BRUGIÈRE Ambroise [BRUGIÈRE Antoine Ambroise]

Par Claudine Khatchadourian

Né le 4 avril 1911 à Messeix (Puy-de-Dôme), mort le 26 avril 1963 à Clermont-Ferrand (Puy-de- Dôme) ; médecin. Résistant, Socialiste. Adjoint spécial de la ville de Clermont-Ferrand chargé de Montferrand (1945-1963), Conseiller Général du Puy-de-Dôme (1945-1963), député (1962-1963)

Antoine Ambroise Brugière est né au sein d’une famille modeste de Messeix (63). Il est le fils de Pierre Brugière, mineur, et de Thérèse Brugière née Briquet. Enfant, il est marqué par la perte de son père, mobilisé dès le début de la guerre 14-18 et tué lors d’une attaque allemande en septembre 1914. Les quatre enfants deviennent pupilles de la nation et la mère sans profession, doit prendre en charge l’éducation de ses quatre jeunes enfants.
Ambroise Brugière (qui préférait son second prénom à celui d’Antoine) débute son parcours scolaire à l’école communale de Messeix. En 1922, âgé de 11 ans, il entre au lycée Blaise Pascal de Clermont-Ferrand. Il réalise une scolarité exemplaire jusqu’au baccalauréat. Durant ses années de lycée, il connaît les plaisirs d’un sport collectif : le rugby. Il intègre l’équipe de l’Iris du lycée Blaise Pascal. A la fin des années vingt, il s’inscrit à l’école de médecine de Clermont-Ferrand. Durant ses études supérieures, il continue à jouer au rugby et fait partie de l’équipe universitaire : le Clermont Université Club (CUC) et est sélectionné en équipe nationale universitaire. Plus tard, il devient un des nombreux dirigeants du CUC. Il achève ses études en 1937 après avoir soutenu une thèse de médecine intitulée « Cure radicale de la hernie-inguino scrotale (nouveau procédé opératoire) » à la Faculté de Toulouse. Jeune diplômé de médecine, Ambroise Brugière débute sa carrière professionnelle la même année en s’installant à Clermont-Ferrand. Durant ces années d’exercice de la médecine, il se montre soucieux de délivrer une aide psychologique et apporte son soutien aux plus démunis des quartiers nord de l’agglomération clermontoise. Son engagement social lui vaut une certaine popularité et l’exercice de la médecine une première notoriété. Peu avant la guerre, il adhère à la SFIO.
En 1939, il est mobilisé dès les premiers jours du conflit mais de santé fragile, il est vite renvoyé à la vie civile. Ambroise Brugière gagne les rangs de la résistance. Il met ses compétences médicales au profit d’un corps franc et apporte des soins aux maquisards blessés reçus dans son cabinet clermontois. On le retrouve aux côtés des résistants du Mont-Mouchet en juin 1944. À la libération, rien ne laisse présager qu’Ambroise Brugière s’apprête à devenir un homme politique d’envergure.
Sa carrière politique débute réellement en août 1944, date à laquelle il incorpore le Comité Départemental de Libération (CDL), emmené par Gabriel Montpied*. Il est appelé à siéger comme résistant au sein de la délégation spéciale municipale de la ville de Clermont-Ferrand. Lors des élections municipales du 29 avril 1945, comme représentant de la SFIO, il figure sur la liste unique dite d’ « Union Antifasciste et Républicaine ». Ambroise Brugière, comme représentant des quartiers nord (Montferrand), est élu conseiller municipal avec 5 989 voix sur 7 232 votants. Il est désigné par le nouveau conseil municipal : adjoint spécial de Montferrand. Le 12 septembre, lors des élections cantonales, il est élu sur la circonscription de Clermont-Ferrand-Est avec 7 615 voix et devient conseiller général à partir de cette date. Il est réélu en 1951 et 1958.
En 1951, au soir du premier tour des cantonales, il est mis en ballottage. Il obtient 3 987 voix et le communiste Robert Marchadier* 2 994 voix. Il est élu au second tour avec 5 372 voix sur 8445 votants. Son mandat lui fut renouvelé en avril 1958. Lors du scrutin de ballottage du 27 avril, Ambroise Brugière fut à nouveau élu avec 6 146 voix face au communiste Henri Bagel*.
Conseiller général, Ambroise Brugière se présente dès 1951 à la députation. L’implantation politique d’Ambroise Brugière, son passé de résistant, sa réputation d’homme épris de justice sociale et sa popularité comme médecin poussent la SFIO à le présenter à la députation. La liste socialiste est patronnée par les deux sénateurs du département : François Dassaud et R Fournier (Voir ces noms), par le maire de Clermont-Ferrand, Gabriel Montpied, par vingt conseillers généraux ainsi que 143 maires de communes urbaines et rurales. Les sept candidats proposés par le PS-SFIO sont alors Lucien Dumas, Adrien Mabrut, Antonin Chastel, Ambroise Brugière, Camille Vacant, Georges Bierzon et Anna Rossignol. Le docteur Brugière est placé en quatrième position. Au soir du premier tour, le 17 juin 1951, la SFIO sort perdante de ce scrutin. Elle n’obtint que 15 % des voix et n’a qu’un seul élu : Adrien Mabrut.
L’instabilité politique française sous la IVe République suscite de nouvelles élections législatives. La dissolution de l’Assemblée nationale le 1er décembre 1955, permet à la SFIO de se lancer à nouveau dans la bataille électorale. Elle avance une liste de sept candidats. Cette liste soutenue par deux sénateurs du Puy-de-Dôme, François Dassaud et Gabriel Montpied, un ancien sénateur, R. Fournier, 19 conseillers généraux, 130 maires, 87 adjoints et 700 conseillers municipaux, prône le « retour au scrutin d’arrondissement et la défense de la laïcité ». Les sept candidats SFIO sont Fernand Sauzèdde, Adrien Mabrut, Louis Chautard, Ambroise Brugière, Camille Vacant, Léon Ozannat et Arsène Boulay*. La SFIO, malgré une légère progression de son score (17% des voix) n’obtient que 41 860 voix. Adrien Mabrut reste son seul élu.
Lors des élections de 1958, le scrutin de liste est remplacé par un scrutin d’arrondissement. La forte personnalité d’Ambroise Brugière ainsi que son implantation politique dans la première circonscription du Puy-de-Dôme, l’imposent comme candidat pour la SFIO. A cette élection, dans le cadre de la première circonscription, il représente le rassemblement républicain contre le gaullism Ambroise Brugière a pour suppléant Arsène Boulay, maire de Romagnat, délégué cantonal et reçoit le soutien de Gabriel Montpied.
Malgré de graves problèmes de santé liés à une opération de l’estomac, il s’engage pleinement dans la campagne pour les législatives de 1958 et multiplie avec son suppléant les réunions publiques.
Lors du premier tour, le 23 novembre, cinq candidats sont en lice. Deux arrivent en tête : Marcel Clermontel pour l’U.N.R., qui obtient 18288 voix et Ambroise Brugière pour la SFIO avec 13 796 voix. Ce dernier garde toutes ses chances, suite au désistement en sa faveur du candidat radical Joseph Gardet maire de Cournon, qui obtint 4957 voix.
Lors du second tour, le 30 novembre, les trois candidats en lice sont : Ambroise Brugière, Marcel Clermontel et Pierre Besset (P.C.)*. Au soir du second tour, le docteur Brugière est battu avec 16 197 voix, Pierre Besset et Marcel Clermontel obtenant respectivement 8 829 voix et 22 916 voix.
Après ce nouvel échec, Ambroise Brugière se consacre entièrement à ses mandats de conseiller général et municipal, à ses patients, ainsi qu’à ses responsabilités associatives.
En 1962, l’Assemblée Nationale dissoute après l’adoption le 5 octobre d’une motion de censure, de nouvelles élections ont lieu, Ambroise Brugière, rongé par la maladie est, à nouveau, candidat.
Le docteur Brugière, bien que très affaibli physiquement, est le candidat socialiste pour la première circonscription du Puy-de-Dôme. En gardant le même suppléant en la personne d’Arsène Boulay, il fait preuve d’une grande fidélité en amitié. Cette candidature bicéphale reçut le soutien de plusieurs conseillers généraux et fut accompagnée d’un appel du sénateur-maire de Clermont-Ferrand, Gabriel Montpied. Délaissant les réunions publiques par obligation à Arsène Boulay, Ambroise Brugière apparaît à la veille du premier tour comme le candidat susceptible de détrôner Marcel Clermontel.
Le 18 novembre, cinq candidats s’opposent à la députation : Servent (PSU) qui obtint 1 85l voix, Ambroise Brugière (socialiste), 13 5l3 voix, Marcel Clermontel (UNR) député sortant, 15 632 voix, Pierre Besset (P.C.), 10356 voix et Gaston Pradelle (MRP), 3 221 voix
Les désistements successifs de Pierre Besset, de Serve’nt et de Gaston Pradelle, donnent la victoire à Ambroise Brugière le 25 novembre.
Lors du second tour, les deux adversaires de 1958 se font à nouveau face. L’électorat de la première circonscription de Puy-de-Dôme opte en faveur du docteur Ambroise Brugière. Ce dernier est élu avec 28 754 voix face à Marcel Clermontel qui n’obtient que 18 844 voix. Député, il fut élu en décembre de la même année membre de la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
. Comme élu local, tout au long de ses mandats, Ambroise Brugière met en œuvre une action en faveur du développement du sport collectif. Comme conseiller municipal, il favorise l’éducation physique dans les écoles et travaille à la mise en place de centres de gymnastique médicale et corrective. Il est président de l’ Amicale des Anciens Internationaux d’Auvergne, président d’honneur de l’Association des parents d’élèves des écoles publiques, président de l’Office municipal des sports de la ville de Clermont-Ferrand.
Plaçant haut les idéaux de justice et d’équité, Ambroise Brugière fut une figure clermontoise respectée et appréciée. Plusieurs distinctions lui rendirent hommage. Différentes décorations sont venues témoigner des services rendus par ce socialiste : médaille de la résistance, Croix de chevalier de la Légion d’honneur en 1956 mais aussi, Palmes académiques la même année.
Bien qu’affaibli par la maladie et l’opération subie en 1958, il continua à exercer sa profession de médecin et à faire face à ses mandats. Le 26 avril 1963, la mort le rattrape. Il décède à Clermont-Ferrand à l’âge de cinquante-deux ans et est enterré à Messeix. À l’Assemblée Nationale, son éloge funèbre est prononcé le 3 mai 1963 par Jacques Chaban-Delmas, alors président.Au Conseil Général du Puy-de-Dôme, un discours salue cet homme emporté par une maladie "dont le nom ne peut être prononcé sans appréhension car elle est implacable ». Hommage est rendu à celui qui fut un "bon serviteur ... dans toutes les fonctions qu’il a exercées, soit comme médecin, soit comme membre de divers groupements politiques, sociaux, sportifs, qu’il animait de sa foi et de son souffle avec une constance et une fidélité exemplaire ». Pour lui rendre hommage et pour rappeler son action, la Commission du Conseil municipal de Clermont-Ferrand, chargée de la dénomination des voies nouvelles, décida le 13 octobre 1972 de donner son nom à un boulevard (qui va du boulevard Léon Jouhaux à la rue du Pré la Reine à Montferrand). En janvier 1984, le nom d’Ambroise Brugière fut donné au lycée d’enseignement général de Montferrand.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article18051, notice BRUGIÈRE Ambroise [BRUGIÈRE Antoine Ambroise] par Claudine Khatchadourian, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 28 avril 2022.

Par Claudine Khatchadourian

SOURCES : Arch. Assemblée Nationale. — Arch. Mairie de Montferrand -La Liberté d’avril 1945, de septembre 1945, de juin 1951, d’octobre 1951, de décembre 1955, de novembre 1958, de novembre 1962, d’avril 1963. —Demain Clermont-Ferrand, décembre 1984. — Reynaud (R), Chroniques historiques du Conseil Général du Puy-de-Dôme, (1945-1981). — Ponceyri (R), Quarante ans d’élections clermontoises. — Courrier de Mr Leclenche Edmond -Notes d’Arsène Boulay et de Martine Brugière

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