ROUX Alain, Francis, Amédée

Par Jacques Girault

Né le 11 juin 1935 à Nice (Alpes-Maritimes) ; professeur d’Université ; militant syndicaliste, secrétaire général du SNESup ; militant communiste ; spécialiste de la Chine.

Alain Roux
Alain Roux
1976 (coll. IRHSES)

Son père, normalien de la Drôme, proche de la SFIO puis sympathisant communiste après 1945, éducateur sportif, animateur d’œuvres laïques, épousa une normalienne des Alpes-Maritimes, aux opinions plus pacifistes. Ils enseignaient à Nice où son père devint directeur d’école à Villefranche-sur-mer. Tous deux, électeurs communistes, étaient admiratifs de l’œuvre scolaire de l’URSS. Leur fils unique Alain Roux, éclaireur de France, accomplit toute sa scolarité au lycée Masséna et échoua deux fois à l’École normale supérieure de la rue d’Ulm. Venu à Paris pour accomplir une nouvelle année de préparation au lycée Louis le Grand à Paris, il renonça à terminer son année et devint étudiant en histoire à la Sorbonne jusqu’à sa réussite à l’agrégation d’Histoire en 1960.

A Nice, Alain Roux, élevé dans une ambiance procommuniste, participa à des manifestations lors du procès des époux Rosenberg. Il adhéra au Parti communiste français à la cellule du personnel du lycée Louis le Grand en octobre 1955. Il participa aux manifestations de défense du PCF d’octobre-novembre 1956 alors qu’il militait aussi à la cité universitaire d’Antony où il ne tarda pas à devenir secrétaire de la cellule. Dès la création de l’Union des étudiants communistes, il entra à son bureau national, fit partie du comité de rédaction de Clarté et devint le responsable de l’UEC à la Sorbonne. Il y joua un rôle important dans les actions communistes, affrontant souvent les groupes d’extrême-droite de la Faculté de Droit notamment.

Il se maria en août 1957 à Nice avec Simone Fraysse, étudiante communiste.

Professeur agrégé au lycée de garçons de Douai (Nord) où son épouse enseignait, Alain Roux adhéra au Syndicat national de l’enseignement secondaire. Il effectua son service militaire dans l’armée de l’Air à Rethel (Ardennes), à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône) puis à Cambrai (Nord) où il le termina comme sergent. Il retrouva son poste au lycée de Douai, puis obtint sa mutation pour le lycée expérimental de Montgeron (Seine-et-Oise) et, en 1966 fut nommé au lycée Condorcet à Paris où il exerça jusqu’en 1969.

En 1964, il commença à suivre le séminaire à l’École pratique des hautes études de Jean Chesneaux tout en étant inscrit en Chinois à l’École des Langues orientales « sans pouvoir suivre de cours ». Il obtint une bourse du gouvernement chinois dans le cadre d’un accord intergouvernemental France-Chine et, en congé sans solde, vécut en Chine au début de la Révolution culturelle qui interrompit son apprentissage de la langue chinoise qu’il continua en France à l’aide de leçons particulières et d’enseignement à l’Institut national des langues et civilisations orientales. Il inscrivit à son retour un sujet de thèse sur le mouvement ouvrier à Shanghaï à la fin des années 1920 sous la direction de Pierre Renouvin. Jean Chesneaux prit le relais comme directeur puis fut remplacé par Jean-Baptiste Duroselle et enfin Marie-Claire Bergère. Il obtint plusieurs missions universitaires pour aller travailler en Chine. Au début des années 1980, le PCF signa un accord avec le Parti communiste chinois, comprenant une annexe permettant l’ouverture de certaines archives nécessaires pour ses recherches.

Lors de l’ouverture du centre universitaire expérimental de Vincennes en 1969, il devint assistant au département de chinois. Il lutta notamment contre les analyses et les pratiques des spécialistes de la Chine acquis aux analyses de la Révolution culturelle, dont la littéraire Michelle Loi. Secrétaire de la cellule du PCF dès sa constitution, responsable de l’organisation, avec Maurice Goldring, il dirigea les luttes internes contre les enseignants du centre (Alain Badiou, Gérard Miller, Emmanuel Terray) se réclamant du maoïsme.

Dans le PCF, les activités militantes d’Alain Roux augmentèrent. Depuis mars 1959, il figurait dans le comité de rédaction de La Nouvelle Critique. Dès son retour de Chine en 1966, il fut intégré dans la commission de politique internationale (la “Polex“). Il écrivit plusieurs articles, critiquant les communistes chinois dans la presse communiste, et prononça une conférence dans le cadre de l’Institut Maurice Thorez en 1972 sous le titre « La politique du Parti communiste chinois et la situation actuelle en Chine ; après la révolution culturelle ». Jean Kanapa, devenu responsable de la “Polex“ en 1973, pensait qu’il ne fallait pas rompre totalement avec les communistes chinois comme le demandaient les communistes soviétiques. Alain Roux fut alors un de ses conseillers et rédigea un rapport sur la situation politique en Chine en janvier 1975 après l’initiative de Zhou Enlai sur les « quatre modernisations ». Il accompagna Kanapa en URSS pour rencontrer les instituts travaillant sur les questions internationales. L’ambiance se dégrada rapidement quand le contenu du rapport de Roux fut diffusé. Il en reprit les grandes lignes dans un article de La Nouvelle Critique. En 1981, il fit partie de la délégation du PCF en Chine qui prépara la normalisation des relations entre les deux partis.

Dans le Syndicat national de l’enseignement supérieur, Roux s’imposa comme responsable de la section de Vincennes en lutte contre une majorité de syndiqués qui approuvaient les orientations de l’ancienne direction nationale écartée au congrès de 1969. Membre de la commission administrative nationale du SNESup depuis 1971 sur la liste « Action syndicale », il entra au bureau national et devint rédacteur en chef-adjoint de la presse syndicale. Il participa notamment à la rédaction de la partie sur l’enseignement supérieur du Programme commun de la gauche. Il devint secrétaire général national de 1975 à 1977. Déchargé à plein temps des activités enseignantes, il continua ses travaux de recherche. Au bout de deux ans de mandat, comme il l’avait annoncé, il devint simple membre de la commission administrative et de la commission des conflits pendant quelques années.

À partir du milieu des années 1970, Alain Roux appuya les analyses euro-communistes du Parti communiste, le programme commun, l’intervention soviétique en Afghanistan en 1979, mais désapprouva l’analyse de la direction sur le « bilan globalement positif » lors d’une réunion d’intellectuels communistes au début des années 1980. Délégué au congrès national de 1981, il intervint sur la situation en Chine. Il s’opposait de plus en plus aux analyses de la direction du PCF sans s’engager dans les divers mouvements contestataires. Militant dans la fédération communiste de Seine-Saint-Denis après le transfert du centre de Vincennes à Saint-Denis, réticent par rapport à certaines orientations de la direction fédérale du PCF, lors de la conférence de la section communiste de Saint-Denis préparatoire au congrès de 1989, il condamna l’invitation faite au Parti communiste chinois, pour le congrès national du PCF, au moment où le gouvernement chinois venait de réprimer le mouvement de la place Tian’anmen. Sa position fut approuvée par un tiers des participants. Un article du Monde rendit compte de l’incident.

Par la suite, devant l’absence d’organisation du PCF dans les établissements universitaires, il s‘éloigna de la politique active, tout en continuant à collaborer à la presse communiste.

Alain Roux soutint sa thèse en 1991 à l‘Université de Paris I sous le titre « Ouvriers et ouvrières de Shanghaï, 1947-1949 » et fut élu professeur à l’Université de Paris VIII puis, en 1997, à l’INALCO où il enseigna jusqu’à sa retraite. Il faisait partie aussi du groupe travaillant au Centre d’études sur la Chine moderne et contemporaine de l’École des hautes études en sciences sociales. Son ouvrage sur Mao Ze Dong fut publié aux éditions de l’Université du Peuple, « après avoir subi des corrections pour le transformer en un plaidoyer pour trouver des circonstances atténuantes aux crimes commis par le Grand Timonier ».

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article171175, notice ROUX Alain, Francis, Amédée par Jacques Girault, version mise en ligne le 2 mars 2015, dernière modification le 21 juin 2022.

Par Jacques Girault

Alain Roux
Alain Roux
1976 (coll. IRHSES)

ŒUVRE : Le fichier de la BNF comprend 21 références dont : La Révolution culturelle en Chine, Paris, PUF, Que sais-je ? 1976. — Le casse tête chinois : trente ans de Chine socialiste vus par un communiste français Paris, Éditions sociales, 1980. — La Chine populaire, t. 1, Les fondations du socialisme chinois 1949-1966, t. 2, Du chaos à la voie chinoise vers le socialisme (1966-1984), Paris, Éditions sociales, 1984. — La Chine au XXeme siècle, Paris, SEDES, 1998, puis rééditions, A.Colin. — Le Shanghaï ouvrier des années trente : coolies, gangsters et syndicalistes, Paris, L’Harmattan, 1993. — Grèves et Politique à Shanghai : les désillusions (1927-1932), Paris, Éditions de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, 1995. — Le singe et le tigre. Mao, un destin chinois, Paris, Larousse, 2009 ; traduit en chinois aux éditions de l’Université du Peuple, à Pékin, en 2014, et à l’Université de Hong-Kong publiée en 2017 — Chiang Kaï-shek : Le grand rival de Mao, Payot, 2016. — Avec Xiaohong Xiao-Planes, Histoire de la République populaire de Chine de Mao Zedong à Xi Jinping, Armand Colin, 2018.

SOURCES : Arch. IRHSES. — Renseignements fournis par l’intéressé. — Presse. — Divers sites Internet.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable