Par Jacques Girault, Pierre Petremann
Né le 25 août 1902 à Courthiezy (Marne), mort le 16 mai 1985 à Naveil (Loir-et-Cher) ; professeur-adjoint de mathématiques, surveillant général ; militant syndicaliste, responsable de la FUE et du Syndicat des professeurs adjoints et répétiteurs, fondateur du SPES, secrétaire du SERP, membre du bureau national du SNES ; résistant du Front national universitaire ; militant communiste d’Eure-et-Loir puis de la région parisienne, puis du Loir-et-Cher ; conseiller général du canton de Charly-sur-Marne (Aisne).
Son père, homme d’équipe à la compagnie de chemins de fer de l’Est, communiste depuis 1926, remarié après le décès de son épouse garde-barrière, avait deux autres garçons devenus, instituteur à Ay (Marne), et cheminot à Noisy-le-Sec (Seine), tous deux militants communistes. Il travaillait aussi, avec ses enfants, chez des cultivateurs du village « pour obtenir un complément de traitement nécessaire à sa famille de quatre enfants ».
Marcel Bonin, après des études primaires à Mezy-Moulins (Aisne), boursier, obtint en 1921 le baccalauréat au collège de Château-Thierry (Aisne). Entré en 1922 en classe de mathématiques supérieures au lycée Saint-Louis à Paris, il ressentit un grand « isolement moral », conséquence de la vie de l’internat dans un établissement d’élite où il dit, dans son autobiographie, avoir rapidement « perdu pied ». Il en résulta « une période de flottement, de dégoût des études qui pouvait m’entraîner à la “débine“ intellectuelle ».
Après avoir obtenu en 1925 un certificat de licence (mathématiques générales), il devint maître d’internat aux collèges de Compiègne (Oise, 1923), de Saint-Germain-en-Laye (Seine-et-Oise/Yvelines, un mois en 1924) puis au lycée Lakanal à Sceaux (Seine/Hauts-de-Seine, 1924-1927). Il épousa en septembre 1927 à Naveil (Loir-et-Cher), Madeleine Noël, répétitrice au lycée Victor Duruy, née le 10 novembre 1902 dans cette commune, fille d’un vigneron franc-maçon. Il l’avait rencontrée lorsqu’elle était maîtresse d’internat au lycée Condorcet à Dijon, et qu’elle avait été élue, lors de sa création le 5 avril 1925, secrétaire adjointe du syndicat des maîtres et maîtresses d’internat de l’académie de Dijon. Le couple eut trois enfants.
Marcel Bonin partit au service militaire dans un régiment d’infanterie à Compiègne (novembre 1927-mai 1929), où il fut refusé aux EOR car « PR » (présumé révolutionnaire). Nommé au lycée Janson de Sailly en mai 1929, il devint répétiteur au collège de Dreux (Eure-et-Loir) en octobre 1931 et obtint sa mutation en octobre 1934 au lycée Janson de Sailly.
Marcel Bonin adhéra au Parti communiste à la fin de 1924 à la cellule de Sceaux « avec plusieurs maîtres d’internat », participa à la création de cellules dans son village de Mezy-Moulins et collabora à L’Exploité, hebdomadaire communiste régional. Domicilié à Fontenay-aux-Roses (Seine/Hauts-de-Seine) après son mariage, il milita localement. Après la naissance du premier de ses enfants et la maladie de son épouse, il continua à cotiser sans militer. La fraction communiste de la Fédération unitaire de l’enseignement le suspecta et demanda des sanctions, mais la direction du Parti lui donna raison.
Bien qu’habitant Paris, avenue de Suffren, Marcel Bonin militait à Dreux. Il y organisa le rayon communiste dont il devint le trésorier (1932-1934) puis le secrétaire (1934-1936), avant d’être le trésorier de la région d’Eure-et-Loir-Loiret à sa création en 1934. Après sa nomination à Paris, il continua à militer en Eure-et-Loir. Dans son rapport sur la conférence régionale, le 22 décembre 1935, Paul Bouthonnier notait qu’il avait fait « un très bon travail » et que, lors d’une conférence entre Parti communiste et Parti socialiste à Dreux, il avait « exposé notre thèse sur le parti unique du prolétariat ». L’année suivante, pour la conférence régionale, le 21 juin, il remplaça le secrétaire régional pour présenter le rapport. Dans son rapport, Hubert Ruffe notait qu’il avait été « déplacé à Paris », mais qu’il aidait la direction régionale. Il avait demandé à être aidé pour financer ses déplacements ; tout en estimant normale cette demande, Ruffe n’avait pris aucun engagement. En février 1937, la conférence régionale lui confia la responsabilité de secrétaire de la région communiste. Depuis 1934, il participait à la rédaction du Travailleur, hebdomadaire régional (Loiret, Loir-et-Cher, Eure-et-Loir) et signait la plupart des éditoriaux de la page d’Eure-et-Loir. On le retrouva dans de nombreuses réunions communistes en Loir-et-Cher notamment. Il assista à la conférence nationale du Parti communiste en 1936, à celle des secrétaires régionaux et à une réunion du comité central élargi en 1937. Candidat aux élections législatives à Dreux en avril 1936 (il suivit alors les cours de l’école du propagandiste), il obtint 1 663 voix et se désista pour Maurice Viollette député USR sortant. En 1937, candidat aux élections cantonales, il organisa le parrainage des organisations communistes du département par des sections communistes de Paris. En décembre 1937, il fut délégué au congrès d’Arles. Par la suite, il abandonna ses responsabilités politiques pour se consacrer au syndicalisme enseignant.
Marcel Bonin, membre du bureau national (1925-1927) du Syndicat national des maîtres d’internat, en devint le trésorier puis le secrétaire général. Il militait aussi dans la Fédération unitaire de l’enseignement. En 1931, organisateur à Dreux de la section départementale de la CGTU, il était déjà partisan du syndicat unique rassemblant toutes les catégories au niveau départemental, et il lança un mouvement syndical unique en 1934, initié par quatre militants unitaires et quatre confédérés. Partisan de l’unification des syndicats de catégories, à commencer par la sienne, il fut un des artisans de la création en 1933 du Syndicat national des professeurs-adjoints, répétiteurs et répétitrices des lycées et collèges de France et des colonies provenant de la fusion entre les deux syndicats des personnels des lycées et des collèges, qui adhéra à la Fédération générale de l’enseignement-CGT. Membre de sa commission exécutive en 1933-1934, il milita pour la constitution par la Fédération générale des fonctionnaires de comités d’entente de fonctionnaires dans chaque localité et chaque établissement pour lutter contre la politique d’austérité. Il critiqua l’action de la CGT lors de grève du 12 février 1934, en regrettant qu’elle n’ait pas rejoint la CGTU qui est « la machine de la révolution prolétarienne, tandis que la CGT en est le frein » (Le Professeur adjoint, n° 7, avril 1934). Au printemps 1934, il ne fut plus que membre suppléant de la commission exécutive. Au début de l’année 1935, après le changement de stratégie du Parti communiste, alors que le Rassemblement populaire était en marche et que la réunification entre la FGE et la Fédération unitaire se profilait, il redevint membre titulaire de la CE de son syndicat et le représenta à la CE de la FGE avec le secrétaire général Dabout.
Secrétaire de la section des professeurs et assimilés de la Fédération de l’enseignement, Marcel Bonin devint en août 1935, lors de la conférence nationale d’Angers, secrétaire général de L’Université syndicaliste, organe de ces enseignants unitaires du second degré, pour très peu de temps, puisque la fusion entre la FGE et la FU intervint quelques mois plus tard. La responsabilité de L’Université syndicaliste, maintenant organe du nouveau Syndicat des professeurs de l’enseignement secondaire affilié à la FGE unifiée fut confiée à Marcel Cornu, un autre militant unitaire. Dans le même temps, Bonin participa avec Georges Cogniot, à une délégation de l’Internationale des travailleurs de l’enseignement à un congrès du Secrétariat professionnel international de l’enseignement à Berne en août 1935. Il devint membre suppléant du comité exécutif de l’ITE au congrès de Meudon en août 1935 et participa à la Conférence de défense des libertés universitaires d’Oxford (août 1935).
En 1936, après la réunification syndicale, il représenta son syndicat à la commission administrative de la FGE. En 1937, il participa activement à la fondation du SPES (Syndicat du personnel de l’enseignement secondaire) affilié à la FGE-CGT, provenant de la fusion de quatre syndicats de la FGE (professeurs de lycée, de collège, des professeurs-adjoints et répétiteurs, des maîtres d’internat). Il fut membre de la commission exécutive et de la commission des affaires internationales en 1938.
Lors du congrès de la Fédération des fonctionnaires (11 novembre 1938), Bonin intervint pour souhaiter une politique de fermeté contre Hitler et à Noël 1938, au congrès de la Fédération générale de l’enseignement dont il était membre de la commission administrative, il s’opposa au rapport présenté par André Delmas. Pour le 30 novembre 1938, il présenta au proviseur la déclaration de grève. Au congrès du SPES d’avril 1939, il devint membre du bureau, secrétaire corporatif des professeurs-adjoints et fit partie de la commission d’éducation sociale. Lors de la réorganisation du bureau du SPES décidée par la CE du 27 octobre 1939 (après la signature du pacte germano-soviétique et l’exclusion des communistes de la CGT), il fut maintenu à son poste de responsabilité dans le bureau.
Mobilisé en septembre 1939, il fut affecté à l’école primaire supérieure d’Orléans en octobre suivant, en raison du déplacement des lycées parisiens en province. Il refusa, en février 1940, de répondre aux questions de l’Inspecteur d’Académie sur le pacte germano-soviétique qu’il avait justifié, indiquant qu’il n’avait pas démissionné du Parti communiste et qu’il avait cessé de cotiser depuis l’interdiction du Parti. Aussi en mars 1941, l’inspecteur jugea-t-il son « attitude intolérable ». Appelé dans un régiment d’infanterie à Soissons en février 1940, démobilisé en août 1940, il reprit son poste de professeur-adjoint au lycée Janson de Sailly à la rentrée. Il se mit immédiatement en contact avec l’équipe de L’Université Libre et avec Edmond Lablénie, professeur dans le même établissement, un des principaux organisateurs de la manifestation du 11 novembre 1940. Il appartint au Comité de défense des professeurs et étudiants de l’université de Paris au lendemain de cette manifestation. Il semblerait qu’il ait fait le lien entre le PCF et le comité de défense mis en place au lycée Janson et qui fut l’un des premiers. Révoqué en avril 1941, il protesta par lettre, invoquant ses bonnes notes, sa bonne conduite sous les drapeaux et surtout l’absence de motifs. Il exerça au collège Sainte-Barbe comme professeur de mathématiques de novembre 1941 à juillet 1944 et poursuivit les actions clandestines des enseignants communistes (diffusion de L’Université libre). En septembre 1943, il remplaça Jacques Pastor, appelé à l’état-major des FTPF, comme organisateur des comités de base. En octobre 1943, il prit part à l’organisation du Front national universitaire et devint responsable du triangle de l’enseignement secondaire, représentant le PCF, aux côtés de Jarry (liaisons syndicales) et de Lablénie (Front National). Il chercha pendant toute la période à établir des liens entre résistance et syndicalisme ; il considérait le FNU comme un outil de l’unité syndicale et écrivit plusieurs articles dans L’Université Libre, après la Libération de Paris, sur les revendications salariales et l’unification par le haut des traitements.
Marcel Bonin joua un rôle important dans l’insurrection parisienne avec la milice de Janson de Sailly. Il participa à l’occupation du ministère de l’Éducation nationale, le 20 août 1944, à l’installation du nouveau secrétaire général du ministère Henri Wallon et fut l’un des organisateurs du rassemblement d’un millier d’enseignants dans la cour du ministère, le 30 août. Le 24 octobre 1944, nommé membre du Conseil supérieur d’enquête par le ministère de l’Éducation nationale, détaché au conseil chargé de l’épuration dans l’enseignement, siégeant dans la commission chargée des inspecteurs d’Académie, il fut très critique, avec des membres du FNU, lors de remises en question des avis du conseil par le ministre de l’Éducation nationale Capitant. À la fin 1944, il fit plusieurs voyages en province au nom du comité directeur du FNU, avec l’objectif d’établir un état du mouvement et de mesurer l’état d’esprit des militants. Il en revint avec des rapports précis et avec l’idée que le FNU devait devenir un rassemblement d’intellectuels le plus large possible, rôle que joua plus tard l’Union française universitaire. Secrétaire général du second degré dans le bureau provisoire des membres de l’enseignement des cinq régions parisiennes du PCF, le 26 décembre 1944, lors du congrès du FNU, il devint membre de son comité directeur. À la même époque, il était le vice-président de l’Association des anciens combattants de la résistance de l’Éducation nationale qui publiait une revue Notre droit.
Dès le début de l’année 1945, Marcel Bonin milita dans le nouveau Syndicat national de l’enseignement secondaire de la FGE-CGT. Il était partisan du maintien des représentants des catégories, en attendant leur disparition, et de la fusion entre syndicats du second degré (SNES-Syndicat national des collèges modernes-Syndicat national de l’enseignement technique), estimant que le mouvement devait venir de la base et s’opérer par étapes (congrès du S 2 de Paris en février 1945). Au premier congrès national du SNES de Pâques 1945, il fut chargé du rapport sur cette fusion des syndicats du second degré de la FGE et devint secrétaire de la commission d’unification entre les trois syndicats, qui déboucha sur une « Union des syndicats du second degré » créée aux congrès de Pâques 1946 et qui se dota de statuts préparatoires à la fusion. Il devint en outre membre du bureau national du SNES, secrétaire de sa commission de l’éducation sociale, responsable des professeurs-adjoints. Au congrès du SNES de 1947, il fut encore le rapporteur sur la fusion entre les syndicats du second degré qui avaient réuni ensemble leur CE les 17 au 17 janvier 1947. Mais la fusion espérée ne se réalisa pas, en raison notamment d’oppositions très fortes entre le SNCM et le SNET (apprentissage). Il fut en même temps délégué des professeurs-adjoints au Comité consultatif du second degré, à partir de 1946, succédant à Henri Lecomte, entré dans les services administratifs du ministère de l’Éducation nationale.
Le 1er juillet 1945, il devint le secrétaire du Syndicat des enseignants de la région parisienne qui regroupait au sein de la FGE, alors membre de la CGT, l’ensemble des syndicats enseignants de la Seine et de la Seine-et-Oise. Son élection à la tête du SERP, alors qu’il était minoritaire, venait du fait que les statuts du syndicat de la région parisienne limitaient le poids du Syndicat national des instituteurs et que son courant était majoritaire dans le SNES et dans le SNET. Il joua un rôle important lors des actions enseignantes de la période pour le reclassement (manifestation du 27 juin 1946), regrettant que la FEN n’ait pas joué un rôle plus mobilisateur au plan national.
Lors de la grève des instituteurs de la Seine en novembre-décembre 1947, il fit décider la grève par le SERP qui organisa un Comité régional de grève de l’Éducation nationale, avec aide financière aux grévistes, et demanda l’engagement du SNES et de la FEN sur le plan national aux côtés des grévistes. Une violente altercation l’opposa à la direction du SNES lors de la réunion du bureau national, le 27 novembre ; il déposa une motion condamnant l’attitude du secrétaire général Robert Guitton qui était intervenu auprès des chefs d’établissement et de la radio pour dissuader les personnels du second degré de faire grève. Il demanda l’aide fédérale, ce qui lui valut une opposition très forte de la part d’Adrien Lavergne, qu’il accusa de défendre davantage des positions de la tendance Force ouvrière que des mandats syndicaux.
En tant que secrétaire du SERP, Marcel Bonin fut, dans les débats internes, l’un des porte- parole du courant unitaire. Il demanda notamment plus de fermeté dans l’épuration, que la FGE se dote d’un permanent, qu’elle prenne des distances avec la Fédération générale des fonctionnaires. Au congrès de la Fédération de l’Éducation nationale, intervenant le premier en tant que secrétaire de la section départementale, il présenta une sorte de contre-rapport et Adrien Lavergne nota que cette intervention constituait « en quelque sorte, elle aussi, un rapport moral préliminaire de la région parisienne ». Le ton équilibré de ses remarques signifiait qu’il savait critiquer sans que ces objections mettent en cause les orientations générales de la direction sortante qu’il approuvait.
Dans le grand débat de l’organisation du début de l’année 1948, il coordonna la campagne pour le maintien à la CGT pour l’ensemble des enseignants. Il signa, en janvier 1948, l’appel sous forme de petite brochure Nous resterons unis dans la CGT avec Louis Guilbert, Maurice Loi et Jacqueline Marchand, texte qui servit de support à la campagne cégétiste au sein du SNES pour la consultation de février 1948. Il dirigea le Bulletin hebdomadaire d’informations, à l’usage des militants de l’Enseignement luttant pour le maintien à la CGT publié à partir du 31 janvier 1948. Il signa (avec Louis Guilbert, Paul Delanoue et Ernest Kahane) une nouvelle brochure A tous nos collègues de l’Éducation nationale, et une autre de 20 pages, Pourquoi nous resterons à la CGT. L’Éducation nationale et la scission (édité par le SERP), expliquant les raisons du maintien de la FEN à la CGT, dénonçant la scission de la CGT provoquée par Force ouvrière et les manœuvres scissionnistes de tous les partisans de l’autonomie. Dans le SERP notamment, il fit appliquer les statuts en interdisant l’entrée du congrès aux syndiqués qui n’avaient pas acquitté leurs cotisations confédérales. Un second congrès, majoritaire, se tint avec les délégués partisans de l’autonomie ou de la CGT-FO. Il s’inclina au congrès national de la FEN et accepta la fusion des deux délégations, en respectant les votes des syndiqués. Il fut alors remplacé au secrétariat du SERP par Paul Ruff, partisan de la CGT-FO, qui reçut le soutien des autonomes.
Lors de l’élection des membres du personnel des premières commissions paritaires, le 17 février 1948, il fut élu commissaire paritaire national des adjoints d’enseignement scientifiques, sur la liste présentée par le SNES et fut réélu aux élections suivantes de 1952.
Au congrès du SNES de 1948, Marcel Bonin, accepta l’autonomie et la double affiliation, fut élu membre de la CA parmi les « cégétistes », et resta secrétaire de la catégorie des professeurs-adjoints et des adjoints d’enseignement ; il fut également élu à la CA fédérale au titre des « cégétistes » et en resta membre suppléant de 1950 à 1952. Il milita aussi dans la FEN-CGT à laquelle il appartint jusqu’en 1956.
En même temps, il devint un des responsables de la liste « B » des « cégétistes » aux élections pour la CA nationale du SNES de 1950, dont la tête de liste était Guilbert. Il milita ensuite dès 1951 pour l’union dans la FEN et le SNES et l’élargissement de cette liste ; aux élections pour la CA nationale de mai-juin, sept militants non-cégétistes (sur vingt-six candidats) apparurent sur la liste « B d’Union et d’action syndicaliste » Pierre Paraire, Pierre Duthu, Granier, Bouquely, Dupont, Humblot, Bultel), lui-même ne se présenta que pour le secrétariat de catégorie qu’il conserva contre le candidat de la liste A, Charles Cordier. Cette même année 1951, il défendit le Comité d’action universitaire aux côtés des dirigeants autonomes du SNES, dont le secrétaire général Albert-Claude Bay, contre les critiques du SNI. Au nom de l’unité d’action autour de la revendication du reclassement, il soutint le Comité dans la presse syndicale. En 1952, il effectua une tournée syndicale dans les établissements d’Algérie avec Bay.
Un ancien partisan de l’autonomie, élu de la liste A, secrétaire de la section académique de Poitiers, Gilbert Tessier, qui s’était exprimé dans L’Action syndicaliste universitaire à la fin de l’année 1951, rallia la liste « Union et action syndicaliste » et en devint le dirigeant avec Louis Guilbert. Cet élargissement correspondait à une tentative de rapprochement entre tendances au plan fédéral, concrétisée par la mise en place de la commission des « trois » (Adolphe Baillet, Louis Guilbert,Robert Chéramy) lors du congrès de la FEN de novembre 1952 pour trouver des points communs au niveau de l’orientation, tentative qui échoua. En mars 1953, il écrivit un vibrant appel dans L’Action syndicaliste universitaire à rejoindre la FEN-CGT.
Après la mise en sommeil de la double affiliation, consécutive à l’appel du Bureau politique du PCF aux instituteurs de janvier 1954, Louis Guilbert et lui cherchèrent à se faire admettre sur la liste autonome en 1955. Leur demande se heurta à un refus ironique et créa des difficultés au sein de la liste « B » : Guilbert ne pouvait plus être le seul tête de liste, il fit équipe avec Bonin et Camille Canonge, un cégétiste non-communiste très attaché à la FEN-CGT. Puis Gilbert Tessier seul fut tête de liste en 1956. Après 1955, Bonin ne figura plus sur la liste « B », autrement que comme candidat au secrétariat de sa catégorie.
Dans cette responsabilité, il s’opposa à la direction du SNES à propos de la revendication de l’assimilation des adjoints d’enseignement aux chargés d’enseignement. Lors des premières élections au suffrage universel des syndiqués sur listes de tendances pour le renouvellement de la CA nationale en mai-juin 1949, il fut battu, de dix-sept voix, pour l’élection du secrétaire de catégorie au profit de Jean Waiss d’Avignon. Les cégétistes menèrent alors une campagne d’explication, fondée sur sa popularité et les résultats qu’il avait obtenus ; une pétition demanda son retour. D’autre part, ils soulignèrent la malfaisance du vote de tendance qui privait ainsi une catégorie d’un de ses plus actifs représentants. L’année suivante, il présenta une « liste d’union des adjoints d’enseignement et des professeurs adjoints » composée de deux « cégétistes », un « autonome » sans partisan de la CGT-FO, à la différence de la liste concurrente. À l’issue d’une vive campagne, la liste Bonin l’emportait avec 91 voix d’avance ; il retrouva sa responsabilité et la conserva jusqu’à son changement de catégorie. Il fut ainsi le seul cégétiste à détenir une responsabilité de secrétaire de catégorie jusque dans les années 1960, avec parfois le secrétaire de catégorie des élèves des écoles normales supérieures et celui des surveillants.
Il considérait son activité en tant que secrétaire de catégorie du SNES comme un modèle qui permettait de s’attacher avant tout aux questions revendicatives des personnels qui pouvaient être défendues dans les commissions et par des rapports constants avec l’administration. Cette attitude satisfaisait les militants majoritaires mais était critiquée par les minoritaires « École émancipée ». Son action syndicale permit l’unification entre professeurs-adjoints et adjoints d’enseignement et la revalorisation catégorielle.
Le 27 août 1953, Marcel Bonin, victime d’un accident d’automobile, fut grièvement blessé et reprit son service en janvier 1954. Son épouse, qui était devenue surveillante générale en 1950 au lycée Paul Bert, décéda des suites de ses blessures. Il se remaria en septembre 1955 à la mairie du XVe arr. de Paris.
Il avait été détaché depuis la Libération. En février 1948, il demanda le renouvellement de cette situation pour exercer les fonctions de secrétaire général du SERP. Le ministère accepta pour une demie-décharge. Il reprit un service complet de professeur-adjoint chargé des études à Janson de Sailly, le ministère acceptant qu’il soit libéré trois jours à 16 heures pour assurer ses permanences syndicales. En février 1949, le ministère lui accorda une demi-décharge. Inscrit sur la liste d’aptitude aux fonctions de surveillant général en 1951, il obtint un tel poste en octobre 1953 au collège Lavoisier puis au lycée Janson de Sailly à partir de janvier 1954, et en 1959 lui fut confié la surveillance des classes préparatoires scientifiques. Son dossier ne mentionnait pas de fonction de surveillant général au lycée Buffon à Paris.
Marcel Bonin fut élu en 1954 secrétaire de la catégorie des surveillants généraux (70 % des voix) à la CA nationale et au bureau national du SNES, et ne fut plus que suppléant aux élections de 1964. Il était également élu membre suppléant de la commission administrative paritaire nationale pour cette catégorie (1955), et siégea ensuite comme titulaire de sa commission permanente (promotions, mutations). Grâce à son action, de nombreux surveillants généraux purent devenir censeurs ou chefs d’établissement ; ceux des collèges d’enseignement technique purent être titularisés. Il travailla aussi à l’élaboration d’un statut de sa catégorie qui ne vit le jour qu’en 1970 avec la création des conseillers principaux d’éducation des lycées et conseillers d’éducation des collèges.
Lors de son départ à la retraite en 1965, ses collègues lui offrirent un voyage en URSS. Bonin demeura membre du bureau national du Groupement des retraités de l’enseignement secondaire et fut le responsable de la section départementale du Loir-et-Cher des retraités du SNES.
Sur le plan politique, Marcel Bonin fut candidat communiste aux élections municipales de Paris en avril 1945. En septembre 1945, il se présenta pour le siège de conseiller général de Charly-sur-Marne (Aisne). Le canton avait alors pour dernier conseiller général l’URD Martin, dont la révocation avait été demandée ; devant être remplacé par l’URD Louis Turbil, il fut finalement maintenu. Au renouvellement de septembre, Martin ne se représenta pas. Bonin arriva en tête des trois candidats, avec 1 732 voix (43,04 % des exprimés). 30,4 % des électeurs inscrits ne s’étaient pas déplacés. Les trois candidats se maintenant, il fut élu avec 2 072 suffrages (51,5 %). Mais en septembre 1951, il fut battu par le candidat de droite.
Marcel Bonin se retira à Naveil près de Vendôme (Loir-et-Cher), commune d’origine de sa première épouse. Animateur de la cellule communiste de Savigny-sur-Braye, lors de la conférence fédérale de novembre 1968, selon le rapport de Gaston Plissonnier, il déclara ne pas approuver la réprobation de l’intervention soviétique tout en gardant sa confiance dans le Parti. Il devint conseiller municipal en 1971 de Naveil puis troisième adjoint au maire de droite en 1977. Membre du comité de la section communiste de Vendôme et de la commission fédérale de contrôle financier du Loir-et-Cher (1971-1974), il fut candidat au conseil général dans les cantons de Savigny-sur-Braye (1967, 1973 – 182 voix, sixième position) et de Saint-Amand-de-Vendôme (1970, 304 voix, quatrième position). Il militait dans diverses associations, section des Vieux de France, président-trésorier du comité France-URSS de Vendôme, comité national de France-URSS, responsable départemental de la Fédération des élus républicains, président de la section de Vendôme de l’ARAC.
Par Jacques Girault, Pierre Petremann
SOURCES : Arch. Nat., F7/13025, F17/24 853, 27599, 28421. — Arch. PPo, B 12, 43 701 (dossier Breuillard). — Arch. Dép. Aisne, 3 MM 4, 7444, 10 756 .— Arch. comité national du PCF. — RGASPI, 495 270 3172, 517, 1, 1818, 1892, 1908, 534, 6, 112. — Marcel Bonin, Mémoires manuscrites, archives J. Maitron. — Témoignage recueilli par Didier Lemaire. — Arch. IRHSES (fonds Bonin, presse syndicale : bulletin du Syndicat des PA, du SPES, L’Université syndicaliste, L’Action syndicaliste universitaire, L’Enseignement public). — La Liberté de l’Aisne, n° 48 du 8 septembre 1945.— Notes d’Alain Dalançon, Laurent Frajerman, Frédéric Stévenot.