THOMAS Émile, Henri

Par Jacques Girault, Alain Prigent

Né le 31 janvier 1925 à Rostrenen (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor), mort le 13 août 2014 à Corbeil (Essonne) ; instituteur dans les Côtes-du-Nord/Côtes-d’Armor ; militant du SNI ; militant communiste.

Fils d’un cantonnier et d’une repasseuse de coiffes, Émile Thomas fit sa scolarité à l’école primaire de Rostrenen puis au cours complémentaire. Il mit en évidence dans un témoignage publié en 1996 dans l’Humanité la rupture que constitua le Front Populaire. L’augmentation des salaires permit à la famille de se dégager de la pauvreté. Son père consacra ses premiers congés payés en 1937 à faire son jardin et à pêcher dans le canal de Nantes à Brest. À l’arrivée en vacances, des neveux et nièces parisiens revinrent au pays pour quelques jours.

Reçu à l’École normale d’instituteurs de Saint-Brieuc en septembre 1942, il fit partie de la promotion « Espoir » (1942-1946) et, à ce titre, fut élève-maître au lycée Anatole Le Braz de Saint-Brieuc. Le 12 novembre 1943, un des groupes de résistance (FUJP) des jeunes lycéens de Saint-Brieuc abattit un soldat allemand dans la ville voisine de Plérin. Le 12 décembre, le lycée fut l’objet d’une rafle : trois lycéens furent arrêtés puis fusillés le 21 février au Mont Valérien. À la rentrée de janvier 1944, Émile Thomas se retrouva avec ses camarades à Beaufort-en-Vallée (Maine-et-Loire) où l’ensemble des promotions avait été envoyé. Mais après le débarquement du 6 juin, la plupart d’entre eux revinrent à pied en Bretagne pour continuer le combat. Ce fut le cas d’Émile Thomas qui revint à Rostrenen avec son bon camarade Yves Clorennec.

À la Libération, il obtint son premier poste d’instituteur à La Ferrière, dans le sud du département des Côtes-du-Nord, en classe unique. Puis il fut nommé à Saint-Brieuc comme secrétaire de l’inspection primaire de Lamballe. En poste à Étables-sur-Mer, il assuma ses premières responsabilités au Syndicat national des instituteurs en occupant le poste de responsable cantonal en 1954. Il fut ensuite muté en 1955 à Saint-Brieuc au cours complémentaire Curie pendant un an, puis à l’école de Cesson.

Il se maria en septembre 1951 à Étables-sur-mer (Côtes-du-Nord/Côtes-d’Armor) avec une sténo-dactylographe.

Émile Thomas adhéra aux Jeunesses communistes en août 1944 et au Parti communiste français en 1945. Dirigeant de l’Union de la jeunesse républicaine de France, mouvement issu des JC en 1945, il prit la succession de Marcel Alory à la tête de l’organisation en 1949. Il intégra le secrétariat permanent de la fédération des Côtes-du-Nord du PCF de 1950 et 1953 avec Édouard Quemper, Marcel Alory et Guillaume Le Caroff. Devenu permanent politique, il fut plus particulièrement chargé de la propagande et de la formation des militants au sein des écoles fédérales. En août 1950, il participa avec Jean Geffroy, secrétaire départemental du SNI, au festival de la jeunesse organisé dans les Alpes-Maritimes. Le gouvernement avait fermé la frontière pour empêcher de jeunes Italiens et de jeunes Français de se retrouver à Menton. Les jeunes Français furent encerclés par les CRS et il fallut l’énergique intervention du député communiste Virgile Barel pour empêcher leur matraquage.

En 1954, il fut réélu au seul bureau de la fédération, chargé des relations avec les intellectuels, puis à partir de 1956, fut invité au bureau en tant que militant exerçant des responsabilités syndicales. En 1955, Émile Thomas fut candidat aux élections cantonales dans le canton d’Étables-sur-Mer. Il obtint 329 voix soit 7,4 %, le candidat socialiste Jules Gourio, ancien dirigeant du SNI avant la guerre, réunissant 631 voix sur les 4 434 suffrages exprimés soit 14,2 % dans une quadrangulaire. Émile Thomas se maintint au second tour, obtenant 410 voix sur les 4 690 suffrages exprimés soit 8,7 %, dans la triangulaire qui vit Lucien Lozet, républicain indépendant, conserver son siège.

Candidat sur la liste unitaire, ex-cégétiste, en 1954 menée par Georges Hélloco, Émile Thomas entra au conseil syndical du SNI avant la fin de la mandature en 1956. Élu sur la liste “Défense de la laïcité“ en 1956, il fut élu secrétaire général de la section départementale en octobre 1956, au moment des événements de Budapest. Avec ses camarades majoritaires, il refusa de dénoncer la répression soviétique ce qui provoqua des débats syndicaux très difficiles. Élu à la commission administrative paritaire départementale en 1956 et réélu en 1959, il siégea aussi au conseil départemental en 1958.

Il fut également secrétaire général adjoint de la section départementale de la Fédération de l’Éducation nationale. Au congrès national du SNI en juillet 1957 à Paris, il fit partie de la commission des résolutions au titre du courant de pensée unitaire. Prénommé parfois Eugène dans la presse syndicale, il figura en 9e position pour l’élection du bureau national du SNI, le 23 décembre 1957, sur la liste “Pour l’unité, la démocratie et l’efficacité du SNI“. Lors de sa réunion, la 16 janvier 1958, le BN du SNI le désigna comme membre de la commission chargée d’examiner le problème posé par l’existence et l’activité d’organisations catégorielles. À nouveau candidat au BN en décembre 1959, il arrivait 11e sur la liste. Il figurait sur la liste unitaire pour les élections au bureau national en décembre 1959 en 13e position. Tête de la liste “Action syndicale“, il fut réélu secrétaire général de la section le 22 janvier 1959. Devant la gravité de la situation (guerre en Algérie, politique anti-laïque), il proposa aux minoritaires de siéger au bureau de la section. Un bureau homogène fut alors constitué intégrant les courants unitaire (13 sièges), École émancipée (3 sièges) dont Yves Thomas et autonome (7 sièges), en particulier Sylvain Loguillard. Il œuvra pour le rapprochement des militants communistes et du Parti socialiste unifié qui se fédérèrent en 1960 dans un courant unitaire qui marqua durablement la vie syndicale départementale.

À la rentrée de septembre 1960, son épouse étant nommée dans la région parisienne, Émile Thomas quitta le département des Côtes-du-Nord pour Corbeil-Essonnes (Seine-et-Oise, Essonne) où il reprit ses activités professionnelles sur un poste d’instituteur adjoint. Rapidement responsable syndical au niveau cantonal, il lança la grève de mai 1968 à Corbeil.

Émile Thomas garda des attaches à Étables-sur-Mer où il possédait une maison.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article178521, notice THOMAS Émile, Henri par Jacques Girault, Alain Prigent, version mise en ligne le 11 février 2016, dernière modification le 29 janvier 2022.

Par Jacques Girault, Alain Prigent

SOURCES : Arch. Dép. Côtes d’Armor 46W36 (Notes des RG) et 1192W59 (Élections cantonales 1955). — Archives du comité national du PCF. — Presse syndicale. — Composition des comités fédéraux et fichier des élus et des candidats de la Fédération des Côtes-du-Nord du PCF établis par Gilles Rivière. — Arch. de l’UD CGT des Côtes d’Armor (1944-1968). — Arch. de la FSU 22 (bulletins des sections départementales du SNI et de la FEN). — Archives Marcel Alory, ancien secrétaire fédéral du PCF des Côtes-du-Nord. — L’Aube Nouvelle, hebdomadaire de la fédération des Côtes-du-Nord du PCF (1945-1951). — Ouest-Matin, quotidien édité par les fédérations du PCF de l’Ouest (1948-1956). — Une semaine dans les Côtes-du-Nord, supplément de l’Humanité Dimanche (1956-1968). — Marcel Alory, L’Union de la Jeunesse Patriotique Républicaine de France dans les Côtes-du-Nord (1945-1956), monographie, 28 pages, sans date. — Alain Prigent, « Les mondes syndicaux dans les Côtes-du-Nord (1935-1965) », in Christian Bougeard, François Prigent (sd), Des fiches aux fichiers. Les enjeux de la méthode prosopographique : élites politiques et sociales, notables, mondes militants en Bretagne (XVIIIe-XXe siècles), Colloque du CRBC et de l’AMB (Association Maitron Bretagne).

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