignement public en voie de constitution et pour laquelle elle se souvenait avoir écrit de nombreuses adresses sur des enveloppes.

François Bernard mourut en novembre 1940. Sa fille fut nommée en octobre 1941 à l’école maternelle du Roucas Blanc de Marseille. Elle y termina sa carrière en tant qu’institutrice attachée de direction, comme on disait alors.

Après la Libération, Hélène Bernard s’engagea plus fortement sur le plan syndical. Elle écrivit, en février 1945, dans le premier numéro de Combat Universitaire, bulletin de l’organisation universitaire du Mouvement de Libération nationale, où se retrouvaient de nombreux militants de l’École Émancipée, un article (« Oui, je voterai... ! ») pour inciter les femmes à participer aux élections. Sous l’amicale pression de Pascal Léna, elle accepta de prendre en charge la rubrique pédagogique de Combat Universitaire. Dans ce cadre, elle renoua les liens avec de nombreux militants pédagogiques nationaux comme France Serret ou Maurice Dommanget. Elle assura ensuite, pendant des années, la même tâche à L’École émancipée, lorsque la reparution de la revue fut possible. Le premier numéro fut imprimé à Marseille.

Les « unitaires » - proches du Parti communiste - avaient obtenu une forte majorité aux élections internes de novembre 1944 au sein du syndicat enseignant des Bouches-du-Rhône dont ils avaient pris la direction à la Libération. Hélène Bernard y défendit, en dépit des difficultés, les positions de L’École émancipée. Elle signa en décembre 1945, dans le Bulletin départemental du syndicat des instituteurs, la motion présentée par les « Amis de l’École émancipée » en vue du congrès national. Dans les réunions et congrès locaux du SNI, elle critiqua avec vigueur les positions de la majorité (appelée bientôt « Bouches-du-Rhôniste »), par exemple, sur « l’armée nouvelle » ou sur les catégories au sein du corps enseignant. Élue titulaire à la commission administrative paritaire départementale jusqu’en 1953, elle participa de ce fait au bureau départemental du SNI et aux congrès nationaux du syndicat.

Dans la vie nationale du SNI, elle fut à plusieurs reprises candidate au bureau national sur les listes présentées par son courant (décembre 1951 cinquième position, 1953 huitième, 1955 septième, 1957 seizième, 1959 dixième sur la liste « Pour un syndicalisme de combat et d’efficacité », 1961 dixième la liste « Pour un syndicalisme révolutionnaire. Programme des Amis de L’École émancipée », 1963, 1965. Lors des congrès nationaux, elle intervint souvent. Ainsi lors du congrès de Bordeaux, le 21 juillet 1955, elle s’éleva contre les positions des sections d’Algérie devenues, selon elle, celles du BN à propos de la situation coloniale, puis, le 23 juillet, elle présenta les thèses de sa tendance sur la question du colonialisme et de l’Union française.

En sus de sa collaboration à la revue L’École émancipée et de son militantisme à la Mutuelle générale de l’Éducation nationale, elle joua un rôle essentiel, pendant des années, au sein du groupe des « Amis de l’École émancipée » des Bouches-du-Rhône. Elle y maintint la tradition syndicaliste révolutionnaire dans les années 1960 en dépit des tensions, crises et scissions, avec le courant « lambertiste » d’abord (naissance du Front unique ouvrier), puis avec des militants de la Ligue communiste. Elle ressentit comme un échec le fait de voir apparaître, pendant quelques années, deux groupes des « Amis de l’École émancipée » dans le département.

Hélène Bernard prit sa retraite en 1970. Elle assura, pendant deux ans encore, la rubrique pédagogique de la revue L’École émancipée. Elle continua également à militer dans la section MGEN des Bouches-du-Rhône dont elle fut vice-présidente.

En 1996, à la suite d’un accident vasculaire, elle fut admise au service gériatrie de l’hôpital Ambroise Paré de Marseille. Très appréciée du personnel et des autres pensionnaires pour ses qualités humaines, elle participa à la vie de l’établissement et écrivit des petits livrets de souvenirs, toujours fidèle à son engagement militant.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article16395, notice BERNARD Hélène, Camille, Adrienne par Robert Mencherini, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 25 août 2022.

Par Robert Mencherini

SOURCES : Presse syndicale nationale : L’École libératrice, L’École émancipée. — Combat Universitaire, bulletin de l’Organisation universitaire du MLN, n° 1, février 1945. — Bulletin départemental du syndicat des instituteurs, n° 10, décembre 1945. — Entretiens avec Hélène Bernard et Pascal Léna, 1983 ; entretiens avec Hélène Bernard, 2003-2004. — Notes de Jacques Girault.

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