ROUX Léontine, Émilie, Louise

Par Jacques Girault

Née le 24 novembre 1883 à Curières (Aveyron), morte le 13 juin 1968 à Chamalières (Puy-de-Dôme) ; directrice d’école primaire supérieure ; résistante ; militante socialiste dans le Puy-de-Dôme.

Fille d’un instituteur, Léontine Roux entra à l’École normale d’institutrices de Rodez (Aveyron) en 1900. Titulaire du brevet supérieur, elle fut nommée institutrice à Sainte Radegonde en 1903, puis institutrice adjointe à l’EPS de Villefranche-de-Rouergue en 1905. Tout en enseignant, elle prépara le certificat d’aptitude au professorat des écoles normales et des EPS en lettres-histoire-géographie auquel elle fut reçue en 1910. Nommée en octobre 1910 professeur à l’EPS de Sète (Hérault), elle eut un congé de maladie et fut soignée en sanatorium en 1913-1914. Nommée à l’EPS de Saint-Gaudens (Haute-Garonne), elle assura l’intérim de la directrice en 1923. Inscrite sur la liste d’aptitude aux fonctions de directrice des EPS, elle fut nommée directrice de l’EPS de Saint-Claude (Jura) en 1930 et titularisée en 1933. Elle entretint de bons rapports avec la municipalité qui encouragea ses initiatives (aménagement d’une salle de lecture, d’un réfectoire avec la création d’un enseignement ménager). Elle fut nommée directrice de l’EPS de jeunes filles de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) en 1935 qui comprenait aussi la direction de l’école pratique annexée à l’EPS, le tout regroupant plus de 1 000 élèves.

Léontine Roux militait dans les organisations pacifistes. Dès 1926, l’inspecteur d’Académie notait dans son rapport : « depuis deux ans elle s’est donnée tout entière aux idées du pacifisme et de morale sociale (Paix par le droit, Ligue des droits de l’Homme, Société des Nations) ; ces préoccupations tournent un peu au mysticisme » mais le recteur ajoutait en 1927 que sa personnalité reflétait « une grande élévation morale » et l’inspecteur général en 1929 concluait : « elle est éprise d’idées morales jusqu’à l’enthousiasme ». En 1930, une petite brochure de Léontine Roux parut sous le titre La Paix ? demain , si le peuple le veut à Nîmes imprimée par le mouvement La Paix par le droit. En 1933, elle adopta une fille d’un chômeur étranger, abandonnée par sa mère qui voulait la tuer « dans un accès de misère et de désespoir ». En août 1933 et en décembre 1936, elle participa à Bruxelles à des congrès mondiaux pour la paix et en 1935 faisait de la propagande pour la Maison de la paix à Genève. Non gréviste le 12 février 1934, elle avait déclaré par écrit au recteur qu’elle approuvait le mouvement. Et le recteur commenta : « Cela est très méritoire de la part de cette nature généreuse mais emballée ». Elle fut engagée dans les mouvements antifascistes favorables au Front populaire et en 1936-1937 devint la présidente d’honneur de l’association amicale des anciennes élèves de l’EPS et de l’école pratique de Clermont-Ferrand.

Le gouvernement, le 19 janvier 1940, prononça sa suspension de ses fonctions de directrice. Elle protesta dans de nombreuses lettres au ministre. Après une perquisition à son domicile à la fin de 1939, furent saisis des brochures et des tracts pacifistes. Inculpée d’infraction aux décrets de juin et septembre 1939 par le Tribunal militaire de la 13e région, le 26 janvier 1940, elle affirma ne pas être communiste et n’avoir jamais milité « dans une organisation de pacifisme intégral ». Elle énuméra ses engagements : membre du conseil de direction de “La Paix par le Droit“, vice-présidente de la section clermontoise de la Ligue des droits de l’Homme, militante de la Ligue des mères et éducatrices pour la Paix, présidente du Rassemblement universel pour la Paix. Membre du Parti socialiste SFIO, elle précisa « je ne vais pas aux réunions ». Elle déclarait : « je suis éducatrice et je ne voulais pas que mes élèves puissent connaître mes opinions en matière politique ou religieuse ou areligieuse ». Dans une lettre à son avocat, le 20 février 1940, elle énumérait des aspects de son intervention pédagogique (enseignement de la morale, direction des loisirs, organisation des kermesses, voyages scolaires à Paris, décoration de l’école « souvent payée par moi », « j’ai embelli mon école », réparation de 13 salles, plantation d’arbres, aménagement de toilettes, de vestiaires, de salle de lecture et de silence, création d’une coopérative, organisation de projections cinématographiques). Finalement, le Tribunal, le 25 février 1940, prononça un non-lieu.

Léontine Roux fut autorisée, le 5 mars 1940 à reprendre la direction de son EPS avant d’être mutée, en octobre 1940, comme directrice de l’EPS de Biarritz (Pyrénées-Atlantiques). Elle refusa ce poste pour raisons de santé. Un nouvel arrêté la releva de ses fonctions le 20 octobre et l’invita à faire valoir ses droits à la retraite. A sa demande de mise à la retraite, elle expliqua que bien que déchargée de cours, elle enseignait la morale. Son école avait adopté 75 filleuls, accueilli dans l’exode 500 réfugiés. Elle avait « hébergé dans ma chambre plusieurs enseignantes réfugiées ». Sa devise était « Travail, ordre, propreté et discipline ».

A la Libération, elle fut réintégrée comme directrice du collège de jeunes filles de Clermont-Ferrand avec réparation du tort moral et matériel et avec admission à la retraite en novembre 1944. Dans son ultime lettre de trois pages, le 21 novembre 1944, cette fois, rendue publique, à « mes chères collaboratrices, mes grandes filles du collège moderne et technique », elle exalta la Résistance au nom de la morale, l’amour du travail et de la vérité.

Elle fut candidate aux élections de l’Assemblée nationale constituante en 1945 en troisième position sur la liste socialiste SFIO dans le Puy-de-Dôme.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article171186, notice ROUX Léontine, Émilie, Louise par Jacques Girault, version mise en ligne le 2 mars 2015, dernière modification le 2 mars 2015.

Par Jacques Girault

SOURCES : Arch. Nat., F17 25084.

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