PASCUAL Pierre-Émile

Par Daniel Grason

Né le 8 septembre 1909 à Perrégaux (Mohammadia) willaya de Mascara (Algérie) ; vernisseur sur bois ; communiste ; volontaire en Espagne républicaine ; membre du Mouvement social révolutionnaire (M.S.R.).

Pierre-Émile Pascual en 1950. Document Laurent Pascual.
Pierre-Émile Pascual en 1950. Document Laurent Pascual.

Fils de Pedro Antonio Pascual (originaire d’Alhama de Almería en Andalousie) et de Maria de la Purification Algarra (originaire de Novelda, province d’Alicante). Le couple se forma en Algérie après l’émigration espagnole des parents des deux familles vers 1880-1890. Pierre-Émile Pascual vécut à Perrégaux et à Oran en Algérie, il alla à l’école primaire. Le 10 janvier 1928 il s’engagea trois ans dans la Marine, il fut libéré en 1931 comme quartier-maître infirmier. Il épousa le 29 juin 1932 Isabelle Lopez en mairie d’Oran, le couple eut trois enfants. Il divorça en 1936, obtint la garde des enfants.
Membre du parti communiste, il s’engagea probablement fin 1936 dans les Brigades internationales. Il combattit sur le front de Madrid, participa aux combats de la cité universitaire et à la bataille de Teruel. Blessé au bras par un coup de baïonnette, peu après l’éclatement d’une bombe incendiaire lui altéra durablement la vue. Peu après son rapatriement en 1937 à Oran, il quitta l’Algérie pour Paris.
Il se remaria en mars 1937 à Paris avec Émilia Maréchal. Vernisseur de meubles, il travailla en 1937 au Comptoir Cardinet 149 avenue de Clichy à Paris (XVIIe arr.). Mobilisé en septembre à la base de sous-marins à Bizerte (Tunisie), il fut déclaré « réformé temporaire » par les autorités militaires, et revint à Paris. La famille Pascual vivait dans un appartement de deux pièces au 137 avenue de Clichy à Paris (XVIIe arr.). Du fait d’une grave maladie de sa nouvelle épouse, il confia la garde et l’éducation de ses trois enfants à sa famille à Oran.
En 1941 Karl Boemelburg responsable de la police de sécurité et de renseignements de la SS (Sipo-SD) sur le territoire français chargea la police française de recenser les anciens combattants en Espagne républicaine. Ces derniers étaient particulièrement visés, ils savaient manier les armes. Le 19 septembre 1941, la liste dressée par les Renseignements généraux qui concernait le département de la Seine était prête. En décembre des ex-Brigadistes étaient arrêtés, ceux d’origines étrangères étaient particulièrement visés. Ainsi parmi les soixante-huit otages fusillés le 15 décembre 1941 au Mont Valérien à Suresnes, cinquante-deux Juifs dont trois anciens Brigadistes, Juifs polonais : Marcel Boczar, Albert Borenheim et Alje Zajdorf.
En 1942, Pierre-Émile Pascual adhéra au Mouvement social révolutionnaire, fondé par Eugène Deloncle, ancien chef de La Cagoule, une organisation d’obédience fasciste farouchement anticommuniste… il exerça son métier pendant toute la durée de la guerre. Arrêté le 24 octobre 1944 par des gardiens de la paix du commissariat de Saint-Ouen, il fut interné au camp de Drancy (Seine, Seine-Saint-Denis), jusqu’au 24 janvier 1945.
Auditionné le 23 mars 1945 par un Commissaire de police, auxiliaire du Procureur de la République, Pierre Pascual expliqua pourquoi il avait adhéré au M.S.R. « Dès 1940 à l’arrivée des Allemands, un de mes camarades de régiment qui habitait Aubervilliers m’a prévenu que les autorités d’occupation recherchaient les anciens combattants des Brigades internationales ».
Pierre-Émile Pascual certifia qu’au cours de l’année 1942, il avait fait connaissance dans un café de son quartier d’un membre du M.S.R., il lui aurait fait part de ses craintes en raison de son engagement en Espagne. Ayant reçu une convocation, il participa à une réunion, par la suite un uniforme pantalon et chemise lui était donné. Il assura qu’il l’utilisa « pour effectuer mes travaux de vernissage ». Quinze jours après son adhésion « J’étais écœuré de ce que j’avais constaté à la seule réunion à laquelle j’ai assisté ». Il envoya une lettre de démission.
Il souligna en conclusion : « Je suis profondément affecté d’avoir été renié par le Parti communiste à la suite de cette affaire ».
Le 31 mai 1945 la commission de vérification des internements administratifs considéra que « le dossier ne contient aucun élément d’appréciation sur l’action politique de Pascual dont l’adhésion au M.S.R. est certaine ». Un complément d’enquête était ordonné.
Plusieurs personnes furent entendues, son ancien employeur, directeur du Comptoir Cardinet Edin J… indiqua : « Pascual a travaillé ici de 1937 à 1939, comme vernisseur. Puis par la suite s’étant établi, je lui ai donné des travaux à exécuter à son atelier. Cet homme que j’ai bien connu avant la guerre puis pendant l’occupation était un excellent ouvrier. Je connaissais ses idées politiques et je n’ai jamais remarqué qu’elles aient changé durant les années d’occupation. Il avait le régime nazi en horreur et par répercussion tous les allemands. Son arrestation m’a énormément surpris surtout lorsque j’en ai su le motif. Encore aujourd’hui je me refuse à croire que Pascual ait donné son adhésion au M.S.R. dans un but autre que celui de se protéger des Allemands ».
Marie M… marchande de fleurs : « Je connais monsieur Pascual depuis son arrivée ici, il est très estimé dans la maison. J’ai presque journellement l’occasion de lui causer. Pendant l’occupation c’est lui qui venait me donner les nouvelles de la radio de Londres. Ça n’a jamais été un collaborateur. Tout le monde dans la maison a été étonné de son arrestation. J’ignorais qu’il appartenait à un groupement politique ».
Louis M… restaurateur, propriétaire du logement de Pascual, il « ne s’est jamais occupé de politique pendant la guerre, ce que je puis affirmer c’est qu’il n’avait pas les idées collaborationnistes. J’ignorais qu’il s’était fait inscrire au M.S.R. ». L’ouvrier qui travaillait avec Pierre Pascual confirma ses propos. Tous les témoignages furent consignés dans un rapport en date du 1er août 1945.
Depuis sa libération Pierre-Émile Pascual était astreint à un pointage hebdomadaire tous les lundis au commissariat. Le 21 septembre 1945, il s’adressa par écrit au Procureur de la République de la cour de Justice de la Seine. Il faisait part de sa situation familiale : « J’ai trois enfants que je n’ai pas vu depuis six ans. Je serais très désireux que l’on conclut mon cas et que l’on me permette d’aller à Oran les revoir ! ». Il reconnaissait son « égarement d’avoir adhéré dans ce maudit parti dans lequel je n’ai jamais fait acte de présence ». Il concluait ainsi : « Je remercie de tout cœur et d’avance de cette obole que je vous demande afin qu’un père puisse aller revoir ses enfants ».
Le ministère de l’Intérieur le dispensa du pointage hebdomadaire le 13 février 1946, il pouvait aller en Algérie voir ses enfants âgés de quatorze, douze et neuf ans.
Il fit la rencontre vers 1947 de E.G, une italienne originaire de Trieste arrivée en France en 1946. Le couple vécut au 93 rue Legendre et trois nouveaux enfants naîtront de cette troisième union. Le couple se maria le 24 novembre 1955 à la mairie du XVIIe arrondissement. À la suite de mésententes familiales le couple divorça en mai 1958. E.G. éleva seule ses trois enfants.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article177043, notice PASCUAL Pierre-Émile par Daniel Grason, version mise en ligne le 14 janvier 2018, dernière modification le 9 février 2018.

Par Daniel Grason

Pierre-Émile Pascual en 1950. Document Laurent Pascual.
Pierre-Émile Pascual en 1950. Document Laurent Pascual.

SOURCES : Arch. PPo. 1W 0565 (transmis par Gilles Morin). – Acte de Mariage n° 23 de 1898, mairie de Perrégaux. – Nos remerciements à Laurent Pascual.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
fiches auteur-e-s
Version imprimable