Par Daniel Grason, Gérard Larue
Né le 25 mai 1914 à Saint-Germain-le-Vasson (Calvados), fusillé le 15 juin 1943 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; cuisinier, dessinateur industriel ; militant communiste ; résistant, membre des FTPF.
Fils de Charles Mathieu, comptable, et de Marie Joséphine Lambert, sans profession, Roger Mathieu obtint à l’issue de sa scolarité le CEP. Le 17 mars 1934 épousa Henriette Murat à Paris (XVe arr.), le couple vivait depuis 1938 au 1 rue Sextius-Michel à Paris (XVe arr.). Il adhéra en 1938 au parti communiste, fut membre d’une cellule du quartier de Grenelle sans y assumer une responsabilité. Il avait exercé la profession de cuisinier avant d’exercer celle de dessinateur industriel chez Hispano-Suiza à Bois-Colombes (Seine, Hauts-de-Seine). De la classe 1934, il fut mobilisé en août 1939 au 401ème Régiment de DCA à Romainville (Seine, Seine-Saint-Denis). Démobilisé par le centre de Catus (Lot), il travailla en tant que dessinateur industriel jusqu’en octobre 1942 à la Société des Grands Travaux de Marseille 25 rue de Courcelles à Paris (XVIIe arr.).
Il s’engagea dans la Résistance diffusa des tracts de l’organisation clandestine dans le XVe arrondissement, puis devint le responsable du groupe de diffuseurs. Au cours du mois de mai 1942 un responsable de l’organisation de l’arrondissement Edgar Lefebure le présenta à « Beslay », il fut aussi en contact avec René Sevi dit Baudin, Roger Pinçon dit Pierre.
Il aurait fait partie le 31 mai 1942 du groupe de protection de la manifestation de femmes de la rue Buci, répondant aux consignes du Parti communiste clandestin « d’organiser des manifestations contre le rationnement, d’envahir en masse les restaurants et épiceries de luxe et de partager les vivres ».
Le 18 juillet 1942 vers 17 heures 30 Roger Mathieu participa avec six autres FTP à une action armée contre le bureau de placement allemand au 28 rue de Clisson à Paris (XIIIe arr.). Une bouteille incendiaire était lancée contre la vitrine occasionnant des dégâts minimes. Un gardien de la paix était en faction, il tira… un FTP riposta le touchant mortellement. Un projectile atteint Roger Mathieu, sa blessure ne saignait pas, mais le faisait souffrir. Il courut puis marcha, passa devant le Ministère des Pensions, demanda son chemin à un gardien de la paix, une façon de « se donner contenance » dira-t-il plus tard. Il prit le métro à la station Bercy.
Il regagna son domicile, se fit extraire la balle dans une clinique. Il expliqua au docteur qu’il s’était blessé en nettoyant une arme qu’il tenait de son père. René Sevi vint lui rendre visite, lui envoya Jean Rozinoer, étudiant en médecine, médecin des FTP. Roger Mathieu se reposa à son domicile un mois, puis partit trois semaines en convalescence dans le Loiret. À son retour, il demanda à ne plus être dans un groupe de combat, il fut affecté aux renseignements. Il nota les allées et venues des fournisseurs du Soldateinheim (foyer du soldat) de la place Clichy, Les données recueillies étaient trop minces pour réaliser une action armée.
Pierre Brossard, dit Philibert, responsable des cadres du parti communiste était arrêté par les policiers de la BS1, le 3 mars 1943. Lors de la perquisition des fiches biographiques de clandestins étaient saisies, ainsi qu’un rapport concernant Maxime. Ce texte était crypté avec un code, mais la grille de lecture était trouvée chez Brossard. Les policiers apprenaient que « Maxime » pouvait être contacté téléphoniquement à Suffren 49.44. Ce numéro était celui de la boulangerie du 69 boulevard de Grenelle. Entendue la boulangère expliqua qu’elle rendait service à plusieurs clients qui étaient contactés par son intermédiaire pour des affaires familiales.
Un inspecteur de la BS1 se faisant passer pour un résistant lui fixa téléphoniquement un rendez-vous le 11 mars 1943 à la station de métro La Motte-Picquet Grenelle. Roger Mathieu disait à l’un d’eux « Je suis Maxime, es-tu Luc ? Qui est Luc ? » En guise de réponse, les inspecteurs lui passèrent les menottes. Il portait sur lui deux carnets annotés et plusieurs feuilles de papier portant des noms et des adresses. Emmené dans les locaux des Brigades spéciales à la préfecture de police, dévêtu, les policiers constataient la présence de deux cicatrices « paraissant être celles de blessures par arme à feu ».
Dans un premier temps il fut réticent à parler, puis s’exprima sans contrainte, tant les preuves de sa participation à l’action armée du 18 juillet 1942 étaient patentes. Sur une dizaine de feuillets dactylographiés il fit part de ses contacts passés avec : Edgar Lefebure arrêté le 31 mai 1942, René Sevi et Jean Rozinoer interpellés le 27 août 1942, les frères Jean et Maurice Cadet, le 18 et 20 septembre 1942 ; Henri Fongarnand et Roger Pinçon interpellés le 13 décembre 1942… Roger Mathieu ne pouvait ignorer ces arrestations antérieures, ce n’était donc pas des révélations pour les policiers.
Les inspecteurs des Brigades spéciales posèrent des questions sur les « planques » et les agentes de liaisons, Roger Mathieu resta silencieux… les policiers le tabassèrent à quatre reprises… Incarcéré à la prison de Fresnes (Seine, Val-de-Marne). Jugé le 7 juin 1943 par le tribunal militaire allemand attaché au commandement du Gross Paris, section B (tribunal établi à cette date rue Boissy-d’Anglas), il fut condamné à mort.
Il a été exécuté par les autorités allemandes, le 15 juin 1943 à 16 h 20, au Mont-Valérien (Seine, Hauts-de-Seine).
La mention « Mort pour la France » lui a été attribuée par le secrétariat général aux Anciens Combattants en date du 29 novembre 1945.
Par Daniel Grason, Gérard Larue
SOURCES : Arch. PPo. GB 116 BS2 carton 24, BA 1752. — Arch. DAVCC, Caen Boite 5 / B VIII 4-Liste S 1744-158/43 (Notes Thomas Pouty et Michel Thébault). — Site Internet Mémoire des Hommes. — État civil.