BOUDREAULT Gaston

Par Daniel Grason

Né le 12 février 1913 à Echiré (Deux-Sèvres), abattu d’une rafale de mitraillette le 20 août 1944 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; cultivateur, gardien de la paix au commissariat de Saint-Denis (Seine, Seine-Saint-Denis) ; F.F.I.

Fils de Charles et de Célestine, née Brunet, cultivateurs, Gaston Boudreault fréquenta dès l’âge de cinq ans l’école primaire jusqu’à onze ans. Il obtint à l’issue de sa scolarité le CEP. Il travailla aussitôt la terre dans la ferme de ses parents « les premières journées étaient dures pour moi, encore jeune », écrivit-il plus tard. À l’âge de dix-huit ans, il travailla comme domestique pour subvenir à ses besoins et apporter de l’aide à ses parents et à ses frères plus jeunes que lui.
Il épousa une fille de cultivateurs, Augustine Chartier, travailla trois mois à la ferme de ses beaux-parents. Il fut appelé le 15 avril 1934 pour effectuer son service militaire au 109e Régiment d’artillerie lourde à Poitiers (Vienne). Il suivit avec succès le peloton d’élèves brigadiers et celui des sous-officiers de réserve. Nommé brigadier il était libéré le 6 juillet 1935. Il reprit son métier de cultivateur avec ses beaux-parents, passait avec succès l’examen du permis de conduire le 30 avril 1936.
Gaston Boudreault regagna la vie civile avec de l’admiration pour la tenue et la discipline. Son beau-frère Etienne Chartier était gardien de la paix au commissariat de Saint-Denis, ce ne manqua pas de l’influencer. Il postula le 20 juin 1936 un emploi de gardien de la paix auprès du Préfet de police de Paris. Le 20 mai 1937 après des examens et une visite médicale, il était admis. Le lendemain il entrait à la Compagnie école des gardiens de la paix.
Affecté comme gardien de la paix au commissariat de Saint-Denis, Le couple vivait dans la ville voisine de Pierrefitte 40 rue Pierre, puis 36 sente Verte. Le commissaire le nota comme « bon gardien, discipliné et travailleur ». Il exprima son souhait d’accéder au grade de brigadier, le commissaire qui le nota en 1943 écrivit « Doit faire un excellent gradé ».
Le 19 août 1944 vers 15 heures un appel téléphonique de la préfecture de police parvenait au commissariat de Saint-Denis, des volontaires étaient demandés pour la défense de la Cité. Douze hommes se portèrent volontaires, le chef de section Meyer conduisit la camionnette, ils se présentèrent au commissariat du Ier arrondissement. Vers 16 heures ordre leur fut donné de regagner Saint-Denis, vers 16 heures 20 boulevard Magenta (Xe arr.), des soldats allemands très nombreux, 500 à 600 selon le rapport du chef de section stoppèrent le véhicule.
Les treize hommes furent conduits dans la cour de la Gare du Nord. Face à un mur pendant plus de deux heures, bras en l’air, frappés à coups de crosse dans les côtes quand ils baissaient les bras. Vers 20 heures il fut mis fin à une posture très difficile… Vingt minutes après les policiers accompagnés d’un soldat par homme étaient emmenés en autocar à la Kommandantur de l’Opéra puis à l’Hôtel Crillon. Un gradé allemand annonça qu’ils allaient être emmenés au Mont-Valérien pour y être fusillés le lendemain.
Au cours du transport un policier fut blessé de trois balles à la jambe gauche par un soldat allemand qui manœuvrait la culasse de sa mitraillette. À minuit quinze, l’autocar était au Mont-Valérien, il resta stationné plusieurs minutes, Gaston Boudreault tenta de désarmer le soldat qui lui faisait face, ce dernier tira une rafale de mitraillette le tuant. Tous les policiers français furent interrogés, l’un du commissariat de Saint-Denis André B... affirma qu’il avait été « condamné à mort par Alger et Londres pour avoir collaboré avec les allemands et arrêté des communistes ». Ce propos sauva peut-être la vie des policiers. Cet agent membre de la Brigade spéciale d’intervention (BS1) appelée aussi Brigade politique fut mis en cause par la commission d’épuration de la police en 1944. Réputé comme un « matraqueur » de militants communistes, il fut révoqué le 4 décembre 1944 pour s’être livré à des sévices sur des détenus. Condamné à dix ans de travaux forcés sa peine fut commuée à quatre ans de prison, le 12 mai 1947 il était libéré.
Le 20 août 1944 vers 11 heures le commandant du Fort du Mont-Valérien informa les policiers qu’ils ne seraient pas fusillés. Le 22 août à 15 heures un autocar de la Croix Rouge allemande emmena les policiers, ils furent échangés contre des soldats allemands prisonniers.
L’inhumation de Gaston Boudreault eut lieu le 23 août au cimetière de Pierrefitte. Père de Jean, né en 1941 et de Nicole, née en 1944, il fut déclaré « victime du devoir ». Le ministère des Anciens combattants lui attribua la mention « Mort pour la France », il fut cité à l’Ordre de la Nation (JO du 20 décembre 1944, et nommé Chevalier de la Légion d’Honneur (JO du 3 janvier 1945), il a été homologué F.F.I. et interné résistant. Nommé brigadier à titre posthume, son nom figure sur le monument aux morts de Pierrefitte. Gaston Boudreault était père de deux enfants Jean-Claude, né en 1941 et Nicole, née en 1944, le commissaire de Saint-Denis fut chargé de leur tutorat.
René Boudreault, frère de Gaston, gendarme de la brigade de Saint-Maixent (Deux-Sèvres) demanda en février 1947 au préfet de police de Paris copie de la citation « Mort pour la France » de son frère « à seule fin que je puisse me faire exempter du tour de départ des gendarmes désignés pour servir en Extrême-Orient ». Le bombardement du port de Haiphong le 2 novembre 1946 avait déclenché la première guerre d’Indochine.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article175258, notice BOUDREAULT Gaston par Daniel Grason, version mise en ligne le 1er septembre 2015, dernière modification le 12 mars 2020.

Par Daniel Grason

SOURCES : Arch. PPo. KC 5, KB 13, 109W 2. – SHD, Caen AC 21 P 29118. – Bureau Résistance : GR 16 P 76063. – Transmis par Delphine Leneveu : DAVCC : 21 P 714 550. – Christian Chevandier, Été 44. L’insurrection des policiers de Paris, Éd. Vendémiaire, 2014. – Site internet GenWeb.
PHOTOGRAPHIE : Arch. PPo.

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