RIDEL Eugène, Jean, René

Par Daniel Grason

Né le 24 novembre 1915 à La Garenne-Colombes (Seine, Hauts-de-Seine), mort le 15 octobre 1996 à Cannes (Alpes-Maritimes) ; chauffeur, pointeau, acheteur ; militant communiste ; résistant déporté à Auschwitz et à Mauthausen ; conseiller municipal de La Garenne-Colombes.

Fils de Raymond Ridel, solier, et de Eugénie Morin, sans profession, Eugène Ridel obtint à l’issue de sa scolarité le CEP. Il effectua son service militaire au dépôt d’artillerie de Bourges. Il adhéra au parti communiste à la fin de l’année 1936, section de Courbevoie-La-Garenne. Mobilisé lors de la déclaration de guerre, fait prisonnier, libéré, il fut démobilisé le 25 septembre 1941. À son retour il prit contact avec des ex-responsables de la section. Il devint cycliste permanent appointé 1500 francs par mois, responsable de deux dépôt de tracts.
Il fut arrêté le 24 février 1942 vers 14 heures 15 lors d’un rendez-vous à l’angle des rues d’Alésia et Didot à Paris (XIVe arr.) Les deux inspecteurs de la BS2 l’emmenèrent pour interrogatoire dans leurs locaux à la préfecture de police. Sévèrement battu il reconnaissait qu’il était responsable de deux dépôts de tracts, l’un au 63 rue de Lourmel (XIVe arr.), l’autre au 24 bis rue du Pont à Neuilly (Seine, Hauts-de-Seine), environ 375000 et 250000 tracts étaient saisis. Quelques titres parmi beaucoup d’autres montraient que la lutte contre l’Allemagne nazie était la préoccupation essentielle des communistes : « Les nazis et leurs valets ont fait arrêter Marcel Cachin, le numéro spécial de l’Humanité de janvier 1942, « Les Morts accusent », « Ils ont assassiné Gabriel Péri et Lucien Sampaix », « Les nazis et leurs valets ont fait arrêter Marcel Cachin », un tract s’adressait aux « Camarades socialistes », d’autres aux troupes allemandes « Soldat im Westen : Zeitung der Armee » et « Radio Moscou nous dit »…
Eugène Ridel ne livra que des surnoms « Michel », « Robert » et « Lulu ». Il déclara vivre chez sa mère au 94, boulevard National à La Garenne-Colombes, la visite domiciliaire fut infructueuse, mais les policiers remarquèrent qu’il n’y avait qu’un seul lit, celui de sa mère. Il reconnut habiter au 47 rue du Théâtre à Paris (XVe arr.), les policiers saisirent vingt livrets militaires et vingt bulletins de démobilisation en blanc. Il y eut une confrontation avec Albert Prévoteaux, membre du même groupe. Après dix jours de détention à la préfecture de police, Eugène Ridel était incarcéré le 5 mars 1942 à la prison de la Santé.
Il comparut le 28 octobre 1942 devant la Section spéciale de la cour d’Appel de Paris en compagnie de Victoria Barat dite Ya-Ya, amie d’Alfred Ottino, Jean Mosnay et Albert Prévoteaux. Eugène Ridel eut la plus forte condamnation, six ans de travaux forcés. Transféré à la prison de Fontevrault le 1er décembre 1942, puis à Blois le 23 octobre 1943. Le 27 avril 1944 il était dans le convoi de 1670 hommes à destination d’Auschwitz (Pologne). Envoyé au camp de Gross-Rosen le 24 janvier1945, puis à Mauthausen le 15 février 1945, les déportés furent libérés le 5 mai 1945 par des soldats de l’armée américaine commandés par le général Omar Bradley. Matricule 186322 Eugène Ridel avait survécut aux épreuves de l’univers concentrationnaire.
Sa mère Eugénie Ridel témoigna le 28 avril 1945 devant la commission d’épuration de la police, alors qu’elle ignorait si son fils était vivant. « Ayant appris qu’il avait été arrêté par les Brigades spéciales, je me suis présentée huit jours consécutifs pour avoir de ses nouvelles ». Ces démarches furent vaines, elle eut la possibilité de lui rendre visite à la Santé, « Son linge était tâché de sang » déclara-t-elle. Eugène Ridel témoigna le 7 septembre 1945 : « J’ai été frappé à coups de nerf de bœuf », il cita les noms des tortionnaires. Il fut homologué comme sergent de la Résistance intérieure française (RIF), (JO du 22 juillet 1950), et Déporté, interné, résistant (DIR).
Selon un témoignage recueilli par René Aondetto, déporté à Auschwitz le 6 juillet 1942 qui connut Eugène Ridel à Gross-Rosen, Eugène Ridel : « a été admis au Revier (à Birkenau) et n’a pas été transféré à Buchenwald ». Il n’eut « aucun contact avec ceux de son convoi qui ont tous été transférés à Buchenwald. » Il se considérait « déporté d’Auschwitz et fréquentait l’amicale de ce camp. Il a été évacué d’Auschwitz le 18 janvier 1945 et a échoué à Gross-Rosen (il y reçut le matricule 129.971). »
« Il n’a pas travaillé à Gross-Rosen, a attendu jusqu’à l’évacuation de février 1945. Il m’apprend que c’est le 9 février que nous avons été évacués (je ne me souvenais plus de cette date, et je disais toujours « à la mi-février ». Il a pu s’en sortir grâce à un jeune Juif qui l’a aidé et qui travaillait au « Canada », Kommando de triage, de tout ce que les déportés apportaient avec eux et qui leur était confisqué (il ne se souvint pas du nom, mais de son adresse 50 rue de Turenne à Paris, dans un magasin de vente de confection). Après Gross Rosen, Ridel sera transféré à Mauthausen jusqu’à sa libération le 5 mai 1945. Rapatrié par Mulhouse le 30 mai 1945. » Très sévèrement marqué par les épreuves de la déportation, il a été pensionné à 95%.
Eugène Ridel habita 13 rue du Renard à La Garenne-Colombes, travailla comme acheteur jusqu’en mai 1949 à la Société nationale aéronautique du sud-ouest (SNCASO) à Courbevoie (Seine, Hauts-de-Seine). Il fut membre du comité fédéral de la fédération Seine-Ouest, membre de la commission de contrôle financier jusqu’en 1961, dirigeant de la section communiste de La Garenne-Colombes. En 1953, il était élu conseiller municipal dans une assemblée dominée par la droite.
Il se maria le 4 février 1961 à La Garenne-Colombes (Seine, Hauts-de-Seine) avec Raymonde Leduc, ex-épouse d’André Marty.

L’Humanité du 26 octobre 1996 signala son décès le 15 octobre dans as 91e année.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article172278, notice RIDEL Eugène, Jean, René par Daniel Grason , version mise en ligne le 27 avril 2015, dernière modification le 22 mai 2021.

Par Daniel Grason

SOURCES : Arch. PPo. 77W 239 (dossier Alfred Cougnon), 1W 2211, BA 2056, KB 21, KB 72, GA 241. – Bureau Résistance GR 16 P 510649. – Courriel témoignage de Pierre Cardon du 6 novembre 2017. – Roger Poitevin, Abbaye-Bagne de Fontevraud 1940-1944, Éd. AFMD 49, 2009. – Livre-Mémorial, FMD, Éd. Tirésias, 2004. – L’Humanité, 26 octobre 1996. — État civil.

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