HINAUT, Joseph Charles, alias Monnet [Dictionnaire des anarchistes]

Par Dominique Petit et Gianpiero Bottinelli

Né le 6 juillet 1863 à Arnay-le-Duc (Côte d’or), mort le 28 avril 1902 à l’hôpital de Villejuif (Val-de-Marne) ; chapelier, serrurier, manoeuvre, employé de chemin de fer, marchand ambulant, gérant de journal anarchiste à Dijon.

Joseph Hinaut fut tout d’abord ouvrier chapeliercomme son père, puis il entra aux ateliers de la compagnie de chemins de fer PLM à Perrigny (Côte-d’Or) le 1er août 1888 et fut l’un des animateurs de la grève de juillet 1891, chargés par ses camarades de remettre les revendications auprès de la direction. Il semble qu’il faisait de la propagande anarchiste parmi ses camarades et au sein du syndicat.
Il fut déplacé et envoyé le 18 avril 1892 aux ateliers de Clermont-Ferrand où il continua sa propagande. Il y colportait le Père Peinard et la Révolte. Au cours de l’été 1892, il tint des propos assez violents au cours d’une réunion anarchiste à Roanne.
Son propriétaire à Clermont l’entendit souvent parler de faire sauter les bourgeois et leurs maisons, pour se débarrasser de lui et par crainte, il lui délivra quittance de son loyer alors qu’il devait encore plusieurs mois de terme.
Révoqué en août 1893, il quitta son logement sans payer son loyer et revint sur Dijon et milita dans le groupe anarchiste, il parcourait les localités voisines pour vendre des articles de coutellerie, tout en se livrant à de la propagande anarchiste.
En novembre, Hinaut devint le gérant du journal anarchiste dijonnais La Mistoufe. Il passa un contrat avec Desvignes, imprimeur, celui-ci lui louant le vendredi de chaque semaine une machine « L’Eclair », ainsi que les caractères nécessaires à la composition.
Son rôle se bornait à remettre au compositeur, les articles reçus par le journal et à le signer, une fois l’impression terminée, Hinaut était en effet presque illettré mais d’un intelligence très vive et disposant d’un certain don de la parole. Sa femme partageait ses opinions et celle-ci était devenue une fervente adepte de l’anarchie.
Le groupe anarchiste «  les Résolus », se réunissait chez lui tous les samedis de 8h à 10 h du soir, chemin de Charbonniers.
Hinaut était en relation avec Sébastien Faure et Tortelier

Le 23 février 1894, la cour d’assises de Dijon le condamna, par défaut, à deux ans de prison et 3000 francs d’amende pour la publication d’articles dans la Mistoufe. Dans le n°2 du journal, un article intitulé « Patrie » : « A quoi servent, en effet, les armées, ces écoles de l’abrutissement et de la servilité ? »... « redresse-toi justicier implacable, garde-toi contre les crapules galonnées »... « si l’on recommande de nous égorger les uns, les autres pour quelque motif que ce soit. Eh, bien ! Retournons-nous unis contre nos dirigeants … et dans une ripaille de titans, mangeons ensemble nos tyrans, nos exploiteurs et nos maîtres. ». Ce texte fut considéré comme injuriant l’armée et incitant les militaires à désobéir.
Le n°6 de la Mistoufe paru le 10 décembre 1893, contenait également un article intitulé « La révolution future  » : « nous sommes convaincus qu’il faudra, dès les débuts de la lutte, que les anarchistes-communistes portent les premiers coups à la propriété ...et prêchent l’exemple en entrant dans les magasins et en s’emparant de ce dont ils ont besoin, sans s’occuper d’aucune formalité. » incitant au pillage et dans le même numéro et un autre texte « Chatillon-sur-Seine. Le pouvoir d’un juge  » : qui se terminait par « quand on est en face d’un tigre, on le tue » fut jugé comme une incitation au crime.

Le 24 mai 1894 fit appel du jugement par défaut mais ne se présenta pas, le jugement fut confirmé. Il avait pris la fuite.

Réfugié en Suisse, domicilié à Genève, il fut écroué à la prison de Saint Antoine à Genève et expulsé par le Conseil fédéral le 20.7.1894, pour les raisons suivantes : « ...autrefois imprimeur et gérant du journal anarchiste La Mistoufe paraissant à Dijon, condamné en contumace au mois de février de cette année, par les tribunaux français, pour excitation au meurtre et au pillage, a séjourné dès lors dans les cantons de Neuchâtel, Vaud et Genève, parfois sous un faux nom, et y a lié des relations avec les groupes anarchistes ; Hinaut, connu comme anarchiste dangereux, n’ayant pas de papiers de légitimation et à cause même de ses précédents, a été expulsé du canton de Vaud ; sur l’avis du ministère public de la Confédération et la proposition du Dép. fédéral de justice et police, en application de l’art. 70 de la Constitution fédérale... ».

Dès son arrivée en Haute-Savoie, il fut arrêté par les gendarmes qui l’amenèrent devant le commissaire spécial d’Annemasse qui lui signifia sa condamnation à deux ans de prison par la cour d’assises de Dijon. "J’aime autant que ça en finisse, ça m’embêtait d’être trimballé d’un canton à un autre" déclara-t-il.

Ecroué à Annemasse, il fut transféré à la prison de Dijon le 14 août 1894.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article167103, notice HINAUT, Joseph Charles, alias Monnet [Dictionnaire des anarchistes] par Dominique Petit et Gianpiero Bottinelli, version mise en ligne le 15 novembre 2014, dernière modification le 4 octobre 2020.

Par Dominique Petit et Gianpiero Bottinelli

SOURCES : 2 U 1517 et 2 U 1518 Arch. Dép. Côte d’Or — Arrêté du Conseil fédéral du 20 juillet 1894 — Gil Blas, Le Temps, le Petit Parisien sur Gallica — René Bianco, Un siècle, op. cit. — Langhard, Die anarchistische Bewegung in der Schweiz, op. cit. — Etat civil

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