WALLON Dominique, Anne, Erwan

Par Alain Monchablon

Né le 21 juin 1939 à Paris (XVIe arr.) ; syndicaliste étudiant, président de l’UNEF (1961-1962), militant PSU, inspecteur général des finances, haut fonctionnaire au ministère de la Culture.

Aîné d’une famille de deux enfants, Dominique Wallon fut très marqué à l’âge de cinq ans par la disparition mystérieuse de son père le résistant Jacques Wallon dans les combats de la Libération. La famille résidait l’été dans la propriété familiale près de Clermont dans l’Oise. Jacques Wallon cadre administratif, gaulliste et combattant FTP en 1943, devenu chef des FFI de l’Oise en 1944 disparut le 30 août 1944 lors d’une mission de harcèlement des troupes allemandes en retraite, sans que son corps fût jamais retrouvé. Son oncle Jean Wallon, gaulliste également fut le président du comité départemental de Libération. Sa mère, née Jeanine Leroy, se remaria, Dominique Wallon eut ainsi trois demi-frères et sœurs.
Fils d’un « mort pour la France », pupille de la nation, Dominique Wallon fit sa scolarité primaire et secondaire au lycée Janson-de-Sailly (Paris XVIe arr.) proche du domicile familial. Est-ce la culture de la Résistance, l’évocation de son trisaïeul Henri Wallon, auteur en 1875 du célèbre amendement qui donna le nom de République au nouvel ordre institutionnel ? En tout cas, Dominique Wallon eut un intérêt précoce pour les questions politiques et sociales. Dès le lycée, où oeuvraient des aumôniers dynamiques, il s’engagea en 1954 à la JEC (Jeunesse étudiante chrétienne), dans la branche lycéenne, dont il devint un des responsables parisiens en 1955. En même temps, il admira Mendes-France et participa avec Tiennot Grumbach au petit groupe mendésiste de Janson.
Bachelier à dix-sept ans, il s’inscrivit à l’Institut d’études politiques et à la Faculté de droit. Tout en continuant à militer à la JEC, il s’inscrivit à l’Amicale de Sciences-Po, section locale de l’UNEF, où la gauche « mino » dominait. En même temps, révolté par l’intervention soviétique en Hongrie en novembre 1956, il participa à la manifestation de protestation. Mais la grande affaire était la guerre d’Algérie, qui occupait tous les esprits, et suscitait sa révolte. La démission forcée de l’équipe nationale de la JEC face aux pressions de l’épiscopat (1957), entraîna celle du bureau parisien donc celle de Dominique Wallon, qui s’éloigna dès lors de la religion. Il fut élu, d’une courte majorité, président de l’Amicale de Sciences-Po à l’automne 1959, la guerre d’Algérie étant la ligne de clivage essentielle. Au printemps 1960, il fut élu vice-président « extérieur adjoint » (c’est-à-dire chargé de l’Outre-mer et de l’Algérie) de l’UNEF. À ce titre, il fut l’acteur de la spectaculaire reprise de relations ouvertes de l’UNEF et de l’UGEMA (Union générale des étudiants musulmans algériens), illégale en France (car dissoute en 1958 par le gouvernement français). Le communiqué commun des deux associations étudiantes, signé à Lausanne le 6 juin 1960 eut un retentissement considérable : il prônait des négociations avec le GPRA (Gouvernement provisoire de la république algérienne) pour mettre fin à la guerre, même si le mot d’indépendance n’était pas prononcé. Du coup le gouvernement supprima la subvention de l’UNEF, peut-être même avait-il envisagé sa dissolution. La participation de Dominique Wallon, à l’été 1960, au congrès de l’UGEMA à Tunis suscita l’animosité durable du Premier ministre Michel Debré. Candidat malgré lui, Wallon fut élu président de l’UNEF au congrès d’avril 1961, à une large majorité. Les studios photographiques Harcourt proposèrent une séance de poses à celui à qui Françoise Giroud dans l’Express prédisait un avenir de Premier ministre. L’UNEF était alors au maximum de son influence, par le nombre d’étudiants syndiqués comme par son aura liée à l’action contre la guerre d’Algérie, malgré la naissance d’une organisation rivale appuyée par le gouvernement. Dominique Wallon avec le bureau de l’UNEF dénonça le massacre d’État commis à Paris le 17 octobre 1961 contre les manifestants algériens pacifiques. Signataire (avec la CGT et la CFTC) de l’appel à manifester le 8 février 1962 contre l’OAS et pour la paix en Algérie, l’UNEF participa aux grandioses obsèques faites le 13 aux neuf tués par la police. Dans son discours, Wallon, comme l’orateur de la CFTC, tint à associer dans un même hommage les victimes du 8 février et les manifestants algériens du 17 octobre.
Quittant au printemps 1962 la présidence de l’UNEF en même temps que la vie étudiante, il put se présenter (avec succès) à l’automne au concours de l’ENA, qui lui avait été interdit l’année précédente par Michel Debré.
Sorti de l’ENA en 1966 (promotion Montesquieu), il adhéra alors au PSU, ce qu’il s’était abstenu de faire pendant ses années à l’UNEF. Secrétaire de sa commission économique de 1968 à 1971, il écrivit sous le nom de Jacques Breton. Il fut de 1969 à 1971 membre de la DPN (direction politique nationale), dans le courant rocardien. Entre-temps il avait été candidat de ce parti aux législatives de juin 1968 dans la 2e circonscription de la Gironde, face à Jacques Chaban-Delmas, obtenant 4,8 % des voix. Ce fut sa seule candidature électorale. En 1975, il ne renouvela pas son adhésion au PSU, ni n’adhéra au PS.
Inspecteur des finances, il fut de 1970 à 1974 chargé de mission au Commissariat au plan, dont il dirigea la section syndicale CFDT de 1972 à 1974. Puis de 1974 à 1981 il fut détaché comme professeur associé à l’Institut d’études politiques de Grenoble. Il s’était en 1975 marié avec Chantal Péraud, décédée en 1999, dont il eut un fils. Son séjour grenoblois suscita un tournant dans son activité à la fois militante et professionnelle. Il se convainquit là des potentialités et de l’enjeu politique de l’action culturelle telle qu’elle se découvrait, alors que l’action proprement politique allait progressivement lui paraître décevante. Il fut président de la Maison de la Culture de Grenoble à partir de 1977, puis de l’Union nationale des maisons de la culture à partir de 1978. L’élection présidentielle de 1981 le ramena à Paris, auprès du ministre de la Culture Jack Lang : conseiller technique, puis chef de la mission du développement culturel, et directeur du développement culturel, de 1982 à 1986. Cette nouvelle direction innovait par une politique, contractuelle, d’impulsion et de décentralisation en direction des collectivités locales. La victoire électorale de la droite en 1986 l’amena à démissionner avec éclat, face aux nouvelles orientations de la politique culturelle. Il fut alors chargé de mission pour la culture auprès de Robert Vigouroux, maire de Marseille, y impulsant une dynamique nouvelle. Au lendemain des élections de 1988 il fut nommé directeur général au CNC (centre national de la cinématographie), jusqu’en 1995. Il fut ensuite, toujours au ministère de la Culture, successivement directeur du théâtre et des spectacles, directeur de la musique et de la danse, puis directeur de ces quatre domaines. En même temps il présidait plusieurs associations de promotion des cinémas du Sud. Après sa démission en 2000, il fut président de l’Institut de financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC), jusqu’à sa retraite en 2002. Il fonda alors à Apt – près de sa nouvelle résidence – le Festival des cinémas d’Afrique. Il est commandeur des Arts et Lettres, officier de la Légion d’Honneur, et titulaire de plusieurs décorations étrangères.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article180023, notice WALLON Dominique, Anne, Erwan par Alain Monchablon, version mise en ligne le 23 avril 2016, dernière modification le 11 juillet 2021.

Par Alain Monchablon

OEUVRE : Combats étudiants pour l’indépendance de l’Algérie, Casbah Éditions, Alger 2014. Réédition sous ce même titre, l’Harmattan, Paris 2016. —Préface à J.Cl. Gillet, Éducation populaire, culture et animation, les orientations du PSU, l’Harmattan, Paris 2014.

SOURCES : Archives de l’UNEF (AN 46 AS). — Correspondance avec l’intéressé. — Who’s who, 1994-1995.

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