BRIGEOIS Jean, Alfred

Par Robin Desvignes, Claude Pennetier

Né le 22 février 1938 à Aix-en-Othe (Aube), mort le 6 avril 1998 à Auxerre (Yonne) ; ouvrier bonnetier, puis ouvrier menuisier, puis monteur ; membre du secrétariat de la fédération communiste de l’Yonne et permanent ; écarté de ses responsabilités en 1970 pour manquements au centralisme démocratique.

Fils d’un bonnetier et d’une ménagère, tous les deux sympathisants communistes dans les années soixante, Jean Brigeois était titulaire du certificat d’études primaires. Il travailla durant quelque temps comme ouvrier menuisier après avoir passé un CAP dans cette spécialité. Il adhéra à l’UJRF en 1952 et au Parti communiste en 1954 (promotion « Staline »), puis à la CGT en 1956. Il assista en août 1953 en qualité de délégué au Festival mondial de la jeunesse en Roumanie. Il était secrétaire fédéral à l’organisation de l’UJRF pour le département de l’Aube.

Au retour du service militaire, après 28 mois passés en Algérie (1958-1960), il s’installa à Sens (Yonne). Secrétaire de la section syndicale de son entreprise du bâtiment, les Établissements Blénet et Cie, depuis le début 1961, il conduisit avec un certain succès une grève du bâtiment. Dynamique et chaleureux, il devint rapidement un des responsables communistes de Sens. Il entra la même année au comité fédéral de l’Yonne et devint permanent. Dès 1962, il fut promu au secrétariat fédéral comme responsable à l’organisation. Il se maria à Sens en août 1963 avec Dolorès Guzman.

Début 1968, Jean Brigeois accepta d’aller s’installer à Auxerre, chef-lieu du département, pour y exercer ses fonctions de permanent et œuvrer au renforcement du PCF, qui était médiocrement implanté dans cette ville par rapport à Sens et Migennes.

Survenant peu après les événements de mai-juin 1968 et le recul électoral consécutif du PCF, les événements de Tchécoslovaquie furent très mal vécus par Jean Brigeois. Toujours membre du secrétariat fédéral, il s’exprima ouvertement avec plusieurs autres dirigeants départementaux contre l’acceptation tacite par le PCF de la politique de « normalisation » imposée à Prague, notamment lors de la 17e conférence fédérale tenue à Auxerre les 24 et 25 janvier 1970. La direction nationale du PCF décida qu’il fallait mettre un terme à cette contestation interne, entre autres parce qu’elle soupçonnait un militant icaunais, Robert Simon, d’être un des responsables de la publication d’Unir-débat et d’orchestrer en sous-main un travail fractionnel.

Le 14 novembre 1970, au terme d’une réunion houleuse du comité fédéral vécue de manière dramatique par la plupart des participants, Jean Brigeois fut suspendu de ses fonctions de permanent et de ses responsabilités au sein la direction fédérale par un vote de 20 voix contre 7. Il lui était reproché des fautes politiques graves et la « violation des statuts » du Parti. Ces accusations reposaient sur des lettres qui lui avaient été adressées par Bernard Foutrier, un ancien responsable communiste de Migennes parti travailler en 1967 à l’Humanité, qui s’était rapproché après 1968 des trotskystes de la Ligue communiste et projetait de publier une « revue-collection » traitant entre autres des problèmes que connaissaient les pays du camp socialiste.

Jusqu’alors latente, la crise qui couvait au sein de la Fédération communiste de l’Yonne s’aggrava brutalement avec la mise à l’écart de Jean Brigeois. À l’issue de la conférence fédérale qui se tint les 13 et 14 novembre 1971 et qui fut suivie de près par le représentant du comité central, Auguste Brunet (membre de la commission de contrôle politique), plusieurs dirigeants départementaux de premier plan, parmi lesquels Jean Brigeois, Guy Lavrat, Jacques Baron et Philippe Breton, furent écartés de leurs responsabilités fédérales. Il fallut ensuite de longues années pour que les plaies ouvertes alors commencent à se cicatriser.

Resté membre du Parti communiste, Jean Brigeois occupa différents emplois, puis devint agent d’assurance et enfin gardien de la colonie de vacances que la ville de Montreuil possédait à Saint Bris le Vineux (Yonne), jusqu’à son décès consécutif à une tumeur au cerveau.

Lors de son enterrement civil, s’exprimant au nom du comité fédéral du PCF, Guy Lavrat évoqua la personnalité attachante d’autodidacte cultivé de Jean Brigeois, rappela son engagement et souligna que l’histoire lui avait finalement donné raison à propos des pays du « socialisme réel ».

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article17950, notice BRIGEOIS Jean, Alfred par Robin Desvignes, Claude Pennetier, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 2 mai 2011.

Par Robin Desvignes, Claude Pennetier

SOURCES : Arch. comité national du PCF. — Documents du fonds Jean Brigeois. — Témoignages de Robert Loffroy (Mémoires manuscrites inédites) et Guy Lavrat.

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