SAIELLI Werther. Écrit parfois par erreur SACELLI

Par Julien Lucchini

Né le 30 octobre 1920 à Riolunatto (province de Modène, Italie), fusillé le 26 janvier 1944 au camp de Souge, commune de Martignas-sur-Jalle (Gironde) suite à une condamnation à mort ; mineur ; militant communiste ; résistant.

Werter Saielli
Werter Saielli

Militant communiste, Werther Saielli avait fui l’Italie fasciste et, une fois en France, avait repris ses activités militantes en devenant secrétaire de la Jeunesse communiste à Méricourt-sur-Lens (Pas-de-Calais). Le 6 août 1941, il fut interné au camp de Huy (Belgique), dont il s’évada. Il devint alors responsable interrégional du groupement communiste italien et s’engagea chez les Francs-tireurs et partisans-Main-d’œuvre immigrée (FTP-MOI) italien. Il organisa des actions de sabotage. Célibataire, il demeurait à Bordeaux (Gironde) vers 1943.
Les archives de la DAVCC indiquent qu’il fut arrêté le 1er septembre 1943 pour « aide à l’ennemi, attentats et sabotages ». Néanmoins, une incertitude demeure sur la date exacte de son arrestation, et le Comité du souvenir des fusillés de Souge avance quant à lui les dates du 27 août ou du 20 septembre.
Incarcéré au fort du Hâ, il fut condamné à mort le 20 janvier 1944 par le tribunal militaire allemand FK 529 de Bordeaux pour « intelligence avec l’ennemi terroriste », et fusillé six jours plus tard au camp de Souge. Un recours en grâce lui avait été refusé.
Dans une dernière lettre envoyée à un ami, Werther Saielli le priait de prévenir son frère cadet, Prodisio, qui était porté disparu.

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Dernière lettre
 
Fort du Ha, Bordeaux
23 janvier 1944, 5 h. du matin
Mon cher Henri,
Je t’écris malgré notre petite brouille qui, j’en suis sûr, n’est pas bien grave. Je suis condamné à mort et dois être exécuté ce matin. Cela ne m’épouvante pas, comme on a l’habitude de le croire. J’étais habitué à cette idée depuis le temps que je mène cette vie illégale. Enfin, passons !
Tu sais peut-être que la frontière italienne est fermée, ce qui m’empêche d’écrire à mon oncle là-bas. Quant à mon frère, J’ignore où il peut être ; en tout cas, je compte sur notre amitié de jeunesse pour faire ce que je te demande. D’abord, d’écrire à mon oncle aussitôt que cela sera possible, de prévenir mon frère, si un jour il revient à Méricourt. Pour la lettre, il faut la faire en italien.
Tu feras mes amitiés à nos anciens camarades Louis, Gustave, son frère Léon, sa femme Fernande, sa mère. N’oublie pas cette dernière elle me rappelle tant de choses (le bal chez Françoise). Va la trouver et dis-lui que je n’oublie pas les beaux
dimanches passés ensemble. Elle connaît l’italien ; elle pourra faire la commission. N’ayant personne, je t’envoie aussi ce qui me reste de linge arrange-toi avec elle, elle a beaucoup d’enfants, cela pourra peut-être servir.
J’aurais encore des tas de choses à t’écrire sur mon compte, mais cela serait inutile.
Je te demanderai, en outre, de fleurir et de nettoyer la tombe de mes parents. Tu le feras avec les autres petits camarades, s’ils le veulent.
En ce moment, je pense aussi à un grand petit camarade, je veux parler de Jean. Ma destinée et la sienne vont se rencontrer.
Si tu vois son père, assure-le de toute mon affection ainsi que sa femme Marie et tous les petits.
Ne me plais surtout pas, je meurs en soldat et bien d’autres avant moi m’en ont indiqué la route J’espère que cela ne sera pas inutile, j’en suis sûr.
J’entends des pas, cher Henri, je crois que ce sont eux Seize copains avec moi vont faire le voyage, le vent siffle et il pleut aujourd’hui !.
Ça ne fait rien, tout passe et les beaux jours reviendront vite ?
Je te quitte avec le seul regret de ne pas dormir à côté de mes chers parents Si un jour tu vois mon frère, dis-lui que je meurs en pensant à lui, tout jeune encore.
Bien le salut à tous. Embrasse le père de Jean et toute sa famille pour moi, ainsi que la belle-mère et sa famille. Ne l’oublie pas surtout.
Je te serre la main et te dis adieu
Verter

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article165818, notice SAIELLI Werther. Écrit parfois par erreur SACELLI par Julien Lucchini, version mise en ligne le 5 octobre 2014, dernière modification le 12 mars 2020.

Par Julien Lucchini

Werter Saielli
Werter Saielli

SOURCES : DAVCC, Caen, B VIII 5, Liste S 1744 (Notes Thomas Pouty). – René Terrisse, Face aux pelotons nazis : Souge, le Mont-Valérien du Bordelais, Aubéron, 2000. – Comité du souvenir des fusillés de Souge, Les 256 de Souge, op. cit. p. 170 (avec photo). — Lettres de fusillés, Éditions France d’abord, 1946, p. 178-179 (écrit par erreur Sacelli dit Verter).

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