MAKOWSKI Jacques [Jacob]

Par Dominique Tantin

Né le 21 juin 1906 à Czestochowa (Pologne), massacré le 29 mars 1944 par les Allemands à Clermont-d’Excideuil (Dordogne) ; électricien ; victime civile d’origine juive.

Jacques Makowski, son épouse et leurs enfants (1934).
Jacques Makowski, son épouse et leurs enfants (1934).
Archives privées Gérard Makowski

Jacob Makowski était le fils de Leib Wolf Makowski et de Rywka Bialek. Les Makowski quittèrent la Pologne, et, dans un premier temps, s’établirent en Belgique. Jacques, qui exerçait la profession d’électricien, était encore domicilié à Saint-Josse-en-Noode (Belgique) sur son livret de famille lorsqu’il épousa, à Strasbourg, le 17 août 1929, Jetti Leibovici, née le 5 juin 1907 à Sereth (Roumanie), fille de Michel Leibovici, menuisier, et de Clara, Chaje Schwarz, domiciliés 9 rue du Jeu de Paume à Strasbourg,. Leur premier enfant naquit d’ailleurs à Bruxelles. Le couple s’installa dans la capitale alsacienne quelques mois plus tard avec les Leibovici.
À l’instar de nombreux habitants du Bas-Rhin, dont de nombreux juifs, les familles Makowski et Leibovici durent se replier en Dordogne lorsque la guerre fut déclenchée. Elles élurent domicile dans la commune d’Excideuil et furent hébergés chez les époux Raynaud domiciliés place Bugeaud. Gilberte Raynaud, l’une de leurs deux filles, était l’institutrice des enfants Makowski.
Jacques et Jetti Makowski eurent quatre enfants : Henriette, née le 10 décembre 1930 à Bruxelles (décédée le le 31 août 1978), Fernand, né le 27 mars 1932 à Strasbourg, ainsi que Lucie, née le 27 septembre 1933 (décédée le 16 juillet 2002), et enfin Gérard, né le 24 octobre 1941 à Excideuil (Dordogne).
Après la défaite, Jacques Makowski – qui disposait d’un passeport du Consulat de Pologne à Toulouse, en date du 12 juillet 1940 – dut rejoindre les Groupes de travailleurs étrangers (GTE) créés par la loi du 27 septembre 1940 du régime de Vichy, dite « Loi sur la situation des étrangers en surnombre dans l’économie nationale ». Ces GTE devaient rassembler « les étrangers de sexe masculin, âgés de plus de 18 ans et de moins de 55 ans, aussi longtemps que les circonstances l’exigent, dans des groupements d’étrangers, s’ils sont en surnombre dans l’économie nationale et si, ayant cherché refuge en France, ils se trouvent dans l’impossibilité de regagner leur pays d’origine ». La loi prévoyait de les mettre à la disposition d’entreprises, notamment dans l’agriculture privée de bras par la captivité de plus d’un million et demi de soldats français. C’est ainsi que dans un premier temps, Jacques Makowski fut incorporé le 14 juin 1941 au 647e GTE basé à Chancelade, non loin de Périgueux, comme « prestataire détaché dans l’agriculture » chez un dénommé Favart domicilié au Fauveau, qui pourrait être un lieu-dit de la commune de Razac-sur-l’Isle (Dordogne). Puis il fut affecté à un emploi plus conforme à sa qualification, détaché à compter du 15 décembre 1942 (jusqu’au 5 mars 1943) pour des travaux de dépannage de postes de TSF chez Marcel Druis à Excideuil, « autorisé à se déplacer dans un rayon de 40km pour les besoins de son travail. » Sur son « ordre de détachement », le « signalement » le décrit mesurant 1,67 m, avec des yeux et des cheveux châtains et un visage ovale.
Les familles Makowski et Leibovici furent victimes de la répression qui se déchaîna en Dordogne en 1944. Le département fut occupé par les Allemands lorsqu’ils envahirent la zone dite libre le 11 novembre 1942. Il devint une terre de maquis contre lesquels les Allemands organisèrent une lutte d’une extrême violence en appliquant les méthodes du front de l’Est. Du 26 mars au 19 avril 1944, la division Brehmer mit à feu à sang les départements de la Dordogne, de la Corrèze et de la Haute-Vienne. Les victimes furent des maquisards, mais aussi des habitants tués en représailles, et parmi eux, les communistes et les juifs étaient les cibles prioritaires, l’incarnation du judéobolchevisme, la figure centrale de l’ennemi dans l’imaginaire nazi. Jacques Makowski fut abattu le 29 mars 1944 à 16h30 à Clermont-d’Excideuil. Selon l’historien Bernard Reviriego, « vers 16 heures, un officier et trois soldats obligèrent Marcel Druis, d’Excideuil, à les conduire auprès de son ouvrier, Jacques ou Jacob Makowski, qu’ils arrêtèrent aussitôt. Le corps de ce dernier, de confession israélite, fut retrouvé le lendemain au lieu-dit la Sablière, commune de Clermont-d’Excideuil […]. Il était criblé de balles. »
Le même jour, son beau-père, Michel Leibovici, arrêté avec son gendre selon Bernard Reviriego, fut également victime des Allemands. L’acte de décès fut dressé par la mairie de Corgnac-sur-l’Isle (Dordogne) où il avait été transporté pour être exécuté.
Les Juifs furent nombreux parmi les victimes de la Division Brehmer. Ainsi, convergent, comme dans bien d’autres endroits depuis 1941, répression et pratiques génocidaires.
A la fin de la guerre, Mme Makowski et trois de ses enfants (Fernand, 13 ans, ayant été envoyé à Strasbourg) et sa mère, s’installent dans un baraquement à Périgueux. En 1945, Mme Makowski doit entreprendre des démarches pour, d’une part, obtenir l’autorisation de rentrer à Strasbourg (l’appartement de la famille étant occupé)), ; d’autre part, pour sa mère, Mme Leibovici, obtenir un dédommagement pour spoliation de la menuiserie de son époux (menuiserie occupée d’abord par les troupes et la police allemandes comme atelier de réparation, puis vendue par contrat à M. Reisser).
Ces démarches se révélèrent infructueuses, et ce n’est que le 20 décembre 1946 qu’un certificat établit une déclaration d’arrivée de la famille à Strasbourg.
La famille conserva longtemps des relations épistolaires avec la famille Raynaud. A partir de 1973, Henriette, Lucie et Gérard et ses enfants se sont rendus à plusieurs reprises à Excideuil et on été reçus par Mme Raynaud, puis après son décès, par Odette Desbrosse dans la maison même où la famille avait été accueillie.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article179855, notice MAKOWSKI Jacques [Jacob] par Dominique Tantin, version mise en ligne le 11 avril 2016, dernière modification le 1er avril 2022.

Par Dominique Tantin

Jacques Makowski, son épouse et leurs enfants (1934).
Jacques Makowski, son épouse et leurs enfants (1934).
Archives privées Gérard Makowski

SOURCES : Témoignage et documents de Monsieur Gérard Makowski, Paris, 8 février 2016. — Guy Penaud, Les crimes de la division Brehmer, la traque des résistants et des juifs en Dordogne, Corrèze, Haute-Vienne (mars-Avril 1944), Périgueux, Éditions La Lauze, 2004, pp. .185, 194, 402. — Bernard Reviriego, Les Juifs en Dordogne, 1939-1944, Périgueux, Editions FANLAC et Archives départementales de la Dordogne, 2003, pp. 405-406.

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