BOUTARD Jacques [BOUTARD, Jean, Jacques, Louis]

Par Gilles Morin

Né le 11 janvier 1906 à Paris (XVIIe arr.), mort le 10 janvier 1982, médecin ; militant et élu socialiste puis socialiste indépendant de la Haute-Vienne ; maire de Chalard (1935 à 1943) puis de Saint-Yrieix-la-Perche (1945-1982) et conseiller général de Saint-Yrieix-la-Perche (1958-1982) ; député de la Haute-Vienne (1958-1973).

Fils d’un médecin qui fut député de la Haute-Vienne et appartenait au groupe des Républicains radicaux, puis qui fut par la suite trésorier payeur général, Jacques Boutard fréquenta le lycée de Poitiers puis la Faculté de médecine de Paris. Il obtint successivement son baccalauréat, une licence ès sciences, et étudia à l’Institut Pasteur dans le secteur de la Recherche, de 1935 à 1939.
Durant la campagne de 1939-1940, Boutard a été médecin de bataillon et fut fait prisonnier. Il s’évada en 1941, acheva sa thèse de médecine en 1943 (à la Faculté de Strasbourg), puis, devint médecin rural dans le village où avait exercé son père et dont il avait été l’élu. Médecin FFI dans la Résistance, il fut décoré de trois citations.
Membre de la SFIO depuis sa jeunesse, Boutard appartint à ce parti de 1920 à 1967. Maire du Chalard de 1935 à 1945, il se présenta à cette date à Saint-Yrieix-la-Perche. Il y était alors élu contre le maire sortant, le communiste Fourtaud. Il exerça ce mandat jusqu’à son décès en 1982.
Durant la IVe République, Boutard fut un simple élu local. Tout au plus le trouve-t-on à une place non-éligible sur la liste de la SFIO aux législatives de novembre 1946. Dans les derniers mois du régime, le 20 avril 1958, alors que le sortant socialiste Gabriel Dufour ne se représentait pas, il fut élu conseiller général SFIO de Saint-Yrieix-la-Perche. Il se présentait pour la première fois à ce scrutin et ne bénéficia pas du désistement communiste. Il siégea à l’Assemblée départementale jusqu’à son décès en 1982 et assumait la fonction de vice-président de l’assemblée à cette date. En 1970, il se fit réélire « sans étiquette » et comme membre du CDP en 1976. Au plan départemental, il fut président du syndicat des colonies de vacances, vice-président du syndicat départemental d’électrification et vice-président du syndicat du bassin Adour-Garonne. Il était alors président de la Fédération des élus socialistes et d’union républicaine (en 1958 et 1962) et président du syndicat des communes à ces dates.
Le rétablissement du scrutin d’arrondissement et l’élimination de Jean Le Bail de la direction fédérale, après celle de Charlet, firent choisir Boutard, notable rural bien implanté, pour assurer la campagne socialiste dans la première circonscription du département pour les législatives de novembre 1958
Le 30 novembre 1958, Boutard fut élu député de la deuxième circonscription. Le Populaire du Centre alors triomphait le 24 novembre 1968 en montrant bien le sens de revanche anticommuniste de ce succès sur cette terre d’affrontements très durs entre les deux partis de gauche depuis la période de la Libération :
« Dans le Sud, où la bataille était la plus difficile, Jacques Boutard arrive très nettement en tête surclassant les moscoutaire dans un fief où jusqu’ici ils s’étaient cru les maîtres ». « C’est peut-être dans cette circonscription que le plus beau succès a été remporté parce qu’il marque la fin de la grande peur qui a pesé pendant des années sur le sud-ouest du département ».
Dans sa profession de foi, il avait aussi affirmé « l’Algérie doit rester française ». Il fut président de la commission parlementaire du cinéma et il siégea à la commission des Affaires culturelles. Il en fut ainsi dans l’Assemblée suivante. Boutard fut en effet réélu le 25 novembre 1962, après avoir été devancé au premier tour par Marcel Rigout, par 16 607 voix contre 17 641. Il avait refusé de se retirer devant le dirigeant communiste. La Fédération de la gauche démocrate et socialiste ayant conclu un accord de désistement avec le Parti communiste, Boutard ne fut pas candidat en mars 1967, pour ne pas avoir à se désister éventuellement pour le candidat communiste, Marcel Rigout. Celui-ci fut effectivement élu. Durant cette période, il ne semble guère avoir eu de responsabilité dans la SFIO. Tout au plus, en liaison avec son action parlementaire, il a été responsable de la « section information » de la Commission nationale d’études de la SFIO en 1958-1959. Il se détacha alors de la SFIO.
Les événements de 1968 conduisirent à la rupture complète entre Boutard, la SFIO et la gauche. Le 30 juin 1968, il fut réélu député sous l’étiquette de « Socialiste indépendant et d’union travailliste ». Dans sa profession de foi, il appelait ses électeurs à s’entendre avec lui sur « quelques idées simples » : « D’abord et par-dessus tout la liberté des citoyens, le respect de l’ordre, de la justice et du travail, l’évolution mais non la révolution, sans lesquels la République à laquelle nous sommes tous attachés ne pourrait survivre ». Dans sa deuxième circulaire il précisait : « fidèle à la ligne de conduite de toute ma vie, je suis candidat contre le parti des moscoutaires » et évoquait tous les affrontements passés, « les règlements de compte sommaires de 1944-1945 », Budapest et la Tchécoslovaquie. Il s’assura l’appui de socialistes indépendants, comme le docteur Claude Madoumier, conseiller général d’un autre canton.
Il rejoignit les rangs de la majorité gaulliste et s’apparenta au groupe « Progrès et démocratie moderne » et devint un collaborateur de Jacques Duhamel. Rigout trouva sa revanche en 1973, en battant Boutard.
Il contribua à fonder notamment un hôpital et une maison de retraite, une école municipale de musique et un lycée professionnel pouvant accueillir 1600 élèves et une maison des syndicats.
Jacques Boutard exerça de nombreuses responsabilités sociales : président de la Caisse du Crédit agricole, président du conseil d’administration de l’hôpital du Cluzeau à Limoges, vice-président du sanatorium de Boulou-les-Rose, président du conseil d’administration de l’Hôpital de Saint-Yrieix-la-Perche Il était titulaire de nombreuses décorations, notamment était chevalier de la Légion d’honneur.
Veuf et remarié, il n’eut pas d’enfant. Décédé la veille de son soixante-seizième anniversaire, il eut des obsèques religieuses.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article17657, notice BOUTARD Jacques [BOUTARD, Jean, Jacques, Louis] par Gilles Morin, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 10 novembre 2008.

Par Gilles Morin

SOURCES : Arch. Nat., F/1cII, 113/C. F/1cII/207. F/1cII/289 ; CAC, 19830172, article 72. — Arch. OURS, dossiers Haute-Vienne. --- Bulletin Intérieur de la SFIO, n° 114. — Rapports des congrès de la SFIO, 1944-1967. — Le Monde, 13 janvier 1982. — Profession de foi aux législatives de 1958.

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