BOSTSARRON Gilbert, Auguste, Philippe [Pseudonyme dans la Résistance : Claude]

Par Odette Hardy-Hémery, Julien Lucchini, Laurent Thiery

Né le 31 août 1903 à Saint-Galmier (Loire), fusillé le 20 janvier 1944 au fort de Bondues (Nord) ; directeur des usines de la Société franco-belge de matériel des chemins de fer ; résistant, membre des réseaux Libération-Nord puis Alliance.

Fils de Gilbert Bostarron, directeur de l’école communale, et de Rose Joséphine Richard, institutrice, Gilbert Bostsarron, passa sa jeunesse à Montluçon (Allier). Il était sorti en 1926 ingénieur de l’École de la Métallurgie et des Mines de Nancy. Il fit une année de service militaire à Prague et fut par la suite attaché au 2e Bureau français à Prague en qualité de lieutenant interprète de réserve. Il entra à la Société franco-belge de matériel de chemin de fer à Raismes (Nord) le 1er décembre 1927. De 1927 à 1934, il fut affecté aux Ateliers, service général, puis au montage de voitures. À la fin de novembre 1934, il devint secrétaire général de la société puis, le 6 juillet 1938, sous-directeur. Après l’évacuation, Gilbert Bostsarron fut chargé le 16 août 1940 de la direction de l’usine, le directeur titulaire, Lécluse, s’étant prudemment réfugié au Canada. C’était un homme ouvert aux questions sociales, recevant courtoisement les délégués syndicaux. Il vivait à Raismes (Nord) et s’était marié à Paris le 11 mai 1931 avec Claire, Renée, Marie Hingre. Le couple eut deux enfants.
Selon les témoignages dont on dispose, il semble qu’il ait été un patron apprécié de ses employés, notamment parce qu’il avait pris une part importante à l’élaboration des conventions collectives de l’entreprise en 1936, avant de s’occuper des familles de ses employés prisonniers de guerre durant les combats de 1939-1940. Il développa les jardins ouvriers, organisa des cultures collectives et l’élevage. Puis, il se rendit en Allemagne, à Berlin, pour vérifier si les clauses des contrats de travail de ses ouvriers (10%) au titre de la "relève" étaient respectés.
Au sein de l’entreprise, il freina la production, qui ne représenta que l’équivalent de six semaines de travail sur la durée de l’occupation. Il donna son consentement avec prudence, au sabotage des fournitures destinées aux Allemands, les chaudières arrivaient parfois percées." Je fais,un travail de Pénélope" disait-il.
En 1941, Gilbert Bostsarron prit part à la fondation d’un groupe d’aide à l’évasion et de renseignements, en relation avec les mouvements Libération-Nord et Voix du Nord. Il fut ensuite recruté par le réseau Alliance en tant qu’agent T20. Il participa dans ce cadre à des activités d’évasions, de parachutages, de sabotages et de propagande clandestine. Entré à la fin de 1941 au grand réseau de renseignement fondé par Jean Cavaillès, Cohors-Asturies, Bostsarron était l’animateur du groupe Cohors pour le Nord en liaison avec Cavaillés par l’intermédiaire d’Edmond Leclercq. Une des spécialités du réseau Cohors consistait à signaler les déplacements des unités allemandes sur le réseau ferré. Le trafic ferroviaire, les écluses et les ports étaient surveillés par les agents du réseau. Ces activités permettaient ensuite de réaliser des plans précis des ouvrages de défense allemands sur la côte et des terrains d’aviation. Ces documents étaient ensuite transmis à Londres. Mais la répression qui frappa le réseau à l’été 1943 et en particulier l’arrestation de Cavaillès, le 28 août, conduisit le service III F de l’Abwehr, le contre-espionnage allemand de Lille, à diligenter une enquête sur la base des informations transmises par Paris sur les agents du réseau Cohors dans le Nord. L’instruction fut rondement menée par les services du groupe 3 de la GFP de Lille, la police militaire. L’enquête conduisit la GFP au sein du personnel de la Société franco-belge de Raismes. Dès le 1er décembre 1943, elle procéda à l’arrestation d’Armand Mottet, puis, le 14, de Gilbert Bostsarron et d’Edmond Leclercq.
Bostsarron fut appréhendé à son domicile, et incarcéré à la prison de Valenciennes (Nord). Transféré le 16 janvier 1944 à la prison de Loos-lès-Lille, son affaire fut alors qualifiée d’espionnage et transmise au service de « l’ange gardien des V1 » ou Abwehr d’Arras. Il fut secrètement condamné à mort, le 20 janvier 1944, par le tribunal spécial du 65e corps d’armée allemand alors réuni boulevard de la Liberté à Lille, et fusillé le jour même au fort de Bondues.
Sa famille ignora son sort ; on retrouva son corps huit mois plus tard parmi soixante douze autres cadavres. L’usine lui fit des funérailles solennelles, quatre mille personnes vinrent témoigner.
Il existe une rue Gilbert Bostsarron à Aubry-du-Hainaut (Nord), ainsi qu’un stade du même nom à Raismes. Jusqu’à sa disparition, la plaque commémorative 1939-1945 de l’École des Mines de Nancy mentionnait son nom, qui figure également sur le monument aux morts de Raismes, le monument aux morts de l’usine franco-belge, et sur le monument commémoratif du fort Lobau, à Bondues.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article168474, notice BOSTSARRON Gilbert, Auguste, Philippe [Pseudonyme dans la Résistance : Claude] par Odette Hardy-Hémery, Julien Lucchini, Laurent Thiery, version mise en ligne le 12 janvier 2015, dernière modification le 12 novembre 2016.

Par Odette Hardy-Hémery, Julien Lucchini, Laurent Thiery

SOURCES : DAVCC, Caen (Notes Thomas Pouty). – Nord Soir, 22 octobre 1944. – Fonds « Michel Rousseau » (La Coupole) – Musée de la Résistance de Bondues, Ils étaient 68, 2010. – Arch. privées de la Société franco-belge de Matériel de chemin de fer. – J.-M. Fossier, Nord-Pas-de-Calais, zone Interdite. Mai 1940-Mai 1945, Paris, Éd. Sociales, 1977. – Mémorial GenWeb. – Laurent Thiery, La répression allemande dans le Nord de la France (1940-1944), Lille, Presses du Septentrion, p. 239-257. – Henri Lespès De l’usine au maquis Éditions du Mail, Paris, 1945. (notes Annie Pennetier). — État civil.

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