CLAES Charles, Joseph.

Par Jean-Paul Mahoux

Bruxelles (pr. Brabant, arr. Bruxelles ; aujourd’hui Région de Bruxelles-Capitale), 21 février 1842 – Bruxelles, 21 mai 1901. Ouvrier tapissier, pionnier du mutualisme neutre, coopérateur, membre de l’Association générale ouvrière.

Fils de Charles Claes, tapissier originaire de Geel (pr. Anvers - Antwerpen, arr. Turnhout) et de M. Bauwens, Charles Claes entre à la Société de secours mutuels des tapissiers en 1865. Il en devient le secrétaire-adjoint en 1869, le secrétaire en 1870 puis le vice-président jusqu’en 1901, année de son décès.

C’est en tant que délégué de cette société mutuelle que Charles Claes entre au Conseil de la Fédération libre des sociétés de secours mutuels de l’agglomération bruxelloise et des faubourgs, véritable fer de lance du mouvement mutualiste neutre. Fondée en 1863 par quatre sociétés mutuelles désireuses d’administrer en commun leur service médical, cette Fédération groupera jusqu’à soixante sociétés de secours mutuels bruxelloises à la fin du XIXe siècle. En 1875, Claes succède au typographe Henri Grégoir au secrétariat de la Fédération. Il en sera le propagandiste zélé et la cheville ouvrière jusqu’en 1899.

Charles Claes est à ranger parmi les principaux artisans du mutualisme neutre qui acquiert sa structure et prend son essor au cours des années 1880-1890. Bien qu’il participe à la fondation de la coopérative des Pharmacies populaires en 1881, il laisse à J.-F. Gaspar le soin de représenter les tapissiers au conseil d’administration. C’est aux côtés du président de la Fédération bruxelloise, J.-A. Wittebols*, et du secrétaire des Pharmacies populaires, Jean-Baptiste Wets, que Charles Claes organise le premier Congrès national des sociétés mutualistes belges en 1886, sur une proposition des mutualistes bruxellois.

Secrétaire et rapporteur des dix congrès mutualistes suivants, Charles Claes est élu à la vice-présidence de la Fédération nationale et ensuite à celle de l’Union nationale des fédérations mutualistes belges qui succède à la Fédération en 1896. Claes participe à la plupart des commissions d’études instituées par sa Fédération dont celle dite « des questions générales » en 1888, dont le rapport met fin à toute idée de rapprochement entre le mutualisme neutre et le jeune Parti ouvrier belge (POB) en 1889. Comme tous les mutualistes neutres de cette commission, Charles Claes est membre de l’Association générale ouvrière, fondée en 1858, affiliée au POB depuis l’origine. Composée de plusieurs corps de métiers bruxellois, la Générale ouvrière oscille alors entre le libéralisme progressiste, la neutralité politique et une conception très timorée du socialisme, empreinte de trade-unionisme et de doctrine dite "possibiliste" en référence à la tendance réformiste de la Fédération des travailleurs socialistes français. L’échec définitif de la ligne politique défendue par une Générale ouvrière, mise en minorité au Congrès du POB d’avril 1889 à Jolimont (commune de La Louvière, pr. Hainaut, arr. Soignies) incite certainement la commission fédérale à rompre alors avec le POB dont elle ne partage pas l’orientation collectiviste.

L’apport de Charles Claes au mouvement mutualiste est plus substantiel : œuvre pour une réforme profonde du régime légal des mutualités consacré par la loi du 3 avril 1851. Il réclame, entre autres, l’octroi de la personnification civile à toutes les mutuelles et l’entrée de délégués des fédérations mutualistes à la Commission gouvernementale des sociétés de secours mutuels. Claes et le président J.-A. Wittebols rédigent des pétitions en ce sens, envoyées aux Chambres dès 1888. Avec le médecin mutualiste, A. Lambrichts*, libéral progressiste de Liège, il milite ensuite pour la révision de la nouvelle loi ’t Kint de Roodebeek du 23 juin 1895 qui, en raison de nombreux amendements restrictifs, ne donne pas satisfaction aux mutualistes. Conseiller du Mutualiste, organe bimensuel des mutualistes neutres en 1886, Charles Claes collabore à sa rédaction comme traducteur des documents flamands. Il participe ensuite à la rédaction de sa version flamande, De Mutualist, fondé par Charles Dequecker* en 1890. Claes est le coauteur de rapports très fournis sur les réalisations des mutuelles belges, avec l’imprimeur du Mutuelliste, Alphonse Worhmout en 1885 ou avec le conseiller communal socialiste de Bruxelles, Désiré Vandendorpe en 1891.

L’appartenance de Charles Claes à la Générale ouvrière explique sa participation à diverses réalisations coopératives. Il est au nombre des sociétaires de la Boulangerie coopérative de Bruxelles (1881), une œuvre qui réunit deux tendances très distinctes du mouvement ouvrier : les militants socialistes et les membres de la Générale ouvrière. Lorsqu’il sera question d’affilier la coopérative au Parti socialiste belge (1883), Claes et tous les membres de la Générale ouvrière se retireront de l’entreprise qui, quelques années plus tard, deviendra la Maison du peuple de Bruxelles.

Charles Claes siège également au collège des commissaires de la coopérative de consommation, Les Ateliers réunis, fondée par la Loge des Amis philanthropes en 1867, dont la gestion est confiée à la Générale ouvrière en 1886 (voir Jean Charles). Il fait également partie des vingt-trois fondateurs de la Banque de crédit populaire, institution coopérative créée à l’initiative de Charles Dequecker*, le 4 septembre 1892, mais il ne participe pas à son administration.

Charles Claes, titulaire de la médaille du mutualiste de première classe, meurt en mai 1901, à l’âge de 59 ans. Son activité s’est essentiellement concentrée sur le mouvement mutualiste neutre. A cet égard, son itinéraire évoque celui des bijoutiers, Jean Charles et Joseph Matta*, de l’employé Joseph Deforchaux ou des tailleurs, Jean-Baptiste Fauconnier*, Joseph Deknop, et Émile Vreven*, membres de la Générale ouvrière et dirigeants mutualistes neutres également membres de la Générale ouvrière. Jean-Baptiste Wets, Alphonse Wormhout et surtout Désiré Vandendorpe y ont joué un rôle non négligeable.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article164087, notice CLAES Charles, Joseph. par Jean-Paul Mahoux, version mise en ligne le 19 septembre 2014, dernière modification le 25 octobre 2020.

Par Jean-Paul Mahoux

ŒUVRE : Avec VANDENDORPE D., Rapport du Congrès national des sociétés de secours mutuels tenus à Bruxelles (1885), Bruxelles, 1885 – Avec WORMHOUT A., Exposition universelle de Paris, 1889. Rapport sur les sociétés de secours mutuels belges et étrangères présenté à l’administration communale de la ville de Bruxelles, Bruxelles, 1891.

SOURCES : Archives de la ville de Bruxelles, Registre de population civile – Le Mutualiste, 1887-1901 dont 1er juin 1901, p. 1-2 – WORMHOUT A., La mutualité en Belgique, Bruxelles, 1896 – BERTRAND L., Histoire de la coopération en Belgique. Les hommes - Les idées - Les faits, t. 2, Bruxelles, 1903, p. 108, 110 – SERWY V., La coopération en Belgique, t. IV : La vie coopérative - Dictionnaire biographique, Bruxelles, 1952, p. 112 – GOFFINET L., Le mouvement mutualiste neutre : ses racines, Bruxelles, Union nationale des fédérations mutualistes neutres, 1986.

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