BRUTAILS Bernard, Émile

Par Gilles Pichavant

Né le 21 mars 1902 à Moulis-Listrac (Gironde), mort le 11 octobre 1989 à Roumare (Seine-Maritime) ; facteur, receveur-distributeur des PTT, APS, vérificateur des PTT ; syndicaliste CGT de Seine-Inférieure (Seine-Maritime), sanctionné pour activités syndicales ; communiste ; Résistant, GCR, FTPF.

Bernard Brutails
Bernard Brutails

Bernard Brutails naquit le 21 mars 1902 à Moulis-Listrac (Gironde) dans une famille modeste originaire de Soustons (Landes), de huit enfants, dont trois moururent en bas-âge, et un quatrième tué le 16 septembre 1914, pendant la première guerre mondiale. Le père était forestier, plus précisément gemmeur, ou ouvrier viticole, selon les saisons. Sa mère fut garde-barrière pendant 10 ans à Moulis, à partir de 1892, puis resta chez elle pour élever les enfants.

Élevé dans dans une famille catholique peu pratiquante, Bernard Brutails obtint son certificat d’étude à l’école primaire de Naujac (Gironde). Il fut envoyé poursuivre ses études au petit séminaire à Bordeaux, sur proposition du curé du village. Il y appris le latin et le grec, pendant trois ans. Mais à la mort de son père — empoisonné par des champignons le 8 septembre 1917 — le contraignit à arrêter ses études, malgré de grandes capacité et un grand appétit d’apprendre qu’il garda toute sa vie, et commença à travailler comme gemmeur, comme son père, pour faire vivre la famille. Il avait 15 ans.

Sportif, il excella dans le vélo, et participa à de nombreuses courses cyclistes en Gironde et dans les Landes. Il conserva toute sa vie un amour pour le vélo, que, même après-guerre, il préférait à la voiture pour effectuer son travail de vérificateur des tournées de distributions des PTT. Il découvrit la course à pied au service militaire, où il fut sélectionnée dans l’équipe nationale militaire de demi-fond.

Le 12 mai 1922 il commença son service militaire et, après ses classes, il fut envoyé à Constantinople (Turquie) dans un corps expéditionnaire, du 16 octobre 1922 au 19 octobre 1923. Rapatrié, il fut affecté au 144e RI, pour être libéré le 6 novembre 1923.

A la suite de la grande crise économique commencée en 1929, il partit pour Paris, et se fit embaucher au centre de tri des PTT de Paris-Brune. Il se syndiqua immédiatement au syndicat des sous-agents, affilié à la CGT. Frustré d’avoir été contraint d’arrêté ses études, il suivit des cours du soir à l’Université Ouvrière de la Sorbonne, et prépara plusieurs concours administratifs (PTT, Police, Contributions indirectes). Reçu à tous les concours, la Poste ayant répondu la première, il fut nommé facteur à Paris 11e vers 1932-1933. Il prépara ensuite le concours de Receveur-distributeur, et le 10 mars 1936, il fut nommé à Saint-Dizant-du-Guâ (Charente-inférieure, Charente-Maritime).

Le 27 décembre 1937, se maria à Royan (Charente-Maritime) avec Solange Rabion, institutrice à Saint-Dizant-du-Guâ, et le couple eut quatre enfants, nés dans des communes différentes, au fil des affectations de leurs parents : Michèle, née le 3 décembre 1940, à Royan (Charente-inférieure, Charente-Maritime) ; Alain, né le 6 novembre 1944 à Saint-Dizant-du-Guâ ; Danièle, née le 19 mars 1946 à Tourville-sur-Arques (Seine-inférieure, Seine-Maritime), Patrice , né le 3 avril 1951 à Rouen.

Le 20 septembre 1939, Bernard Brutails fut mobilisé, et affecté au Centre régional de rééducation et d’instruction physique à Agen (Lot-et-Garonne), puis affecté à l’armée de l’air le 22 avril 1940, et dirigé sur le Bataillon de l’Air 101, 4e compagnie, à la base aérienne de Toulouse Francasal. Il fut démobilisé le 23 juillet 1940.

De retour à Saint-Dizant-du-Guâ, il devint un agent du GCR (Groupement des Contrôles Radioélectriques), organisation officielle intégrée dans les PTT qui, sous-couvert de ses missions officielles d’écoute radio pour différents départements ministériels du Gouvernement de Pétain, deviendra un instrument d’information des alliés après l’invasion de la zone sud par l’armée allemande. Sous couvert de cette activité semi officielle, il fonda et dirigea le groupe FTPF de Saint-Dizant-du-Guâ, et le bureau de poste de la commune devint un lieu de réunion du canton, et des armes y furent cachées. C’est sans doute à cette période qu’il rejoignit le parti communiste.

Après la Libération, il passa le concours d’agent Principal de Surveillance (APS), grade appelé par la suite Vérificateur-principal. En septembre 1945 ; il fut nommé à la direction départementale des PTT de la Seine-Maritime, installée Rouen (Seine-Inférieure), à proximité de la gare "Rive droite" des chemins de fer. En octobre sa femme fut nommée à l’école communale de Tourville-sur-Arques, près de Dieppe (Seine-Inférieure), et la famille y habita une année. En septembre 1946, elle fut nommée à l’école des filles du Houlme (Seine-Inférieure), et la famille s’installa dans un logement de fonction de l’école de garçons où elle habita jusqu’en 1956. Il intégrèrent alors un logement HLM neuf qui offrait le confort moderne à une famille nombreuse. De 1946 à 1959, une employée de maison logeait avec la famille, pour aider son épouse dans les tâches ménagères et lui permettre de poursuivre son activité d’institutrice.

Élu à la Commission exécutive du syndicat départemental CGT de Seine-Inférieure lors du congrès des 30 novembre et 1er décembre 1946, il fut chargé du secrétariat administratif des employés. Il devint rapidement secrétaire régional de la CGT des PTT pour toute la Normandie responsabilité qu’il conserva jusqu’au début des années 50. Parallèlement il s’impliqua fortement dans la création de la coopérative des PTT, ainsi que dans celle de la cantine, qui devint plus tard le restaurant administratif.

Bernard Brutails fut suspendu le 10 décembre 1947, pour une durée de quinze jours, pendant les grèves qui eurent lieu du 24 novembre au 10 décembre 1947. Le motif de la sanction fut : « pénétration dans un local administration pour exhorter à la cessation de travail ». La CE du 4 août 1948, décida que les 3852 F collectés à Rouen en faveur des sanctionnés, lui soient versés.

Les 19, 20, 21 et 22 juillet 1948, il participa en tant que délégué, au congrès national de la fédération CGT des PTT. Le 12 juin 1949, il fut nommé secrétaire du syndicat, chargé des employés, lors du 5ème congrès du syndicat des PTT Rouen. En mai 1950, il fut désigné comme titulaire pour représenter le syndicat au conseil national de la Fédération CGT des PTT, et participa au congrès fédéral.

A la suite des actions revendicatives qui eurent lieu dans la semaine du 19 au 23 mars 1951, à Rouen, Bernard Brutails passa en conseil de discipline national des PTT, en même temps de André Langlois. Sanctionné pour activités syndicales, il fut rétrogradé au grade de Receveur-Distributeur et muté à Boury-en-Vexin (Oise). Sa femme et les enfants restèrent au Houlme, et la famille vécut dans des conditions difficiles pendant trois années. Au bout de deux ans, il fut réintégré dans son grade de Vérificateur principal, mais, son poste précédent étant occupé, il fut nommé à Alençon (Orne), où il resta une année. Sa réintégration dans son grade coïncida avec le décès brutal du directeur départemental des PTT qui lui était particulièrement hostile.

En 1954, il retrouva son poste à Rouen, au 3e étage de la direction départementale des PTT, boulevard de la Marne à Rouen (Seine-Maritime), où il resta jusqu’à son départ à la retraire en 1962. Entretemps sa femme prit le poste de direction à l’école nationale des Douanes du Havre, où la famille s’installa. Il fit quelques années l’aller-et-retour domicile travail en train.

Il fut amnistié par le président Mitterrand, et sa carrière fut recalculée. Il récupéra alors les sommes perdues, ainsi que son retard de carrière consécutif à sa sanction de 1951. Il mourut le 11 octobre 1989 à Roumare (Seine-Maritime), à l’âge de 87 ans

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article18124, notice BRUTAILS Bernard, Émile par Gilles Pichavant, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 7 mars 2016.

Par Gilles Pichavant

Bernard Brutails
Bernard Brutails
Brassard des GCR
Brassard des GCR
Groupement des Contrôles Radioélectriques
Bernard Brutails, à la veille de la guerre
Bernard Brutails, à la veille de la guerre
Photo d'identité, années 1960
Photo d’identité, années 1960

SOURCES : Arch. de la Fédération CGT des PTT, à la CGT FAPT, à Montreuil — Arch. du syndicat CGT des PTT de Seine-Maritime, aux Arch. Dép. se Seine-Maritime. — État civil — Témoignages et archives familiales.

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