VIGOUREUX Clarisse, née GAUTHIER [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis]

Par Jean-Claude Dubos, Michel Cordillot

Née le 11 juin 1789 à Montagney (Doubs), morte le 13 janvier 1865 à San Antonio (Texas), dans la propriété de son gendre Victor Considerant ; une des premières disciples de Charles Fourier ; participante active de l’expérience de colonisation au Texas.

Fille d’un maître de forges, Claire-Dorothée, dite Clarisse Gauthier épousa en 1808 Pierre-François Vigoureux, marchand de draps à Besançon, lequel disparut en 1817 dans des circonstances tragiques : accusé — certainement à tort — par la rumeur publique d’être à l’origine de la disette qui sévissait alors à Besançon, il se suicida en s’empoisonnant dans les bois de Charbonnières, près de Lyon.

Nul doute que cette épreuve n’ait incliné Clarisse Vigoureux à adhérer au fouriérisme, auquel l’initia dès 1822 un ami de son frère, Just Muiron. Elle devint rapidement une fervente zélatrice de cette doctrine, notamment dans son ouvrage Paroles de Providence, publié en 1834 en réponse aux Paroles d’un croyant de Lamennais. Ce livre fut mis à l’index par le Pape Grégoire XVI.

En 1832, Clarisse Vigoureux fut la gérante, aux côtés de Muiron et Fourier, du journal fondé à Paris par Lechevalier et Considerant, Le Phalanstère. Mais pour des raisons d’ordre légal, elle fut amenée à utiliser son fils Paul-Émile, alors âgé de 20 ans, comme prête-nom. Cela a conduit plusieurs de ses biographes à lui donner pour époux son propre fils, gratifié au passage du titre de maître de forges.

Ayant placé toute sa fortune et le patrimoine de ses enfants dans les affaires de son frère, le maître de forges Joseph Gauthier, Clarisse Vigoureux permit en 1839 à Victor Considerant, devenu son gendre l’année précédente, grâce à une reconnaissance de dette fictive, de payer les 500 F de cens nécessaires pour se présenter à la députation. Mais le chiffre de sa fortune a été largement exagéré, en particulier par Kalikst Wolski (ce dernier écrivit dans son journal de voyage à Réunion, que Julie Vigoureux avait reçu une dot s’élevant à un million de francs, alors qu’elle n’avait eu en réalité que le vingtième de cette somme). En janvier 1841, la faillite de Joseph Gauthier entraîna la ruine totale de Clarisse Vigoureux et de ses enfants. Cela amena d’ailleurs Victor Considerant à poser sa candidature à un poste de bibliothécaire à l’École polytechnique, puis à accepter les émoluments — toujours refusés jusque-là — auxquels il pouvait prétendre en qualité de directeur de La Démocratie pacifique. La fortune disparue de Clarisse Vigoureux n’a donc joué aucun rôle dans la fondation en 1854 de la Société européenne de colonisation, dont le principal actionnaire fut en fait Godin-Lemaire, le fondateur du Familistère de Guise.

N’ayant pratiquement plus rien publié (à l’exception d’une critique sévère du Jocelyn de Lamartine parue en 1838 dans La Phalange, et d’un appel « Aux femmes de France » au bénéfice de la Pologne paru en 1846 dans La Démocratie pacifique), Clarisse Vigoureux semble avoir volontairement choisi de vivre dans l’ombre de son gendre, le déchargeant, comme le montre sa correspondance, de bien des détails matériels. Vivant à Paris avec le ménage Considerant, elle l’accompagna dans son exil après le 13 juin 1849.

Lorsque le projet de colonisation au Texas fut lancé, Clarisse Vigoureux quitta la Belgique et partit avec sa fille et son gendre pour prendre part à l’expérience fouriériste de Réunion, s’embarquant le 17 janvier 1855 sur le vapeur de New York. Après le départ définitif de Victor Considerant pour San Antonio, elle resta à Réunion avec sa fille. Elles quittèrent ensemble la colonie, désormais condamnée, autour de la fin du mois de février 1858.

Clarisse Vigoureux passa les dernières années de sa vie aux alentours de San Antonio avec Julie et Victor Considerant. Elle mourut le 13 janvier 1865, et fut enterrée par sa fille et son gendre près de leur cabane située sur la berge du fleuve San Antonio, à cinq kilomètres de la ville portant le même nom.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article166385, notice VIGOUREUX Clarisse, née GAUTHIER [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis] par Jean-Claude Dubos, Michel Cordillot, version mise en ligne le 9 octobre 2014, dernière modification le 28 septembre 2016.

Par Jean-Claude Dubos, Michel Cordillot

SOURCES : Maurice Dommanget, Victor Considerant, sa vie, son œuvre, Paris, 1929 ; Cahiers Charles Fourier, n° 4, 1993, « Autour de l’expérience de Réunion » ; Jean-Claude Dubos, préface à Clarisse Vigoureux, Parole de Providence, Seyssel, Champ Vallon, 1993 ; CDRom Maitron.

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