ROULET Bernard, Georges

Par Alain Dalançon

Né le 30 avril 1925 à Mehun-sur-Yèvre (Cher), mort le 26 novembre 2014 à Sèvres (Hauts-de-Seine) ; professeur de physique ; militant syndicaliste, secrétaire général du SNET (1957-1961).

Bernard Roulet
Bernard Roulet
septembre 1946, coll. familiale

Bernard Roulet ne connut pas vraiment son père, Fernand Roulet, fils d’un marchand de chevaux, ouvrier mort dans un accident du travail à 28 ans, alors qu’il n’était âgé que de trois ans et avait un frère âgé de deux ans et une sœur de quelques mois. Sa mère, née Marie Mouillé, lingère à sa naissance, l’éleva donc avec l’aide de sa grand’mère maternelle, ouvrière décoratrice de porcelaine, qui étaient veuve de guerre.

Pendant l’Occupation, il fut élève-maître au lycée de Bourges (Cher), les écoles normales d’instituteurs ayant été supprimées par le Régime de Vichy. Après avoir obtenu le baccalauréat, il alla en classe préparatoire au collège Chaptal de la ville de Paris pour préparer les concours d’entrée à l’École normale supérieure de garçons de Saint-Cloud et à l’ENS de l’enseignement technique. Admissible à Saint-Cloud, admis à l’ENSET, il fit partie de la promotion 1945-1947, section A1 (mathématiques-physique). Il y rencontra Suzanne Hubert, élève de sa promotion, fille d’enseignants retraités, qu’il épousa le 29 mars 1947 à Mehun-sur-Yèvre. Ils eurent trois enfants : une fille Chantal, devenue médecin, et deux garçons, Jean-Bernard devenu ingénieur et Alain décédé accidentellement.

Comme tous les jeunes hommes de la classe 1945, il n’effectua pas de service militaire. Muni du professorat de l’enseignement technique, il fut nommé professeur à l’école nationale professionnelle d’Armentières (Nord), fut muté à la rentrée d’octobre 1953 au collège technique Diderot à Paris (XIXe arr.), puis en 1954 à l’ENREA (École nationale de radiotechnique et électricité appliquée) de garçons à Clichy (futur lycée Newton).

Bernard Roulet adhéra au Syndicat national de l’enseignement technique dès l’ENSET. Après 1948, il y milita dans le courant « autonome » aux côtés de Georges Lauré devenu seul secrétaire général du SNET en 1951, Philippe Rabier étant secrétaire général adjoint. Il commença à siéger à la commission administrative nationale comme suppléant après le congrès de Pâques 1953, où il intervint pour défendre un syndicalisme « partant de la base » dans la Fédération de l’Éducation nationale, et pour développer l’action commune avec les autres fonctionnaires. Muté à Paris, il devint titulaire l’année suivante et entra au bureau national. Il fut chargé de la « commission des jeunes » (personnels à la situation précaire : surveillants, répétiteurs, adjoints d’enseignement), développa son activité en s’appuyant sur des délégués de catégories pour défendre leurs revendications très concrètes.

Quand Georges Lauré fut élu secrétaire général de la FEN au congrès de novembre 1956, il fit partie du secrétariat national du SNET, Joseph Réveillet faisant fonction de secrétaire général par intérim jusqu’au prochain congrès. Mais ce dernier, ayant été nommé directeur d’études à l’ENSET, refusa de prendre la responsabilité de secrétaire général, de sorte que Bernard Roulet fut élu « faute d’autre candidat », selon sa propre expression, et siégea désormais à la CA et au bureau de la FEN.

Entouré de quatre autres secrétaires en 1957-1958 (Pierre Thuillier*, Robert Janod, Jean Eygout et Réveillet) puis trois en 1958-1959 (Thuillier, Janod et Jean Deslogis), Bernard Roulet, déchargé de service à temps complet, maintint l’homogénéité du secrétariat décidée par la majorité « autonome » au congrès de Pâques 1956, contre le vœu de la minorité « Union pour une action syndicale efficace » dirigée par Etienne Camy-Peyret, son condisciple à l’ENSET, si bien que les élus UASE à la CA nationale votèrent systématiquement contre la composition du secrétariat durant ses mandats.

Bernard Roulet s’efforça cependant de maintenir l’esprit de cohésion des personnels de l’enseignement technique qui avait présidé aux bons rapports entre courants depuis 1948, et permis jusqu’en 1955 la « cogestion » du syndicat par les « autonomes » et les « ex-cégétistes ». Militant pondéré mais déterminé, travailleur, très organisé, il se préoccupa avant tout de défendre l’enseignement technique et ses personnels face à l’administration ministérielle, et comme membre du Conseil de l’Enseignement technique ou commissaire paritaire national des personnels certifiés ou assimilés. Il la défendit aussi dans la FEN, en accord avec Georges Lauré. Il supportait difficilement l’hégémonie du Syndicat national des instituteurs, ce qu’il réaffirma dans son rapport moral de 1958, soutenu sur ce point par la minorité « UASE ».

Bernard Roulet dénonça avec force le putsch du 13 mai 1958 et publia dans le Travailleur de l’enseignement technique le film des événements au jour le jour (grève de la FEN du 28 mai et manifestations). Mais il ne souhaita pas que le syndicat lance un appel clair à voter « non » au référendum constitutionnel, au nom de l’indépendance syndicale, tout en donnant des éléments d’appréciation aux personnels sur les dangers menaçant le droit syndical et les libertés démocratiques. Il fut particulièrement attentif à la défense de la laïcité au moment du vote de la loi Debré et à ses atteintes en Alsace-Moselle ; il se réservait d’ailleurs le rapport sur la laïcité dans les congrès.

Il ne voulait pas passer sous silence le problème algérien, « source de toutes nos difficultés » avec son « cortège d’arbitraires ». Il estimait, avant le congrès de 1959, qu’il « faudrait bien un jour discuter pour reconstruire » et à la fin de l’année, Le Travailleur de l’enseignement technique publia un encart de 4 pages, « La guerre doit finir », faisant l’accord des militants « autonomes » et « UASE ». Au congrès de Pâques 1960, la motion votée à l’unanimité (moins l’abstention du S3 d’Alger) exprimait « son attachement au principe de l’autodétermination » et demandait des « négociations avec ceux qui se battent » pour « obtenir un cessez-le-feu et discuter des garanties que toutes les parties en présence sont en droit de réclamer et de négocier ».

En printemps 1961, Bernard Roulet remit sa démission du bureau fédéral, exaspéré par l’attitude du secrétaire général du SNI, Denis Forestier, qui avait rendu visite au ministre des Finances, en pleine bataille sur la revalorisation, sans même en informer le secrétaire général de la FEN. Il ne reprit sa démission que sur la demande pressante de Lauré et par fidélité à son camarade, reconnaissant son rôle dans le gain d’un reclassement intéressant pour les professeurs certifiés et surtout pour obtenir l’échelle indiciaire 245-475 pour les PTA (professeurs techniques adjoints). Lauré soutint en effet toujours les positions du SNET dans la FEN, souvent en positions intermédiaires entre celles du SNES et du SNI. Il estimait cependant que l’hostilité de la direction du SNET à l’hégémonie du SNI devait être tempérée et ne lui facilitait pas la tâche pour diriger la fédération. Aussi ne retint-il pas Bernard Roulet quand celui-ci annonça à la CA du 22 juin 1961, à la suite d’une réunion des camarades de sa liste, qu’il démissionnait de sa responsabilité de secrétaire général du SNET pour « raison de santé ». Il fut remplacé alors par Louis Astre qui était secrétaire national à ses côtés depuis une année.

Bernard Roulet abandonna alors ses différents mandats syndicaux. Il reprit son enseignement au lycée technique Raspail à Paris, où il avait été nommé pour ordre, puis alla enseigner comme professeur de physique à l’Institut universitaire technologique de Ville d’Avray (Hauts-de-Seine), ouvert en 1967, et termina sa carrière en 1983, comme inspecteur d’académie chargé d’inspection dans l’académie de Versailles.

Il résidait à Sèvres (Hauts-de-Seine), où son épouse avait enseigné les mathématiques au lycée.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article170507, notice ROULET Bernard, Georges par Alain Dalançon, version mise en ligne le 8 février 2015, dernière modification le 12 mai 2022.

Par Alain Dalançon

Bernard Roulet
Bernard Roulet
septembre 1946, coll. familiale
secrétaire général du SNET
secrétaire général du SNET
1959, TET

SOURCES : Arch. IRHSES (dont Le Travailleur de l’enseignement technique, arch. du SNET et fonds Astre transféré aux ANMT de Roubaix). — Julien Veyret, « L’intégration progressive de la logique fédérale : le SNET et la FEN », in La Fédération de l’Education nationale (1928-1992). Histoire et archives en débats, Septentrion, 2010 (art. préparé notamment à partir d’une interview de l’intéressé par Julien Veyret en 2005). — Témoignage de Louis Astre. — Renseignements fournis par son épouse en 2015.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
fiches auteur-e-s
Version imprimable