BRISSET Alice, Eugénie

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

Née le 15 avril 1894 à Paris (XVIe arr.), morte le 19 novembre 1974 à Bagneux (Hauts-de-Seine) ; teinturière ; membre du comité central du Parti communiste (1926-1929), membre de la commission exécutive de la CGTU (1927-1929), membre de la commission administrative de la CGT (1946-1951), membre de la commission de contrôle financier de la CGT (1951-1963) ; résistante ; conseillère de la République (1946-1948), membre du Conseil économique (1950-1952), membre du conseil des prud’hommes de la Seine, conseillère municipale de Bagneux (1960-1970).

[Sénat]

Alice Brisset était l’aînée de quatre filles dont deux atteintes par la maladie ne pouvaient pas avoir un travail continu. Elle dut donc aider son père « vieux militant révolutionnaire de Seine-et-Oise » et habiter chez ses parents à Montigny-les-Corneilles (Seine-et-Oise) jusqu’en 1924. Son père mourut deux ans plus tard. Alice Brisset resta toute sa vie célibataire mais à partir de 1924-1925, elle vécut maritalement avec Georges Joseph (né le 4 octobre 1896 à Paris IIIe arr. - mort le 10 juillet 1962, dirigeant communiste), d’abord sous le nom de Monsieur et Madame Henriet, puis sous leurs noms d’état-civil. Ils habitèrent 139, rue du Faubourg Saint-Denis (Xe arr.) jusqu’en 1935, puis 106 rue du Ranelagh (XVIe arr.).

Apprentie teinturière en 1906, Alice Brisset se spécialisa dans le détachage des fourrures. Dès mai 1917, elle participa activement à la grève des « midinettes » parisiennes qui refusaient que la guerre soit prétexte à aggraver leurs conditions de travail.
« Et l’on s’en fout,

On f’ra la s’maine anglaise

Et l’on s’en fout,

On aura nos vingt sous ! »

Membre du Parti communiste depuis le congrès de Tours (décembre 1920), elle apparaissait en 1922 comme une des principales figures du mouvement révolutionnaire parmi les femmes dans la région parisienne. En 1922, elle participa à la création en Seine-et-Oise d’une « sous-commission féminine du travail » ayant pour but d’intensifier la propagande communiste parmi les femmes et « d’attirer leur attention sur les avantages qu’elles pourraient obtenir en se fournissant aux coopératives et en confiant leurs enfants aux pupilles ». En 1923 et 1924, elle fut secrétaire de la Fédération communiste de Seine-et-Oise et élue membre de la commission des conflits et de la commission féminine du Comité directeur du PC au congrès national de Lyon, en janvier 1924. Peu après, elle fut déléguée de son département à la 4e entente des Jeunesses communistes. En juin 1926, elle assista au congrès de Lille du PC.

C’était, dans le même temps, une militante syndicaliste tout aussi ardente, membre de la commission féminine de la CGTU à partir du congrès de Bourges en novembre 1923 puis sa déléguée à la commission exécutive de la CGTU à partir de juillet 1924, avec la qualité, à ce titre, de secrétaire à partir du congrès d’août 1925. Interrogée par l’historienne A.-M. Sohn sur les conditions dans lesquelles elle avait succédé à la commission féminine aux syndicalistes institutrices, elle souligna l’incompatibilité de tempérament existant alors entre institutrices et ouvrières et reconnut que la modification de composition sociale de la commission avait été délibérée (thèse, op. cit).

Au début de l’année, pourtant, au moment de la réorganisation du PC sur la base des cellules d’entreprise, elle abandonna toutes ses responsabilités politiques, donna sa démission de la commission exécutive de la CGTU au printemps de 1927 pour protester contre la « dictature occulte » de Suzanne Girault à laquelle elle reprochait de lui avoir donné, par lettres, des instructions impératives au sujet de son travail syndical. D’après la police, elle espérait entraîner à ses côtés un certain nombre de militantes syndicalistes et communistes à demander l’exclusion de Suzanne Girault du PC. Elle demeurait cependant une militante très active et, au début de 1927, déjà membre de la commission exécutive de la Fédération du Textile (vêtement) depuis novembre 1926, et du comité de rédaction L’Ouvrière, journal des femmes communistes, collaboratrice régulière de l’Humanité, elle fut élue au Comité central au congrès de Lille (20-26 juin 1926).

Un conflit entre son ami G. Joseph et la direction du Parti communiste affaiblit sa position. En juin 1928, elle prit sa défense à la conférence de la Région parisienne, alors que la grave accusation (non fondée) d’être un « agent provocateur » était diffusée par les adversaires de Joseph (Arch. J. Maitron). Ainsi s’explique peut-être le relatif effacement d’Alice Brisset entre 1929 et 1939. Elle milita cependant activement. La police l’appréhenda le 28 avril 1930, alors qu’elle haranguait les ouvriers des établissements Hachette pour les inviter à manifester le 1er Mai. Elle siégea à la direction de la Fédération Textile-Habillement avant et après la réunification de 1936.

La biographie parue dans l’Humanité du 21 novembre 1974 précise qu’elle avait milité dans l’Indre pendant l’Occupation.

Alice Brisset fit partie du Comité local de Libération de Châteauroux. Alice Brisset avait été responsable clandestine des Comités féminins du Parti communiste français d’où naquit l’Union des femmes françaises (UFF) après la guerre. Sa participation à la Résistance la fit réélire à d’importantes fonctions syndicales et politiques : membre de la commission féminine de la CGT de 1945 à la fin des années soixante ; membre de la commission administrative de la CGT (1946-1951), membre de la commission de contrôle financier de la CGT (1951-1963), conseillère de la République (1946-1948), membre du Conseil économique (1950-1952), membre du conseil des prud’hommes de la Seine, membre du conseil municipal de Bagneux (1960-1970).

Après avoir travaillé comme secrétaire dans les services du Conseil économique, elle prit sa retraite et ralentit ses activités militantes, restant gérante du journal La Fourrure parisienne et membre du bureau de l’Amicale des vétérans du Parti communiste. Alice Brisset laissa, selon la formule de Charles Tillon, le souvenir d’une « militante allègre, dont le dévouement n’avait d’égal que la modestie » (On chantait rouge, p. 90).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article17980, notice BRISSET Alice, Eugénie par Jean Maitron, Claude Pennetier, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 3 janvier 2022.

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

[Sénat]
A la Bours du Tr

SOURCES : Arch. PPo. 300. — Arch. Jean Maitron. — Arch. André Marty, A IV. — L’Humanité, 21 novembre 1974. — Le Monde, 24-25 novembre 1974. — Bulletin communiste, 24 octobre 1924. — Madeleine Colin, Ce n’est pas d’aujourd’hui... Femmes, syndicats, luttes de classe, Éditions sociales, 1975. — A.-M. Sohn, Féminisme et syndicalisme, thèse 3e cycle, op. cit. — S. Courtois, thèse 3e cycle, op. cit.

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