RÉGOBIS Louis, Charles

Par Daniel Grason

Né le 23 juillet 1903 à Paris (XXe arr.), mort le 30 avril 1945 à Sandbostel (Allemagne) ; menuisier ; militant syndicaliste CGT ; militant communiste ; déporté.

Fils de Vincent Régobis, ébéniste, et d’Augustine, née Dinouard, ménagère, Louis Régobis épousa Henriette Ben Billoud le 30 avril 1927 en mairie d’Asnières, le couple vivait dans un petit pavillon dont ils étaient propriétaires au 209 rue du Ménil à Asnières (Seine, Hauts-de-Seine). Il travailla aux usines Chausson rue de Malakoff à Asnières du 8 mai 1936 au 29 novembre 1938. Militant du parti communiste et de la CGT, il fut licencié pour « faits de grève » après l’échec de la grève du 30 novembre 1938 contre les décrets Daladier-Reynaud qui remettaient en cause les acquis du Front populaire.
Chômeur, il ne retrouva du travail que le 27 avril 1939 à la maison Girard, rue Flammarion qu’il quitta le jeudi 10 août, il entra le samedi 12 aux établissements Clément rue Defresne-Bapst, à Asnières. Mobilisé en septembre 1939 au 34e Régiment d’artillerie à Meaux (Seine-et-Marne), fait prisonnier à Moulins (Allier), il se serait évadé, se fit démobiliser le 14 août 1940 à Puylaurens (Tarn). Il regagna son domicile le 28 août.
Dès son retour il reprit contact avec Bernard Jugault et Marcel Couvri, un ancien combattant des Brigades internationales. En ce dernier trimestre de l’année 1940 les militants communistes tentaient d’implanter des Comités populaire de chômeurs à Asnières et dans d’autres villes de la Région parisienne. Du fait de son licenciement des usines Chausson en 1938, Louis Régobis était connu de la police. Le 13 novembre 1940 des policiers de la Brigade spéciale d’intervention (BSi) du commissariat de la ville l’interpellèrent, après un interrogatoire, il était relaxé.
Le 27 novembre les policiers perquisitionnèrent son domicile, des papiers du « Comité des Chômeurs de Paris-Ouest, section d’Asnières » et du « Comité féminin des prisonniers de guerre » étaient saisis, après un interrogatoire musclé, il était déféré au Dépôt, puis incarcéré à la prison de la Santé et ensuite à Fresnes.
Henriette son épouse s’adressa le 6 mars 1941 au préfet de police, elle indiquait « qu’aucune preuve [ne] vienne justifier cette arrestation, c’est un honnête travailleur, bon époux, jouissant de l’estime de tous les habitants de notre quartier ». Elle faisait part des difficultés matérielles auxquelles elle était confrontée. Privée de toutes ressources, elle s’occupait de son père qui était incurable. L’inscription au fond de chômage lui avait été refusée en raison de certificats de travail trop anciens. Elle demandait à pouvoir travailler comme femme de service dans une école.
Les policiers n’ignoraient pas que la structuration du comité était en gestation. Dans un rapport de la police en date du 18 avril 1941 il était écrit : « Régobis qui s’était institué secrétaire du « Comité des Chômeurs Paris-Ouest » semble en fait être le principal instigateur des groupements précités. Ces derniers qui, en réalité, ne devaient avoir qu’une existence fictive, servant à créer de l’agitation parmi les chômeurs, femmes de prisonniers et ménagères, secondant ainsi la propagande communiste ». La situation de dénuement de sa femme était mentionnée : « Actuellement, elle tire ses moyens d’existence de la vente de matériaux qu’elle ramasse quotidiennement dans les poubelles ».
Le 20 mai 1941 la Cour d’Appel de Paris le condamna à deux ans de prison pour « reconstitution de parti politique dissous, infraction du décret-loi du 26 septembre 1939 ». Il purgea sa peine à la prison de Poissy (Seine-et-Oise, Yvelines). À l’expiration de sa peine le ministre de l’Intérieur de Vichy dans une lettre en date du 21 juillet 1942 au préfet de police écrivit « une mesure d’internement ne me semble pas nécessaire ». L’autorité militaire allemande en décida autrement, Louis Régobis fut interné au camp des Tourelles à Paris (XXe arr.) et le 9 mars 1943 au centre de séjour surveillé de Voves (Eure-et-Loir).
Louis Régobis était le 21 mai 1944 dans le convoi de déportés qui partit de Compiègne à destination de Neuengamme dans le nord de l’Allemagne, ils arrivèrent trois jours plus tard. Installé dans une zone humide, marécageuse et insalubre le climat était éprouvant, très chaud l’été, très froid l’hiver. Après avoir extrait de l’argile, les prisonniers fabriquaient des briques.
À la mi-avril 1945 le camp fut évacué dans différentes directions, des déportés dont Louis Régobis entassés dans un train allèrent à une centaine de kilomètres de là. L’aviation alliée bombarda plusieurs fois le convoi qui mit plusieurs jours avant d’atteindre les environs de Sandbostel. Ultime marche vers la mort, une dizaine de kilomètres furent parcourus à pied avant d’arriver au Stalag XB, un camp de prisonniers de guerre où se trouvaient 14000 prisonniers dont 5000 Soviétiques et 4000 Polonais… Des baraques sans porte ni fenêtre où s’entassaient 800 prisonniers par baraque, l’eau une mare, un cloaque sur lequel flottait des cadavres. Des tanks de l’armée britannique entrèrent dans le camp le 29 avril 1945. La mort de Louis Régobis matricule 31884 probablement mort d’épuisement était enregistrée le lendemain.
Après la Libération sa femme Henriette Régobis témoigna, elle déclara notamment : « Mon mari a été conduit au commissariat, où il a été l’objet de sévices de la part de ceux qui avaient procédé à son arrestation, il avait le visage ensanglanté et se plaignait de vives douleurs dans les côtes. [Il était] au camp de Neuengamme, matricule 31884, block 15. J’ai eu de ses nouvelles par l’un de ses camarades de déportation [Aimé] Dolidier qui l’a vu pour la dernière fois le 20 avril 1945. » (Rapport de la commission rogatoire du 8 octobre 1946). Elle travailla comme tourneuse sur métaux à l’entreprise Cochet au 18 rue de Bretagne à Asnières. Début février 1948 elle obtint du ministère des anciens combattants, une allocation mensuelle provisoire d’attente en attendant la fixation de son montant définitif.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article172108, notice RÉGOBIS Louis, Charles par Daniel Grason, version mise en ligne le 20 avril 2015, dernière modification le 23 février 2020.

Par Daniel Grason

SOURCES : Arch. PPo. CB 81.24, BA 1836, BA 2114, 1W 0676, KB 61, KB 64, KB 100. – J.O n° 057 du 08/03/1997. – Bureau Résistance GR 16 P 503630 (non homologué). – Livre-Mémorial, FMD, Éd. Tirésias, 2004. – Cahier des Archives Départementales du Calvados N°34 - 2007. – État civil.

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