THONET Victor, Joseph, Vincent.

Par José Gotovitch

Huy (pr. Liège, arr. Huy), 2 janvier 1883 − Huy, 17 septembre 1973. Voyageur de commerce, militant à la Jeune garde socialiste et au Parti ouvrier belge, correspondant du Peuple, fondateur et dirigeant du Parti communiste de Belgique, député provincial de Liège, responsable clandestin du parti.

Appelé communément Joseph, Thonet naît à Huy le 22 janvier 1883 d’un père ouvrier de meunerie et d’une mère ménagère qu’il perd à trois ans. Le père travaille onze heures par jour, bénéficie d’un demi-jour de congé par semaine et d’un jour de vacances par an ! La viande n’est au menu que le dimanche. Néanmoins, le père lit les journaux, est dreyfusard et libéral. Mais il meurt quand Joseph Thonet a quatorze ans. Il sera élevé par sa sœur ainée et sa grand-mère, dans une ambiance chaleureuse. Bon élève, il entre à quatorze ans chez un avoué chez qui il effectue des copies d’actes. Son travail, dira-t-il, lui ouvre les yeux sur les misères du monde et les hypocrisies bourgeoises. Parallèlement, il poursuit des études de dessin industriel, le soir, pendant cinq ans.


Jeune garde socialiste

L’année 1897 marque une première grande étape de la vie de Joseph Thonet : il est ébloui par l’Exposition universelle de Bruxelles et est admis à la Jeune garde socialiste (JGS). Il ignore alors qu’il entame ainsi une vie de septante-six années de militantisme ininterrompu !
La JGS constitue son université politique : ils sont quelques-uns à dévorer et discuter chaque samedi leurs lectures. Au menu : littérature et philosophie, bientôt s’y ajouteront les conférences scientifiques données au théâtre de Huy par l’Extension universitaire. Très tôt, Joseph Thonet adhère à la Libre pensée mais les idées libertaires le séduisent aussi : il lit Kropotkine, Sébastien Faure, Bakounine... Un petit cercle d’études est créé au sein des JGS : Georges Thonar*, Adhémar Hénault*, Émile Chapelier viennent y parler. Quelques exaltés entament avec Thonet la construction matérielle d’un phalanstère… La richesse intellectuelle qu’il acquiert ne compense pas la pauvreté matérielle : pour pouvoir se rendre à un congrès des JGS à Bruxelles, il doit emprunter une paire de chaussures à un camarade car une grande partie du trajet se fait à pied !

Le 8 novembre 1906, Joseph Thonet épouse Célinie Lecharlier : sa famille catholique exige l’église. Sa femme s’y rend, il l’accompagne sans sacrifier au culte. Quatre enfants se succéderont, en 1907, 1908, 1914 et 1925.

Joseph Thonet demeure vingt-quatre années aux JGS. Pendant dix ans, il est secrétaire de la Fédération de Huy-Waremme. Il exerce également quelque temps des responsabilités aux Enfants du Peuple. Son activité n’y est pas purement politique. Il mobilise ses amis au sein des coopératives de la région pour y arracher des modifications alors révolutionnaires des conditions de travail : la fermeture du dimanche, la limitation des heures quotidiennes de travail et, bien avant la loi de 1936, six jours de congés payés annuels !

Vient le temps du service militaire. Joseph Thonet tire un mauvais numéro, mais est réformé pour la vue. Comme tous ses camarades de la JGS, il refuse d’effectuer lui-même le tirage au sort. En 1902, il est engagé comme secrétaire-comptable à la coopérative Les Campagnards de Tihange (aujourd’hui commune de Huy) qui vend machines agricoles, graines et engrais. Ils sont deux à se partager un salaire de 375 francs par an, que Thonet complète comme rédacteur à mi-temps du journal local Le Travailleur et comme correspondant du Peuple. Il gagne alors un peu plus de cent francs par mois. Son métier le met en contact avec des agriculteurs et des coopérateurs agricoles et ce milieu demeurera à jamais une des bases de sa notoriété politique. Thonet participe à la grève générale de 1902 en faveur du suffrage universel aux côtés des carriers et des métallurgistes, ne se privant pas, avec ses amis des JGS, de couper les fils de téléphone et, en 1913, il participe à la mise à sac du domicile du commandant de la Garde civique ! Par ailleurs, il se forme au journalisme. Il ne cessera plus d’écrire articles de journaux, tracts, rapports…

Joseph Thonet poursuit son travail à la coopérative en 1914 et peut se rendre à Maastricht (Pays-Bas) pour y acheter des graines. Il en profite pour passer des lettres de soldats, activité pour laquelle il est arrêté le 4 février 1915, puis condamné et emprisonné en Allemagne. Libéré en avril, il participe en 1917 à un meeting hostile à la guerre et est dès lors exclu du Comité de secours et d’alimentation local avec son ami Antony Vienne*. Il critique vivement ce qu’il dénonce comme la pratique de collaboration de classes menée par le Parti ouvrier belge (POB) et manifeste sa solidarité avec la révolution russe. Dès lors, il est mis en accusation au sein de la fédération pour indiscipline, mais la majorité refuse l’exclusion demandée par le leader local, le député Georges Hubin*.


Du POB au PCB

En octobre 1918, Joseph Thonet crée le groupe socialiste L’Ère nouvelle, cercle d’étude, dont le programme à défendre au sein du POB est de rompre l’union nationale, imposer le suffrage universel, les pensions ouvrières, l’impôt progressif sur le revenu. Le POB doit affirmer sa fibre républicaine, refuser la participation aux gouvernements bourgeois. L’Ère nouvelle se donne comme objectif d’étudier tous ces aspects du programme et invite à sa tribune Célestin Demblon*, Émile Chapelier, Charles Massart, Joseph Jacquemotte. Thonet assure lui-même une série de conférences, sur la Deuxième et la Troisième Internationale, la révolution bolchévique. De fait, le groupe constitué d’une quinzaine de militants se situe dans la mouvance des Amis de L’Exploité, « tendance socialiste de lutte de classe », animée à Bruxelles par Joseph Jacquemotte, dans laquelle il se fondra en 1920.

Le 20 décembre 1920, le Congrès du POB met les Amis de l’Exploité en demeure de se dissoudre. Joseph Thonet adresse dès le lendemain même sa démission du parti. Il plaide désormais pour la sortie collective immédiate. Mais ce n’est qu’en mai 1921 que le IIIème Congrès des Amis de l’Exploité décide de se transformer en Parti communiste (Parti communiste de Belgique - PCB). À Huy, Thonet se retrouve quasiment seul et c’est seul qu’il dépose une liste communiste aux élections communales d’avril 1921. Il recueille 324 voix ! Les coopératives socialistes dont il est membre l’excluent alors à leur tour, de même que le Syndicat des employés.

Joseph Thonet figure au comité directeur du PCB, la mouvance Jacquemotte qui s’unit, sur injonction de l’Internationale communiste, en septembre 1921, au parti fondé antérieurement par War Van Overstraeten*. Thonet préside le Congrès d’unification et, membre de son Comité central, œuvre au sein de sa commission agraire. Alternant ou cumulant parfois les deux fonctions, il demeurera membre du Comité central et /ou de la Commission de contrôle politique, sans interruption jusqu’en 1960.

Une dernière action menée comme membre du POB caractérise le type d’engagement de Joseph Thonet. À la fin de l’année 1920, la misère, l’agitation et des grèves sévissent en Autriche. Un comité d’aide aux enfants de Vienne est constitué à Bruxelles (pr. Brabant, arr. Bruxelles ; aujourd’hui Région de Bruxelles-Capitale) et Thonet prend aussitôt l’initiative d’étendre son action à Huy. Une dizaine de familles de la région (la plupart ouvrières) adoptent ainsi pour plusieurs mois un enfant viennois.


Le militant communiste

Tout naturellement donc, quand en1921 est mis sur pied, à l’appel du Secours ouvrier International (SOI), un Comité de secours ouvrier à la Russie pour faire face à la famine décimant la jeune République, Joseph Thonet relaie son activité à Huy. Si ce comité est géré par le tout jeune PCB, l’action est également soutenue par un Comité d’aide aux orphelins de la famine en Russie, sous le patronage de personnalités comme Maxime Gorki, Anatole France, Barbusse, Clara Zetkin, et où militent les socialistes Célestin Demblon*, Louise Moreau-Brunfaut, et aussi Jean Tousseul*. Albert Marteaux* en assure le secrétariat. À souligner que l’on expérimente dans cette campagne des techniques qui vont s’épanouir lors de la Guerre d’Espagne : soirées théâtrales, collectes à domicile, ventes de fleurs, souscriptions… Plus particulier encore, le Comité de secours participe au lancement en 1922 d’un « Emprunt international ouvrier pour la Russie des Soviets », garanti par le gouvernement russe et remboursable en 1933. Thonet y souscrit pour vingt-cinq francs. Dans l’action contre la famine, il intervient d’autant plus efficacement qu’il peut acheter à bon prix, à destination des Russes, plus de cent tonnes de grains auprès des commerçants en grains qu’il démarche. Une maison d’orphelins située à Aktyubinsk (Kazakhstan) portera d’ailleurs le nom de « César De Paepe et Defuisseaux ».
En effet depuis 1919, Joseph Thonet travaille comme représentant en grains pour un patron anversois qui lui assure un revenu plus confortable. Militant inlassable, il portera cependant ses valises de courtier jusqu’à son élection en 1936. Mais il s’est assuré de quinze jours de vacances et emmène camper sous tente rituellement chaque année toute sa famille au littoral. D’autres caractéristiques le singularisent parmi les militants de l’époque : de par son métier, il parcourt la France, l’Allemagne, les Pays-Bas, le Grand-Duché de Luxembourg. Il poursuit inlassablement ses lectures.

Joseph Thonet fait du SOI une base essentielle de son activité militante. Il dirige le Comité fédéral de Huy-Waremme. Se présentant comme « Organisme de solidarité ouvrière hors de toutes tendances politiques », le SOI, création de l’IC, mène des campagnes en faveur du Japon en 1923, des Pays-Bas et des mineurs borains en 1924, des enfants chinois en 1925, des mineurs britanniques en grève en 1926 et, la même année, des enfants de travailleurs sinistrés par les inondations désastreuses qui frappent principalement la Wallonie.

Mais avant cela en 1923, Joseph Thonet entame son grand rallye des prisons belges. Arrêté chez lui le 8 mars au matin, perquisitionné (ses papiers et ses livres remplissent quatre grands sacs), il est emmené à Forest (Bruxelles) dans le cadre d’un « complot contre la sûreté de l’État ». Après l’arrestation de plus de cinquante militants communistes dont tous les dirigeants, l’accusation va en mener quinze, emprisonnés pendant cinq mois, devant la Cour d’assises du Brabant. Thonet en profite, dans une bonne humeur collective, pour parfaire ses connaissances selon un horaire rigoureux, en littérature, en sociologie, pour apprendre le flamand et lire les journaux ! Dans la cellule d’en face, Joseph Jacquemotte, qui a fait venir sa machine à écrire, rédige…. Le Drapeau rouge. En juillet, l’acquittement général tournera à la confusion du ministère public qui avait décrit Thonet comme « peut-être de tous les accusés celui dont la volonté révolutionnaire est la plus trempée » !

Les incarcérations et condamnations ultérieures de Joseph Thonet balisent l’histoire sociale de la Belgique : lors de la manifestation pourtant autorisée du Premier mai 1930 à Liège, arrestation, double condamnation et emprisonnement de deux mois et demi pour injures et provocation à rébellion ; en juillet 1932, nouveau « complot contre la sûreté de l’État » dans le cadre des grèves et condamnation à quatre mois suivie dans les faits d’une incarcération de deux mois ; en décembre 1933 : Assises de Liège, condamnation à seize mois pour injures au Roi avec six mois de prison effectués de mars à octobre 1934 à la prison de Namur (pr. et arr. Namur). Le 11 mai 1940, Thonet est une fois de plus emprisonné à Namur comme communiste suspect mais libéré le lendemain, la prison étant sous les bombes.

C’est pendant son emprisonnement de 1934, que lui est attribuée la présidence de la section belge du Secours rouge international (SRI) qui a repris globalement les missions du SOI. Cette condamnation pour outrage au Roi - il avait comparé la liste civile aux indemnités de chômage - suscite la solidarité des étudiants de l’Université libre de Bruxelles (ULB) qui lui envoient le produit d’une souscription lancée à son profit.

En avril 1935, la conférence du parti à Charleroi (pr. Hainaut, arr. Charleroi) que Joseph Thonet préside, le désigne à la Commission centrale de contrôle dont il devient le secrétaire. Cette conférence marque la rupture officielle du PCB avec la politique « classe contre classe » et le tournant vers la ligne antifasciste. Elle coïncide également avec la mise en place systématique du devoir d’autobiographie auquel sont soumis tous les cadres. Il en explique personnellement l’application devant les autorités du Komintern car, délégué belge au Plénum du SRI en août 1935, il réalise enfin son rêve, qu’il rappelait en ces termes en 1966 : « je pleurai de joie en entrant dans le premier pays du Socialisme ». La confiance placée en lui tient certes à son long parcours militant et sa popularité « auprès des paysans du Condroz et de Hesbaye », mais certainement aussi à sa ferme opposition aux trotskystes.

Les élections provinciales de juin 1936 marquent le grand bond en avant du PCB dans la foulée de la politique de Front populaire qui a triomphé en Espagne et en France. En province de Liège, tout particulièrement face à la forte poussée rexiste, les dix communistes élus offrent leur soutien à une députation permanente homogène socialiste. Mais, fort étonnamment, ceux-ci leur proposent un contrat d’entente et, phénomène quasi révolutionnaire, constituent une députation permanente d’union au sein de laquelle deux sièges sont dévolus au PCB. Avec le liégeois Henri Grognard*, Joseph Thonet devient le 15 juin député permanent en charge de l’agriculture, y compris l’enseignement agricole et technique. L’antifascisme, l’appui à la SDN, l’interdiction du cumul pour les fonctionnaires provinciaux, la révision de leurs barèmes et le raccourcissement de la carrière de 65 à 60 ans (accordée par la province mais annulée par le gouvernement !), la reconnaissance syndicale, telles sont quelques-unes des lignes de force de la nouvelle majorité de ce qui est désormais « la province rouge ». Thonet dépose donc ses valises et s’investit totalement dans l’action, qu’il aura la possibilité de poursuivre, la guerre exceptée, jusqu’en 1949. Il aura la joie d’étendre l’enseignement technique, de développer l’école d’agriculture du Condroz, d’implanter des centres d’orientation professionnelle, de participer à l’inauguration du domaine de vacances de Wégimont (commune de Soumagne, pr. et arr. Liège) dont il a contribué largement à la création. Il poussera à la constitution de l’Association liégeoise d’électricité (ALE).

Toute cette activité ancre Joseph Thonet encore plus dans son terroir et il n’aura jamais la tentation de « monter à la capitale », comme jamais il ne voudra être propriétaire ni disposer d’une automobile. Sans ostentation, il choisira tout au long de sa vie, de demeurer au milieu des siens. Il incarne tout au long de l’entre-deux-guerres la continuité dans ce PCB qui a connu de nombreux changements de cap et de dirigeants : membre sans discontinuer de son Comité central, membre du Praesidium à chaque Congrès et conférence. À cela s’ajoute une présence constante dans les instances des Amis de l’Union soviétique, car son attachement au « pays du socialisme » ne se démentira jamais.

Arrêté donc comme suspect le 11 mai 1940, Joseph Thonet sort le lendemain et part (à pied) se mettre à l’abri chez des amis à Gand (Gent, pr. Flandre orientale, arr. Gand). Fin mai, il est de retour à Liège et, au milieu du chaos et vu la disparition de ses collègues, Grognard et lui reconstituent une députation permanente « d’union nationale » (deux PC, deux POB, un catholique, un libéral) qui se préoccupe des chômeurs et du ravitaillement. Leur révocation en juillet par l’occupant allemand y met fin. Moyen de pression ou mesure d’intimidation, sa femme est détenue six mois à la Citadelle, sans connaître ni jugement ni condamnation.

Avec sa belle-fille Mariette, femme de Victor (né en 1914) qui a gagné ses galons d’officier dans les Brigades internationales en Espagne, Joseph Thonet rédige et édite l’un des premiers journaux clandestins communistes, L’Espoir, journal de libération sociale et nationale, qui paraît le 10 novembre 1940. Il s’affiche par la suite comme l’organe de la Fédération Huy-Waremme du PCB. Quinze numéros paraissent avant le 22 juin 1941. Ce jour de l’invasion de l’URSS, alerté par son fils, Joseph Thonet passe dans l’illégalité. Il est rapidement affecté comme secrétaire de la Fédération clandestine de Thudinie (pr. Hainaut), sous le pseudonyme de Toussaint, et réside à Biercée (aujourd’hui commune de Thuin, pr. Hainaut, arr. Thuin), chez un sympathisant.

En février 1944, Thonet est désigné pour assurer la fonction de responsable national des cadres qu’il exerce sous le pseudonyme de Delvosal, hébergé cette fois à Nivelles (aujourd’hui pr. Brabant wallon, arr. Nivelles). Il détient le record de longévité dans la fonction de secrétaire politique de Fédération. La stricte discipline observée y est pour beaucoup.

À la Libération, Joseph Thonet demeure responsable national des cadres et préside également la Commission de contrôle politique (CCP). Il lui reviendra de présenter au premier congrès tenu après la Libération, en mai 1946, les résultats des investigations souvent douloureuses menées par la CCP sur l’attitude des membres du parti face aux policiers allemands ainsi que leur conduite dans les camps et prisons. Il lui revient surtout de synthétiser l’affaire dite « des quatre », la compromission avec la SIPO consentie par les quatre plus hauts dirigeants arrêtée en juillet 1943, sans toutefois en dévoiler totalement les ressorts qui demeureront « secret de parti » pendant quarante ans. En réalité les affaires sont instruites par le délégué de l’internationale, Andor Berei, demeuré en Belgique pendant toute l’Occupation. Le bras agissant des cadres est son adjointe « Dechamps », l’avocate Lucette Bouffioux.

Joseph Thonet retrouve avec soulagement sa bonne ville de Huy et la députation permanente. La guerre n’a pas épargné sa famille. Il a subi une perte cruelle : son fils Victor, qui a assuré la direction des Partisans à Charleroi. Arrêté une première fois à Andenne le 15 septembre 1941, il s’est évadé le 15 octobre lors d’un transport, mais tombe le 23 décembre 1942, victime d’un indicateur de la gendarmerie passé au service de la Gestapo. Le procès intenté à onze de ses camarades en 1944 expose la longue liste des exploits qu’il a dirigé, notamment l’affaire des explosifs du Bois-du-Cazier (Marcinelle, aujourd’hui commune de Charleroi) et l’exécution des bourgmestres Demaret de Ransart (aujourd’hui commune de Charleroi) et Teughels, de Charleroi. Condamné à mort le 12 avril, il est fusillé le 20 avril 1944. Sa belle-fille, Mariette Verstichel (Claude), femme de Victor, secrétaire politique à Verviers (pr. Liège, arr. Verviers), est arrêtée en janvier 1944 est déportée à Ravensbruck (Brandebourg, Allemagne). Elle survivra. Sa fille Micheline (née en 1925), entrée très jeune en résistance et emprisonnée à Huy, est délivrée par un coup de main des Partisans le 1er janvier 1943.

Quoique réélu en 1949 avec 12.357 voix, comme il l’avait été en 1946 (8.500 voix, entraînant un second élu dans le canton), Joseph Thonet ne figure plus à la députation permanente, les socialistes, « Guerre froide » oblige, ayant mis fin à la coalition. Il siège encore au conseil provincial de Liège jusqu’en 1950. À partir de cette date, il porte le titre, plus honorifique qu’opératif, de président de la Fédération. Il mènera encore à chaque fois la liste communiste provinciale, celle aussi du Sénat jusqu’en 1965 et même celle de la commune en 1958 et 1964 ! Ce qui lui vaudra d’ailleurs un hommage à sa courtoisie et surtout à son amour de la ville de Huy, publié par le chef de file libéral dans La Gazette de Huy. Un hommage solennel lui est rendu au Grand Théâtre de Huy par son parti pour son 70ème anniversaire en 1953, sous la houlette du secrétaire général, Edgar Lalmand. Thonet quitte toutes ses fonctions nationales au XIIIe Congrès du PCB en 1960. Mais il sera encore parmi les fondateurs du Mouvement populaire wallon (MPW) dans sa région.

Campeur impénitent, mais aussi passionné de découvertes, Joseph Thonet se plait alors à voyager dans diverses démocraties populaires, toujours émerveillé des réalisations qui lui sont « dévoilées » et il s’attache à les faire connaître dans la série des brochures biographiques qu’il prend réel plaisir à publier.

Cet homme parfois désigné comme le « Marcel Cachin belge » poursuit ainsi un parcours, heureux, respecté et honoré, en bonne intelligence avec ses camarades comme avec des personnes de tous horizons, comme l’indiquera notamment le vigoureux hommage qui lui sera rendu à son décès par le RP Pire. Une avenue porte son nom dans sa ville. Ce militant ouvrier incarne ainsi une double tradition : l’éveil à la politique et l’action, l’enracinement et l’accès à la culture par la force du mouvement socialiste ; la radicalisation embrassée à la lumière de la Révolution bolchévique qui le dressera à jamais contre « l’état bourgeois » avec sa part de danger, jamais esquivée, dans la paix comme dans la guerre.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article178347, notice THONET Victor, Joseph, Vincent. par José Gotovitch, version mise en ligne le 2 février 2016, dernière modification le 29 novembre 2022.

Par José Gotovitch

ŒUVRE : Une province rouge. L’œuvre de la députation permanente socialiste-communiste de Liège, Bruxelles, Éditions Germinal,[1938] − Mémoires et souvenirs, Bruxelles, s.d. :
1. Mon enfance ; 2. Mon adolescence ; 3. Ma jeunesse ; 4. Jeune Garde socialiste ; 5. Les débuts du mouvement ouvrier dans la région hutoise ; 6. Mon activité au sein du POB ; 7. Souvenirs de propagande socialiste ; 8. Souvenirs d’autrefois ; 9. 1914-1918 ; 10. 1914-1918, suite ; 11. 1919 ; 12. Les Amis de l’Exploité ; 13. 1921 ; 14. Le premier appel du PCB ; 15. Mes prisons : à Forest en 1923 ; 16. En Cour d’Assises du Brabant du 9 au 26 juillet 1923 ; 17. Mes prisons : à Liège en 1930 ; 18. Mes prisons : à Liège en 1932 ; 19. La Cour d’Assises de Liège des 13 et 14 décembre 1933 ; 20. Mes prisons : à Namur en 1934 ; 21. La grève générale pour les congés payés en 1936 ; 22. Députation permanente de Liège ; 23. La guerre de 1940-1945 ; 24. Souvenirs de propagande communiste - Mes voyages : En République populaire roumaine ; En République populaire de Hongrie ; en République populaire de Bulgarie ; En URSS (souvenirs d’un voyage effectué en 1935) ; En URSS (vingt ans après) ; En RDA.

Sources : CArCoB, fonds Joseph Thonet − RGASPI, dossier 495/193/11, autobiographie novembre 1935 − Interviews de Joseph Thonet, 23 novembre 1971 ; de Mariette Verstichel-Thonet, 13 octobre 1977 ; de Micheline Thonet, 5 juillet 1995.

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