BRUGUIER Michel, Pierre [alias "commandant Audibert", pseudonyme de Résistance]

Par Frédérick Genevée, Sharon Elbaz

Né le 17 novembre 1921 à Carcassonne (Aude), mort le 16 mars 1967 ; avocat à Paris ; résistant de l’Aude et du Gard (Combat, AS, chef des FFI du Gard) et militant communiste ; membre du conseil national du Mouvement de la Paix et du conseil mondial de la Paix.

Michel Bruguier (1921-1967) Alès, 18 septembre 1944, inhumation des victimes du puits de Célas
Michel Bruguier (1921-1967) Alès, 18 septembre 1944, inhumation des victimes du puits de Célas
Archives Aimé Vielzeuf* DR

Michel Bruguier naquit dans une famille de militants syndicalistes et socialistes. Son grand-père Victorien Bruguier fut un des fondateurs de la Bourse du Travail de Nîmes. Son père Victorien Bruguier dit Georges, sénateur du Gard avant la guerre fut un des quatre-vingt qui refusèrent les pleins pouvoirs à Pétain. Il était député SFIO dans les assemblées constituantes de 1945 et 1946. Son oncle Eugène Bruguier était secrétaire fédéral de la SFIO dans le Gard en 1944 et dirigeait une importante imprimerie publicitaire.
En 1940, Michel Bruguier était étudiant en droit. Quand il rejoignit la résistance organisée pendant l’été 1941, ce fut d’abord dans les rangs du mouvement « Liberté » par l’intermédiaire de l’avocat Renouvin. Il fut alors en contact avec Roger Stéphane. Il participa à l’action des réseaux à Carcassonne (Aude) avec Albert Picolo, à Lyon (Rhône) où il rencontra notamment André Philip. Michel Bruguier prit contact pour la première fois avec le PCF en juillet 1942 par l’entremise de Dominique Gimenez qui le représentait à Carcassonne (Aude) pour une action commune le 14 juillet 1942. Ce fut à ce moment après l’arrestation de Picolo qu’il devint le chef départemental de Combat dans l’Aude. Suite à des arrestations en série à l’occasion d’une distribution de tracts pour la commémoration de la bataille de Valmy, Michel Bruguier fut arrêté le 23 septembre 1942 et inculpé pour « menées gaullistes ». Il fut d’abord incarcéré à la prison de Carcassonne puis au camp de Saint-Sulpice (Tarn). Pendant sa détention, il fit la connaissance de militants communistes comme Daniel Renoult. Il fut condamné à quatre mois de prison mais en accomplit dix. Michel Bruguier fut libéré en juin 1943. Il rentra alors immédiatement dans la clandestinité et rejoignit les maquis de la Lozère. Gilbert de Chambrun alors chef régional des MUR dans le Languedoc-Roussillon lui confia la responsabilité d’inspecteur régional de cette organisation. En septembre 1943, il aurait fait part à Charles Plantier de sa volonté de rejoindre le PCF. Toujours d’après son autobiographie, la maladie lui aurait interdit d’aller plus loin. En décembre 1943, il devint membre du Comité régional d’action ouvrière et entra alors en contact avec Janvier (Suberville). En janvier 1944, il remplit sa première « biographie » pour le PCF. En avril 1944, il participa à la création des Corps Francs de la Libération. En mai 1944, pressenti comme chef départemental des FFI dans le Gard, il fut ensuite désigné à ces fonctions le 24 juillet, lors de la constitution des FFI dans le Gard. C’est à ce titre qu’il participa à la libération d’Alès, de Nîmes et de La Madeleine (Gard). Il participa alors à la création des cours martiales et présida celle de Nîmes. En janvier 1945, il partit pour le front à la tête du 4e bataillon de volontaires. Après sa dissolution, il fit abandon de son grade et fut affecté à la 14e division d’Infanterie comme lieutenant et participa à la campagne d’Allemagne. Il fut ensuite appelé au cabinet général Salan alors commandant de la 14e division. D’après sa biographie, il maintint alors le contact avec le PCF et travailla sous son contrôle. Il fut démobilisé en septembre 1945 et s’investit alors dans les organisations telles que le Mouvement unifié de la résistance dont il devint le secrétaire général dans le Gard, la Fédération des officiers de réserve républicain (bureau national), le Secours populaire et de l’Association des Amis des FTPF et de l’entente FFI dans le Gard dont il devint le président. En février 1946, il acheva sa licence de droit. Michel Bruguier fut par ailleurs titulaire d’un diplôme d’études pratiques d’anglais. Il devint ensuite attaché de presse du ministre communiste de la Santé, Arthaud. De décembre 1946 à janvier 1947 il participa à l’école de « politique extérieure du PCF ». En février 1947, il rejoignit le cabinet de François Billoux* toujours comme attaché de presse. Malgré son milieu d’origine et son action résistante pour partie hors des rangs des organisations communistes, la section des cadres semble l’avoir jugé de manière positive. Joë Nordmann l’engagea comme stagiaire dans le courant de l’année 1947. Il put enfin s’inscrire au barreau en 1948. Commença alors une carrière d’avocat au service du PCF et de la cause anticoloniale. En 1949, encore stagiaire, il participa aux cotés de Mes Nordmann, Vienney, Matarasso et Blumel au procès Kravchenko. Il fut ensuite de la plupart des procès et des affaires de la guerre froide. Ainsi, il défendit Eugénie Cotton, présidente de l’UFF. Il fut l’avocat de Raymonde Dien et participa à l’organisation de la défense lors du « complot des pigeons ». Michel Bruguier fut happé par la défense anticoloniale pendant la Guerre d’Algérie. Gérant effectivement la dimension organisationnelle du collectif d’avocats mis sur pied par le SPF en liaison avec la Section coloniale du PCF, il fut chargé de coordonner le travail de nombreux avocats métropolitains en Algérie. Il fut personnellement le défenseur de Jacqueline et Abdel Kader Guerroudj, condamnés à mort en décembre 1957 à Alger dans le procès des « Combattants de la libération », des anciens membres du PCA ralliés au FLN. Au terme d’une mobilisation de l’opinion publique, les époux furent graciés par le Président Coty. En 1962, il se rendit à Rabat pour participer à la défense des membres de l’Union Nationale des forces populaires accusés de complot. Avec d’autres avocats, il fut éconduit. Il fut l’avocat et ami personnel de Ahmed Ben Barka et défendit les intérêts de ce dernier lors du procès qui se tint après l’enlèvement de l’opposant marocain. Victime d’un malaise au Palais de justice, emporté d’une hémorragie cérébrale, il mourut quelque temps après, le 16 mars 1967. Il était chevalier de la Légion d’honneur à titre militaire, décoré de la Croix de guerre avec palme et médaillé de la Résistance.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article18057, notice BRUGUIER Michel, Pierre [alias "commandant Audibert", pseudonyme de Résistance] par Frédérick Genevée, Sharon Elbaz, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 16 mai 2018.

Par Frédérick Genevée, Sharon Elbaz

Michel Bruguier (1921-1967) Alès, 18 septembre 1944, inhumation des victimes du puits de Célas
Michel Bruguier (1921-1967) Alès, 18 septembre 1944, inhumation des victimes du puits de Célas
Archives Aimé Vielzeuf* DR

ŒUVRE : Préface à La France devant les accords de Bonn et le traité de Paris, leur origine, leur contenu, leurs conséquences, Paris, Conseil national du Mouvement de la paix (1954). 34 p. ; Assises nationales du peuple français pour la paix et la liberté (27-28 novembre 1948). Rapports et comptes rendus des collèges. Défense de la liberté et droit international [Rapports de Michel Bruguier, l’abbé Boulier, Vercors, Lentin. Avant-propos de Jean Guignebert.] Paris, les Combattants de la liberté et de la paix 40 p.

SOURCES : Arch. comité national du PCF. — Le Monde, 18 mars 1967, L’Humanité, 18 et du 21 mars 1967.

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