BOIN René

Par Claude Pennetier

Né le 1er novembre 1887 à Bourges (Cher), mort le 13 octobre 1972 à Paris (Xe arr.) ; instituteur, domicilié à Stains (Seine-Saint-Denis) ; militant socialiste du Cher puis de la région parisienne, candidat SFIO aux élections législatives dans le Cher, conseiller général de la Seine de 1947 à 1959.

René Boin était le fils du socialiste berruyer Michel Boin et le frère aîné de Maurice. Élève de l’École normale de Bourges, il collabora à l’âge de dix-sept ans au Bulletin officiel de la Bourse du Travail de Bourges. Nommé en 1910 instituteur-adjoint à Sancoins, il fonda un groupe socialiste. Il connaissait à cette époque un certain nombre de dirigeants de la SFIO, comme en témoigne une carte du VIIIe congrès national tenu à Saint-Quentin en avril 1911 adressée à René Boin et signée par Édouard Vaillant, Mauger, Laudier, J. Guesde, Compère-Morel. Avant la guerre, il quitta le département et fut nommé à Saint-Denis (Seine). René Boin avait été exempté du service militaire en 1909, il fut pourtant reconnu bon pour le service en septembre 1914, et incorporé le 22 février 1915. Selon un témoignage hostile conservé dans les archives du Grand-Orient : « Il fit tout d’abord à ses camarades des conférences de caractère plutôt subversif ; mais, cherchant à s’élever, il suivit les cours et passa les examens lui permettant de faire un officier. Devenu sous-lieutenant, il commença par fuir ses camarades non gradés et afficha un mépris et une telle morgue à leur égard qu’ils se réunirent pour lui faire une démonstration catégorique ».

Sous-lieutenant d’infanterie, il fut blessé à Hadonville le 14 avril 1917. René Boin devint lieutenant de réserve et fut promu dans l’ordre de la Légion d’honneur, en 1933, pour son attitude pendant la guerre.

Revenu à Saint-Denis à la fin des hostilités, il devint une figure très populaire du mouvement ouvrier local en prenant une part active aux grandes grèves de 1919 et 1920. Le journal socialiste de Saint-Denis, L’Émancipation, le décrit lors de la manifestation du 1er Mai 1919 : « Au premier rang, l’instituteur René Boin en uniforme de lieutenant d’infanterie portait le drapeau rouge de la section socialiste de Saint-Denis. Après un affrontement sans gravité avec la police on le retrouve juché sur un bec de gaz à haranguer les manifestants ». Il aida la municipalité socialiste à créer la colonie de vacances de Sancerre (Cher) - dont les moniteurs favorisèrent la propagande communiste dans le Sancerrois - et anima l’Université populaire de Saint-Denis. Membre du comité de la IIIe Internationale, il adhéra au Parti communiste après le congrès de Tours mais en fut exclu au début de l’année 1923, pour avoir signé avec soixante-dix-sept communistes - dont quatre de Saint-Denis - une déclaration du Comité de Défense communiste. Une autre source situe son départ du PC en octobre 1922, après le congrès de Paris.

René Boin était franc-maçon ; il avait d’abord été refusé par une Loge du Grand-Orient de Saint-Denis, en raison d’un avis défavorable donné par la Loge Travail et Fraternité de Bourges. Il fut initié en 1922 à la Loge Jean Jaurès de Paris, affiliée à la Grande Loge de France. Au début de l’année 1923, René Boin fonda une section dionysienne du Parti communiste unitaire de Frossard devenu Parti socialiste communiste. Son organisation bénéficiait du soutien de plusieurs conseillers municipaux. En fait, qui déchaîna les passions, indique l’influence de Boin : en février 1923, le conseil municipal « communiste » désigna la femme de Boin, et non la candidate du PC, au poste de directrice de l’orphelinat municipal. Pour la première fois depuis la réélection de Gaston Philippe aux fonctions de maire, en mai 1922, le Parti communiste était mis en minorité. Quatre conseillers adhérèrent alors au Parti socialiste communiste.

René Boin rejoignit le Parti socialiste SFIO au cours du deuxième semestre 1924, à l’occasion des élections législatives. Il collabora au Réveil socialiste, journal d’unité ouvrière de la banlieue Nord, et devint un des dirigeants locaux, Boin assura le secrétariat de la section en 1930 et 1931 au moins. Les effectifs socialistes étaient passés de 700 cotisants en décembre 1919, 630 au premier semestre 1920 à 72 en 1925, 12 en 1928, 14 en 1929, 20 en 1930, 3 en 1931, 12 en 1932, 10 en 1933, 28 en 1934, 19 en 1935 et 50 en 1936. Les résultats électoraux n’étaient pas plus brillants que ceux du recrutement. Candidat en deuxième position de la liste socialiste en mai 1929, René Boin recueillit 1 937 voix sur 20 471 inscrits et 17 685 votants (voir Gilbert Pinton*, tête de liste). Il se représenta sans succès aux élections municipales partielles du 16 mars 1930.

Les groupes SFIO de la deuxième circonscription de Bourges (Vierzon) avaient fait appel à lui comme candidat pour les élections législatives de 1928. Son frère Maurice était alors considéré comme le candidat probable dans la même circonscription ; l’élection d’un communiste était d’ailleurs assurée. La concurrence électorale des deux frères n’eut pas lieu, la région communiste présenta à Vierzon, Gaston Cornavin et Maurice Boin, exclu du Parti communiste après les élections, rejoignit la SFIO (voir Maurice Boin*). René Boin obtenait 3 098 voix soit 14,4 % des voix des électeurs inscrits contre 7 609 (35,5 %) au communiste Gaston Cornavin.

René Boin se retira au deuxième tour et ses voix se partagèrent également entre Cornavin et le républicain socialiste Breton qui fut élu. Tout en habitant à Saint-Denis, Boin continua son activité politique dans le Cher. Candidat au conseil général dans le canton de Vierzon en 1931, il recueillit 14,8 % des voix des électeurs inscrits - le socialiste Maillot-Duparc en avait obtenu 5,2 % en 1925. Il retrouvait approximativement ses voix de 1928. Au deuxième tour, il se désista pour le communiste Jean Picot et les deux tiers des électeurs socialistes suivirent sa consigne de vote. Sa deuxième candidature aux élections législatives en 1932, marqua un net recul de la SFIO qui progressait pourtant dans les autres circonscriptions. René Boin ne recueillit que 2 016 voix, soit 9,4 % des voix des électeurs inscrits ; Cornavin obtenait 6 045 voix, soit 28,3 %. De 1927 à 1934, René Boin fut membre de la commission de contrôle de la SFIO. Il écrivait régulièrement dans Le Réveil socialiste du Cher, organe de la Fédération SFIO qui parut de mars 1931 à octobre 1934 ; il y défendait les positions de la tendance de gauche « La Bataille Socialiste ». Dès 1932, il avançait comme mot d’ordre dans Le Réveil socialiste : « Pour le pain ! Pour la paix ! Pour la liberté ! », slogan qui fut « réinventé » au moment du Front populaire. Son échec électoral de 1932 lui fit abandonner son activité militante dans le Cher.

À la différence de beaucoup de militants socialistes dionysiens, René Boin se montra très tôt hostile à Jacques Doriot, maire de Saint-Denis, exclu du Parti communiste en juin 1934. L’Humanité du 25 novembre 1934 publia une lettre où Boin préconisait, contre l’avis de sa section, l’application du pacte d’unité avec le rayon communiste officiel (celui reconnu par le PC) et regrettait que « la section socialiste ait donné par son appui public une sorte d’approbation à une action dissidente ».

Nommé directeur d’école à Stains, près de Saint-Denis, René Boin y milita jusqu’en 1939. Mobilisé en Lorraine, fait prisonnier, il fut libéré en août 1941 comme officier de la guerre de 1914-1918 ; après une convalescence, il entra dans la résistance FFI et fut démobilisé en septembre 1944.

René Boin fut candidat à l’Assemblée nationale constituante, le 21 octobre 1945, sur la liste socialiste SFIO dans le sixième secteur de la Seine (Nord-Est) en cinquième position.

Retraité en 1946, il consacra toute son activité au Parti socialiste. Il fut conseiller municipal de Stains et conseiller général du secteur-nord de 1947 à 1959 ; pendant cette période, il resta plusieurs années au syndic du conseil général de la Seine. À son décès en 1972, la section socialiste de Stains prit son nom : section René Boin (Assemblée générale du 15 octobre 1972) et la municipalité communiste donna son nom à une rue de Stains.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article17049, notice BOIN René par Claude Pennetier, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 16 octobre 2021.

Par Claude Pennetier

SOURCES : Arch. Dép. Cher, 20 M 45, 20 M 46, 21 M 35. — Arch. Dép. Seine, Versement 10451/76/1 et listes électorales. — Arch. Grand Orient. — Arch. Jean Zyromski, dossier Fédération de la Seine. — Professions de foi électorales de 1928 et 1932. — L’Émancipation, 10 mai 1919. — L’Émancipateur, 25 avril 1931. — Le Réveil socialiste (banlieue Nord), 1924. — Le Réveil socialiste du Cher, 1931-1934. — Journal de Saint-Denis, 30 mars 1935. — Congrès de la Fédération socialiste de la Seine. — Jean-Paul Brunet, thèse, op. cit. — A.-M. et Cl. Pennetier, mémoire de maîtrise, op. cit. — Cl. Pennetier, thèse, op. cit. — Documents fournis par Madame E. Pierre, fille de René Boin. — Témoignage écrit de Madame E. Pierre. — État civil de Stains.

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