VALVERDE José

Par Nathalie Lempereur

Né en 1932 à Paris (Xe arr.) ; comédien, metteur en scène, auteur, directeur du théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis de 1966 à 1976, puis du théâtre Essaïon de 1978 à 2003 ; militant communiste.

Né à Paris dans une famille d’émigrés économiques espagnols (son père avait travaillé dès l’âge de huit ans dans les mines de plomb en Andalousie), José Valverde quitta les bancs de l’école à quinze ans pour entrer au Centre Dramatique de la rue Blanche. En 1948, âgé de 16 ans, il adhéra au Parti Communiste. En 1950, il devint l’assistant de Jean-Marie Serreau et joua au sein de la Compagnie André Reybaz. Il participa à l’expérience de Drame à Toulon, spectacle de Claude Martin et Henri Delmas sur la guerre d’Indochine qui avait tourné dans toute la France en 1951 et 1952.
Après avoir fait son service militaire, il fut envoyé six mois en Algérie. A son retour, en 1957, il fit le choix de se « trouver au milieu des travailleurs », s’installa à Saint-Etienne, devint électricien et milita au sein de la Compagnie des Ateliers Forges de la Loire. En 1960, il retrouva Jean-Marie Serreau, renoua avec le théâtre et alterna, pour gagner sa vie, entre ses activités de comédien et son travail de régisseur-électricien, machiniste et chef de plateau chez Jean Dasté à Saint-Etienne, puis à Paris au théâtre Récamier. Son parcours se distinguait par cette imbrication entre son travail de créateur et son implication dans le monde ouvrier et syndical. Comme il l’écrivit « Pour [lui], la démarche politique et la démarche artistique ont toujours été absolument parallèles ».
En 1961, il fonda avec Henri Delmas et Raymond Gerbal la compagnie de théâtre itinérant, le « Franc-Théâtre », une compagnie soutenue par Travail et Culture qui proposait de sillonner la banlieue parisienne avec un répertoire politique : L’Exception et la règle de Brecht, Sacco et Vanzetti de Lucinao Vincenzoni et Mino Roli, ou encore Le Brave soldat Sveyk d’après Haseck. La compagnie dut surmonter les difficultés matérielles et peina à nouer des relations avec la population des banlieues concernées.
En 1965, José Valverde fut sollicité par Jacques Roussillon, directeur du Théâtre Gérard Philipe de Saint-Denis, pour organiser l’équipe technique et penser la rénovation du théâtre. L’année suivante, il créa pour la première fois en France la pièce Hop là, nous vivons !, d’Ernst Toller. Il succèda à Jacques Roussillon et, au cours des dix années passées à la tête du théâtre, créa des pièces d’auteurs contemporains, comme La Politique des Restes d’Adamov et Kask de Mikelsen, monta des classiques comme Roméo et Juliette de Shakespeare ou Les Trente millions de Gladiator de Labiche. Ses mises en scènes alternaient avec les créations lyriques de Jacques Luccioni. Avec son équipe, composée de neuf comédiens permanents, il travailla à faire venir ceux qui n’avaient pas l’habitude de venir au théâtre en multipliant les propositions d’animation auprès de la population locale : des spectacles de Tréteaux prenant pour thèmes la guerre du Vietnam ou la sécurité sociale étaient proposés sur les marchés, devant les cités HLM, dans les écoles ou pour les comités d’entreprises.
En 1968, la troupe joua des spectacles de divertissement (pantomimes, cabarets, farces) pendant les grèves et rendait publiques des séances de maquillage. Présent aux journées de Villeurbanne, José Valverde fut le seul à refuser de ratifier le contenu du Manifeste. Il dénonça la création de concepts qu’il jugeait peu pertinents, à l’instar de « culture bourgeoise » ou « non-public » et regrettait que les présents balayent toutes les expériences passées et leurs enseignements. Isolé, il quitta les lieux sans avoir lu la communication qu’il avait rédigée pour clarifier sa position.
Le rapport de José Valverde au Parti Communiste n’a pas été sans tensions, et certaines de ses créations ont suscité des débats, comme en 1971, lorsqu’il monta un Libérez Angela Davis tout de suite, spectacle militant au cours duquel les spectateurs étaient invités à signer une pétition et à verser leurs dons au comité de soutien. En 1974, José Valverde proposa un « théâtre de la grande polémique » avec la création de Chile vencera ! de Juan Fondon. Dans le même temps, il se distinguait du théâtre populaire de son temps en s’éloignant du brechtisme pour défendre une approche « festive » du théâtre. Ainsi, il monta en 1972 un spectacle C’est la fête, « Chronique quotidienne et joyeuse des mœurs de notre temps » mêlant chants, danses, lampions, flonflons et, en 1974, un spectacle de divertissement Figaro-ci, Figaro-là, d’après Beaumarchais et Rossini, avec gangsters et musique.
Alors qu’il présentait Mère Courage, pièce bien reçue par le public, mais mal reçue par la critique, se sentant insuffisamment reconnu et soutenu, il démissionna en1976.
A partir de 1978, et pendant vingt-cinq, il s’installa dans la petite cave-théâtre Essaïon et travaille avec Alida Latessa à la découverte d’auteurs vivants. Lui-même a écrit plusieurs pièces de théâtre, dont Le Procès de Lady Europe (2004) et un livre, imprimé à compte d’auteur et au titre évocateur, Le mensonge de la culture nationale et du théâtre d’état (2007).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article178316, notice VALVERDE José par Nathalie Lempereur, version mise en ligne le 30 mai 2016, dernière modification le 31 octobre 2019.

Par Nathalie Lempereur

SOURCES : Arch. Mun. Saint-Denis 20S10, 14 AC 46, 41 ACW5, 1TGP323. - « José Valverde et le Théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis », in Philippe Madral, Le Théâtre hors les murs, éditions du Seuil, 1969, pp. 117-160. - Marie-Ange Rauch, Le Théâtre en France en 1968. Crise d’une histoire, histoire d’une crise, éditions de l’Amandier, 2008. - Céline Trescases, "Le Théâtre Gérard Philipe de Saint-Denis sous la direction de José Valverde 1966-1976. Un militant communiste à la tête d’un théâtre populaire de la banlieue rouge." Mémoire de master d’histoire sous la direction de Pascale Goetschel et Pascal Ory, juin 2011. - Françoise Kourilsky, « Les jeunes compagnies en banlieue », Théâtre Populaire, n°48, 4e trimestre 1962. - José Valverde, « Editorial », Scène Saint Denis, n°1, septembre 1967. - Roberto Gac, « Entretien avec José Valverde », Sens public. Publié en ligne : 2006/03 : http://www.sens-public.org/spip.php?article217

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