VUILLET Samuel (père)

Par Roger Bergeret

Né en 1863 à Chaumont près Saint-Claude (Jura), mort en 1935 à Londres ; ouvrier diamantaire, responsable syndical, militant socialiste, coopérateur, agent commercial d’une coopérative diamantaire à Londres, auteur de souvenirs et d’une abondante correspondance.

Ouvrier diamantaire à la coopérative Adamas, Samuel Vuillet prit très tôt des responsabilités syndicales. Il fut en 1884, parmi les fondateurs du premier syndicat de Saint-Claude, la Chambre syndicale des ouvriers diamantaires. Excellent professionnel, il fut délégué aux frais de la ville à l’exposition internationale de 1889. L’exposition universelle lui donna l’occasion de rencontrer des ouvriers diamantaires d’Anvers et d’Amsterdam. En 1890, il fut donc désigné par ses camarades délégué au premier Congrès international diamantaire de Charleville (1890) qu’il présida. De ces Congrès allait naître l’Alliance universelle des ouvriers diamantaires. La même année, il fit partie des six ouvriers qui chômèrent le Premier Mai.

Élu par ses camarades représentant commercial de la coopérative diamantaire Adamas à Londres en 1893, Samuel Vuillet fut chargé de la plus lourde responsabilité : acheter du diamant brut et vendre pour sa coopérative les pierres taillées aux joaillers de la place, mais aussi de Birmingham, Anvers ou Paris. Il apprit rapidement l’anglais au point de le parler bientôt couramment et se fixa définitivement à Londres jusqu’à sa mort, en pleine activité, en 1936. Diamantaire averti, commercial avisé, mais aussi fin observateur de la grande place de Londres et du quartier diamantaire d’Hatton Garden, Samuel Vuillet nous fit connaître de près et parfois au quotidien tout un monde de négociants, courtiers, joaillers, au point que ces lettres permettent à la thèse de prendre parfois les couleurs d’un monde balzacien, d’une véritable « comédie humaine ». On a ainsi des milliers de lettres d’une correspondance journalière (parfois deux lettres par jour à sa coopérative !). Certaines de ces lettres à elles seules vaudraient une publication ! Elles décrivent très finement les différents dispositifs techniques des marchés du brut comme du taillé sur la place de Londres. Elles sont une source importante pour la connaissance des techniques de la taille du diamant et de leur évolution pendant un demi-siècle.

Introduit dans tous les milieux diamantaires Samuel Vuillet a réussi à avoir le privilège d’acheter directement du brut au Syndicat de Londres, émanation de la De Beers, et a fait ainsi profiter sa coopérative de prix d’achat inférieurs au prix pratiqués par les revendeurs). Pourtant, il resta toujours fidèle aux convictions syndicalistes et politiques de sa jeunesse. Il le montra en poussant ses camarades coopérateurs à augmenter la part des bénéfices versée au fond social de la coopérative afin de financer assurance maladie, caisse de retraite, formation technique, ce qui revint à orienter Adamas vers le modèle des coopératives communistes du « modèle de Saint-Claude ».

Samuel Vuillet a légué un véritable trésor à tous ceux qui s’intéressent à l’histoire diamantaire : sa correspondance représente un mètre dans le Fonds Adamas de la Maison du Peuple de Saint-Claude.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article176414, notice VUILLET Samuel (père) par Roger Bergeret, version mise en ligne le 1er novembre 2015, dernière modification le 1er novembre 2015.

Par Roger Bergeret

SOURCES : Archives de la Maison du Peuple de Saint-Claude, Fonds Adamas, Correspondance de Samuel Vuillet. — Thomas Figarol, Le district industriel de Saint-Claude et le monde du diamant à l’âge de la première mondialisation (1870-1914), Thèse, Besançon, 2014, p. 761. — Thomas Figarol, « L’Alliance Universelle des Ouvriers Diamantaires (1905-1950) : Esquisse de l’histoire d’un Internationale Syndicale ». — Samuel Vuillet, « Souvenirs sur les débuts du syndicalisme diamantaire à Saint-Claude », AMDP, Archives de la Chambre syndicale des ouvriers diamantaires). L’Ouvrier diamantaire, nécrologie, décembre 1935.

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