ROUTIER-PREUVOST André, Auguste

Par Frédéric Cépède

Né le 9 mai 1915 à Saint-Hilaire-Cottes (Pas-de-Calais), mort le 22 septembre 1996 à Nantes (Loire-Atlantique) ; officier de marine marchande, inspecteur d’assurances puis directeur commercial ; militant socialiste de la Loire-Atlantique ; secrétaire de la fédération SFIO (1955-1969) ; membre du comité directeur de la SFIO (1958-1969) puis du Parti socialiste (1969-1973) ; conseiller municipal puis adjoint au maire de Nantes (1959-1977) ; conseiller général de Nantes-Villes (1973-1976) ; conseiller régional des Pays-de-la-Loire (1973-1976).

Fils d’Auguste Routier, bottier, et de Nelly Delattre, institutrice publique, André Routier-Preuvost, après le lycée de Saint-Omer, André Routier-Preuvost intégra l’École d’hydrographie de Boulogne et devient officier de marine. Il fut l’un des fondateurs du premier syndicat d’officier de marine marchande, avec la carte n° 7. En 1935, il rencontra Claire Peuvost, qu’il épousa deux ans plus tard, le 23 décembre 1937 à Airons (Pas-de-Calais). Ensemble, ils formèrent un couple militant inséparable. Routier-Preuvost, militant socialiste défendit avant la guerre des position pacifiste au congrès fédéral de décembre 1938 (La Voix populaire du 24 décembre 1938). Ils étaient amis proches de Guy Mollet.

En 1940, André Routier-Preuvost participa à l’embarquement de l’armée britannique à Dunkerque, puis il devint Officier des Forces françaises de l’Intérieur à Londres. Plus tard, il fut parachuté dans le Limousin, alors que son épouse et ses enfants se réfugiaient dans la Nièvre après avoir milité auprès de Guy Mollet dans la fédération socialiste du Pas-de-Calais, puis dans la Résistance à l’OCM. Il fut décoré de la Croix de guerre 1939-1945 avec palmes. Il voyageait beaucoup pour son nouveau métier d’inspecteur d’assurances puis de directeur commercial.

La famille Routier-Preuvost s’installa à Nantes en 1950 et s’intégra immédiatement dans la vie politique du socialisme local, gravement affaibli depuis les exécutions (Daniel Maurice, Alexandre Fourny, Marcel Hatet, Marin Poirier, Albert Vinçon) et déportation (Jean Brossaud) de la guerre et de l’Occupation qui avaient durement frappé le parti clandestin, puis par les exclusions de la Libération (François Blancho, Eugène Leroux, Auguste Pageot, Maurice Tiefaine) et par des divisions profondes entre les militants depuis cette date (Joseph Bercegeais, Théodore Staub). Il y gagna progressivement la première place. En décembre 1951, il fut désigné secrétaire de section, du groupe du 6e canton. L’année suivante, il publia L’Écho socialiste de Chantenay, puis fut désigné secrétaire de la section de Nantes en janvier 1953. En février 1953, membre du Bureau fédéral, il occupa la fonction stratégique de responsable des élus. Dans la crise de la CED en 1954-1955, il appuya la position du comité directeur contre les parlementaires indisciplinés (Jean Guitton pour le département). Cela lui permit de l’emporter contre Théodore Staub dont la motion avait obtenu une majorité relative au congrès fédéral de janvier 1955, avec 163 voix, contre 142 qui approuvaient le comité directeur et 36 qui refusaient toute sanction. Staub fut battu au renouvellement du secrétariat fédéral, André Routier-Preuvost obtenant 16 voix, contre 11 pour Théodore Staub. Secrétaire fédéral d’avril 1955 à 1969, puis secrétaire du NPS, il fut co-directeur gérant de La Résistance de l’Ouest (ancêtre de Presse Océan). En 1963, il disait avoir dirigé durant 5 ans un quotidien régional (120.000 exemplaires) et une imprimerie dont il était chef du personnel (350 personnes) dont la direction générale est inféodée à l’UNR. Après avoir soutenu la direction nationale de la SFIO lors de la crise de la CED, la fédération SFIO de Loire-Atlantique, dirigée par Routier-Preuvost, a, en continuité, apporté une forte majorité de ses mandats à Guy Mollet et à Robert Lacoste dans les débats sur l’Algérie.

Ses fonctions de secrétaire fédéral prirent fin le 30 novembre 1969, lors du congrès administratif. Il fut placé en dernière position lors de l’élection au bureau et Christian Chauvel ne fut pas reconduit. Il se solidarisa avec son compagnon de 15 années de combat. Mais il fit élire Maurice Jégou pour le remplacer à une voix de majorité.

Sur le plan local, André Routier-Preuvost impulsa une politique d’entente avec les radicaux, et notamment avec le maire de Nantes André Morice. Élu conseiller municipal minoritaire de Nantes en 1959, il fut réélu sur une liste commune en 1965 et fut nommé adjoint de Nantes en 1965-1977 (municipalité André Morice). Il était chargé des questions économiques, des relations intercommunales et des problèmes de la circulation. Il se montra un bâtisseur actif dans une ville très touchée par la guerre ;

André Routier-Preuvost s’imposa rapidement dans la SFIO au plan national, comme un des proches de Guy Mollet. Il intervint à la conférence d’information des secrétaires fédéraux, parlementaires et membres de l’Union française du 18 mars 1956. Il siégea ensuite à la commission de réintégration au congrès de Toulouse en 1957, où il présenta une motion personnelle proche de celle de la majorité. Candidat, il ne fut pas élu au comité directeur. On le retrouve ensuite membre de la commission sur les indisciplines parlementaires au conseil national de décembre 1957, membre de la commission chargée d’étudier la situation en Algérie au conseil national des 3-4 mai 1958 et au conseil national des 10-11 janvier 1959. Il présenta de nouveau des motions personnelles proches de celles de la majorité pour le congrès de 1958.

André Routier-Preuvost fut élu au comité directeur de la SFIO en 1958-1969, puis reconduit à celui du Parti socialiste en 1969. Membre du conseil d’administration du Populaire en 1958, après la scission voyant la création du PSA, il fut chargé d’une mission de conciliation dans le Finistère du 13 au 17 octobre 1958 pour éviter la rupture entre Tanguy Prigent et les partisans de la majorité. Il fut désigné pour siéger à la commission problèmes de la paix des Journées nationales d’études des 7 au 10 mai 1959. Il était par ailleurs membre de la commission nationale ouvrière en 1959-1963.

Durant la traversée du désert de la gauche dans les années soixante, André Routier-Preuvost accepta l’idée d’un rapprochement avec les autres forces se réclamant du socialisme démocratique, mais ancien militant de Force ouvrière et probablement franc-maçon, il se montra un adversaire résolu de l’alliance avec les communistes et un défenseur intransigeant de la laïcité. Approuvant le projet de candidature de Gaston Defferre pour les élections présidentielles de 1965, il participa activement à la mise en place de clubs « Horizon 80 » en Bretagne. Après l’échec de Defferre, il appuya la candidature de François Mitterrand et fut pendant la campagne présidentielle délégué régional pour l’ouest de la France, désigné par le candidat de la gauche. Il fut ensuite président de fédération départementale de la FGDS de la Loire-Atlantique. Mais, après la crise de Mai 1958 et le désastre électoral de la gauche, lors du comité directeur de la SFIO du 3 juillet 1968, avec Max Lejeune et Arthur Notebart, ils remirent violement en cause le maintien de François Mitterrand à la présidence de la FGDS. Il s’opposa ensuite à Alain Savary, puis à François Mitterrand. Pour le congrès national extraordinaire de décembre 1968, il signait un texte intitulé “Non !”, refusant la fusion dans un nouveau parti socialiste. Il appartint au comité de soutien du courant animé par André Chandernagor qui publiait Démocratie socialiste, en mai 1970. Membre du comité directeur du Parti socialiste après le congrès d’Épinay en juin 1971-1973 (élu de la tendance Defferre-Mauroy), il devint l’un des animateurs d’un courant dit des socialistes-démocrates, avec Éric Hintermann. Il se situait résolument sur une ligne « réformiste » et anticommuniste, adversaire du rapprochement avec les communistes et du Programme commun. Ils étaient aussi hostiles à l’entrée des chrétiens au Parti socialiste et fut toujours un défenseur intransigeant de la laïcité. Routier-Preuvost accusa par ailleurs les membres de Témoignage chrétien d’avoir mené une campagne en règle contre lui, qui aurait amené son élimination du comité directeur du PS en 1973. Il appartint au « Centre d’études pour le socialisme démocratique » d’Éric Hintermann, fondé en octobre 1974.

Candidat sans succès dans le 1er canton de Nantes en 1961 et à cinq reprises aux élections législatives (1958, 1962, 1967, 1968 et 1973), Routier-Preuvost a été élu conseiller général de Nantes-Villes en 1973. Désigné pour siéger au conseil régional des Pays-de-la-Loire, il présida le groupe PS lors de sa formation en 1973.

Mais, à l’heure de l’Union de la gauche, sa position et celle de ses proches devenait de plus en plus intenable et leur influence diminuait dans une fédération qui voyait arriver des militants unitaires, pour une part issue de la filière chrétienne. Après avoir été exclu du PS le 3 mai 1975 avec les autres élus, dont Christian Chauvel, pour « leur refus de se constituer en groupe d’opposition et de proposition au sein du conseil municipal », c’est-à-dire d’être resté dans la municipalité Morice, il demanda à rester au groupe des socialistes et des radicaux de gauche. Cela lui fut refusé et il fut considéré comme « s’étant mis hors de la fédération » par la FNESER.
Il perdit son poste de conseiller général lors du renouvellement de 1976, battu par Guy Goureaux du PS. Après avoir participé à la Fédération social-démocrate (FSD), puis au Parti social-démocrate (PSD), avec Éric Hintermann, Christian Chauvel et André Routier-Prevost ont refusé l’intégration à l’UDF en 1978. Ils ont fondé une Fédération des socialistes démocrates de France (FSDF).

Il a été vice-président de la Société d’équipement de la Loire-Atlantique en 1967.

Jean-Claude Routier, son fils, fut secrétaire fédéral mitterrandiste du PS de 1973 à 1977.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article175415, notice ROUTIER-PREUVOST André, Auguste par Frédéric Cépède, version mise en ligne le 10 septembre 2015, dernière modification le 10 septembre 2015.

Par Frédéric Cépède

OEUVRE : Routier-Preuvost André, Lettre inquiète à François Mitterrand.

SOURCES : Arch. Nat. F/1cII/562 et 566. — Archives de l’OURS, dossiers Loire-Inférieure et 6EF73/2 ; 2/APO/2, fonds FGDS. — Arch. FJJ, dossier Loire-Atlantique. — Arch. mun. Marseille, 100 II 838. — Rapports des congrès de la SFIO, 1944-1967. — Bulletin intérieur de la SFIO, n° 111. — Bulletin Quotidien, 21 octobre 1974. — Démocratie socialiste, n° 6, mai 1970. — Yoan Taris, Les courants socialistes dissidents opposés au programme commun d’Union de la gauche : une impossible troisième voie autonome (1970-1982), TER d’histoire, Université de Bordeaux III, 1997-1998, 100 p. — François Lafon, Guy Mollet, Paris, Fayard, 2006, 960 p. — État civil. — Notes de Gilles Morin.

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