VISSE René, Paul, Eugène

Par Didier Bigorgne

Né le 22 octobre 1937 à Attigny (Ardennes), mort le 18 février 2020 à Charleville-Mézières ( Ardennes) ; électricien dans l’industrie, puis monteur de lignes aux PTT ; syndicaliste et militant communiste ; secrétaire fédéral du Parti communiste des Ardennes (1965-1978, puis 1985-1990) ; conseiller général (1977-2004) ; député des Ardennes (1978-1981) ; conseiller régional de Champagne-Ardenne (1978-1981, puis 1986-2004)

René Visse et son épouse
René Visse et son épouse

Fils d’Eugène Visse*, charpentier, et de Georgette Mercier, sans profession, René Visse est le cadet d’une famille de trois enfants (deux filles et un garçon). Après avoir fréquenté l’école primaire d’Attigny jusqu’à l’âge de onze ans, il poursuivit ses études au lycée professionnel Roosevelt de Reims. Il y réussit le CAP, puis le brevet professionnel d’électricien.

René Visse entra dans la vie active le 18 octobre 1955. Embauché à la Solac à Florange (Moselle), René Visse y travailla jusqu’au 23 janvier 1956. De retour dans les Ardennes, il exerça son métier d’électricien à l’usine Porcher de Revin jusqu’au 31 octobre 1957. Après avoir interrompu son activité professionnelle pendant vingt huit mois pour cause de service militaire, il reprit un emploi à l’usine Clémecy de Rethel du 14 mars au 17 septembre 1960. Quatre jours plus tard, René Visse entra aux PTT, en qualité de monteur de lignes. Il y demeura jusqu’au 30 août 1965, date à laquelle il devint secrétaire fédéral permanent du Parti communiste des Ardennes.

René Visse naquit dans une famille ouvrière de tradition communiste. Son père, secrétaire de la cellule d’Attigny du Parti communiste, fut candidat aux élections pour le Conseil d’arrondissement dans le canton d’Attigny en 1937. Arrêté par les Allemands le 19 octobre 1941, il fut interné au camp de Royallieu à Compiègne, puis déporté au camp de concentration de Sachsenhausen-Oranienburg. Rentré le 31 mai 1945, il fut l’âme du PCF dans la région d’Attigny pendant de longues années. Il représenta de nouveau son parti aux élections cantonales de 1945 à 1976.

Sans doute influencé par le militantisme de son père, René Visse adhéra à la CGT, puis au Parti communiste en 1956. Appelé au service militaire le 7 novembre 1957, il fut incorporé dans le 10ème régiment de tirailleurs sénégalais stationné à Fort-de-l’Eau, près d’Alger. Alors affecté au centre de formation, il y servit jusqu’au 15 février 1960. Pendant les vingt huit mois passés en Algérie, René Visse s’installa dans une résistance passive en ne participant à aucune opération militaire. Il échappa aux sanctions grâce à la bienveillance d’un sergent-chef qui comprenait son refus de la guerre.

De retour à la vie civile, René Visse reprit ses activités syndicales et politiques. Son premier engagement prit une dimension nouvelle dès son embauche aux PTT. D’abord secrétaire de section syndicale, il accéda bientôt à des responsabilités plus importantes en devenant membre du bureau de la Fédération postale à partir de 1962.

Dans le même temps, René Visse réussit une ascension rapide dans le Parti communiste des Ardennes. Membre du secrétariat à la section de Charleville, il entra au bureau fédéral le 27 janvier 1963. Lors de la conférence fédérale qui se tint le 10 mai 1964, il fut élu secrétaire, responsable de l’éducation des cadres. Enfin, le 20 juin 1965, il devint secrétaire fédéral, succédant ainsi à Roger Villemaux*, démissionnaire pour raison de santé. René Visse quitta son poste le 24 janvier 1978 afin de préparer les élections législatives. Elu député le 19 mars suivant, il démissionna du secrétariat fédéral le 12 mai 1978.

Pendant ces années, à la tête de la fédération des Ardennes du Parti communiste, René Visse suivit les cours (un mois, puis quatre mois) de l’Ecole centrale du Parti. Par contre, il déclina la formation d’un an à l’Ecole de Moscou, son départ pour la capitale soviétique étant programmé la veille de son mariage. Surtout, il imposa un style nouveau. Homme de détermination et de conviction, il apporta des qualités de dialogue, un sens de la réflexion et une volonté d’ouverture qui permirent à son parti de se renforcer et d’élargir son audience dans le département. Quelques années après sa défaite aux élections législatives de 1981, René Visse retrouva son poste de secrétaire fédéral du Parti communiste des Ardennes : il l’occupa du 20 janvier 1985 au 2 décembre 1990.

René Visse fit son apprentissage électoral à Charleville au scrutin municipal du 14 mars 1965. Il figura en quatrième position sur la liste de son parti qui n’eut aucun élu. Le 14 mars 1971, il conduisit une liste d’union de la gauche PCF-PSU qui échoua à Charleville-Mézières.

Dans les années qui suivirent, René Visse devint un élu communiste. Il exerça plusieurs mandats. Après deux échecs successifs aux élections pour le Conseil général (le 8 mars 1970 dans le canton de Charleville, puis le 23 septembre 1973 dans celui de Charleville-La Houillère), il fut élu conseiller général dans le canton de Monthermé à l’élection partielle du 27 mars 1977 (suite à la mort du communiste André Compain*) en l’emportant au premier tour avec 3142 voix sur 9583 inscrits et 6202 votants. D’abord réélu au premier tour le 18 mars 1979 avec 53% des suffrages exprimés, René Visse arriva ensuite en tête au premier tour de chaque scrutin pour remporter facilement la victoire au deuxième tour (3613 voix le 17 mars 1985, 3120 voix le 29 mars 1992 et 2307 voix en qualité de seul candidat le 22 mars 1998).

Au sein de l’assemblée départementale, René Visse lutta inlassablement contre la désindustrialisation des Ardennes (fermeture de sites sidérurgiques de la Chiers à Brévilly et à Vireux-Molhain, de l’usine Manil à Vivier-au-Court et bien d’autres). Son pragmatisme et son souci permanent d’écoute l’amena parfois à prendre le contre-pied de la direction nationale de son parti. Seul élu communiste dans un Conseil général dominé par la droite, il accepta un poste de vice-président, contre l’avis du comité central, pour faire avancer les revendications en faveur des plus démunis. Ainsi, il n’hésita pas à voter le budget départemental qui avait pris en compte ses propositions de mesures financières pour les chômeurs et la prestation dépendance. Il mit fin à son mandat de conseiller général en ne se représentant pas aux élections cantonales de 2004.

La carrière nationale de René Visse fut plus brève puisqu’il siégea à l’Assemblée nationale pendant trois années, de 1978 à 1981. Dès sa première candidature aux élections législatives des 5-12 mars 1967, dans la deuxième circonscription de Charleville-Givet, il réalisa un score prometteur : avec 12521 suffrages recueillis sur 60305 inscrits et 48971 votants, il fit gagner 3026 voix à son parti. Aux scrutins suivants, il talonna le député socialiste sortant, André Lebon, au premier tour : il obtint 11078 voix sur 59352 inscrits et 48587 votants le 23 juin 1968, 12497 voix sur 60146 inscrits et 48143 votants le 4 mars 1973. Enfin, aux élections législatives des 12 et 19 mars 1978, il arriva en tête au premier tour avec 16759 voix sur 66066 inscrits et 55997 votants pour être élu député des Ardennes au scrutin de ballottage en rassemblant 30166 suffrages sur 57235 votants.

Secrétaire de l’Assemblée nationale, René Visse fut membre de la commission de la Défense nationale. A ce titre, il fit partie d’une délégation de parlementaires (conduite par le général Bigeard) qui fut reçue aux Etats-Unis et au Pentagone. Malgré sa personnalité, il ne résista pas à la vague socialiste de 1981. Le 14 juin, il fut battu dès le premier tour en recueillant 14031 voix sur 67061 inscrits et 47158 votants. Vint ensuite le temps du déclin. Après avoir conduit la liste du Parti communiste qui obtint 20169 voix sur 193391 inscrits et 150479 votants et n’eut aucun élu le 16 mars 1986, il fut éliminé au premier tour à chaque scrutin législatif : 25,6% des suffrages exprimés le 5 juin 1988, 15,7% le 21 mars 1993, 15,2% le 26 mai 1997.

En qualité de parlementaire, René Visse fut nommé conseiller régional de Champagne-Ardenne en 1978, fonction qu’il occupa jusqu’en 1981. Aux élections régionales du 17 mars 1986, il conduisit la liste de son parti et fut élu conseiller régional. Après sa réélection au scrutin du 22 mars 1992, il fut candidat sur la liste du Parti communiste aux élections européennes du 12 juin 1994. De nouveau réélu le 5 mars 1998, il siégea à l’assemblée régionale jusqu’en 2004. Président du groupe des quatre conseillers régionaux communistes dont son ami Claude Lamblin*, il resta fidèle à son principe de dialogue pendant son dernier mandat en travaillant sur les budgets soumis par la majorité de droite pour insister sur les avancées dont pouvaient profiter les administrés champardennais.

Le 22 mars 1969, à Bogny-sur-Meuse, René Visse avait épousé Viviane, Françoise Leloux qui lui donna deux filles. Ouvrière d’usine qui devint agent de l’Education nationale, fille de Jean Lecloux*, ouvrier métallurgiste qui fut membre du bureau fédéral du Parti communiste des Ardennes de 1948 à 1953 puis secrétaire jusqu’en 1954, Viviane Leloux militait à la CGT et au Parti communiste. Elle siégea notamment au bureau de l’UD-CGT des Ardennes de 1967 à 1969.

René Visse vainquit un cancer du poumon, suivi de rares complications, en 2000. Domicilié à Charleville-Mézières, il restait un militant du Parti communiste et un lecteur assidu du journal L’Humanité. Il participait régulièrement aux manifestations organisées par la CGT et le Front de gauche. Ses obsèques eurent lieu au funérarium de Prix-lès-Mézières, le 25 février 2020.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article177402, notice VISSE René, Paul, Eugène par Didier Bigorgne, version mise en ligne le 13 janvier 2016, dernière modification le 24 mai 2020.

Par Didier Bigorgne

René Visse et son épouse
René Visse et son épouse
René Visse avec son père (casquette) à la Fête de l'Humanité.
René Visse avec son père (casquette) à la Fête de l’Humanité.

Sources : Arch. comité national du PCF. — L’Humanité-Dimanche, une semaine dans les Ardennes, 1966 à 1971. — Nouvelles des Ardennes, 1971 à 1990. — L’Ardenne syndicale, 1967 à 1969 — L’Ardennais, 15 septembre 2002, 17 février 2004 et 21 février 2020. — Presse locale — Didier Bigorgne, René Visse. Un chemin des Ardennes au Palais Bourbon, Pantin, Le Temps des Cerises, 2008 — Témoignage de l’intéressé.— Etat civil d’Attigny et de Bogny-sur-Meuse.

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