BUARD Claudius, Adolphe

Par Jean Lorcin

Né le 7 février 1900 à Firminy (Loire), mort le 12 septembre 1978 ; instituteur, puis directeur d’école à Saint-Étienne (Loire) ; membre du comité de la fédération communiste de la Loire (1945-1954). Membre des Amis de l’URSS ; trésorier adjoint de l’Union départementale CGT unifiée (1936) ; conseiller municipal de Saint-Étienne (1945-1958) ; conseiller général (1945-1958) ; conseiller de la République (1946-1948).

Claudius Buard
Claudius Buard
[Sénat]

Claudius Buard, fils de Jean-Baptiste Buard, métallurgiste (tourneur outilleur), et de Julie, née Bergeron, ménagère, fit ses études à l’école communale, puis au cours complémentaire de Firminy. Il fut seulement baptisé mais n’eut pas d’éducation anticléricale. Élève de l’École normale d’instituteurs de Montbrison (Loire) de 1915 à 1918, il fut nommé instituteur à Montbrison. Il adhéra au syndicat de l’enseignement dès sa constitution en 1919, alors qu’il effectuait son service militaire au 2e dépôt des Équipages de la flotte à Brest où il avait été incorporé en 1918. Le quartier-maître Buard fut arrêté au Centre d’aviation maritime de Saint-Raphaël le 10 ou 13 juillet 1921 et condamné par le conseil de guerre maritime de Toulon le 4 novembre 1921, à cinq mois de prison et 150 francs d’amende pour « menées anarchistes » et « propagande antimilitariste » (Arch. Dép. Loire, M. 540, pièce 380, rapport du commissaire spécial, Saint-Étienne, 8 juillet 1922 - lettre de Claudius Buard à l’auteur, Saint-Étienne, 27 août 1975. - Papiers Thévenon) : il avait diffusé à Toulon un journal libertaire et Clarté. Il effectua sa peine à la prison maritime de Toulon et fut libéré le 28 février 1922. Du fait de cette condamnation, il fut privé de son emploi d’instituteur par décision du ministre de l’Instruction publique Léon Bérard en 1922, et poursuivi en janvier 1923. Réintégré dans l’enseignement le 1er octobre 1924, Buard exerça à Saint-Priest-en-Jarez, puis à Roche-la-Molière (Loire).

Pendant sa révocation, de mai 1922 à octobre 1924, il avait été employé à la mairie de Saint-Étienne, au service des Eaux et de l’Éclairage, où l’avait placé Louis Soulié, maire républicain-socialiste, sur l’intervention de Ferdinand Faure*, premier adjoint communiste, et du syndicat des instituteurs.

Claudius Buard militait au syndicat unitaire de l’Enseignement dont il fut secrétaire général de 1928 à 1934. En 1932, il fut nommé avec son épouse à Saint Étienne et y resta jusqu’à sa révocation en mai 1940. En 1934, il fit l’objet d’un avertissement ministériel pour un article écrit dans La Tribune républicaine où il se déclarait partisan de l’action commune des organisations de fonctionnaires. Membre des Jeunesses Communistes depuis 1922, il adhéra au Parti communiste français en 1922, mais n’a pas repris sa carte en 1923, par suite de la crise que traversait alors le parti - Buard lui-même a appartenu à la Ligue des droits de l’homme de mars 1922 à juillet 1923 et a peut-être été tenté de suivre son protecteur Ferdinand Faure dans la dissidence -. Il a été réadmis au PC en mai 1924. Il était membre de la cellule de Villebœuf. Membre du Comité de Rayon de Saint-Étienne en 1925, il fut secrétaire de la cellule de Roche-la-Molière en 1926.

Il se forma seul par la lecture des ouvrages de Proudhon, Benoît Malon, Tolstoï, Kropotkine autant que de Marx et Lénine.

Sa femme, Claudine Micheline née Grivolat, institutrice comme lui, milita également au syndicat unitaire de l’enseignement et au PC et fut élue secrétaire du groupe des « Femmes contre la guerre et le fascisme » de Saint-Étienne. Elle est, par sa mère Francine née Mounier, ouvrière passementière, la petite-fille du « communard » stéphanois J.-B. Mounier 1817-1885, pensionné du coup d’État, et la fille du syndicaliste libertaire Claude Grivolat, secrétaire du syndicat des ouvriers armuriers et similaires, président du Conseil des Prud’hommes, mort en 1920. Les époux Buard ont eu deux enfants.

Claudius Buard fut candidat sur la liste communiste aux élections municipales de 1925 à Saint-Étienne. Il avait pour adversaire le maire sortant, Louis Soulié*.

Instituteur à Cellieu (Loire), où il avait enfin obtenu un poste double avec sa femme, entre 1926 et 1932, Claudius Buard apporta le concours de sa plume aux candidats du PC aux élections législatives de 1928, en première page du Cri du Peuple, hebdomadaire communiste de la région de Saint-Étienne. Il y attaquait la politique « à la petite semaine » du Bloc national qui survivait, écrivait C. Buard, « dans la peau de l’Union nationale » (« Il ne faut pas oublier le passé », 3 mars 1928). Il dénonçait la faillite de la social-démocratie dont il opposait l’« opportunisme » stérile à la « discipline de fer » du bolchevisme, qui seule avait permis le triomphe de la Révolution d’Octobre. Partisan, comme Lénine, des scissions « nécessaires », Buard dénonçait la « démocratie », qui n’était qu’une « décomposition », régnant au sein de la IIe Internationale où chaque section, chaque individualité agissait à sa guise. Autant de justifications de la tactique « classe contre classe » (« Communisme et socialisme », dans Le Cri du Peuple, 24 mars 1928). Aux cartellistes qui objectaient qu’elle compromettait le succès de la gauche aux élections, Buard répondait que « le sort des travailleurs ne se règle pas au Parlement », mais « sur le terrain de classe » (« Leur ’discipline républicaine », dans Le Cri du Peuple, 5 mai 1928). Il semble avoir abandonné rapidement cette collaboration dont il n’a pas gardé le souvenir : selon un rapport de police de 1930, il n’écrivait plus alors que dans des organes corporatifs. En revanche, d’après son autobiographie conservée aux archives de Moscou, il aurait encore fait partie de la rédaction du Cri du Peuple en 1932-1933. En 1932, il fut nommé avec son épouse à Saint-Étienne et y resta jusqu’à sa révocation en mai 1940.

Claudius Buard se présenta aux élections cantonales de septembre 1928 à Saint-Chamond (Loire) puis, entré au comité régional du PC et à la commission exécutive de l’Union départementale CGTU en 1933, il fut candidat aux élections cantonales de Firminy en 1934 pour le renouvellement du conseil d’arrondissement et en 1937 pour le conseil général, ainsi qu’aux élections législatives de 1936 dans la quatrième circonscription de l’arrondissement de Saint-Étienne.

En 1934, Claudius Buard, après avoir obtenu 969 voix, se désista en faveur du candidat socialiste SFIO Jean-Baptiste Moulin* qui avait recueilli 1 949 suffrages contre 1 934 au démocrate-populaire Berthollet : il contribua ainsi à la victoire de Moulin sur son adversaire de droite, le candidat républicain-socialiste Forge, qui avait eu 752 voix au premier tour. En 1936, Buard recueillit 2 594 suffrages sur 22 731 votants, contre 930 au candidat SFIO Roiron*, 9 203 au candidat de droite Bouteille et 9 658 au candidat « pupiste » Pétrus Faure* : le désistement des candidats communiste et socialiste assura la victoire de ce dernier.

Claudius Buard jouait un rôle important dans la coopérative « l’Union des Travailleurs » : membre de plusieurs commissions, il fit en outre de nombreuses interventions dans les assemblées générales pour que la coopérative jouât son véritable rôle social en défendant plus efficacement les intérêts des consommateurs et des travailleurs en lutte. Il fut en 1925, 1926 et 1927, secrétaire de la commission coopérative de son rayon et membre de la commission coopérative régionale. Au congrès de région de Saint-Étienne, le 12 janvier 1936, il recommandait aux communistes, forts de leur succès aux élections municipales de 1935, de militer également dans le mouvement coopératif.

Claudius Buard représenta le PC et le syndicat des enseignants CGTU, aux côtés de Dubouchet*, du Parti socialiste SFIO et de la Fédération départementale des œuvres postscolaires, au congrès antifasciste du 28 juillet 1934 à Saint-Étienne.

Après la réunification syndicale, Claudius Buard, qui était membre de la commission exécutive de l’UD - CGTU depuis 1933, fut élu trésorier adjoint de l’UD - CGT de la Loire au congrès départemental du 16 janvier 1936 (cf. La Voix du peuple, janvier 1936). Au congrès d’unité syndicale de Saint-Étienne, en janvier 1936, il s’associa vigoureusement à l’opposition des unitaires à la thèse de l’incompatibilité entre les mandats syndicaux et politiques mise en avant par les confédérés : « Il n’y a qu’une seule incompatibilité, affirmait-il, celle entre les intérêts des travailleurs et les intérêts du capitalisme. Le texte confédéré est une attaque directe contre les partis politiques et en particulier le PC » : il visait en effet, dans la Loire, les dirigeants unitaires comme Marcel Thibaud* et Barthélemy Ramier* qui, aux élections municipales de 1935, étaient entrés au conseil de Saint-Étienne sur la liste du Rassemblement populaire. C’eût été estimaient Buard et la plupart des unitaires, affaiblir le mouvement ouvrier que d’en écarter de tels militants en créant « deux catégories de syndiqués » (Cri du Peuple, 25 janvier 1936).

Claudius Buard fut également secrétaire du Comité d’aide au peuple espagnol et président du Comité départemental d’accueil aux enfants d’Espagne constitué en 1936 par l’UD-CGT.

Il fit grève le 30 novembre 1938 et subit une retenue de huit jours de salaire.

Après la signature du Pacte germano-soviétique et la dissolution du PC, Claudius Buard, alors membre du bureau fédéral du Parti communiste pour la Loire, où il était responsable de la presse, fut arrêté avec les autres membres de la CE de l’UD - CGT de la Loire, réunis clandestinement, sans autorisation préalable, dans les locaux de l’Amicale laïque de la Baraillère, à Saint-Jean-Bonnefonds, le 22 octobre 1939. Selon certains témoignages, contestés par Monique Luirard (« La région stéphanoise », in : Les Communistes français de Munich à Châteaubriant : 1938-1941, sous la direction de J.-P. Rioux, A. Prost, J.-P. Azéma, p. 310), les gendarmes se seraient contentés de dresser procès-verbal, l’arrestation des participants n’ayant eu lieu qu’une semaine plus tard, le 28 octobre. Selon son propre témoignage, Claudius Buard fut arrêté le 26 octobre 1939. Placés sous mandat de dépôt et incarcérés à la prison de Bellevue, à Saint-Étienne, sous l’inculpation de « propagande communiste » définie par le décret du 26 septembre 1939 (Tribune, 29 octobre 1939), puis transférés à la prison militaire de Clermont-Ferrand, les inculpés furent traduits devant le Tribunal militaire de la région de Clermont-Ferrand le 10 mai 1940. Trois d’entre eux, Delorme*, Patinaud*, Civet*, qui étaient membres du bureau de l’UD, furent condamnés à cinq ans de prison, et la plupart des autres dont Buard, à trois ans, pour reconstitution de parti dissous. Les inculpés avaient en vain argué, pour leur défense, qu’il s’agissait de la réunion d’une organisation syndicale légale et non d’une organisation annexe du PC. En vain avaient-ils établi que, en tant que syndicalistes de la CGT, les positions du PC sur le Pacte germano-soviétique ne les regardaient pas : le témoignage d’Urbain Thévenon*, cité par l’accusation, aurait été, au dire de C. Buard (interview du 5 mai 1975) déterminant. C’est lui, en effet, qui aurait établi que les membres de la CE de l’UD - CGT de la Loire étaient tous des militants communistes ou des sympathisants, la minorité, dirigée par Urbain Thévenon, ayant refusé d’y siéger. Les condamnés furent incarcérés à la Maison centrale de Riom où les détenus, mélangés avec les relégués, ne bénéficiaient pas d’un régime de faveur, contrairement aux affirmations d’Urbain Thévenon, mais s’administraient eux-mêmes _ Buard était affecté à l’économat _. Buard fut en outre suspendu de ses fonctions à compter du 28 octobre 1939.

Libéré à l’expiration de sa peine, le 28 octobre 1942, Claudius Buard se réfugia chez un cultivateur du Puy-de-Dôme. « Contacté » dès février 1943, il entra dans la Résistance. Il participa au Comité des instituteurs qui reconstitua le syndicat illégal de l’Enseignement de la Loire. Il représentait sa tendance au sein du bureau clandestin dudit syndicat. En relations avec Georges Sadoul* qui s’occupait des comités d’intellectuels au sein du Front National, il en diffusa la presse clandestine, Le Palais libre, Les Étoiles, Les Lettres françaises, L’École de Barra, Les Éditions de Minuit, et contacta professeurs, instituteurs, médecins, avocats, écrivains, etc. Il connut ainsi Julien Benda*, Aragon*, Luc Estang, le Père Bruckberger, etc.

Membre du comité de la fédération communiste à la Libération, il le demeura jusqu’à 1954.

À la Libération, il fut désigné par le Comité départemental pour siéger dans la délégation municipale provisoire de Saint-Étienne, le 25 août 1944, et fut élu premier adjoint au maire, en tant que représentant du PC, conformément aux accords passés avec les MUR et le NAP à la veille de la Libération. Il dirigeait le service de la Voirie, des Eaux et de l’Éclairage. Il présida à la modernisation de la place Jean-Jaurès, à la surélévation du barrage du Lignon et à la réalisation de la station d’épuration de Solaure. Il fut reconduit dans sa fonction de 1er adjoint par les élections municipales d’avril-mai 1945, faute d’avoir pu succéder au Docteur Muller dans son fauteuil de maire, bien que, soutenaient ses camarades, Buard en ait pratiquement assumé les fonctions comme le laissait entendre le titre insolite de maire adjoint qui lui avait été conféré en 1944. En effet, la coalition entre les socialistes et le MRP avait mis le PC en minorité au 2e tour la liste Buard n’avait obtenu que 27 286 voix contre 38 879 à la liste Muller et 14 194 à la liste de droite présidée par Gonnet _. À partir de ce moment, Buard se considéra comme dans l’opposition et se mit à refuser obstinément de voter le budget, après l’avoir discuté point par point, en faisant valoir que le poids excessif des charges financières laissées par l’État aux communes portait atteinte à l’autonomie municipale et obligeait le conseil municipal à faire peser une taxation inégalitaire sur la classe ouvrière. L’éviction des ministres communistes du gouvernement et l’élection du maire RPF Alexandre de Fraissinette le 19 octobre 1947 - lui-même fut réélu conseiller municipal, la liste communiste qu’il conduisait ayant obtenu 28,5 % des suffrages et 12 sièges sur 37 - ne put que conforter Buard dans son opposition, d’autant plus qu’il avait perdu son poste d’adjoint.

Claudius Buard fut élu conseiller général communiste du canton de Firminy le 23 septembre 1945 avec 7 364 voix sur 14 016 suffrages exprimés et 19 497 inscrits, alors qu’il n’avait obtenu que 1 768 voix dans le même canton en 1937. Comme au conseil municipal de Saint-Étienne, Claudius Buard qui fut successivement écarté du bureau, le 1er octobre 1946, puis de la commission départementale, où il avait été élu avec l’appoint des voix socialistes, en octobre 1947, s’opposa le plus souvent au vote du budget. Il fut réélu en octobre 1951 avec 5 739 voix sur 19 418 inscrits, 11 486 votants et 11 342 suffrages exprimés, contre 2 391 au MRP Achard, 1 805 au RPF Bonnet et 867 à l’UDSR Peyre. Il fut réélu en 1952 et le resta jusqu’à 1958.

Claudius Buard fut également conseiller de la République de 1946 à 1948. C’est à ce titre qu’on le vit, aux côtés du député Marius Patinaud, marcher en tête de la manifestation organisée le 29 novembre 1947 à l’occasion de la grève générale orchestrée par le Parti communiste, manifestation qui tourna à l’émeute lorsque le cortège tenta de franchir les barrages de police placés devant la Préfecture. Il perdit son siège de conseiller de la République en 1948 : il fut battu au 2e tour, le 7 novembre, avec 185 voix sur 1 314 inscrits et 1 310 votants, contre 679 au PRL Fléchet, 624 au maire RPF de Saint-Étienne De Fraissinette et 458 au SFIO Malécot*.

Claudius Buard fut candidat aux élections législatives du 2 juin et du 21 octobre 1945, en sixième position, et à celles du 10 novembre 1946, où il axa sa campagne sur la défense de la laïcité. Placé en cinquième position sur la liste communiste, qui avait obtenu 85 143 voix sur 382 053 inscrits et 287 320 suffrages exprimés, ce qui lui donnait trois sièges, il ne fut pas élu. Ce résultat était prévisible, ce qui avait suscité des commentaires qui l’avaient obligé, au cours de la campagne, à s’en prendre à ceux qui voudraient le voir élu député, parce que, disait-il, ils le trouvaient « gênant, tant à l’Hôtel de Ville de Saint-Étienne qu’au Conseil général » (Le Cri du Peuple, 9 novembre 1946). Il fut de nouveau candidat aux élections législatives du 17 juin 1951, toujours en position inéligible, derrière Patinaud, Denise Bastide*, Masson*, Claudius Vial*, et Jeanne Pitaval*. De fait, sur la liste communiste, devancée par la liste d’Union nationale, dite « des ministres », avec Georges Bidault, Antoine Pinay, Eugène Claudius-Petit, seuls Marius Patinaud et Denise Bastide furent élus. Le fait que Claudius Buard n’ait jamais été présenté en situation éligible tend à accréditer l’idée que, comme d’autres instituteurs depuis la mort de Jean Doron*, il ait été marginalisé au sein du Parti communiste au profit de militants d’origine ouvrière.

De surcroît, à partir de 1952, Claudius Buard, comme Marius Patinaud, a été l’objet au sein du parti d’une disgrâce qui l’a fait disparaître de la scène politique locale, malgré le crédit dont il bénéficiait au sein du monde ouvrier et enseignant. Il fut écarté successivement des élections municipales du 26 avril 1953, où il fut remplacé, à la tête de la liste du PC, par Michel Olagnier*, nouveau secrétaire fédéral de la Loire, et des élections sénatoriales de 1955, où le PC lui préféra Christophe Alexandre*, qui ne jouissait pas du même crédit que Buard « dont l’activité à la tête des organisations laïques lui assurait une certaine influence » (Arch. Dép. Loire, 354 VT 2. RG, Saint-Étienne, 7 juin 1955). Dès lors, il se consacra surtout à « la défense de l’école laïque en sa qualité de président de la Fédération des Œuvres laïques » (Ibid. RG, Saint-Étienne, 4 juin 1955). Cette éclipse était-elle le fait d’un alignement sur la nouvelle orientation du PC soviétique après la mort de Staline ? Selon Théo Vial-Massat (Arch. Dép. Loire, 37 J 143), la Fédération de la Loire lui reprochait, comme à Marius Patinaud, d’avoir renié le Pacte germano-soviétique au procès de Clermont-Ferrand et d’avoir, sur ce point, « pris des libertés avec la vérité » dans l’autobiographie que le PC lui avait fait remplir à la Libération. Il n’en fut pas moins de nouveau présenté aux élections municipales de Saint-Étienne en 1965, en troisième position, sur une liste d’union démocratique PC - Démocrates divers conduite par Michel Olagnier qui comprenait aux côtés des communistes des militants du PSU et des personnalités de gauche. Cette liste, en tête au premier tour, fut battue au deuxième tour.

Militant des œuvres post et périscolaires, il fut élu vice-président de la Fédération des œuvres laïques de la Loire en 1950, président en 1954 et président d’honneur en 1970. Il fut également vice-président de l’Union fédérale stéphanoise des Amicales laïques (1952) et président du conseil d’administration de l’École de musique.

Claudius Buard représentait depuis 1964 les nombreuses associations culturelles qu’il patronnait à l’assemblée générale de l’Association de gestion de la « Maison de la Culture » que la Ville de Saint-Étienne édifiait avec l’aide de l’État. À ce titre, il s’opposa, comme son vieil adversaire Michel Durafour, devenu maire de Saint-Étienne, à la politique du ministre des Affaires culturelles, André Malraux, dont la doctrine était de faire gérer la MDC par le directeur du Centre dramatique qui y était implanté, en l’occurrence la « Comédie de Saint-Étienne » de Jean Dasté. Claudius Buard considérait en effet que la MDC devait également abriter la saison municipale théâtrale et lyrique, la ville étant privée de théâtre municipal, en arguant que le théâtre « lyrique », l’opéra, l’opérette, étaient des formes de culture populaire qu’on ne saurait négliger, alors que Jean Dasté aurait privilégié tout naturellement le théâtre. Claudius Buard souhaitait en outre que la MDC relaie les associations populaires à vocation culturelle et artistique dont sa création avait amené la disparition et que des associations qualifiées, Concerts du Conservatoire, Sociétés de musique de chambre, etc., y trouvent leur place, la Comédie conservant son rôle de création dans un climat d’absolue liberté. Il ne saurait donc être question de confier la direction exclusive de la MDC à Jean Dasté à qui Claudius Buard reprochait d’ailleurs d’avoir été infidèle à sa mission initiale de « décentralisation » dramatique : en effet, la « Comédie de Saint-Étienne », forte de son succès, avait quelque peu délaissé la ville de Saint-Étienne, où Claudius Buard avait contribué à la faire accueillir en 1947, et le département de la Loire, bien qu’elle bénéficiât aussi d’une subvention du conseil général.

Claudius Buard fut enfin administrateur du Bureau d’aide sociale de la ville de Saint-Étienne à partir de 1962.

De son passé de conseiller municipal et de conseiller général, Claudius Buard garda, comme on le voit, un tempérament de gestionnaire et juge volontiers les hommes politiques, adversaires ou non, qu’il a pu croiser au cours de sa carrière, sur leur efficacité.

Une école primaire et une rue de Saint-Étienne portent son nom.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article18128, notice BUARD Claudius, Adolphe par Jean Lorcin, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 17 août 2021.

Par Jean Lorcin

Claudius Buard
Claudius Buard
[Sénat]

ŒUVRE : Articles de fond dans le Cri du Peuple, notamment « Il ne faut pas oublier le passé (3 mars 1928), « Communisme et socialisme » (24 mars 1928), « Leur « discipline républicaine » « (5 mai 1928), « Pour l’unité quand même » (2 décembre 1937), « Défendons la « laïque » « (30 novembre 1944), « Liste commune républicaine, antifasciste et laïque » (17 avril 1945), « Maquignonnage réactionnaire et anticommuniste » (10 mai 1945), « Manœuvres et combinaisons réactionnaires » (11 mai 1945), « Les masques tombent ! » (12 au 12 mai 1945), « Une politique municipale constructive » (11 et 23 juillet 1945), « Les « Révisionnistes » contre l’École laïque » (5 novembre 1946), et dans Le Patriote, en particulier « MM. De Fraissinette et Durafour ennemis déclarés de la laïcité » (9 mars 1949) et « Le renouvellement du Conseil de la République : truquage et escroquerie » (14 octobre 1948).

SOURCES : RGASPI, 495 270 757. — Arch. Nat. F7/13026, F7/13095, F7/13113, F7/13121. — Arch. Dép. Loire, 3 M 77, 4 M 120, 4 M 127, 4 M 129, 4 M 588, 10 M 184, 10 M 187, M. 540 (dossiers politiques 1920-1925), 2 W 18, 2 W 20, 2 W 31, 2 W 34, 2 W 76, 2 W 81, 2 W 82, 2 W 85, 2 W 95-99, 2 W 103, 2 W 108, 2 W 124, 85 W 94-95, 85 W 103, 85 W 160, 85 W 198-200, 85 W 204, 199 VT 46, 354 VT 1-2, 633 VT 19, 20 J 61. — Arch. Comité national du PCF (comités fédéraux et suivi des fédérations). — Interview (5 mai 1975) et lettres (16 juin et 27 août 1975). — Réponse de C. Buard à l’enquête de Jacques Girault en 1975. — Renseignements fournis par M. Olagnier. — Arch. C. Buard (Notes personnelles ; Lettre de C. Buard, Saint-Étienne, à P. Liot, Vice-Président de la Ligue Française de l’Enseignement (FOL), Caen, 29 mars 1968 ; Association de gestion « Maison de la Culture », AG, 24 octobre 1964, 19 juin 1967, CA, 20 mai 1966, Bureau, 16 février 1965). — RGASPI, Moscou, fond 495, opis 270, delo 757. Autobiographie non datée, vraisemblablement de 1937, communiquée par Claude Pennetier. — Projet de notice biographique rédigé par Urbain Thévenon. — Bulletin municipal de la Ville de Saint-Étienne, S. 24 août, 9 novembre, 19 et 29 décembre 1944 ; 19 avril, 18 et 31 mai, 30 novembre 1945 ; 29 mars et 18 octobre 1946 ; 26 janvier, 12 avril, 5 juillet, 4 octobre, 26 novembre 1948 ; 31 janvier, 28 février, 29 avril, 31 mai, 4 juillet, 1er août et 10 octobre 1949. — La Tribune républicaine, 11 février 1934, 27 avril 1936 et 29 octobre 1939 (« Sept leaders communistes ont été écroués hier à la prison de Bellevue "). — Le Cri du Peuple, articles précités et 9 novembre 1929 ; 25 janvier, 8 février 1936 ; 4 et 20 septembre, 9, 18 et 30 octobre, 2 et 7 novembre 1944 ; 12 janvier, 14, 15, 17, 19 au 19 mai, 5-6 juin 1945. — La République du Soir, 25 et 29 août 1944. — Le Patriote, 6 février (« Cas de conscience au Conseil général où la majorité est contrainte d’entendre M. Buard, faire le procès de la politique financière du Gouvernement ») et 2 mars 1948. — L’Espoir, 1er décembre 1947 (« M. Buard, attraction de la dernière fête Kalmouk »). — Émile Copferman, « Jean Dasté à Paris », Les Lettres Françaises, 22 au 22 novembre 1967. — Jean Duperray, « L’équipe de « L’Insurgé », in : Mémorial de l’Insurgé., édité par Marie-Gabriel Fugère, Lyon, Imprimerie Nouvelle Lyonnaise, 1968, 24 cm, 116 pages, pp. 39-52. — Pétrus Faure, La Terreur rouge, Saint-Étienne, Imprimerie Dumas, 1975, 19 cm, 166 pages. — Jean Merley et Monique Luirard, « Les Grèves de 1947 à Saint-Étienne », in : Histoire, économie, sociétés. Journées d’études en l’honneur de Pierre Léon (6-7 mai 1977), Presses Universitaires de Lyon, 1978, pp. 151-186. — Monique Luirard, La Région stéphanoise dans la guerre et dans la paix (1936-1951), Centre d’Études foréziennes/Centre Interdisciplinaire d’Études et de Recherches sur les Structures régionales, 1980, 24 cm., V-1 024 pages ; « La région stéphanoise », in : Les Communistes français de Munich à Châteaubriant : 1938-1941, sous la direction de Jean.-Pierre Rioux, Antoine Prost, Jean-Pierre Azéma, Paris, Presses de la Fondation nationale des Sciences politiques, 1987, 22 cm 439 p., pp. 309-317. — Jean Lorcin, « Du théâtre municipal à la Maison de la Culture : le cas particulier de Saint-Étienne », Les intermédiaires culturels. Actes du Colloque du Centre Méridional d’Histoire sociale, des mentalités et des cultures. 1978, Université de Provence, Aix-en-Provence, 1981, 21 cm, 682 p., pp. 595-607. — Sylvie Guillaume, Antoine Pinay ou la confiance en politique, Presses de la Fondation nationale des Sciences politiques, 1984, 22 cm, 231 pages. — Hervé Blettery, Le mouvement ouvrier dans la Loire sous la IVe République. Pluralisme syndical et unité d’action dans la région stéphanoise (1944-1948), mémoire de maîtrise, Saint-Étienne (Dir. M. Luirard), 1985 (Arch. Dép. Loire, 37 J 98). — Jean Dasté, Jean Dasté. Qui êtes-vous ? La Manufacture, Lyon, 1987, collection « Qui êtes-vous ? », 18 cm, 221 pages. — Salah Chabane-Chaouche, La vie politique à Saint-Étienne (1951-1958) à travers les élections, MM, Saint-Étienne (Dir. Merley), 1 989 (Arch. Dép. Loire, 37 J 143). — Jacques Girault, Benoît Frachon Communiste et syndicaliste, Presses de la Fondation nationale des Sciences politiques, 1989, 22 cm, 364 pages. — Jean-Paul Molinari, Les Ouvriers communistes : sociologie de l’adhésion ouvrière au PCF, Paris/Montréal, l’Harmattan, « Logiques sociales », 1996, 367 p.— René Gentgen, La Résistance civile dans la Loire : de sa naissance à la Libération, préface de Lucien Neuwirth, Lyon, Éditions Lyonnaises d’Art et d’Histoire, 1996, 206 pages. — Notes de Jacques Girault. — Photo transmise par Jean-Michel Steiner.

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