BOULET Paul, Marie, Maurice

Par Jean Sagnes, Gilles Morin

Né le 8 septembre 1894 à Marseille (Bouches-du-Rhône), mort le 28 juillet 1982 à Montpellier (Hérault) ; professeur agrégé de médecine ; militant de la Jeune République puis du MRP, enfin de la Nouvelle gauche ; député de l’Hérault (1936-1951), maire de Montpellier (1935-1937, 1945-1953).

Paul Boulet
Paul Boulet

Fils d’un officier, Paul Boulet fit des études secondaires aux lycées de Béziers et de Montpellier. Après le baccalauréat, il entra à la Faculté de médecine de Montpellier mais bientôt la guerre l’obligea à interrompre ses études médicales. Il fut mobilisé en septembre 1914 comme brancardier au fort de Romainville puis devint médecin-militaire. Blessé en 1916, il reçut la croix de guerre mais fut fait prisonnier par les Allemands en novembre 1917. À son retour, il termina ses études médicales tout en étant interne des hôpitaux en 1920. Après avoir soutenu sa thèse en 1924, chef de clinique médicale en 1925, il passa l’agrégation de médecine en 1926 et devint professeur à la Faculté de médecine de Montpellier en 1927.

Durant la guerre, il avait rencontré l’abbé Basch qui avait appartenu au Sillon, rencontre importante pour son engagement politique futur. De 1919 à 1929, il fut président de la Jeunesse catholique (ACJF). Jusqu’en 1934, il fit très peu de politique. Il se définissait alors comme un homme de gauche mais ne pouvait se reconnaître dans les grands partis de gauche marqués par l’anticléricalisme. C’est alors qu’une nouvelle rencontre, avec A. Nief ancien secrétaire de Marc Sangnier, décida de son engagement politique. Autour de A. Nief et P. Boulet se créa un groupe de la « Jeune République ". P. Boulet, qui appartenait au bureau du Comité des intellectuels antifascistes, était très sensible à la misère des taudis montpelliérains. Ce thème fut particulièrement développé lors de la campagne électorale de 1935 au cours de laquelle P. Boulet fut présent sur une liste de « Rassemblement républicain et socialiste » regroupant des militants de la Jeune République et du PSDF (USR). Au second tour de scrutin, une liste d’Union des Gauches regroupant le Rassemblement républicain et socialiste, les socialistes SFIO, les radicaux et soutenue par le Parti communiste fut élue contre une liste de radicaux de droite et de conservateurs traditionnels. Paul Boulet devenait maire de Montpellier et un des premiers élus du Front populaire en France. Il devint ensuite conseiller général du canton très catholique et jusque-là conservateur de Saint-Martin de Londres. L’action de P. Boulet et de ses amis de la Jeune République pour rompre le monolithisme politique des catholiques du Montpelliérais, jusque-là classés à droite voire à l’extrême droite, se révélait payante au grand mécontentement de L’Éclair journal royaliste de Montpellier.

Au premier tour des élections législatives de 1936, P. Boulet candidat de la Jeune République arrivait en tête des cinq candidats de gauche dans la 1ère circonscription de Montpellier. Léon Blum, de passage dans la ville, incita ses camarades pour lui à faire campagne, en dépit de leurs préventions laïques (témoignage de Robert Verdier). Au second tour, il battait le député sortant de Rodez-Bénavent par 8 467 voix contre 6 831 dans une circonscription réputée catholique et conservatrice. Le congrès de Lyon de la JR du 2 novembre 1936 l’élut à la commission exécutive de l’organisation, il rapporta sur "Dictature et liberté".

À l’Assemblée nationale, P. Boulet déploya une importante activité sur les questions économiques en liaison avec le problème du chômage et sur les questions sociales et de santé publique. Il se montra notamment partisan de l’extension de la loi des congés payés à la main d’œuvre agricole indigène d’Algérie. En octobre 1937, lassé par les rivalités internes au sein du conseil municipal de Montpellier, il démissionna du poste de maire.
Dans la période de déclin du Front populaire, P. Boulet se montra partisan de l’unité de celui-ci. Son combat antifasciste le conduisit aussi à appartenir au Comité d’honneur de la Centrale sanitaire internationale d’aide à l’Espagne républicaine. En 1938-1939, il eut des responsabilités au sein de la Fédération de l’Hérault du Secours populaire français. Il fit en mai 1939 un rapport au deuxième congrès de cette organisation sur les problèmes de l’enfance.

Lors de la déclaration de guerre, il fut volontaire et devint médecin-commandant. Le 10 juillet 1940, il était à Vichy et fut un des 80 parlementaires qui refusèrent de voter pour Pétain. Considéré comme « sympathisant du PCF » par la Sûreté nationale, il était décrit par elle comme « intègre et désintéressé, ennemi de tout favoritisme ». Convaincu d’être un ennemi du régime, il était particulièrement surveillé par les Renseignements généraux qui affirmait en juin 1944 qu’il n’avait pas d’activité politique mais « qu’il n’a pas renié ses anciennes idées et ses sentiments en font un adversaire du gouvernement ».

Paul Boulet fut délégué à l’assemblée consultative provisoire le 7 novembre 1944, et appartint au groupe de la Gauche indépendante. Membre du bureau politique de la Jeune République, il était représentant du MLN en 1945. Il retrouva rapidement tous ses mandats électoraux, connaissant toutefois des déboires au Parlement.

En 1945 et en 1947, Boulet fut réélu maire de Montpellier, poste qu’il conserva jusqu’en 1953. Il fut ensuite conseiller municipal en 1953 puis en 1959 (seul élu d’une liste d’Union de la gauche qu’il dirigeait). Il fut encore élu conseiller général Jeune république de Saint-Martin en 1945-1951. Il ne se représenta pas dans le canton en 1951, tenta de le faire en 1958 et fut battu.

Aux élections du 21 octobre 1945, pour la première Assemblée nationale constituante, Boulet dirigea la liste Jeune République - Mouvement de Libération nationale, mais échoua. Le 2 juin 1946, il fut présenté comme second de Paul Coste Floret sur la liste du Mouvement républicain populaire et il redevint député de l’Hérault. Il fut réélu le 10 novembre 1946, toujours sur la liste du MRP. Il eut une importante activité parlementaire, en faveur de ses électeurs et comme vice-président de la commission de la famille. Il fut rapporteur pour la commission du projet de ratification de la convention créant l’Organisation mondiale de la santé. Pacifiste convaincu, il proposa aussi une loi d’amnistie des faits de collaboration et l’abolition de la peine de mort le 6 juin 1947.

Paul Boulet fut rapidement en désaccord avec la politique nationale du MRP, se prononçant notamment contre le Pacte Atlantique en 1949, générateur de course aux armements et, à terme de guerre, selon lui. Faisant profession de foi neutraliste, il fut exclu du MRP en mai 1950. Aux élections législatives du 17 juin 1951 puis du 2 janvier 1956, le maire de Montpellier fut tête de liste de la gauche indépendante qui obtint un nombre faible et décroissant de voix (10 301 puis 6 012 voix sur plus de 210 000 exprimés). En 1958, il appela à voter « non » au référendum. Fondateur du Comité d’action des gauches indépendantes et de la Nouvelle Gauche, il fit campagne contre la guerre du Vietnam et la CED, puis contre le réarmement allemand.

En mars 1977, il apporta un soutien public à la liste d’Union de la gauche qui fut élue à la mairie de Montpellier.

Paul Boulet, célibataire à la Libération, vivait en concubinage avec une femme russe. Chevalier de la Légion d’honneur, il mourut à Montpellier le 28 juillet 1982.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article17493, notice BOULET Paul, Marie, Maurice par Jean Sagnes, Gilles Morin, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 20 août 2021.

Par Jean Sagnes, Gilles Morin

Paul Boulet
Paul Boulet

SOURCES : Arch. Nat., F7/15490/A n° 2557, rapport des RG du 12 juin 1944, F/1a/3228, F/1cII/285, F/1cII/291, F/1cII/310, F/1cII/320, F/7/15283. CAC, 19910564, art 11, F17/28257. — Arch. Dép. Hérault, 15 M 78 et 79. — Archives du Comité national du PCF. — Le Travailleur du Languedoc, 1935-1939. — Le Languedoc socialiste, 1935-1936. — Le Libérateur, n° 1, 17/1/1954. — J.-J. Jolly, Dictionnaire des parlementaires français, PUF, t. 2, 1961. — Dictionnaire des parlementaires français, 1945-1958, La documentation française, t. 2, 1992— P. Couttenier, Religion et politique à Montpellier, 1934-1935, Maîtrise histoire, Montpellier, 1974. — Notes de Jacques Girault.

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