BUNISSET Paul, Marcel, Julien

Par Jacques Girault

Né le 14 juin 1910 à Treignac (Corrèze), mort le 10 janvier 1983 à Saint-Lô (Manche) ; professeur ; militant syndicaliste du SNES et de la FEN ; militant mutualiste ; militant socialiste dans la Manche, conseiller municipal de Cherbourg, de Saint-Lô, puis d’Agon-Coutainville.

Paul Bunisset au Lycée Condorcet, Paris (vers 1935)
Paul Bunisset au Lycée Condorcet, Paris (vers 1935)
Coll. privée de Pierre-Raoul Bunisset.

Marcel Bunisset était le fils de Pierre Bunisset, boucher-aubergiste devenu gendarme, sous-agent militaire au camp militaire de La Courtine (Creuse), qui, veuf en 1925, se remaria en 1926 avec une veuve, propriétaire d’un hôtel-restaurant de La Courtine. Ses parents lui firent donner une éducation catholique.

Après avoir fréquenté les écoles publiques de Treignac et de La Courtine, il fut élève interne boursier au collège Lakanal de Treignac, où il obtint à la première partie du baccalauréat, puis il obtint la seconde (mathématiques élémentaires) au lycée de Tulle, en 1929. Sportif (rugby et cyclisme), appuyé par le député, Charles Spinasse, il obtint des postes de surveillant d’internat aux lycées de Guéret (Creuse, 1929-1930), de Montluçon (1930-1931) puis de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) en 1932, tout en poursuivant ses études à la faculté des lettres, où il termina une licence d’ histoire-géographie en 1933 (certificats d’histoire ancienne en 1930, du Moyen-Age en 1932 et les deux autres certificats en 1933). Il fut nommé sur des postes de répétiteur aux lycées du Puy (Haute-Loire) en 1933 puis Condorcet à Paris en octobre 1934, poste qu’il n’occupa qu’en octobre 1935. Il effectue en effet son service militaire en 1934-1935, dans l’infanterie à Châteauroux (Indre) puis dans la météorologie nationale au fort de Saint-Cyr pour sa formation, enfin, comme sergent, au poste météorologique du camp militaire de La Courtine.

Influencé par son oncle, Marcelin Bunisset, instituteur devenu haut fonctionnaire au ministère de la Justice, actif radical-socialiste, Paul Bunisset militait au Parti socialiste SFIO et au syndicat des maîtres d’internat dont il fut l’un des dirigeants.
Il épousa religieusement à l’église en décembre 1935 à Epinay-sur-Seine (Seine) une institutrice, Simone Flétout, originaire de La Courtine, qui, tuberculeuse, décéda en mai 1936 à Paris où ils habitaient rue Lecourbe dans le XVe arrondissement.

Nommé professeur délégué d’histoire-géographie au lycée de Cherbourg (Manche) en 1936, il fut titularisé professeur de collège en 1938.

Il se remaria civilement à Cherbourg puis religieusement à Caen (Calvados) en février 1942 avec Jeanne Benoit, professeure de lettres au collège classique de jeunes filles de Cherbourg, qui devint en 1959 censeur puis, en 1966, proviseur du lycée Le Verrier à Saint-Lô (Manche). Elle était la fille d’un professeur aux écoles normales d’instituteurs de Saint-Brieuc puis de Caen. Le couple eut une fille et un fils qui reçurent une éducation religieuse. Il hébergea sa mère de 1947 à 1954.

Mobilisé comme sergent-chef en août 1939, dans l’armée de l’Air (météorologie) à Mars-la-Tour (Meurthe-et-Moselle), devant l’attaque allemande, avec son unité, il passa la Loire à Nevers et fut démobilisé à la base aérienne de Moissac (Lot) en août 1940. Il retrouva son poste au lycée de Cherbourg qui fut fermé par les Allemands à la rentrée 1942 pour des raisons politiques (agitations gaullistes chez les élèves) et matérielles (occupation des locaux).

Titularisé comme professeur en octobre 1942, il fut nommé en Guadeloupe où il ne put partir « en raison des circonstances », et fut donc affecté à partir de mai 1943 jusqu’à la fin de l’année scolaire 1943-1944 au lycée Malherbe de Caen.

Membre d’un réseau de renseignements, il collabora avec le mouvement « Libération Nord » dirigé à Cherbourg par son ami René Schmitt. Membre du comité de Libération de Cherbourg en 1944, Il retrouva son poste au lycée de Cherbourg en octobre 1944, chargé de la classe de préparation à l’École navale à partir de 1946-1947 jusqu’à la fermeture de la classe à la rentrée 1948.

Paul Bunisset fut candidat aux élections municipales de Cherbourg, le 19 octobre 1947 sur une liste du « Rassemblement démocratique » (divers gauche non alignée) conduite par André Picquenot mais ne fut pas élu. Non-candidat en 1953, il devint, à la suite d’une nouvelle élection générale, conseiller municipal, le 1er mars 1954, élu, avec 4 470 voix sur 18 771 inscrits, en tant que socialiste indépendant, sur la liste « de concentration, républicaine et d’administration municipale » conduite par le futur maire socialiste SFIO René Schmitt. Nommé cinquième adjoint le 4 février 1956, responsable du secteur de l’enseignement secondaire, il s’occupa de la rénovation du lycée Victor-Grignard dont les bâtiments appartenaient à la ville. Ayant aussi la charge de l’aide sociale, administrateur du centre hospitalier, il fit installer au centre de la ville un asile de nuit pour les SDF. Adjoint délégué aux Sports et aux Beaux-arts, il participait aux manifestations sportives et supervisait la gestion du Théâtre municipal, fit commencer la rénovation des musées, en particulier du musée de peinture Thomas-Henry qui possédait des œuvres de Jean-François Millet. Il fit rénover les monuments aux morts en refusant les allégories pompeusement patriotiques. À nouveau candidat aux élections en 1959 sur la liste conduite par René Schmitt, il arriva en deuxième position de la liste avec 5 536 voix sur 14 201 suffrages exprimés, liste ne fut pas élue en raison d’une élection triangulaire à la suite de la rupture entre socialistes et communistes après les événements hongrois de 1956.

Paul Bunisset refusa une nomination au lycée de Coutances pour rejoindre sa femme qui devait y être nommée censeur, mutation qu’il n’avait pas demandée en raison de ses activités municipales, ne voulant pas que son départ puisse être mal interprété. Après l’échec de la liste Schmitt, ce qu’il qualifia de « vicissitudes municipales », il accepta sa mutation, avec son épouse, au lycée Le Verrier de Saint-Lô en septembre 1959.

A Saint-Lô, Bunisset, qui conduisait aux élections municipales de 1965 une liste d’union socialiste et républicaine, fut élu conseiller municipal minoritaire. Vice-président de la Fédération de la gauche démocratique et socialiste dans le département, candidat (FGDS-Convention des Institutions républicaines) aux élections législatives de 1967 dans la circonscription de Saint-Lô, il obtint 5 117 voix sur 51 497 inscrits, doublant presque le nombre de voix de 1962. Retraité en 1971, délégué cantonal, il fut élu conseiller municipal minoritaire d’Agon-Coutainville (Manche) en 1971 et 1977 à la tête d’une liste d’Union de la Gauche.

Il militait au Syndicat national de l’enseignement secondaire et de la tendance « autonome » puis « Unité, Indépendance et Démocratie », et fut le secrétaire de la section départementale de la Manche de la Fédération de l’Éducation nationale de 1949 à la fin des années 1960. Il présida le ciné-club Georges Méliès du lycées de Cherbourg, puis créa et anima celui de Saint-Lô. Il présida aussi la fédération de la Manche des patronages laïques et fut membre à Saint-Lô de l’Office régional des œuvres laïques d’éducation par l’image et le son.

Bunisset, marqué depuis sa jeunesse, par la maladie qui avait touché sa famille, consacra une très grande part de son action militante à la mutualité. Il fut l’un des fondateurs de la section de la Manche de la Mutuelle générale de l’Éducation nationale qu’il présida de 1951 à 1983. Il présida aussi, dans la même période, l’Union mutualiste de la Manche. Il siégea dès sa fondation comme administrateur à la Caisse départementale de la Sécurité sociale, comme élu de la liste des syndicalistes « Force ouvrière », puis jusqu’en 1967 au titre de représentant élu de la Mutualité. Il fut jusqu’en 1971 désigné par les préfets comme administrateur de l’hôpital Mémorial de Saint-Lô.

Initié à la Franc-maçonnerie vers 1950 (Loge Jean Goubert du Grand Orient à Cherbourg), il prit des distances avec les activités maçonniques qu’il interrompit à la fin des années 1950.
Bunisset militait pour « une laïcité authentique et non anticléricale, contre les guerres coloniales et leurs séquelles, contre le stalinisme et pour l’union des peuples européens ». Certains militants des « Amis de L’École émancipée » l’attaquèrent, l’accusant de trahir la laïcité. Un jury d’honneur trancha en sa faveur. Dirigeant du Comité départemental d’action laïque, il mena la lutte contre la loi Debré, notamment comme orateur principal lors des rassemblements laïques (Cherbourg, 28 juin 1959, Saint-Lô en octobre 1959). En 1961, il fut à Saint-Lô un de ces candidats d’union laïque que le CNAL soutenait pour les élections cantonales, l’abrogation de la loi Debré servant d’unique thème de campagne. Il présida la section de la Manche de la Ligue de l’Enseignement autour de 1950 et fut le vice-président de la Fédération des œuvres laïques qui organisa des fêtes scolaires dans le département avec des thèmes historiques dont « Les grands progrès de l’Humanité ». Membre de la Ligue des droits de l’homme, il protesta dans la presse contre la politique algérienne du gouvernement Guy Mollet et contre la torture en Algérie, affrontant ainsi la puissance de la droite locale. A partir de 1947, il milita à Cherbourg en faveur du fédéralisme européen et y implanta le Mouvement socialiste pour les Etats-Unis d’Europe. Il s’en éloigna devant les querelles internes du mouvement.

Membre ou dirigeant d’associations diverses (du ciné-club de Cherbourg au club cycliste d’Agon-Coutainville qu’il présida), Bunisset fut également le vice-président de l’association des professeurs d’histoire et géographie de l’Académie de Caen. Il associait « un socialisme peu marxiste et un christianisme social en recherche ».
Ses obsèques, organisées par la MGEN et la Fédération des œuvres laïques, furent religieuses. Au cimetière d’Agon-Coutainville, André Grandguillotte, dirigeant de la MGEN, lui rendit hommage. La presse locale et mutualiste évoquèrent sa disparition.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article18180, notice BUNISSET Paul, Marcel, Julien par Jacques Girault, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 29 mars 2022.

Par Jacques Girault

Paul Bunisset au Lycée Condorcet, Paris (vers 1935)
Paul Bunisset au Lycée Condorcet, Paris (vers 1935)
Coll. privée de Pierre-Raoul Bunisset.

SOURCES : Arch. Nat., F17/30238. — Arch. mun. Cherbourg (Jean-Paul Pasquette). — Presse syndicale et mutualiste. — Presse régionale. — Note de Gilles Morin. — Renseignements fournis par le fils de l’intéressé. — Note d’André Lainé.

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