LAFFONT Paul

Par André Balent

Né le 25 avril 1885 au Mas d’Azil (Ariège), mort assassiné par des membres du PPF le 13 juillet 1944 à Rimont (Ariège) ; avocat ; radical-socialiste ; député de l’Ariège (1914-1929) ; sénateur de l’Ariège (1929-1940) ; sous-secrétaire d’État aux PTT (1921-1924) ; conseiller général de Castillon-en-Couserans (Ariège) de 1918 à 1940 ; président du conseil général de l’Ariège élu en 1939 ; maire de Rimont.

Paul Laffont en 1921
Paul Laffont en 1921

Paul Laffont était le fils de Marie-François, aspirant au notariat âgé de vingt-cinq ans en 1885 et domicilié avec son épouse au Mas d’Azil. Sa mère, Jeanne, Marthe, Louise, Clémentine Benoît propriétaire au Mas d’Azil était, à la même date âgée de vingt-huit ans.

Licencié en Droit , il s’inscrivit au barreau de Toulouse (Haute-Garonne) . Il se maria à Paris (15e arrondissement ) le 16 avril 1939 avec Jeanne, Émilie Theise.

Il s’engagea, à compter du 10 octobre 1905, comme volontaire pour cinq ans au 83e régiment d’Infanterie (RI) cantonné à Toulouse et à Saint-Gaudens (Haute-Garonne). Caporal à son incorporation, il fut mis en disponibilité le dès le 6 août 1906.

Il commença bientôt une carrière politique dans son département d’origine. Il se fit élire en 1914 député de l’Ariège sous l’étiquette radicale-socialiste.

Parlementaire, il fut mobilisé dès le 1er août 1914 dans le 83e RI.. Adjudant à son arrivée au corps le 2 août, il fut promu aspirant le 16 septembre et sous-lieutenant le 2 novembre. Le 1er septembre 1915, il fut détaché à l’école d’Aviation de Buc (Seine-et-Oise / Yvelines). Puis affecté à l’escadrille C 14. Lieutenant le 15 avril 1916, il fut blessé puis évacué le 1er octobre 1916 avant d’être remis à la disposition du Parlement le 2 novembre 1916.

Réélu député de l’Ariège en 1919, il intégra les gouvernements présidés par Aristide Briand puis par Raymond Poincaré. Nommé sous-secrétaire d’État aux PTT — poste gouvernemental nouvellement créé dont il fut le premier titulaire — le 17 janvier 1919, il demeura sans interruption à ce poste jusqu’au 29 mars 1924. Ayant la tutelle des postes de radiodiffusion, il s’intéressa vivement aux conditions de l’implantation de ce nouveau moyen d’information. Il s’affirma d’emblée favorable à la libéralisation de ce nouveau media. Plus tard, dans ses mandats de député puis de sénateur de l’Ariège, il ne cessa de s’intéresser à la radio et à son expansion.

Réélu député de l’Ariège en 1924, il accéda au Sénat en 1929. Outre la radio, ses domaines d’interventions parlementaires étaient les PTT, l’Armée et l’agriculture. En 1938, dans un rapport sur la radiodiffusion. Il s’en prit à la SFIO et dénonça comment Robert Jardillier, membre du gouvernement de Léon Blum ayant autorité sur de moyen de communication aurait livré la radio « à l’esprit de parti le plus borné et le plus agressif ».

Paul Laffont fut élu en 1919 puis réélu jusqu’à la Seconde Guerre mondiale conseiller général du canton de Castillon-en-Couserans (où ne se trouve pas la commune de Rimont). Il devint président du conseil général de l’Ariège en 1939. La résidence ariégeoise de Laffont, le château de la Vignasse, était à Rimont, village situé sur les voies de communication (RN 117 et ligne de chemin de fer de 47 km, aujourd’hui désaffectée, entre Foix et Saint-Girons. Il en fut maire durant de nombreuses années. En 1934, il était domicilié 351 bis rue de Vaugirard à Paris (15e arrondissement)

En 1939, Paul Laffont était l’un des hommes politiques les plus influents de l’Ariège.
Avant la guerre, c’était l’un de ses amis, Jean Claustres, qui était maire de Rimont. Ce dernier fut rapidement évincé par Vichy.

Le 10 juillet 1940, il vota les pleins pouvoirs à Pétain lors de la réunion des chambres à Vichy. Il ne resta que peu de temps favorable à Pétain. Il se détacha rapidement du régime duquel il refusa les propositions. S’il fut destitué de son poste de président du conseil général et s’il se retira apparemment de la vie publique, il conservait beaucoup influence dans le département et, en particulier à Rimont. Il essaya de se rapprocher de la Résistance. Mais dans les rangs de cette dernière on lui reprochait son vote du 10 juillet 1940. En 1943, il demanda d’adhérer au mouvement Franc-Tireur déjà partie prenante des MUR. Lors d’une réunion clandestine de Franc-Tireur à Foix, le chef départemental du mouvement Jules Amouroux, soutint la demande de Laffont. Mais la majorité des militants présents la repoussèrent. En 1944, Paul Laffont soutint l’important maquis FTPF de la Crouzette, implanté près de Rimont. Il fit parvenir au maquis, à trois reprises, une importante somme d’argent. Les Allemands et les collaborationnistes se méfiaient de lui et ne méconnaissaient pas la grande influence qu’il exerçait encore dans la localité. Leur nervosité augmentait au fur et à mesure que le proche maquis du col de la Crouzette multipliait ses actions.

Le 13 juillet 1944, le GAJS (Groupe d’action pour la justice sociale) du PPF (parti collaborationniste fort actif à Saint-Girons) composé de Français
— d’après un rapport du commissaire des Renseignements généraux au juge d’instruction du tribunal militaire de Paris, 13 janvier 1950, les Français du GAJS ayant commis l’assassinat de Paul Laffont et de Charles Labo étaient le suivants : Jean Rives né le 16 décembre 1923 à Saint-Girons (Ariège), Louis Rives né le 9 mars 1927 à Saint-Girons, Louis Bourges né le 16 juillet 1921 à Saint-Girons, Roger Vidalie (Vidali ?) né le 29 juin 1923 à Bétaille (Lot), Louis Losson né le 15 mai 1902 à Liévin (Nord), Arnaud Pelous né le 5 mars 1908 à Laroque-d’Olmes (Ariège), Lucien Raynaud né le 23 décembre 1923 à Montégut-Plantaurel (Ariège), Patrick de Saint-Blancat né le 27 février 1897 à Lescure (Ariège — mais aussi d’un Italien (Paul Righini ou Rigini) et d’un Allemand —Sarrois — John Helmut, interprète de la Sipo-SD, arriva le matin à Rimont. Ils se présentèrent à la Vignasse, au domicile de Laffont. Après avoir pillé et saccagé la demeure, ils s’emparèrent de Laffont et l’emmenèrent. Entre temps, un voisin, le docteur Charles Labro alerté par le bruit accourut chez Laffont. Il fut à son tour arrêté. Tous deux furent torturés puis abattus. Leurs corps furent retrouvés quelques jours plus tard sur le territoire de la commune voisine de Lescure, Laffont à Augère et Labro à Soueix de las Barthes. Le corps de Laffont était ligoté avec un fil téléphonique ; son visage était défiguré par les coups reçus. L’autopsie du docteur Artigues révéla que Laffont avait « succombé à une hémorragie interne consécutive à deux blessures à arme à feu tirée presque à bout portant ». Le château de la Vignasse fut pillé (le produit de la rapine fut transporté à la villa Horizon de Saint-Girons, repère des des supplétifs de la Sipo-SD). Le 21 août 1944, le village où vivaient Laffont et Labro fut détruit par les forces allemandes en mouvement vers la vallée du Rhône (Voir Rimont (21 août 1944)).

Paul Laffont fut enterré le 29 juillet 1944 à 16 heures 30 en présence d’une nombreuse assistance. Le préfet de l’Ariège et le sous-préfet de Saint-Girons s’étaient déplacés. Le chef de la Milice également. Les assassins furent vite identifiés, mais la Sipo-Sd empêcha qu’ils fussent arrêtés ou même simplement interrogés par la police française.

Le nom de Paul Laffont figure sur le monument des victimes des collaborationnistes (13 juillet 1944) et des Allemands (21 août 1944) érigé à Rimont. À côté de ce monument fut érigée une stèle surmontée d’un buste de Paul Laffont qui rend hommage au « Député, sénateur ministre des PTT martyr de la Résistance ». Sur son domicile fut apposée une plaque avec l’inscription suivante : « Ici vécut Paul Laffont (1885-1944), député, sénateur, de l’Ariège, ministre des PTT sous la IIIeme République exécuté le 13 juillet 1944 ». Une avenue de Saint-Girons porte son nom.
Il était reconnu comme Interné résistant (N° 1207.00889).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article175039, notice LAFFONT Paul par André Balent, version mise en ligne le 21 septembre 2015, dernière modification le 20 mai 2022.

Par André Balent

Paul Laffont en 1921
Paul Laffont en 1921
Paul Laffont, stèle érigée à Rimont (Ariège) près du monument des victimes des exécutions des 13 juillet et 21 août 1944
Paul Laffont, stèle érigée à Rimont (Ariège) près du monument des victimes des exécutions des 13 juillet et 21 août 1944
Photographie : André Balent, 15 août 2016
Paul Laffont, détail de la stèle de Rimont (Ariège)
Paul Laffont, détail de la stèle de Rimont (Ariège)
Photographie :André Balent, 15 août 2016

SOURCES : Arch. Dép. Ariège, 129 W 30, registre matricule, f° 378 ; 4 E 1983, état civil du Mas d’Azil, registre des naissances, 1885-1895, acte de naissance de Paul Laffont et mention marginale ; 64 J 118, fonds Claude Delpla, lettre du commissaire des RG (de Foix ?) au juge d’instruction [du tribunal militaire de Paris], 13 janvier 1950, copie manuscrite de l’original (par Claude Delpla). — Jean-Noël Jeannenay, Échec à Panurge, l’audiovisuel public au service de la différence, Paris, Le Seuil, 1986 (en particulier le chapitre III). — Jean Vigreux, Histoire du Front populaire. L’échappée belle, Paris, Tallandier, 2016, 368 p.
— Site http://www2.ac-toulouse.fr/eco-cycle3-saverdun/dossiers/resistance/rimont.htm consulté le 16 août 2016. — Site MemorialGenWeb, consulté le 16 août 2016.

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